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Citations de Drago Jancar (99)


Pourquoi suis-je là, moi ? A cause de cette lumière rouge ? Du regard séducteur de cette femme maquillée ? Son esprit se perd dans le brouillard rougeâtre, bien sur, cette lumière est nébuleuse, épaisse comme une fumée, son esprit s'y perd et s'y atomise.
Je suis seul ici, complètement seul, je vais m'asseoir parmi ces ombres, à coté d'une personne qui regarde les éclats de verre sur la table, les éclats de sa vie par terre, et lève sa main ensanglantée vers ses yeux. Est-ce ma main ? Est-ce ma main qui a fait ça?
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L'air du paradis est celui qui souffle entre les oreilles d'un cheval.
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Entre la vie et la mort, ai-je pensé, nous vivons tous ainsi entre la nuit et le jour, comme maintenant.
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Elle parla du matin berlinois, au pied de leur château, le soleil se levait d'un côté alors que, sur l'autre côté, un quartier de lune pendait encore. Nous arrêtâmes au bord de l'eau. C'était silencieux, clair, décoloré, presque douloureusement beau en cette époque de folie.
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Elle détestait toute forme de violence. Quand les chasseurs revenaient chargés des bêtes abattues, elle ne les attendait pas dans la cour.Elle se tenait à la fenêtre, regardait les animaux morts en hochant tristement la tête. Quand elle montait à cheval, elle n'utilisait pas la cravache. Même une grenouille écrasée l'émouvait. Peut-être avait-elle simplement peur, elle ne voulait absolument rien avoir à faire avec ces temps horribles.
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Ce post-scriptum m'a suivi et s'est posé près de mon coeur, où est apparu le dangereux picotement lié à l'angoisse, mon coeur déjà rongé par ce rat qui avance en mordant, épuise le corps et ralentit les idées, qui couvre la tête de cheveux gris.
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J'expliquai l'alpha et l'omega, le cheval sent et sait si on se comporte bien avec lui, si on ne le fait pas, il se révolte. Imaginez, madame, dis-je aussi gentiment que je le pouvais, imaginez que le cheval regimbe alors qu'il doit attaquer. Mais c'est ce que vous dites aux recrues ? dit-elle. Oui, c'est ce que je leur dis. C'est-à-dire que vous ne vous comportez bien avec lui que pour pouvoir le pousser sous ces bombes ou disons ces obus. Je dis avec colère que nous aussi nous donnons de nous-mêmes là-bas, il y a eu mille morts à la bataille de la Kolubra.
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Et quand dans la librairie à moitié vide où on attend encore quelques visiteurs pour commencer, elle prendra sur une étagère un recueil de poèmes de Byron, traduits en slovène, et le feuillettera, ses yeux s'arrêteront sur deux vers :

Ainsi nous n'irons plus vagabonder
Si tard la nuit ...

Elle s'assiéra à une petite table du club et lira le poème. Pour la première fois peut-être après toutes ces années de prostration, les larmes jailliront de ses yeux. Pour la première fois peut-être elle pensera qu'elle pourrait lui envoyer à Ljubljana, comme elle le faisait autrefois de Graz, ce qu'elle venait de lire :

Car l'épée use le fourreau
Et l'âme épuise le coeur,
Et le coeur doit faire halte pour souffler
Et l'amour aussi a besoin de repos (1).

1. Lord Byron, d'après la traduction de J.P. Richard et P. Bensimon.
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Elle part à Gratz, lui à Ljubljana, il reviendra, il reviendra, les roues du train crissent sur le pont, moi aussi je reviendrai, l'amour triomphe de la distance, l'amour triomphe de tout.
Sauf de la guerre. La guerre triomphe de tout, même de ceux qui se battent. Et de ceux qui attendent que ça passe.
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Elle regardait toujours le plafond.
Elle ne savait pas quand elle s'était habillée et quand elle était partie. Elle se souvenait de cette chambre de garçon, de la raquette de tennis sur le mur, de la canne à pêche derrière l'armoire, de la serviette pliée qui l'attendait dans la salle de bains, elle se souvenait de la manière dont elle avait grimpé l'escalier, dont elle avait lu les noms sur les plaques de laiton, de l'odeur de l'escalier fraîchement repeint, des barques aux Trois Pêcheurs qui se cognaient les unes contre les autres dans une douce ondulation, des frondaisons lourdes et humides qui se penchaient sur elle quand elle marchait dans le parc avant d'entrer, elle se souvenait du manteau de cuir suspendu dans le couloir, en partant, elle avait pris congé sans un mot, elle avait attendu dans l'entrée qu'il ouvrît la porte. Et elle avait entendu quelque chose bouger derrière une porte de l'autre côté de l'appartement, ensuite elle avait distinctement perçu une voix de femme qui disait derrière la porte fermée, dans l'allemand de Maribor : ta visite est déjà partie ? Elle avait eu l'impression que l'homme dans l'entrée avait rougi, mais pourquoi se cache-t'il de se mère, s'était-elle dit, si tant est qu'elle avait pu se dire quelque chose, pourquoi avait-il enlevé toutes ses affaires de la salle de bains, oui, la visite était partie, elle errait dans l'escalier sombre, elle était presque tombée, elle avait marché au hasard dans le parc et les rues humides jusque chez elle, la visite s'était faufilée dans l'appartement de ses parents, elle s'était jetée sur son lit. Elle s'était couvert la tête et c'est seulement à ce moment-là qu'elle s'était mise à hoqueter violemment, mais sans pleurs, sans larme, elle avait violemment hoqueté et gémi dans la couverture qui étouffait ce qui voulait devenir un cri.
Jamais plus, avait-elle murmuré, avec ce lézard, ce reptile, ce prédateur, jamais plus.
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A l'époque, l'immobilité de la vie m'impatientait, maintenant elle me rendait heureuse. J'étais heureuse de n'avoir rien à faire, sinon attendre. Je n'attendais même pas, l'attente est une activité, je n'en avais aucune, c'était le temps qui en avait une.
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Le voile de l'oubli s'étend lentement sur le passé et sur mes souvenirs . Sur ma tête, il y a ces cheveux gris que je n'avais pas il y a cinq ans. Et quand je me regarde dans le miroir, je sais : ma vie a basculé de l'autre côté, du côté où sont tombés mes camarades, morts dans les marécages d'Ukraine, dans les chemins boueux de forêt, en Slovénie, là où, dans une embuscade, les balles des partisans ont fusé, fracassant les vitres des voitures et les visages, dans les plaines de Lombardie que nous avons traversées en quarante-cinq pour nous retirer vers les Alpes. Alors la mort frappait et détruisait avant d'aller guetter ailleurs. Cependant je ne la sentais pas comme maintenant, maintenant je sais qu'elle est en moi, dans mon corps qui claudique dans l'appartement et pendant les promenades matinales dans le parc où les oiseaux chantent très tôt le matin, où les insectes d'août bourdonnent quand je reviens, et ensuite dans la rue où les mains persévérantes des jeunes gens remplacent les briques et les poutres, murent des fenêtres et des portes, où on entend aussi des rires, des cris d'encouragement. Partout la vie renaît, mais en moi c'est la mort qui est installée, j'ai vu tant de gens mourir que maintenant je ne peux plus me réjouir de cet été où tout recommence, la mort, tel un rat, a fait son trou dans mon esprit et rien ne peut l'empêcher de se souvenir de la guerre, des années de service dans la Wehrmacht, de tout. Et qui me réveille au milieu de la nuit et me fait savoir qu'à chaque souffle, à chaque pas claudiquant de la salle de bains au lit, j'avance vers son néant. La mort, je ne l'ai pas connue quand elle était tout près de moi dans ces lointaines contrées, maintenant je la vois partout, dans les feuilles mortes pendant ma promenade matinale, dans les yeux d'un vieux chien qui se traîne derrière son maître.
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Est-ce que je vais entendre battre le cœur du petit enfant dans cette église ? Entendre les coups silencieux du cœur de l'enfant ému, voir ses yeux regarder le monde ? Peut-être alors, dans cette église, sortirai-je un instant du chaos, de la confusion qui engloutit et ronge ses murs de toute part.
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Entre rêve et éveil arrivent des visions bizarres. Des images de rêve. Chaque jour de nouveaux cadavres, chaque jour d'autres maisons détruites. Les champs brûlent. Les gens errent, les yeux vides, dans des rues vides. Membres arrachés, dans une cave qui sert d'hôpital, trous dans les têtes. Bruit d'explosions lointaines. Lumière au-dessus des montagnes. Qu'est-ce que tout cela ? Une invention du diable qui s'ennuie ?
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Mais même si c’était la guerre et si les informations toujours plus mauvaises, parfois même terrifiantes se bousculaient, les gens vivaient leur vie de tous les jours. Dès que les sirènes s’arrêtaient de hurler et les bombes de tomber, ils allaient au théâtre et au cinéma où avant chaque film on passait une revue hebdomadaire, Wochenschau, où des militaires en tanks déboulaient toujours plus superbement dans les plaines polonaises et défendaient la frontière occidentale de l’invasion des barbares, d’autres allaient aux expositions à Paris et mangeaient des croissants dans les cafés en compagnie de femmes,.....
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Le mal n'est pas en ce qu'on a fait ou ce qu'on fait. Le mal est dans la réponse à la question de savoir ce que nous avons fait pour qu'il voie le jour
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l'amour triomphe de la distance, l'amour triomphe de tout. Sauf de la guerre. La guerre triomphe de tout, même de ceux qui se battent.
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On a toujours honte de ce qui n'arrive pas selon notre volonté, de ce qui peut-être même arrive contre notre volonté.
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J'ai vu trop de choses, trop de morts qui souvent se produisaient si facilement, comme en passant, d'un coup de fusil, d'un shrapnel, devant un peloton d'exécution ou par une balle perdue pour pouvoir penser autrement. Tuer un homme est quelque chose d'aussi naturel qu'écraser une grenouille sur une route. c'est ce qui s'est passé avec Veronika, elle n'en voulait à personne elle ne souhaitait rien de mal à personne, elle était seulement au mauvais moment au mauvais endroit. Là où il y avait des gens prêts à tuer. Même s'il fallait supprimer un innocent.
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Certains s'occupent d'affaires utiles, d'autres de choses inutiles, il en était ainsi depuis que le monde est monde ou au moins depuis qu'on a commencé à jouer du klezmer pour célébrer Dieu ou pour fêter les mariages, pour exprimer sa tristesse quand, la nuit, on regarde le ciel et la petitesse de l'homme sous lui. Certains avaient toujours biné les champs ou vendu des chevaux, d'autres s'étaient couverts d'une capuche et avaient marché dans les couloirs glacés des monastères, ils s'étaient levés à deux heures du matin pour prier. Certains s'étaient accrochés sous le plafond de la chapelle Sixtine pour y peinturlurer la création divine, d'autres avaient chevauché en Terre sainte et pillé des villes en chemin pour arrondir avantageusement leurs revenus. Certains d'entre nous jouent du violon, de la contrebasse ou de l'accordéon, d'autres brassent des papiers et écarquillent les yeux sur les écrans de leur ordinateur. C'est comme ça.
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