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Citations de Edogawa Ranpo (84)


Les membres du cercle de la "Chambre rouge" se taisaient. Sans doute étions-nous chacun assailli des mêmes pensées, car la plus vive émotion se lisait sur les visages.
Notre silence devenait insoutenable. La servante s'était effondrée auprès du corps désormais immobile et poussait de petits sanglots nerveux. La lumière vacillante du chandelier donnait à la scène des reflets irréels.
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- Vous pensez avoir gagné?
- Mais madame, il est minuit passé!
- Et si vous alliez vérifier?
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Et pourtant, cher lecteur, le diable n’avait en aucun cas failli à sa promesse. Il avait déjà assassiné quelqu’un dans une maison hermétiquement close, et à présent, sur cette plage qui s’étendait à perte de vue, au beau milieu de plusieurs centaines de personnes et sans qu’une seule ne s’alarme, sans laisser aucune trace il était bel et bien parvenu à tuer un homme. Même pour un démon, son habileté n’était-elle pas extraordinaire ?
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Je me précipitai vers la tête de Miyamagi et la secouai à deux mains mais, pareille à celle d'une poupée, elle ne fit qu'osciller d'un côte à l'autre. Je me hâtai de creuser au niveau de la tache sur sa poitrine ; apparut dans l'épaisse couche de sable le manche blanc d'un petit poignard. Le sable tout autour était devenu visqueux, mêlé de sang coagulé. Je creusai davantage : le poignard était profondément planté en plein coeur.
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Le malheur, pour moi qui étais aveugle, c’était que je ne pouvais pas voir les jolies femmes ni les beaux paysages. Il y avait bien d’autres choses encore que mon regard ne distinguait pas, les peintures, les livres, le théâtre, la lumière du soleil, la couleur des nuages, ou encore la beauté de la lumière artificielle comme celle des lampes électriques. Je lisais des livres en braille, mais les conversations de mon entourage me faisaient envier ceux qui avaient des yeux. Je détestais mes parents qui m’avaient fait aveugle. Je haïssais Dieu. Mais il n’y avait rien à faire.
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J'avais lu "Le jeu du grenier" et il n'était pas question pour moi de prendre à la légère le récit en apparence extravagant de Shizuko. J'étais moi aussi en proie à une peur bleue ; j'eus la vision d'un énorme Shundei Oe, habillé en clown et coiffé d'un chapeau pointu écarlate, qui ricanait dans l'obscurité d'un grenier.
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Je m'explique. Mon intention première était de t'ôter la vie à petit feu en te harcelant et en te terrorisant sans répit. Le spectacle de ton bonheur conjugal m'a donné envie de faire d'abord disparaitre, sous tes yeux, ce mari que tu chéris tant , et de m'occuper de toi qu'après t'avoir fait goûter cette rare douleur. L'efficacité de la démarche m'a séduit. Ma décision est prise.
J'ai tout mon temps, je ne suis jamais pressé. Il serait dommage de mettre déjà en oeuvre l'opération suivante alors que cette lettre que tu tiens entre tes mains commence à peine à produire ses effets dévastateurs.
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Quand la peur du crime excède un certain degré, il se passe exactement le même phénomène que lorsqu'on se bouche les oreilles et qu'on n'entend plus rien, c'est à dire qu'on devient sourd à sa conscience, tandis que l'intelligence relative au crime, devenant aussi aiguë qu'une lame de rasoir effilée, se met à agir mécaniquement avec calme et sang-froid, sans négliger aucun détail
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En même temps, on avait entrepris des recherches dans la maison. Ce fut une mobilisation générale des employés, à commencer par les étudiants et les trois policiers qui avaient été envoyés en mission. On fouilla la propriété de fond en comble : le grand salon, la chambre de Sanae, les étages, les sous-sols, le parc, et jusque sous les vérandas.
Mais Sanae restait introuvable, évaporée comme une goutte de rosée dans le soleil matinal.
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Cette partie du mur était recouverte de protubérances semblables à des bols inversés, et alors qu'elle avait appuyé sur l'une d'elles, celle-ci avait tremblée comme de la gelée et la partie où elle s'était appuyée venait de s'enfoncer. De plus, elle était tiède et donnait exactement la même sensation que la peau humaine vivante.
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Un jour Shizuko ayant apporté un gros bouquet de pivoines, en sortit la cravache que Rokuro avait ramenée de l'étranger. Je frissonnai d'émotions. Elle me la mit entre les mains et m'ordonna de frapper son corps nu. Si je n'ai pu résister à sa demande, c'est que je me souvenais de l'étrange frisson de plaisir que j'avais éprouvé en découvrant les zébrures rouges laissées par les coups de cravache sur son corps docile, à la surface de sa peau blanche.
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Préparé comme il l’était, vous auriez pu lui faire passer des dizaines de vos tests sans aucun résultat. Il n’est pas nécessaire d’ailleurs de préparer des listes de mots, des graphiques et d’utiliser des machines compliquées, il suffit de converser avec le suspect avec les mots de tous les jours. Le célèbre juge Ooka appliquait déjà au XVIIIe siècle, sans le savoir, les découvertes les plus récentes de la psychologie. « Prendre les criminels au piège, disait-il, ce n’est pas si compliqué. L’important est de savoir leur poser les bonnes questions. »
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Sitôt dit, sitôt fait. Escaladant la barrière, l'écolier se précipita vers Mlle Prune. Son frère aîné essaya de l'en empêcher, mais il était déjà trop tard.
- Et voilà ! Tadaaaah !!
Arrachant le bras droit de Mlle Prune, l'écolier le brandit bien haut en direction des spectateurs. Une sorte de rumeur tonitruante roula à sa vue.
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Tu n'as qu'à t'asseoir sur le livre qui te paraîtra confortable.
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Les deux ou trois jours qui suivirent le meurtre, je n’allai pas travailler et m’enfermai chez moi, causant du souci à ma mère et au couple de mon frère aîné et de son épouse. Hormis la seule fois où je m’étais rendu aux obsèques de Hatsuyo, je ne mis pas le pied dehors.

À mesure que les jours passaient, je commençais à ressentir clairement ce qu’était la vraie tristesse. Ma relation avec Hatsuyo n’avait duré que neuf mois, mais la profondeur et l’intensité de l’amour ne se mesurent pas avec la durée. En trente ans de vie, j’avais éprouvé toutes sortes de tristesses, mais jamais une affliction aussi profonde que lorsque j’ai perdu Hatsuyo. L’année de mes dix-neuf ans, mon père était mort, et l’année suivante une de mes petites sœurs ; moi qui avais un tempérament faible de nature, je m’étais senti très triste, mais ce n’était rien comparé au cas de Hatsuyo. L’amour est une chose curieuse. Il peut vous donner des joies sans équivalent dans ce monde, mais s’accompagne parfois, en échange, de la plus grande tristesse de toute une vie. Par chance ou par malheur, je n’ai jamais connu la tristesse d’une déception sentimentale, mais, quelle qu’elle soit, on peut sûrement la supporter. Lorsqu’on subit un échec amoureux, l’autre n’est encore qu’un étranger. Mais dans notre cas, nous aimant mutuellement et profondément, faisant fi de tous les obstacles – oui, comme j’aimais à le dire, enveloppés d’un nuage rose venu de je ne sais quels cieux –, nous étions unis corps et âme et ne faisions plus qu’un. Je ne pouvais me sentir aussi lié à aucun parent proche ; Hatsuyo était ma moitié, que je n’avais rencontrée qu’une seule fois dans ma vie. Et cette Hatsuyo avait disparu. Si elle était morte de maladie, j’aurais encore eu le temps de la soigner, mais, après m’avoir quitté de bonne humeur, en à peine dix heures de temps elle s’était changée en une triste et muette poupée de cire qui gisait devant moi. De plus, elle avait été cruellement assassinée, son pauvre cœur déchiré de manière atroce par un inconnu surgi du néant.

Je pleurais en relisant ses nombreuses lettres ; je pleurais en ouvrant le registre généalogique de ses véritables ancêtres qu’elle m’avait offert ; je pleurais en contemplant la vue sur la plage qu’elle voyait en rêve, que j’avais dessinée à l’hôtel et gardée précieusement. Je ne voulais parler à personne. Je ne voulais voir personne. Je voulais seulement m’enfermer dans mon bureau étroit, fermer les yeux et voir Hatsuyo, qui à présent n’était plus de ce monde. Dans mon cœur, je ne voulais parler qu’avec elle.

Le lendemain de ses obsèques, au matin, il me vint une idée et je me préparai à sortir. Ma belle-sœur me demanda si je partais au travail, mais je sortis sans même lui répondre. Ce n’était évidemment pas pour aller travailler. Ce n’était pas non plus pour aller consoler la mère de Hatsuyo. Je savais que, ce matin-là, avaient lieu la crémation et le recueil des os de la défunte. Ah ! Pour voir les tristes cendres de mon ancienne fiancée, je me rendais en un lieu abominable.

J’arrivai juste à temps, alors que la mère de Hatsuyo et les membres de sa famille, armés de longues baguettes, participaient à la cérémonie de recueil des os. De façon peu conforme aux usages, je présentai à la mère mes condoléances et demeurai distraitement debout en face du four. Personne ne parut s’offusquer de mon inconduite. Je vis l’employé briser avec violence un agglomérat de cendres en le frappant avec ses baguettes métalliques. Et, pareil à un métallurgiste en quête de quelque métal parmi les rouilles d’un creuset, il cherchait habilement les dents de la défunte pour les réunir dans un petit récipient. Éprouvant une douleur presque physique, j’observais ma fiancée traitée comme une « chose ». Mais je ne regrettais point d’être venu. Car, dès le départ, j’avais un but précis quoique puéril.

Je profitai d’une occasion, à l’insu des autres, pour dérober sur la plaque de fer une poignée de cendres, une partie de ma fiancée dont l’apparence avait tragiquement changé. (Ah ! Comme j’ai honte de ce que je suis en train d’écrire !) Puis je m’échappai jusqu’à un vaste champ des alentours et, tel un fou, hurlant toutes sortes de paroles d’amour, j’introduisis ces cendres, j’introduisis ma fiancée dans mon estomac...
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Kôkichi Miyamagi était un habile interlocuteur. Je n’avais pas besoin de mettre mon histoire en bon ordre pour la lui raconter. Il me suffisait de répondre à ses questions l’une après l’autre. Finalement, je lui racontai tout, depuis la première fois où j’avais adressé la parole à Hatsuyo Kizaki jusqu’à sa mort suspecte. Miyamagi voulut examiner le croquis de la plage apparue à Hatsuyo en rêve, ainsi que le registre généalogique qu’elle m’avait confié ; comme ceux-ci se trouvaient justement dans la poche intérieure de ma veste, je les lui montrai. Il sembla les étudier pendant un long moment, mais je regardais ailleurs pour cacher mes larmes et ne prêtai pas attention à ses expressions…
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Renonçant aux subtils jeux des sens dont ils avaient l’habitude, ils se mirent à rechercher des sensations plus violentes.
Comme deux bêtes sauvages lâchées dans les ténèbres, ils prirent du plaisir à se mordre, à se frapper, à se blesser.
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C’était lui qui avait caressé sa statue de marbre au musée, qui s’était fait passer pour un masseur afin de mieux pouvoir la caresser, et qui venait de lui envoyer des fleurs. Ah, quelle terrible obstination ! Il était comme le serpent immobile devant sa proie, attendant de pouvoir la saisir.
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N'avons-nous pas d'autres occasions d'utiliser notre sens aigu du toucher en dehors des jeux de la chambre à coucher ?
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Si ces petits plaisirs m’apparaissent frelatés et insipides, c’est qu’au moment où notre ami me proposa discrètement d’y participer, j’avais pour ma part découvert un autre jeu, épouvantable certes, mais pourvoyeur de sensations bien plus exaltantes. [...] Ce jeu peut se résumer en un seul mot qui sera capable, je crois, de vous faire frémir : le meurtre.
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