Citations de Emile Durkheim (141)
la sociologie ne pouvait naître que si l'idée déterministe, fortement établie dans les sciences physiques et naturelles, était enfin étendue à l'ordre social.
Mais alors, a-t-on dit, si l'on veut ramener la paix dans les esprits et prévenir le retour de semblables discordes, c'est cet individualisme qu'il faut prendre corps à corps. Il faut tarir une fois pour toutes cette inépuisable source de divisions intestines. Et une véritable croisade a commencé contre ce fléau public, contre « cette grande maladie du temps présent ».
La mémoire est la faculté par laquelle un état de conscience passé se reproduit en nous avec ce caractère que nous le reconnaissons pour passé. Ces deux conditions sont nécessaires à la mémoire.
Cette définition nous montre combien est inexacte l'expression : je me souviens de tel objet. On ne se souvient pas des choses, mais seulement des états de conscience où ils ont été primitivement représentés. Aussi Royer Collard a-t-il dit que nous ne souvenons que de nous-mêmes.
La philosophie est la science des états de conscience et de leurs conditions.
Montesquieu ne se borne pas à aborder les choses sociales comme un objet offert à l'observateur : il les considère comme distinctes de celles que traitent les autres sciences.
Interpréter les choses, ce n'est rien d'autre que disposer les idées que nous en avons,. selon un ordre déterminé qui doit être le même que celui de ces choses.
Oublieux de notre histoire, nous avons pris l'habitude de considérer la science sociale comme étrangère à nos moeurs et à l'esprit français. Le fait que d'illustres philosophes qui ont tout récemment écrit sur ces matières, ont jeté leur éclat en Angleterre et en Allemagne, nous a fait oublier que cette science a d'abord pris naissance chez nous. Et pourtant ce n'est pas seulement le Français Auguste Comte qui a été le premier à lui donner son fondement propre, à en distinguer les parties essentielles et à lui donner un nom particulier, à vrai dire un peu barbare : le nom de sociologie ; mais tout cet élan qui nous porte aujourd'hui vers les problèmes sociaux, est venu de nos philosophes du XVIIIe siècle. Dans cette brillante cohorte d'écrivains, Montesquieu se détache parmi tous les autres : c'est lui, en effet, qui, dans son livre De l'Esprit des Lois, a établi les principes de la science nouvelle.
L'éducateur qui entreprendrait de rationaliser l'éducation, sans prévoir l'éclosion de ces sentiments nouveaux, sans la préparer et la diriger, manquerait donc à une partie de sa tâche. Voilà pourquoi il ne peut se borner à commenter, comme on l'a dit, la vieille morale de nos pères. Mais il faut, de plus, qu'il aide les jeunes générations à prendre conscience de l'idéal nouveau vers lequel elles tendent confusément, et qu'il les oriente dans ce sens. Il ne suffit pas qu'il conserve le passé, il faut qu'il prépare l'avenir.
La conclusion générale du livre qu'on va lire, c'est que la religion est une chose éminem-ment sociale. Les représentations religieuses sont des représentations collectives qui expriment des réalités collectives; les rites sont des manières d'agir qui ne prennent naissance qu'au sein des groupes assemblés et qui sont destinés à susciter, à entretenir ou à refaire certains états mentaux de ces groupes.
Introduction. II
...si une manière de se conduire, qui existe extérieurement aux consciences individuelles, se généralise, ce ne peut être qu’en s’imposant.
[]….alors qu’il s’agit simplement de nos démarches privées, nous savons bien mal les mobiles relativement simples qui nous guident ; nous nous croyons désintéressés alors que nous agissons en égoïstes, nous croyons obéir à la haine alors que nous cédons à l’amour, à la raison alors que nous sommes les esclaves de préjugés irraisonnés, etc. Comment donc aurions-nous la faculté de discerner avec plus de clarté les causes, autrement complexes, dont procèdent les démarches de la collectivité ?
Au cours de notre histoire, il s'est constitué tout un ensemble d'idées sur la nature humaine, sur l'importance respective de nos différentes facultés, sur le droit et sur le devoir, sur la société, sur l'individu, sur le progrès, sur la science, sur l'art, etc., qui sont à la base même de notre esprit national; toute éducation, celle du riche comme celle du pauvre, celle qui conduit aux carrières libérales comme celle qui prépare aux fonctions industrielles, a pour objet de les fixer dans les consciences.
Il y a deux sortes de causes extra-sociales auxquelles on peut a priori attribuer une
influence sur le taux des suicides : ce sont les dispositions organico-psychiques et la nature
du milieu physique. Il pourrait se faire que, dans la constitution individuelle ou, tout au
moins, dans la constitution d'une classe importante d'individus, il y eût un penchant,
d'intensité variable selon les pays, et qui entraînât directement l'homme au suicide ; d'un autre
côté, le climat, la température, etc., pourraient, par la manière dont ils agissent sur l'organisme, avoir indirectement les mêmes effets. L'hypothèse, en tout cas, ne peut pas être écartée
sans discussion. Nous allons donc examiner successivement ces deux ordres de facteurs et
chercher s'ils ont, en effet, une part dans le phénomène que nous étudions et quelle elle est.
Nous estimerions que nos recherches ne méritent pas une heure de peine si elles ne devaient avoir qu’un intérêt spéculatif. Si nous séparons avec soin les problèmes théoriques des problèmes pratiques, ce n’est pas pour négliger ces derniers : c’est au contraire pour nous mettre en état de les mieux résoudre.
L'éducation est l'action exercée par les générations adultes sur celles qui ne sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez l'enfant un certain nombre d'états physiques, intellectuels et moraux que réclament de lui et la société politique dans son ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement destiné.
L'histoire est le développement dans le temps des sociétés humaines.
On ne refait pas la science, par son expérience propre, parce qu'elle est sociale et non individuelle; on l'apprend.
Il faut donc enseigner à l'enfant les éléments des sciences fondamentales, disons mieux, des disciplines fondamentales, pour bien marquer que la grammaire ou l'histoire par exemple, coopèrent, elles aussi, et au plus haut degré, à la formation de l'entendement.
L'enfant en entrant dans la vie, n'y apporte que sa nature d'individu. La société se trouve donc, à chaque génération nouvelle, en présence d'une table presque rase sur laquelle il lui faut construire à nouveaux frais.
Dans chaque société, il y a autant d'éducations spéciales qu'il y a de milieux sociaux différents.
Et même dans des sociétés égalitaires comme les nôtres, qui tendent à éliminer les différences injustes, l'éducation varie et doit nécessairement varier selon les professions.