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Critiques de Eric Reinhardt (799)
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L'Amour et les Forêts

Bon là, je ne peux pas. Quelle pédanterie (lisez le nom de la fan lectrice), quelle autocentrisme, quel narcissisme ... Belle écriture ? Oui, c'est une écriture déliée et élégante, mais tellement vaniteuse.



Comme plusieurs lecteurs, je ne suis pas parvenue à arriver à la fin du premier chapitre, c'est tout dire. Car le premier chapitre, c'est l'envol, l'élan, le départ qui doit vous donner l'envie d'aller plus loin.



Et là, cela m'a juste donner l'envie d'aller voir ailleurs, un livre qui me correspondrait mieux.
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L'Amour et les Forêts



Depuis le livre de Marie-France Hirigoyen sur le harcèlement moral, tout le monde ou presque sait de quoi il s'agit et peut identifier des situations où ce phénomène se produit. C'est ce qui arrive à Eric Reinhardt qui reçoit les confidences de l'une de ses lectrices et admiratrices. Mal à l'aise dans un premier temps, il finit par écouter le récit de la souffrance et des fantasmes (vécus ou pas) de cette femme.



On pourrait imaginer que cette rencontre a vraiment eu lieu tant le portrait de cette femme prisonnière d'une vie conjugale ratée est juste, le mécanisme du harcèlement et les difficultés pour s'en extraire étant parfaitement décrits. le seul problème est qu'Eric Reinhardt se met en scène et ce n'est pas un prétexte pour introduire son sujet ou plutôt si, mais son sujet c'est lui se regardant écrire, de façon prétentieuse, souvent. Dommage.



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Cendrillon

Un livre... Ou un sort ?



Je ne connaissais pas l’auteur et, en ce mois un peu magique d'Halloween, ce titre inspiré me laissait espérer un conte moderne, entre satire et poésie. Mais, si je ne savais pas exactement à quoi m’attendre, il est certain que je ne m’attendais pas du tout à ce que j’ai lu ! Et ce ne fut pas pour me déplaire…





Première surprise, il s’agit en fait de 4 récits différents qui s’alternent et se rejoignent.

Deuxième surprise, contrairement à ce que le titre pourrait laisser penser, les 4 personnages principaux sont des hommes.

Troisième surprise… L’un d’entre eux est l’auteur narrateur ! On comprend bientôt que les autres sont des variantes inventées de ce qu’aurait pu être l’auteur.

Nous obtenons donc un roman complètement original et intriguant, déstabilisant par l’absence de schéma narratif classique mais tellement bien écrit qu’on ne peut le lâcher, même si on se demande quel OL(ittéraire)NI on est en train de lire, et quel est le sens de ces 4 récits ! Car tout en s’adressant clairement au lecteur, Eric Reinhardt entame bien 4 histoires différentes ; Et si, finalement, elles n’en racontent qu’une, on ne percera totalement le mystère qu’à la toute fin.





« Ecrire, pour moi, depuis toujours, c’est inventer une forme. »





Certains ont pu se demander quel besoin narcissique a poussé l’auteur à se raconter au milieu de ce roman, à parler de lui, de son œuvre, de ses passions, régler ses comptes avec la presse, etc… Je pense que ce n’est pas tellement la question. Si on fait confiance à l’auteur et qu’on se laisse porter, le fil se déroule tout seul sans que l’on s’ennuie. Nouveau roman (l’auteur fait beaucoup référence à Joyce ou Breton, joue infiniment sur les variantes d'une même situation, d'un même mythe), essai, ou autofiction fantasmée ? Plus on avance et moins cela a d’importance : Ce qu’a écrit Eric Reinhardt est novateur et brillant et, au fil du récit, c’est tout naturellement que l’on comprend quels messages l’auteur essaye de faire passer dans ce roman. C’est déstabilisant mais ça a du sens et le fond et la forme finissent par s’imposer comme une évidence tant l’auteur, à l’aide de détours apparents, arrive à nous emmener là où il voulait en venir.





« Ce qui suppose du lecteur qu'il accepte de se soumettre à l'épreuve du texte (au lieu de prendre un taxi pour s'abriter du vent, de la pluie, du spectacle automnal) et de s'abandonner sans réserve. Etre réceptif à tout prix : voilà le principal. Se mettre en condition d'être submergé à chaque instant par un quelconque phénomène extérieur. »





Certes, ce roman l’a probablement aidé à surmonter le fait d’avoir d’abord été rejeté car, il l’expose lui-même, il est persuadé qu’il existe un déterminisme littéraire qui découle d'un déterminisme social. Ceci explique le thème de ce roman et le message qu’il délivre en explorant, par l’autobiographie et l’autofiction, la question de la discrimination sociale. Mais ce qui ressort surtout de ce roman, c’est la poésie et la magie avec laquelle il voit la vie, la volonté de faire toujours mieux, de regarder le monde avec enchantement pour vivre mieux et supporter le monde.





« Je voudrais que mes livres soient comme des sortilèges, que leur pouvoir relève de la magie, de l'envoûtement, de la possession. Exactement ce que je cherche à vivre dans la réalité ».





Cendrillon, le mythe du pied bandé, la passion de l’auteur pour les pieds cambrés, pour la danse et pour l’automne, les sortilèges. Issu d’un milieu populaire, attendant qu’on l’aime et tentant d’entrer dans la cour des grands écrivains, le carrosse de la célébrité s’étant transformé en citrouille lorsque la presse - la bourgeoisie intellectuelle de gauche - a descendu son dernier livre… : Cendrillon, c’est lui.

C’est son histoire qu’il raconte, et celle de milliers de gens issus des classes moyennes ou défavorisées, qui essayent par tous les moyens de s’en sortir et sont écoeurés par le système.

A partir de son propre personnage, il imagine à l’aide des trois autres ce qu’il aurait pu devenir. Ce qu’il aurait pu devenir si quoi ? S’il n’avait pas rencontré Margot à 23 ans pour commencer, cette épouse qui le fascine ; et puis ses lecteurs aussi, à qui l’auteur - Cendrillon - laisse en s’enfuyant, quand minuit sonne et que le roman s’achève, ses récits d’encre et de papier en guise de pantoufle de vair qui, peut-être, nous permettrons de le retrouver.





« J'ai eu de la chance de ne pas connaître avec elle les nuits torrides du commencement qui font aborder les histoires par la fin. C'est à dire par le paroxysme. A-t-on jamais écrit un roman qui débute par son paroxysme ? Et qui ne peut que décliner en intensité ? C'est absurde ! »





Ainsi, en plus de découvrir ce que son autobiographie nous dévoile de son expérience, c’est l’histoire du système économique français et des mœurs du pays que nous étudions à l’aide des trois autres familles décrites. Et l’auteur n’y va pas avec le dos de la cuillère dans la noirceur et la décadence. Si l’un tente de s’en sortir dans la finance, sa volonté de grandeur ne rendra la chute que plus difficile. Le deuxième, à force d’être rejeté et d’en venir à détester ses parents qui l’ont fait naître dans ce milieu, deviendra complètement asocial, suicidaire voire terroriste. Le troisième se réfugiera ou s’évadera dans ses déviances sexuelles. Mais heureusement, avant de basculer avec ses anti-héros, l’auteur a rencontré sa femme ; Et son public. Ecouté, aimé, (lu), il délivre son message. Saurez-vous l’écouter à votre tour ? Ce roman testament est un petit bijou plein de réflexions intéressantes et bien écrites. A découvrir si vous n’avez pas peur de la différence, mais à ne pas mettre entre toutes les mains ! Et quant à moi : Mission réussie, Monsieur Reinhardt, vous m’avez ensorcelée…




Lien : http://onee-chan-a-lu.public..
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Sarah, Susanne et l'écrivain

En ouvrant Sarah, Susanne et l'écrivain, je me suis dit comme c'est agréable de lire un livre sans chichis qui parle de nous, dans un langage simple.



« Sarah lui demanda comment il imaginait Susanne Stadler, puisque c'était le nom qu'il avait choisi. Qui est cette femme, finalement ? lui demanda-t-elle ». (Incipit)



Le début est prometteur sauf qu'après ça traine en longueur. Je suis sur le point de refermer le livre quand un rebondissement inattendu surgit, et puis la narration, à nouveau, traine en longueur avant un nouveau rebondissement et la chute finale majestueuse.



Ce style trainant apparait comme nécessaire pour nous mettre dans l'ambiance, pour que subrepticement on se rende compte comment une situation banale peut dériver vers une situation surréaliste, où on va perdre pied, on ne saura plus qui est Susanne, qui est l'écrivain, qui est Sarah. En même temps que les personnages, le lecteur va s'enliser dans un no man's land aux conséquences dramatiques.



Sarah a quarante-quatre ans. Elle contacte par Facebook un écrivain, sans grand espoir, pour lui demander de raconter son histoire. A sa grande surprise, l'écrivain lui répond qu'il est d'accord.



Sarah est représentée par Susanne Sonneur, mariée au Comte de Manerville (son prénom n'est pas précisé), mère de Paloma (21ans) et Luigi (17ans) – prénoms d'emprunt -. Son domicile est un appartement cossu, place du Président-Wilson à Dijon (c'est l'écrivain qui a choisi la ville).



Dans le premier chapitre, l'écrivain plante le décor. C'est une famille bourgeoise, visiblement heureuse, qui s'apprête à acheter une maison sauf que Sarah développe un cancer du sein et tout va être chamboulé.



Le roman va se construire sous nos yeux avec le témoignage de Sarah, l'adaptation de l'écrivain qui transpose Sarah en Susanne, en consultant souvent l'intéressée pour lui demander son accord. Nous assistons non seulement à leurs conversations mais aussi à leurs pensées.



À partir de l'histoire d'une femme bourgeoise ordinaire, Sarah, qui pêche par excès de naïveté, et qui probablement sans l'élément déclencheur du cancer ne se serait jamais aperçue du cynisme de son mari, l'écrivain va créer Susanne, le double.



C'est un ménage à trois romanesque, un écrivain oscille entre son modèle réel et son personnage, et les trois entités se diluent dans un faisceau thématique qui questionne la notion de réalité, qui représente la fiction et ses projections, à travers l'art, les choix existentiels, les aléas de la vie… Sarah est architecte et artiste plasticienne. Susanne est généalogiste et écrivaine malheureuse. Susanne, contrairement à Sarah ose affronter son mari. Sarah, Susanne et l'écrivain ont tous les trois eu la possibilité dans le passé de modifier leurs destins.



« […] Susanne, à l'inverse de son mari, accordait une importance considérable à la lumière […]. Elle apportait un soin extrême à la disposition des sources lumineuses. C'était primordial, comme si chaque pièce était une scène de théâtre et qu'elle devait en régler les éclairages en fonction du climat qu'elle souhaitait y créer, de la luminosité requise et de l'humeur du moment. Il était d'ailleurs troublant, elle s'en rendait compte seulement aujourd'hui, à Longvic, en réfléchissant à l'aménagement de son appartement, que le « texte dramatique » tout comme la « cellule d'habitation » soient désignés par un seul et même mot, le mot « pièce », comme quoi ». (p.150)



« À partir de ce jour, Sarah revint chaque soir se cacher derrière le tronc. Sa propre vie se déroulait sous ses yeux comme sur un écran de cinéma, mais elle n'avait pas la possibilité de s'immiscer dans les images pour infléchir la narration. Elle était condamnée à la fonction de spectatrice. Sa vie était devenue une fiction écrite par d'autres, une fiction où des personnages qu'elle ne connaissait pas n'arrêtaient pas d'apparaître, dont elle était privée des dialogues ». (p.215)



« Sa propre vie, dans ce silence, n'était qu'une vie d'emprunt, de la même façon que les garagistes vous prêtent un véhicule pendant que le vôtre est en réparation ». (p.237)



Sarah, Susanne et l'écrivain m'a conduit à modifier mon profil. Je me suis aperçue que le mot « intimiste » ne correspondait à ce que je recherchais en littérature. Voici un extrait de ma nouvelle présentation : « J'aime les livres qui me surprennent, qui me font plonger dans un monde inconnu, avec des personnages qui s'imposent à moi comme des êtres vivants ».



Sarah ne s'est pas éveillée à la vie devant mes yeux. Elle est restée un être de papier animé en Susanne par le discours nombriliste de l'écrivain. Je me répète mais ce livre est trop cérébral pour moi, ce qui n'empêche que je salue la construction brillante avec ce jeu de miroirs, la profondeur de la réflexion et les belles références à des oeuvres artistiques. Ce livre m'a impacté au point de regarder dans la foulée le film "l'amour et les forêts". Eric Reinhardt est un maître dans le traitement de l'emprise.
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L'Amour et les Forêts

Après la parution de son livre, l'auteur reçoit une lettre d'une admiratrice par l'intermédiaire de sa maison d'édition.

Il est touché par le contenu et il devine un mystère chez cette femme.

Il l'invite au café Nemours. Benedicte Ombredanne est agrégée de lettres et fait le déplacement depuis Metz jusqu'à Paris . Elle va se livrer difficilement au cours des rencontres. Elle vit un enfer avec un homme qui la harcèle.

Elle reste avec lui pour préserver ses deux enfants d'une séparation.

La destruction de Bénédicte va aller loin malgré un rencontre furtive lors d'une escapade volée au temps familial.

Je me suis attachée au personnage de Bénédicte, j'ai observé ce que pouvait être un pervers narcissique mais j'ai été un peu insensible au style et à l'écriture de l'auteur.

J'ai pourtant admiré la partie où Bénédicte va sur un site de rencontre. L'auteur a fait là une gymnastique assez rare pour retranscrire les messages afin qu'on puisse les suivre.

La rencontre qui s'ensuit avec Christian est ma foi, quasi onirique. Rien ne cloche. Etrange...
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L'Amour et les Forêts

C'est un récit bouleversant que nous livre Eric Reinhardt. Celui, tout d'abord, de la rencontre d'un écrivain et d'une femme brisée, Bénédicte Ombredanne.

Elle est professeur de français, mariée à un névropathe, Jean-François et mère de deux enfants égoïstes.

Bénédicte vit dans l'ombre de son époux, victime de son harcèlement moral quotidien. Elle est soumise. Elle n'arrive pas à se sortir de ce schéma dramatique car elle a peur de revivre une grave fracture sentimentale qu'elle a connue auparavant.

Elle jette une bouteille à la mer, à l'intérieur : le livre "l'amour et les forêts".

Eric Reinhardt cisèle le profil psychologique de chacun de ses protagonistes avec un art inégalé.

C'est une fois de plus un ouvrage d'une grande qualité dont on ne sort pas indemne.

Ce type a vraiment du talent.

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L'Amour et les Forêts

Qu'est-ce qu'une forêt ? Elle peut-être menaçante, infranchissable et soudain devenir clairière. De l'obscur au lumineux. Ou l'inverse. On s'y perd ou bien l'on s'y (re)trouve, cela dépend. La forêt est changeante comme l'est le roman d'Eric Reinhardt, oeuvre puissante et parfois nimbée d'un lyrisme noir. L'amour et les forêts est avant tout le portrait d'une femme. Bénédicte Ombredanne, une Emma Bovary d'aujourd'hui, il faut le dire vite et puis l'oublier. Exigeante pour elle-même et pour les autres, avec l'ambition de donner à sa vie toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. Mais c'est le gris qui l'attend, insupportable, et l'effondrement de sa personnalité dans l'humiliation et la négation de son être. Le roman de Reinhardt est magnifique. Pour une grand part. Il est même sublime par instants, si, vraiment. Et terrible en ce qu'il contient dans la description minutieuse du harcèlement conjugal, horreur absolue. Mais le livre est également bancal dans sa construction. Passe encore que l'auteur se mette en scène quoique l'autofiction commence à devenir une mode passablement agaçante, ces temps-ci. Mais au cinéma, on dirait que certaines séquences ne sont pas "raccord". C'est le cas entre le récit fait par l'héroïne, au début du roman, et celui de sa soeur, vers la fin. Quelque chose cloche entre les deux narrations, du point de vue de la psychologie de son personnage principal. Par ailleurs, si Reinhardt se montre virtuose dans le passage d'un style à un autre, du prosaïque (la conversation sur Meetic) au romantique (l'après-midi des amants), il arrive aussi qu'il pêche par ce que l'on pourrait appeler une inflation littéraire. Comme si la forme prenait parfois le pas sur le fond. Mais au bout du compte reste tout de même une impression extrêmement forte, celle d'avoir lu l'histoire d'une femme aux idéaux tellement purs et qui a heurté de plein fouet la médiocrité et la perversité des autres. Comme s'il fallait absolument lui faire payer son "élévation" et son esprit brillant en la mettant plus bas que terre. Bénédicte Ombredanne fait partie de ces personnages romanesques qui ne s'oublient pas. D'une certaine façon, elle est plus grande que le livre qui raconte son existence. Elle s'en est échappée et même Eric Reinhardt a dû se résoudre à lui laisser prendre le large. Enfin libre.
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La chambre des époux

Un grand merci tout d’abord à Babelio et aux Editions Gallimard pour m’avoir proposée la lecture de « La chambre des époux » d’Eric Reinhardt.

Difficile de définir ce livre : roman autobiographique- Autobiographie et roman ?

En 2006, Eric Reinhardt, alors qu’il écrivait « Cendrillon » apprend que sa femme Margot est atteinte du cancer du sein. Mais, au lieu de laisser son écriture pour un temps afin de la soutenir, elle le supplie justement de terminer ce roman pour être ensemble comme dans une bataille conjointe. L’auteur, qui aura souvent envie de lâcher prise, va alors trouver la force pour écrire ce roman, puisant justement cette force dans le combat de sa femme contre la maladie, son amour pour elle, leur amour. Pour elle, parce que son combat à elle est bien plus grave et difficile, il a l’obligation de finir ce roman. Comme un mantra, une incantation qu’il se répète. Cette bataille qu’ils vont vivre ensemble, se soutenant mutuellement, va renforcer leur amour. La transcender plus encore.

Par la même, dans ce contexte, il nous raconte comment son écriture n’a plus le même ton, ses mots sont comme transportés par ce qu’ils vivent, ce qu’ils ressentent tous les deux.

Au cours d’un dîner, il croise une femme dont il se souvient qu’elle était, elle aussi, gravement malade et qui a été guéri « miraculeusement », alors que les médecins ne lui laissaient que quelques mois à vivre. La maladie de sa femme, quant à elle, est en cours de rémission. Et croiser cette femme le bouleverse. Elle lui rappelle bien-entendu toute cette difficile période vécue avec Margot, lui rappelle combien il l’aime. Et cette femme, en vie, dégageant de son être toute la représentation de la vie, lui donne une beauté, une luminosité incroyable au point de la désirer. Et alors qu’il ne s’était jamais allé aux larmes, à l’apitoiement durant la période de cancer de sa femme, là, il craque. Les émotions sont trop fortes. Il laisse tout déborder.

C’est notamment cette rencontre qui va lui donner l’idée d’un roman tiré de ces émotions diverses. Alors, peu à peu, on glisse vers le roman. On retrouve certaines phrases identiques à ce qu’il avait écrit pour lui-même et sa femme, mais avec d’autres personnages. (J’ai dû faire quelques aller-retours pour vérifier si tout était répété à la virgule près ou non).

Le héros est son double. Nicolas, compositeur de musique, apprend que sa femme Mathilde est atteinte d’un cancer et elle lui demande de terminer sa symphonie « La belle au bois dormant » (comme un double du roman « Cendrillon »). Et comme des doubles, toutes les femmes ont des prénoms commençant par M : Margot, Mathilde, Marie... La/les femme(s) qu’il aime(nt) (qu’il M, on l’aura compris).

Ce roman, Eric Reinhardt ne le terminera jamais, mais il écrira les romans qu’on connaît, notamment « Cendrillon » et « L’amour et les forêts ». Pourtant, dix ans plus tard, parce que le cancer est loin derrière, cet auteur nous raconte cette période, y mêlant les épisodes de sa vie avec ceux romancés de ce musicien et de sa femme, commentant son travail d’écriture ou n’étant que spectateur/narrateur du roman sur lequel il réfléchit, il imagine.

Les récits sont mêlés, approchant parfois la frontière de l’emmêlement et de la confusion (les situations, les prénoms si proches, si copier-coller). Même dans la deuxième partie « romancée », l'auteur est toujours omniprésent (ce qu'on peut trouver original ou qui peut déranger). De bout en bout, Il nous fait la chronique de cette période, de tout son travail d’écrivain, ses pensées, ses interrogations et analyses mais aussi ses désirs. Des désirs d’ailleurs un peu extrêmes qu’il a -en quelque sorte- pu assouvir par le biais du héros Nicolas, qu’il a fait aller plus loin dans l’expérience amoureuse.

Le double Nicolas est un peu « too much » à mes yeux, un peu trop super-héros. Parce qu’il va forcément composer une symphonie qui va tellement émouvoir les gens, qui forcément va aller se produire dans les plus grandes salles de concert internationales, qui forcément va chercher à sauver la deuxième femme, etc. Cela en devenait plus qu’agaçant.

Et j’ai regretté cette 2ème partie alors que l’idée de base était intéressante, voire originale. Sûrement aussi que mon côté un chouia féministe n’a pas apprécié le(s) rôle(s) qu’il a fait tenir à « ses » femmes (un peu égoïste quand même notre Superman. On ne peut pas avoir toutes les qualités ! Ni être le parfait prince chevalier servant qui va sauver sa « belle au bois dormant » parce qu’il en a même perdu de son autodérision de la 1ère partie). Sans parler des étreintes et coïts amoureux avec une femme atteinte d’un cancer que je n’ai pas trouvées crédibles. J’ai parfois ressenti du malaise à lire certaines « scènes » au point que son style d’écriture commençait à me lasser. Dommage qu’il ne soit pas arrêté à la partie autobiographique.

Par contre, j’avoue qu’il a été assez inspiré de ne pas avoir, finalement, écrit ce roman (dont il avait déjà le titre « une seule fleur »). Pour ma part, je ne suis pas sûre que je l’aurais aimé ! (possible même que je l’eus lâché en cours de route par exaspération, de mon bras « bionique » à la super Jaimie, bien sûr…).

Pourtant, parce que cela parle de moments douloureux, de la maladie, de la mort mais bien plus encore de la vie ; parce que cela parle de la beauté de la vie et de ce tout ce qu’elle nous offre de beau (l’art, la littérature, la musique, la nature, les lieux magiques comme l’Italie et tant de choses encore) ; parce que cela parle de corps, abimés, usés par la maladie, mais aussi d’amour entre un homme et une femme, de l’amour d’Eric Reinhardt pour sa femme, j’ai été assez touchée par ce livre (la 1ère moitié, s’entend). Car il reste un témoignage d’amour.



Pour la petite anecdote, les petites coïncidences de la vie (mais la rentrée y est un peu pour quelque chose): une amie avait pris deux places pour l’enregistrement de deux émissions « Le masque et la plume » de France Inter. Pour la partie littéraire qui sera diffusée le 28 Août, parmi les livres commentés, il y avait celui de Reinhardt .

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L'Amour et les Forêts

J'arrive longtemps après la tourmente, car il semble que ce livre ait suscité de nombreuses -et contrastées -réactions...



Je n'ai jamais lu aucun roman de cet auteur, mon avis est donc celui d'une novice.Eh bien, je n'ai pas beaucoup apprécié ce livre, je le reconnais.



Pourquoi ? D'abord, le style m'a paru précieux, pédant, et cette idée de l'auteur de s'exposer dans le roman comme personnage à part entière m'a gênée , on frise l'auto-satisfaction. Certains diront que ce procédé est génial, l'auto-fiction comme mise en abyme de l'écriture et autres subterfuges , je ne suis pas convaincue.



L'histoire de Bénédicte Ombredanne aurait pu m'intéresser, prisonnière qu'elle est d'un enfer conjugal qu'elle n'arrive pas à quitter. Mais ce personnage ne m'a pas vraiment émue. Il y a quelque chose d'artificiel, de figé chez elle qui m'a agacée.



Les deux étoiles , je les attribue à quelques jolies phrases, et surtout à la fin, bouleversante, particulièrement lorsque la soeur jumelle de Bénédicte nous révèle un autre aspect d'elle, bien plus attachant.



Beaucoup de bruit pour pas grand chose, je trouve.Je suis un peu dure, je sais, mais je dis sincèrement ce que j'ai ressenti...



Reste un titre poétique et mystérieux, belle trouvaille,mais c'est l'arbre qui cache une forêt décevante...
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Le système Victoria

Ce roman pourrait être le récit convenu d'une relation adultère, ou un polar décrivant l'enquête entourant la mort mystérieuse de Victoria, mais non. Il est bien plus que cela. Récit d'une histoire d'amour passionnel entre un homme plein de doute sur lui-même et une femme de pouvoir, il se fait aussi le témoin des excès d'un libéralisme débridé.



Le point récurrent du livre, c'est le sexe. Bien que ça ne soit pas un roman érotique, celui-ci y est constamment présent, avec des pages d'une force époustouflante. C'est le sexe qui réuni David et Victoria, c'est également lui qui contribuera à causer leur perte, mais pas seul.



Le "système" de vie construit par Victoria, aussi parfait qu'il semble paraître, se lézarde pour finir par la détruire. L'auteur a-t-il voulu mettre ce système en parallèle avec les lézardes qui fissurent le système économique mondial aujourd'hui ? C'est sur ce point précis (et sur bien d'autres choses) qu'Éric Reinhardt répond dans une longue interview accordée au journal Libération.



Ce roman est un pavé de 522 pages, mais qui se dévore, tant il est prenant. Quant au style, il est brillant, travaillé. On ne peut rester insensible devant la beauté de certaines phrases.



"Le système Victoria" est un grand livre, qui, une fois terminé, laisse le regret de ne pas pouvoir le découvrir à nouveau.
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Comédies françaises



E.Reinhardt, Gallimard, "la Blanche", c'était vraiment bien parti pour un bon moment de lecture . Que nenni, et quel ennui!

Je ne mettrai pas en cause l'écriture de l'auteur , toujours brillante, mais j'y ai vu une sorte d'expérience littéraire, la déconstruction d'un roman , d'où un agacement que je n'ai pu réprimer. Que de redondances! Je n'ai pu que le lire en grande diagonale et cela sans même perdre le fil du récit malgré des situations parfois cocasses et la vie tourbillonnante et bourrée de fantasmes d'un Dimitri, jeune journaliste .

Il se pique d'enquêter sur le lobbying et les pratiques obscures de certains industriels.

Ce que nous promet la quatrième de couverture est un peu beaucoup exagéré.

Quant aux revers français de l'Internet dus au président Giscard, ne pas oublier qu'il s'agit d'un roman du moins je l'espère dans la tête de l'auteur.

J'ai lu sur Babelio,et le recommande vivement, un billet de "REMDESP" (Remi Desprès) daté du 7 janvier sur ce roman qui éclaire vraiment le pourquoi du comment de l'Internet français.

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La chambre des époux

Eric Reinhardt déclare dans le roman : « le romancier doit inventer des formes plurielles, subtiles, perverses (…) qui désaxent nos perceptions habituelles.» Et bien, mission accomplie : voilà un roman, « la chambre des époux », dont le sens m'a longtemps échappé et qui m'a déstabilisé. Une lecture fastidieuse jusqu'à ce que je devine l'intention de l'auteur dans les dernières pages. le premier chapitre est un article publié en 2007 dans les Inrockuptibles. L'auteur y témoigne du combat conjoint mené avec son épouse : elle lutte contre un cancer, il se bat pour terminer son roman. Et chaque soir, il lui donne à lire les pages rédigées dans la journée. Les combats pour la vie et la beauté se conjuguent ; dans les deux cas, il faut se dépasser. La fin est heureuse : elle guérit, entre en rémission ; son livre est un succès public et critique. Puis arrive le creux de la vague après une lutte si intense. Comment retrouver un souffle créatif après cet acmé ? La chute est vertigineuse. L'auteur revient sur cet effondrement qui se déroule lors d'Assises du roman auxquelles il est invité comme intervenant. Les passages de son discours sont autant de clef à la compréhension du roman car peu après, surprise, nous changeons de registre. L'auteur nous livre son projet inabouti de roman : « voilà ce que j'aurais écrit si j'avais écrit ». Ce roman dans le roman est au départ répétitif puisqu'il est une « projection travestie » de ses ressentis retranscrits dans les premiers chapitres. Mais cela lui permet ensuite de passer dans le domaine de l'intime, d'évoquer le désir d'un et pour un corps malade. Cela lui permet aussi de fantasmer une rencontre avec une autre femme malade, nouvelle occasion de créer du sublime dans une épreuve morbide. Nous sommes en pleine mise en abîme qui – l'auteur est décidément joueur – peut se révéler multiple. Et n'oublions pas qu'Eric Reinhardt, s'il est un de nos contemporains, est dans les faits un romancier de la fin du XIXe siècle qui navigue entre Romantisme et Symbolisme (il est question de Mallarmé et de Verhaeven). Son style est travaillé, souvent magnifique, parfois sophistiqué (« la native singularité intrinsèque de Mathilde »). Mais surtout, tout est exalté : beauté sidérante, amour fou, orgasme existentiel, bonheur suprême. Il célèbre le Beau, la Vie et l'Amour. le bégueule y verra des signes de bipolarité (l'extase ou le désespoir), mais je préfère y reconnaître la manifestation d'un « artiste total ».

Voici donc un roman que je n'ai pas apprécié mais que j'ai finalement aimé, qui m'a su me surprendre et m'impressionner par son audace et son intelligence.



(merci aux éditions Gallimard et à Babelio de m'avoir permis de découvrir le livre dans le cadre d'une Masse critique)
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L'Amour et les Forêts

Inspiré d'une authentique correspondance et de réelles rencontres avec deux lectrices,Éric Reinhardt raconte l'histoire tragique de Bénédicte Ombredanne,jeune femme,jolie,intelligente,agrégée de lettres,victime de harcèlement conjugal à l'extrême.Le roman se déroule en trois parties.L'auteur se met en scène dans la première et raconte ses deux rencontres (semi-imaginaires)avec B.O.Dans la deuxième partie beaucoup plus sombre,il disparaît et c'est l'histoire de la descente aux enfers de B.O. après un bref passage par un amant via internet(cette épisode qui va être cruciale par la suite l'a-t-elle vraiment vécue?ou bien est-ce une illusion,un espace imaginaire où elle a voulu se réfugier pour échapper à l'enfer de son couple?).Dans la troisième partie,aussi dure et sombre que la deuxième ,l'auteur refait surface et là on a une vue plus ample avec feed-back sur la vie de B.O.

C'est un bon roman ,bien écrit,qui dans le fond souléve la question de la possibilité de la fiction aussi bien dans l'existence que dans le roman(l'auteur lui-même ayant déclaré lors d'un interview ,qu'enfant ayant peur de ne pas se sentir à l'aise dans le monde extérieur a toujours eu un besoin vital de se constituer un imaginaire).

Tout ça pour être objective.Si je voudrais terminer sur mon point de vue subjectif,ce roman est trop oppressant.L'amour il y en a peu,mais par contre beaucoup de sexe qui à la limite est lassant.Pour finir,au XXI éme siècle ,en France(nous ne sommes pas chez les Talibans ou en Arabie Saoudite)qu'une femme jeune,jolie,instruite,ayant une profession,gagnant sa vie se fasse humilier à ce point par son mari et ne fasse rien pour s'en sortir est révoltant et mérite peu d'empathie.
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Le système Victoria

En premier lieu un reproche à cette histoire : - On apprend dès la 28ème page ce qu'il advient de la principale protagoniste Victoria.



"Je suis la magnifique, la merveilleuse Mme Mim ! ... Euh pardon, Victoria !



Le moins qu'on puisse dire c'est qu'elle ne doute ni de son charme, ni de ses talents de séductrice, ni de ses talents de manipulatrice , ni de ceux qu'elles déploient dans des draps de soie ou pas.



Elle ne m'est pas vraiment sympathique cette Victoria, si sûre d'elle , si manipulatrice, si égoÏste dans sa recherche du plaisir ; elle sait se rendre indispensable mais de manières peu scrupuleuses dans la vie comme dans son travail.



Tous les deux David et Victoria bafouent la morale, mais la morale personnellement, là , je m'en moque !



On s'interroge sur le désir profond de chacun.



Et l'auteur va développer leurs vies familiales et surtout leurs vies professionnelles .

Quelques pages qui parfois m'ont lassé.



Un jeu de l'amour et du hasard !



De l'érotisme fulgurant entre les pages, qui électrise !



Echange de sms - fixettes d'adolescents - téléphone qui brûle les doigts.



Ce qui m'a le plus choqué ce ne sont pas les scènes torrides de rencontres amoureuses ; mais bien la mentalité de Victoria, DRH qui a des façons très cavalières de prendre tout le monde dans ses filets sans plus aucune limite ni morale.

Une araignée qui protège son antre mais n'hésite pas à dévorer tout ce qu'il y a autour d'elle.



David qui va être totalement sous son emprise, puis un court laps de temps de moins en moins aveuglé par le désir, mais finalement va y revenir pour leur plus grand plaisir à tous deux.



Mais le désir incontrôlé et incontrôlable de Victoria va la mener à sa perte de façon terrible.



Eric Reinhart allie pouvoir et séduction avec des transitions heurtées entre les activités sexuelles et les activités professionnelles.



Scènes d'amour torrides - discussions non moins animées sur leur travail respectif entre David et Victoria.



Finalement, après quelques passages qui m'ont fortement fait passer par divers sentiments d'agacement ....



J'ai beaucoup apprécié cette histoire.
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Le système Victoria

C'est un roman à multiples facettes, un roman social-psychologique-thriller.. qui reflète la dureté de notre époque mais aussi les infinies possibilités qu'elle offre. Deux héros que tout semble opposer à première vue: David est architecte, directeur de travaux pour la construction d'une tour gigantesque à La Défense; Victoria, elle, est ce qu'on appelle une femme de pouvoir complètement engagée dans la mondialisation. Une femme qui jongle avec les contraintes, les décalages horaires. Son poste de DRH d'une grande entreprise industrielle internationale l'amène à prendre chaque jour des décisions difficiles qui ont un impact sur des milliers de salariés à travers le monde...

Une histoire d'amour se lie entre ces deux personnages; une histoire d'amour qu'on a tellement du mal à comprendre qu'on hésite à lui donner l'étiquette d'"histoire d'amour". Peut-être qu'ici, encore une fois, les extrêmes s'attirent, puisque au travers de l'histoire entre David et Victoria (deux prénoms de roi et reine, ce qui est un signe!...) ce sont deux visions du monde qui s'opposent: une vision "libérale", extensive, insatiable et une vision plus centripète, repliée sur des valeurs d'intérêt collectif.

C'est un roman féministe, ce que souligne souvent l'auteur Eric Reinhardt dans ses interviews, car nous avons ici un portrait de femme de pouvoir, ce qui est finalement assez rare dans la littérature. Victoria est une femme de talent qui va jusqu'au bout de ses capacités, même si cela l'entraîne finalement bien au-delà de ce qui est souhaitable.

C'est le premier livre de Eric Reinhardt que je lis et je dois dire que j'ai été impressionnée par la qualité du portrait des personnages et de ce tableau saisissant du monde d'aujourd'hui qui apparaît au travers de ce qui pourrait n'être qu'une banale histoire d'adultère.

Un roman politique, un roman social, un roman psychologique..on pourrait donner encore plein d'autres étiquettes.

C'est un livre sans certitude mais qui pose de vraies questions, un livre fascinant car le point de vue se déplace sans cesse et sans cesse nous sommes pris dans ce balancement entre l'intime et le politique, le sensible et le social, l'imaginaire et l'économique..

Un grand moment de lecture..
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Sarah, Susanne et l'écrivain

Si je doute qu'on puisse avoir vécu sans avoir lu « Cent ans de solitude » ou « le choix de Sophie », faire l'impasse sur « Sarah, Suzanne et l'écrivain » ne vous laissera aucun regret.

Le pitch ? Un écrivain dialogue avec le modèle de l'héroïne de son roman (Sarah) tout en narrant l'histoire de cette héroïne (Suzanne) qui, elle-même, est écrivaine. Vous suivez ? Je n'ai pas compris l'intérêt de croiser les récits de Sarah et de Suzanne. Ça n'apporte rien si ce n'est la confusion, une impression diffuse d'écriture diluée, d'un récit qui s'étire jusqu'à l'ennui.

Il fallait se concentrer sur le drame de Suzanne, sur sa fascination pour un tableau figurant la claustration (grosse symbolique) qui donne au livre son intérêt (très beau chapitre 10). le personnage de Suzanne dont la bouffée délirante arrive trop vite pour être crédible. Dommage, parce que son évocation est puissante tout comme son séjour en HP, d'une grande justesse.

Quant à l'écrivain, on a franchi un palier dans l'autofiction. Ce trio masturbatoire sert l'ego d'Éric Reinhardt qui, en mode making-of (ex : pages 98, 130, 194, 234, 270…), étale ses états d'âme d'homme vieillissant (tyrannie du désir, fragilité du couple, sens de la famille, remises en question). Ça m'a barbée, exaspérée, car il est présomptueux d'élever la banalité du quotidien en art majeur, persuadé que la mise en abyme vous absoudra. L'expression « se regarder écrire » n'a jamais été aussi pertinente.

À l'instar de Foenkinos, cette anomalie de la collection blanche, Éric Reinhardt cherche trop l'inspiration dans le reflet de son miroir. Il n'en avait pas besoin. Sarah, sa muse, lui suffisait. Lui donner un rôle n'avait qu'à seul intérêt, être adulé par son fan club : « Éric, à l'écoute de ses lectrices. Éric, le sauveur des coeurs meurtris ». Beurk.

Les jurés du Goncourt auront peut-être la faiblesse (Gallimard oblige) de récompenser cet ouvrage à qui il manque la cohérence. Déprime.

Bilan : 🔪

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Comédies françaises

‘Comédies françaises’, roman signé Éric Reinhardt relève davantage de l’escroquerie que de la comédie. Sa quatrième de couverture nous annonce une enquête journalistique, que l’on suppose pointue, prenant pour cible un puissant industriel ayant, in fine, volé l’invention d’internet aux français. Ah, ces français qui ont fait la France et qui rêvent qu’ils auraient pu faire le monde ! En fait, cette histoire alambiquée, vraie selon certaines sources, d’une décision Giscardienne sous l’influence de ce lobbyiste ne prend que quelques pages et ne commence qu’après la moitié du bouquin. Trahison !

Le vrai pourquoi du livre serait plutôt la vie de Dimitri. Héros de nos jours ? Peut-être. Mais héros, certainement pas. Plutôt copie conforme d’une franche de la population qui ne s’émerveille que du cosmétique, rêve d’avenir mais ne croit pas au bienfondé de l’effort, du travail assidu et de la construction d’une vie. Comme de toute manière, selon eux, elle est pourrie, autant s’en remettre au hasard et tenter de le forcer un peu. Jeunesse d’aujourd’hui ? Probablement. Triste !

Car derrière le personnage de Dimitri, jeune journaliste quasi sans expérience et sans ambition réelle, il n’y a qu’un petit frimeur à la française, à l’esprit aussi gros qu’un petit pois et aux façons grossières, manquant de tout tact et de respect d’autrui. Hé oui, la liberté de paroles cache souvent une méconnaissance d’un savoir-vivre élémentaire plus qu’elle ne promeut une liberté à laquelle on ne croit plus guère. Mais il a de l’entregent, notre Dimitri. Il parade, minaude, joue l’imbécile (pas trop compliqué pour lui, semble-t-il) et passe presque toujours entre les mailles du filet protecteur que ses ami(e)s et patron tissent autour de lui. Bref, un personnage qui n’a que le triste mérite d’exister et qui, de plus, est assez tordu pour ne pas s’en rendre compte. Plausible ? De nos jours, assurément. Désespérant !

Dimitri, au long des pages et des pages, va donc faire une fixette sur des possibles coups de foudre, une fille puis l’autre. Des rencontres impromptues au coin d’une rue, dans un café, un théâtre et, toujours, notre bête s’anime, flaire la rencontre de sa vie. Tout en défendant l’idée que le hasard est prépondérant pour forger une vie, notre plumitif va multiplier les tentatives d’organisation du hasard espérant enfin trouver bonne fortune. Navrant !

Avec la déclaration d’un scoop à paraître à travers l’écriture d’un livre dans lequel Dimitri confondrait Giscard et ses lobbyistes, avec pour cerise sur le gâteau, la réhabilitation de la France comme géniteur d’internet, le récit s’englue dans la vie puérile, décalée, fantasque, inopérante de ce journaliste. Même si c’est là un reflet peu déformé de notre société, l’auteur devait trouver une pirouette pour en sortir. Bien sûr, avec le métier qu’Éric Reinhardt possède, cela ne fut pas compliqué. Et, dans l’art, l’auteur boucle son récit par l’annonce faite dès la première page. Déjà vu, mais pas mal tout de même. Rassurant !

Si le récit ne m’a pas semblé nourricier en termes d’humanité à promouvoir, l’écriture de Reinhardt est bien la sienne. Avec de longues énumérations de références culturelles, manifestement c’est un homme érudit ou disposant du verni pour le faire croire. Il utilise volontiers les répétitions des conteurs mais sans magnifier la suite par une chute, un changement d’axe, de cap ou même d’idée. Pour exemple :

P. 66-68 : Il avait vu les spectacles de Romeo Castellucci. Il avait vu les spectacles de Christoph Marthaler. Il avait vu les spectacles de Krzystof Warlikowski. […Je vous passe les 65 lignes suivantes de la même structure pour le laisser conclure…] Il avait passé énormément de temps dans les salles de spectacle. Trop de références littéraires ou artistiques nuit à l’avancée dans la lecture. Pédant !

Un autre artifice dont l’auteur use et abuse est la mise en parenthèses. Quasi pas une page du livre sans une, voire plusieurs parenthèses qui coupent le récit, parfois sans aucunement alimenter la réflexion du lecteur. Enervant !

D’autant plus regrettable qu’à plusieurs endroits du récit, l’auteur se montre fine plume, j’insiste, très fine plume, touchant juste et décrivant à la perfection les mutations en cours au sein de notre société. Cela aurait pu être tellement enivrant !

Il me reste, même si ma chronique est un peu amère, le plaisir d’avoir lu ce livre, vraiment ! D’y avoir pointé l’une ou l’autre belle source de réflexion et m’être bercé du rythme et de l’à propos de quelques beaux passages d’une écriture subtile capable de faire briller notre belle langue française. J’oublie le reste et garde le meilleur.

Merci à Babelio et aux Editions Gallimard de m’avoir accordé leur confiance en m’offrant ce roman de la Rentrée 2020.

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L'Amour et les Forêts

Je ne savais pas trop ce que ce livre contenait, au vu des prix reçus, le titre, je m'attendais à une histoire passionnante.

Je ne dirais pas que je suis déçue, car cette histoire m'a émue, mais je n'arrive pas à dire si j'ai aimé ce livre, le style m'a laissée indifférente.

Et j'ai eu mal à accepter que cette relation s'empire au lieu d'exploser, la faiblesse de cette femme qui se laisse avaliser par son mari voire ses enfants, c'est incompréhensible. Et ce Jean-François il me répugne.

Seul Christian et sa soeur m'ont touchée, j'aurai aimé qu'ils peuvent sortir cette femme des griffes de gourou.

Une lecture qui apporte beaucoup de réflexions sur des sujets psychologiques.

Cependant je n'ai pas trop compris l'engouement des lecteurs et surtout cette ribambelle de prix, d'autres livres bien plus majestueux n'ont pas eu autant d'éloges et encore moins de récompenses.

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L'Amour et les Forêts

Je sors de cette balade en forêt bouleversée.

Quel texte! Par moment étouffant du fait de la cruauté qui se joue entre les époux, romantique à l'égard de cette rencontre, réaliste dans la description des liens mères/enfants (sauf à la fin, ils sont terribles), magnifique pour les décors, émouvant dans ce qui unit les sœurs et pudique quand l'auteur prête sa plume à cette lectrice qui le touche en plein cœur.

Eric Reinhardt traite ici d'un sujet sensible: la violence faite au quotidien à certaines femmes (et hommes, je n'en doute pas...) dans l'abnégation et le silence le plus parfait...

Je ne sors pas indemne de cette histoire, sûrement le roman le plus triste que je n'ai jamais lu et certainement LE roman de la rentrée littéraire!
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L'Amour et les Forêts

Voici un de ces livres qu'on ne lâche pas. Le commencement de l’histoire est déroutant, on ne voit pas bien où Eric Reinhardt veut nous emmener.

Et puis, tout s’éclaire… l’histoire de Bénédicte Ombredanne nous emporte malgré son côté sordide. L’écriture est très juste, on ne sait plus si Bénédicte a rêvé ou réellement vécu ce qu’elle raconte à Eric. Il faut tourner les pages encore et encore car on a envie qu’elle se libère enfin de son mari autoritaire. Il paraît, même, impensable qu’elle ait pu se soumettre à cet homme. Son esprit n’aspire pourtant qu’à la liberté. On la croit seule avec cette famille qui ne semble pas l’aimer, mais non…

Nous l’apprenons un peu plus tard, elle aurait pu être plus entourée si seulement elle avait parlé…
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