Citations de Eve Borelli (79)
Il était devenu un ramollo du bulbe, une huître sur son rocher. Bref, il avait pris racine. La déprime était son terreau, écrin cotonneux et anesthésiant.
C’est pathétique.
Je crois en fait, que c’est ça, être amoureux. Un truc qui vous prend aux tripes, qui vous rend fou de l’autre au point de souhaiter le posséder. Mais il y a la réalité. Le boulot, les tâches, la liberté de la personne qui compte pour vous.
Chaque matin, je cochais le calendrier, poireautant comme une âme en peine. Je me languissais de ses rires, et de sa joie de vivre, de sa beauté et de sa gentillesse. Ce sera terrible, de ne plus le voir.
Chaque homme est le maître de sa vie et de ses envies. On ne commente pas ce que fabrique l’un ou l’autre si à côté, chacun se montre réglo dans le travail.
Je ne le reverrai plus. Ce que j’ai senti entre nous, cette étincelle disparaîtra. Je songe à demain, quand je me réveillerai, seule, que je regarderai par la petite fenêtre de ma petite caravane, du haut de ma petite vie, l’espace désert à la place du Cirque Sanglant. Et que mon cœur tombera lourdement dans ma poitrine, ouvrant grand la porte au vide et l’ennui glacial.
Ça m’affole.
Je ne veux plus de tout ça. Je refuse de vivoter encore. Je crève de sentir les montagnes russes dans mon ventre. Et de me confier. De rire. De l’embrasser.
On ne cache pas la vérité à celui qui a donné une telle claque à vos cinq sens.
Ça porte malheur de marcher sous une échelle, de se pointer sur scène sapé en vert, de croiser un chat noir, de briser un miroir. Et pourtant, il ne m’est jamais rien arrivé.
Femme. Le maquillage me donne l’impression de me débarrasser mon enveloppe de gamine. C’est tant mieux. Ce soir, je n’ai plus envie d’être la fille rebelle qui se fait enguirlander par son père. La nana pathétique qu’on gronde, qu’on punit et qui boude dans sa caravane pour dévorer des thrillers, ne surprenant personne. Je veux l’audace et la sensualité.
J’ai l’impression d’être un des lions. Enfermée, à tourner en rond. Il ne me laisse rien faire. J’ai dix-huit ans. Je pourrais partir.
Il faut croire qu’un clown peut avoir du bagou, parce que la ballerine, ma mère, l’a aimé au premier coup d’œil.
J’avais envie d’une fille qui me remette mon écharpe pendant que je l’embrasserais sur le front.
Il l'attira vers elle et elle se perdit dans son étreinte. Elle devait le lui dire.
- Je suis amoureuse de toi.
- Et c'est follement réciproque....
Tu me plait. Beaucoup. Mais quand je t'embrasserai, je ne veux plus aucune rancune en moi. Je désire savourer chaque moment d'intimité avec toi sans le regretter ensuite, être avec toi le cœur libre, léger, confiant. Et c'est encore trop tôt. Tu comprends?
- Je m'appelle Eugène Milaneo.
A ces paroles, l'attitude d'Olivia se modifia subrepticement, puis plus franchement. La douceur de son regard se mua en froideur. Ses lèvres souriantes s'affaissèrent. Elle posa son verre calmement - un peu trop calmement- et passa sa main sur son grain de beauté.
Définitivement, c'était une pensée agréable. Angoissante, aussi.... Une pensée qui faisait resurgir des choses anciennes et une vilaine version de lui - lâche, violente, perdue - , sur laquelle il avait définitivement tiré un trait et qui lui paraissait si lointaine.
Elle hésita. Elle n'avait pas vraiment envie de se retrouver psychanalysée par un type sexy dans un ascenseur en perdition, mais quelque chose dans sa voix - un réel intérêt, une tendresse subite - la poussa à répondre.
Je suis Anna, je viens pour l'émission. Je... je vous jure que je suis aussi inoffensive qu'un paresseux narcoleptique.
Tiens, tiens… un héros dont Nora serait fière se planquait-il en lui, bien enfoui sous la grossièreté ?
Que faire ? Verrouiller et le laisser repartir ? Lui ouvrir et discuter, l'air de rien ? Lui ouvrir et lui administrer une gifle magistrale et sûrement libératrice ?
Il fallait en tout cas prendre les choses en main, parce que l'Ex ne poireauterait pas des heures et James semblait actuellement dans l'incapacité totale de lui donner des conseils judicieux. Elle était le capitaine de son âme, le maître de son destin.
Arrachant le mouchoir des mains de James, Agathe se planta devant lui et le regarda bien en face :
- Reprends-toi. oui, c'est bien... Ne lâche pas mon regard. Non ! Regarde-moi. Oui, voilà. on va s'en sortir, je le sais !
Son ami parut retrouver la raison.
- OK, sorry... Mais le savoir ici, tout près, en chair et en os... Je suis confondu...