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Citations de Hans Magnus Enzensberger (113)


Fleurons et clochetons néo-gothiques, paons et lianes 1900 - tout s'émiette, se fissure, est noircie par la suie. Les grappes de raisin et les cornes d'abondance en plâtre, les harpes et les têtes de lions sont cassées, les anges et les vierges ne sont plus que des torses, mais ils sont toujours là. Le progrès, ce puissant bulldozer, ne les a pas emportés : il n'y avait pas d'argent et il faut beaucoup d'argent pour saccager le monde. Les planificateurs ont frappé ailleurs, loin dans la plaine, là où s'élèvent les cages grises conçues sur les planches à dessin des architectes pour la classe ouvrière. (L'imbroglio hongrois)
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La main malveillante de la nécessité passe à nouveau à travers la verdure de mars de tes aimables lettres, et déchire ce que j'ai tissé et noué pour toi dans ma tête pour ne pas perdre de temps et te remettre sans attendre la clé de cette maison en flammes. (Achim Von Arnim à Bettine Brentano - 29 mars 1808)
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Je distingue quatre espèces. Il y a les officiers intelligents, les travailleurs, les sots et les paresseux. Généralement, ces qualités vont par deux. Les uns sont intelligents et travailleurs, ceux-là doivent aller à l’état-major. Les suivants sont sots et paresseux ; ils constituent 90 % de toute armée et sont aptes aux tâches de routine. Celui qui est intelligent et en même temps paresseux se qualifie pour les plus hautes tâches de commandement, car il y apportera la clarté intellectuelle et la force nerveuse de prendre les décisions difficiles. Il faut prendre garde à qui est sot et travailleur, car il ne provoquera jamais que des désastres.
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La façon dont la république de Weimar en est arrivée à s’effondrer, les historiens l’ont étudiée minutieusement, jour par jour, voire heure par heure. [ ] C’est une lecture décourageante. On a l’impression de se perdre dans une broussaille impénétrable de rumeurs, de racontars, d’intrigues et de manœuvres. Ce ne sont partout que versions contradictoires, faux-fuyants, mensonges de propagande. C’est peut-être vrai dans la plupart des tournants historiques importants. Mais il est rare que le désarroi du personnel politique saute aux yeux aussi clairement que dans ce cas. P55
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Qu'on ait pu croire par la suite au mensonge qui déguisa ces "années folles" en âge d'or, c'est une énigme que ne saurait excuser ni l'ignorance ni le manque de vision historique...On assiste à la millième représentation de l'Opera de quat'sous, on s'enthousiasme pour les copies de meubles de bauhaus et l'on se repaît de films comme Cabaret...Cette floraison de culture extrêmement minoritaire fait oublier le marécage où elle poussait.
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Différents en cela des politiciens et des managers, l'herbe et les arbres maîtrisent naturellement le calcul exponentiel. En effet s'ils'appliquait intégralement aux arbres ceux-ci croîtraient de 5% l'n et atteindraient le ciel assez vite. À ce compte, un hêtre haut de 10 mètres en aurait, à cent ans, six cent quarante, à supposer qu'il ne se soit pas effondré avant. Retenir la leçon des arbres ne permet peut être pas la victoire mais pourrait bien suffire à la survie.
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Dût le petit écran ne jamais rattraper son grand modèle, ce carré noir (de K. Malevitch) qui, dès 1915, rendait à strictement parler superflues toutes les émissions de la télévision, degré zéro du média.
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L’adaptation à tout prix, une assimilation sans frein, les pratiques les plus modernes, une habileté hautement capitaliste, voila ce qui a contribué à la remarquable réussite des gangsters de Chicago. Mais dans la plus petite de leurs actions, dans tous les plus petits détails de leurs manières d’être et de leur façon de penser, on voit apparaître un facteur contraire : il est dû au fait qu’ils sont issus d’un passé exotique, précapitaliste, inassimilé. C’est leur modernisme qui a fait leur succès, leur antiquité qui a fait leur fascination. (Chicago-Ballade)
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P63 : L’ « acquis communautaire », monstrueux recueil de normes que jamais personne n’a lu. En l’an 2004, il comptait déjà 85000 pages ; aujourd’hui il doit dépasser les 150 000. Dès l’année 2005, le Journal officiel de l’Union européenne pesait au total plus d’une tonne, autant qu’un jeune rhinocéros. (…) On estime que 85% des lois n’émanent plus des Parlements, mais de Bruxelles. (…) Il [toutes les règles édictées par l’UE] s’agit d’un recueil d’environ 1 400 000 documents. S’il faut parler du coût de cet appareil réglementaire, les traitements et pensions si volontiers critiqués par les médias sont ce qui pèse le moins lourd. Là-dessus, il y a déjà un certain temps, un commissaire nommé Verheugen avait vendu la mèche. Il avait convenu que les règlements de » l’UE pour l’économie européenne coûtaient quelque 600 milliards par an. Ce qui équivaut au PIB des Pays-Bas.
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L’Union européenne peut se targuer d'exercer une forme de pouvoir qui n'a pas d'antécédent dans l'histoire. Son originalité consiste à procéder sans violence. Elle fait la chattemite. Elle se donne pour aussi humaine qu'inexorable. Elle ne veut que notre bien. Comme un tuteur plein de bonté, elle se soucie de notre santé, de notre savoir-vivre et de notre morale. L'idée ne l'effleure pas que nous sachions ce qui est bon pour nous ; nous sommes à ses yeux bien trop désemparés et trop mineurs. C'est pourquoi il faut nous prendre en charge, de fond en comble, et nous rééduquer.
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"Il est regrettable que la plupart des ethnologues partent plutôt pour la Papouasie-Nouvelle-Guinée que pour Bruxelles, car la capitale européenne offirait à leurs recherches un terrain particulièrement original."
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On remarque également que très peu de terroristes sont issus de milieux fondamentalistes. Cela éclaire le rôle idéologique de la religion. En tant qu'observateur extérieur, on ne peut risquer ici que des hypothèses. De nombreux éléments laissent toutefois supposer que l'attachement religieux des terroristes n'est pas si profond que cela. "Une telle foi chancelante se double toujours de l'exhortation à l'obéissance la plus stricte. Elle ne connaît pas de compromis et se vexe d'un rien. Comme elle n'est pas tout à fait sûre d'elle-même, elle doit s'appuyer sur l'autorité ou le passage à l'acte." (Wolfgang Sofsky, "Mob der Frommen", in Die Welt, 15 février 2006).
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On oublie souvent que le terrorisme moderne est une invention européenne datant du XIXe siècle. Ses ancêtres les plus représentatifs se trouvent dans la Russie tsariste, mais en Europe occidentale aussi, il peut se prévaloir d'une longue tradition. Ces derniers temps, sa principale source d'inspiration a été le terrorisme d'extrême gauche des années 1960 et 1970. Les islamistes lui empruntent de nombreux symboles et de nombreuses techniques. Le style de leurs communiqués, l'utilisation d'enregistrements vidéo, la signification emblématique de la kalachnikov, leurs mimiques, leurs postures et leurs habits même révèlent tout ce qu'ils ont retenu des modèles européens. De plus, les outils techniques du terrorisme, de l'explosif au téléphone satellitaire, de l'avion à la caméra vidéo, ont tous une origine occidentale.
À l'instar de leurs précurseurs européens, les combattants islamistes se rattachent à un nombre très limité d'autorités canoniques. Le Coran remplace Marx, Lénine et Mao, et au lieu de se réclamer de Gramsci, on cite Sayyid Qutb. Ce n'est plus le prolétariat international qui fournit le sujet révolutionnaire, mais l'oumma ; ce n'est plus le Parti qui fait figure d'avant-garde et représentant auto-désigné des masses, mais le réseau clandestin et largement ramifié des combattants islamistes. Si le mouvement islamiste reprend parfois à son compte une rhétorique plus ancienne, qui peut paraître grandiloquente et prétentieuse, il doit nombre de ses idées fixes à l'ennemi communiste : l'histoire est soumise à des lois inébranlables, la victoire est assurée, partout il s'agit de démasquer les dissidents et les traîtres, qu'on couvre, suivant la bonne vieille méthode léniniste, d'insultes rituelles.

La liste des adversaires préférés ne recèle guère plus de surprises : l'Amérique, l'Occident décadent, le capital international, le sionisme. On la complète avec les infidèles, c'est-à-dire les 5,2 milliards d'êtres humains qui restent. À cela s'ajoutent les musulmans considérés comme dissidents, les chiites, ibadites, alevis, yazidis, zaydites, ahmadis, hanafites, druzes, soufis, kharidjites, ismaéliens et autres courants religieux.
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Cela lui faisait une impression étrange de vivre deux fois de suite la même scène, mais cette fois, il ne la regardait plus de l'extérieur, rongé par l'angoisse, dans une salle de cinéma obscure en plein Moscou; il était en plein dedans, dans un film tourné Dieu seul sait dans quel paysage féerique au bord de la mer...
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A travers l’histoire de la famille Hammerstein on retrouve et on peut montrer, ramassés sur un très petit espace, toutes les contradictions et tous les thèmes décisifs de la catastrophe allemande : depuis la mainmise de Hitler sur le pouvoir total jusqu’à l’hésitation titubante de l’Allemagne entre l’Est et l’Ouest, du déclin de la république de Weimar à l’échec de la résistance, et de l’attrait de l’utopie communiste jusqu’à la fin de la guerre froide. P389
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[Un contemporain témoigne : ]
Hammerstein était d’avis qu’il fallait absolument abandonner l’idée d’un attentat [contre Hitler], étant donné que les Allemands étaient à ce point peu doués politiquement qu’ils ne comprendraient jamais la nécessité avant d’avoir bu la coupe amère jusqu’à la lie. Au contraire, ils prétendraient toujours que le génie Hitler aurait été tué par ambition. P272

[Hammerstein aurait dit] Puisque le troupeau de moutons que sont les Allemands a élu un tel Führer, qu’ils le paient jusqu’au bout. P214

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Insupportable , insensé , impossible
Étais-tu ( .... )
Tu déranges
Tout simplement . Et c'est pourquoi je t'en prie , Bakounine : REVIENS !
L'Europe sent toujours la police . C'est pourquoi , et parce que jamais et nulle part
Bakounine , il n'y a eu , n'y a ou n'y aura un monument à Bakounine ,
Bakounine , je t'en prie : reviens , reviens , REVIENS !
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Pour combattre les présentes "conjurations mondiales" du système obsessionnel paranoïde, des contre-conjurations sont nécessaires. Partout où le tabou de la trahison est utilisé comme un instrument de domination, on voit surgir des services d'espionnage organisés. A l'époque de Tibère, à Rome, est apparu le métier de dénonciateur professionnel, du delator. Ce qui correspond aujourd'hui à ce métier, c'est la police secrète. Elle devient une instance politique au fur et à mesure que le nombre des procès en trahison et, du même coup, celui des traîtres en puissance augmentent. (...) Pour la logique de la paranoïa, il n'existe pas d'innocents, ou seulement ceux qui n'ont pas encore été convaincus de trahison, donc des traîtres déguisés.
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Division du travail


Tout ce que tu ne sais pas faire :
faire atterrir le gros-porteur plein à craquer,
démontrer le théorème de Mordell,
tricoter – les autres le font pour toi,
peu doué comme tu l’es, dépendant
du bienheureux Saint Florian,
du directeur de prison, de l’homme
aux pinces isolantes, de la voyante,
de l’éboueur, du chamane,
et sans oublier la maman.
Tous savent faire quelque chose, ensemble
subviennent à tes besoins, te distraient,
et, que tu le veuilles ou non,
te tiennent compagnie – mais toi ?
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« Le seul chemin pour échapper à ce dilemme ["C'est ma faute."-"C'est la faute des autres."], c'est la fusion des pulsions destructrice et autodestructrice, de l'agression et de l'autoagression. D'un côté, le perdant radical ressent au moment de son explosion un pouvoir d'une plénitude unique : son acte lui permet de triompher des autres en les anéantissant ; de l'autre, il résout le problème posé en creux de ce sentiment de puissance, c'est-à-dire le soupçon que sa vie pourrait n'avoir aucune valeur, en mettant fin à celle-ci. » (p. 25)
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