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Citations de Horacio Quiroga (96)


La seule chose qu'un tâcheron possède réellement, c'est la faculté de se défaire brutalement de son argent.

LES TÂCHERONS.
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— Pourquoi n'entrez-vous pas ? demanda l'alezan aux vaches.
— Parce qu'on ne peut pas, répondirent-elles.
— Nous, nous passons n'importe où, affirma l'alezan, hautain. Depuis un mois, nous passons n'importe où.
Dans tout l'éclat de leur aventure, les chevaux avaient sincèrement perdu la notion du temps. Les vaches ne daignèrent même pas regarder les intrus.
— Les chevaux ne peuvent pas, dit une preste vachette. Ils disant ça, et ils ne passent jamais nulle part. Nous oui, nous passons n'importe où.
— Vous avez un licol, ajouta une vieille mère sans lever la tête.
— Moi non ! Moi je n'ai pas de licol ! répondit vivement l'alezan. Moi je vivais dans les nopals et je passais partout.
— Oui ! Après nous ! Nous autres nous passons et vous, vous ne pouvez pas.
La preste vachette intervint à nouveau :
— Le maître a dit l'autre jour : « Les chevaux, avec un fil on les tient. » Et alors ?… Vous ne passez pas ?
— Non, nous ne passons pas, répondit simplement le belle face qui se rendait à l'évidence.
— Nous, oui !
Cependant, l'honorable belle face pensa soudain que les vaches, hardies et rusées, impertinentes violatrices des cultures et du Code Rural, ne pouvaient pas non plus passer la barrière.
— Cette barrière est mauvaise, objecta la vieille mère. Lui, oui ! il fait sauter les pieux avec ses cornes.
— Qui ? demanda l'alezan.
Toutes les vaches tournèrent avec émotion la tête vers lui.
— Le taureau Barigüi. Il est plus fort, lui, que toutes les mauvaises clôtures.
— Les clôtures ?… Il passe ?
— Toutes ! Et même les barbelés. Nous, nous passons après lui.
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À Misiones, une tempête d'été fait facilement chuter la température de quarante à quinze degrés, en moins d'un quart d'heure. Personne ne tombe malade, parce que dans ce pays c'est ainsi, mais on meurt de froid.
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L'homme marcha sur quelque chose de mou et sentit aussitôt la morsure à son pied. Il bondit en avant et, en se retournant, il vit en jurant une yararacusu qui, enroulée sur elle-même, attendait une autre attaque.
L'homme jeta un rapide coup d'œil à son pied, où deux gouttelettes de sang grossissaient péniblement, et sortit sa machette de sa ceinture. Le serpent vit la menace et enfonça davantage la tête au centre même de sa spirale ; mais le dos de la lame tomba, lui disloquant les vertèbres.
L'homme se baissa, essuya les gouttelettes de sang, et contempla un instant la morsure. Une douleur aiguë naissait des deux points violets et commençait à envahir tout le pied. Il serra sa cheville en toute hâte avec son foulard et suivit le sentier jusqu'à sa cabane.
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Les jours passaient les uns après les autres, aveuglants de lumières, et lourds, avec ce vent du nord persistant qui faisait ployer les légumes flétris sous le ciel blanc et torride des midis. Le thermomètre se maintenait entre 35 et 40 degrés sans la moindre espérance de pluie. Il y eut quatre jours d'un temps chargé ; pas un souffle d'air, on étouffait et la chaleur augmentait. Et quand enfin on perdit l'espoir que le vent du sud pût transformer en torrents d'eau le feu venu du nord pendant tout un mois, les gens se résignèrent à une sécheresse désastreuse.
Dès lors le fox-terrier vécut assis sous son oranger, car quand la chaleur dépasse certaines limites raisonnables, les chiens, allongés, ne respirent pas bien. La langue pendante, les yeux entrouverts, il assista à la mort progressive de tout ce qui ressemblait à un bourgeonnement printanier. Les légumes furent vite perdus. Le maïs passa du vert clair à un blanc jaunâtre et, à la fin novembre, il ne restait qu'un champ de fines colonnes tronquées sur le noir de la terre désolée. Le manioc, héroïque entre tous, résistait bien.

YAGUAÏ.
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Quand un être est bien constitué, agile, fort et rapide, il maîtrise son ennemi avec la seule arme de ses muscles et de ses nerfs, ce qui fait son honneur, comme il en va pour tous les lutteurs de la création. C'est ainsi que chasse l'épervier, le léopard, le tigre, nous autres et tous les êtres noblement constitués. Mais quand on est lâche, lourd et peu intelligent, et donc incapable de lutter franchement pour la vie, alors on est doté d'une paire de crochets pour assassiner traîtreusement, comme cette dame importée qui veut nous en imposer avec son grand chapeau.

Chapitre IX.
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Nous n'avons pas à être surréaliste, a constaté Octavio Paz puisque nos pays le sont par nature.
(Préface)
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Depuis longtemps déjà le petit chien blanc avait été réclamé à Cooper par l'un de ses amis, un homme de la forêt qui passait tous ses moments perdus dans les bois à chasser le sanglier. Il était aidé par trois chiens magnifiques, bien que très enclins à pister les coatis ; et le chasseur non seulement perdait du temps, mais risquait une catastrophe, car d'un seul coup de dent un coati peut impitoyablement égorger le chien qui n'a pas su l'attraper.
Fragoso, ayant un jour vu le fox-terrier à l'œuvre avec un ragondin, que Yaguaï avait su forcer à une paix perpétuelle, en déduisit qu'un petit chien doté de ce talent singulier pour planter ses dents juste entre le cou et le garrot n'était pas un chien ordinaire, si courte que fût sa queue. C'est pourquoi il insistait tellement pour avoir le chien de Cooper.
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Tous ceux qui avaient passé la porte avant moi avaient donné leur tête, et je les voyais placées dans une longue file de vitrines adossée au mur d'en face. L'air pollué n'entrait sûrement pas dans c,es vitrines, car les têtes se conservaient de façon admirable, presque comme si elles étaient vivantes, même si l'afflux de sang sous la peau leur manquait. Je dois avouer que le spectacle produisit sur moi une frayeur soudaine et intense. Pendant un certain temps, je me sentis paralysé par la terreur.

(Juan Bosh, La tache indélébile)
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Jusqu’alors, chacun avait pris sur lui la part qui lui revenait dans la déchéance des enfants, mais désespérant de se racheter après les quatre bêtes qui étaient nées d’eux, ils laissèrent jaillir ce besoin impérieux d’accuser les autres qui est l’apanage des cœurs inférieurs.
Ils commencèrent par changer de pronom : TES enfants. Et comme en plus des insultes il y avait les insinuations, l’atmosphère s’alourdit.
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Ce fonctionnaire s'appelait Malaquias Sotelo. C'était un Indien de petite taille , au cou très court, qui semblait devoir vaincre une résistance de sa nuque pour redresser la tête. Il avait une forte mâchoire et le front si bas que ses cheveux, courts et raides comme du fil de fer, prenaient naissance en une ligne bleue à deux doigts de ses épais sourcils, sous lesquels deux petits yeux enfouis regardaient avec méfiance, surtout quand l'asthme les baignait d'angoisse.
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La chambre à coucher restait tout le jour entièrement éclairée, dans un silence complet. Les heures se passaient sans que l’on entendît le moindre bruit. Alicia somnolait. Jordan vivait dans le salon dont toutes les lampes étaient également allumées. Il marchait sans arrêt de long en large avec une infatigable obstination. Le tapis étouffait ses pas. Par moments il entrait dans la chambre et poursuivait son va-et-vient muet le long du lit, s’arrêtant un instant à chaque extrémité pour regarder sa femme.
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Pour lui, romantique au point d'être sensible à l'état de mélancolie douloureuse que provoque une simple bruine quand elle assombrit le patio, cette enfant, avec son visage angélique, ses yeux bleus et sa jeune plénitude, devait incarner la quintessence possible de l'idéal.
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Benincasa avait déjà entendu parler de ces curieuses fourmis que nous appelons correction. Elles sont petites, brillantes, et marchent rapidement en formant une colonne plus ou moins large. Elles sont essentiellement carnivores. Elles avancent en dévorant tout ce qu'elles trouvent sur leur passage : araignées, grillons, crapauds, vipères, et tous les êtres qui ne peuvent résister. Il n'est pas d'animal, pour grand et fort, qui ne fuie devant elles. Leur entrée dans une maison suppose l'extermination de tout être vivant, car il n'y a de recoin ou de trou, si profond soit-il, où le fleuve dévorateur ne se précipite. Les chiens aboient, les boeufs mugissent, et l'ont est forcé de leur abandonner la maison sous peine d'être rongé jusqu'au squelette en dix heures. Elles restent au même endroit un, deux et même cinq jours, selon sa richesse en insectes, en chair ou en graisse. Quand tout est dévoré, elles s'en vont.
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Jordan se pencha dessus. Effectivement, sur la taie, des deux côtés du creux qu’avait laissé la tête d’Alicia, on voyait deux petites tâches sombres.
– On dirait des piqûres, murmura la bonne après l’avoir observé immobile pendant un moment.
– Approchez-le de la lumière, lui dit Jordan.
La bonne le souleva, mais elle le laissa immédiatement retomber et resta à le regarder, livide et tremblante. Sans savoir pourquoi, Jordan sentit ses poils se hérisser.
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A l'instant Maria Elvira m'interrompt pour dire que ma dernière phrase n'est pas juste : mon récit n'est pas seulement bon, il est très bon.

[ La méningite et son ombre ]
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Depuis des temps immémoriaux, le bâtiment était inhabité. Et maintenant on y entendait des bruits insolites, des coups métalliques, des hennissements de chevaux, tout un ensemble de choses qui révélaient à une lieue la présence de l'Homme.
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Je ne sais pourquoi je n'ai rien ressenti de plus. Je présume que la raison est la suivante : au lieu de m'épuiser à me défendre à tout prix, angoissé, contre ce que je ressentais, ainsi que tous ont dû le faire, et même les marins sans s'en rendre compte, j'ai accepté simplement cette mort hypnotique, comme si j'étais déjà annulé.

[ Les bateaux suicides ]
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Le bourdonnement ne cesse d'augmenter. Mes yeux se couvrent d'un voile d'épaisses ténèbres sur lesquelles se détachent des losanges verts. Soudain, je vois la porte bordée de murailles d'un souk marocain, d'où s’échappe un troupeau de poulains blancs, tandis qu'en sens inverse entre en courant un cortège d'hommes décapités.
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Cela dit, dans une crue du Haut Parana on trouve bien des choses avant d'atteindre la grume repérée. Des arbres, bien sûr, arrachés d'un seul coup, leurs racines noires, à l'air comme des pieuvres. Des vaches et des mules mortes, en compagnie d'un bon nombre d'animaux sauvages noyés, tués par un coup de fusil ou une flèche encore plantée dans leur ventre. Des pyramides de fourmis entassées sur une souche. Et parfois, un tigre, des îlots de camalote (nénuphars), et de l'écume à foison - sans compter, évidemment, les serpents.
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