AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Horacio Quiroga (96)


C'est une obsession, continua Ayestarain, une simple obsession à 41°. La malade a le regard constamment rivé sur la porte. […] Comme tout homme, j'ai bien une vague idée de ce que sont deux yeux qui aiment quand on s'approche doucement d'eux. Mais la lumière de ces yeux, la félicité dans laquelle ils sombraient à mon approche, cet éclair de bonheur éperdu — jusqu'au strabisme — quand je m'inclinai sur eux, jamais aucun amour normal à 37° ne me les donnera plus à voir.
Commenter  J’apprécie          420
Un après-midi, pendant qu’ils faisaient la sieste, un jacaré se réveilla en sursaut et il leva la tête, croyant entendre un bruit. Tendant l’oreille, il perçut effectivement un bruit sourd et profond, qui venait de loin, très loin. C’est alors qu’il appela le jacaré qui dormait à ses côtés.
« Réveille-toi ! lui dit-il. Il y a danger.
— Quoi donc ? répondit l’autre, alarmé.
— Je ne sais pas, lui dit le jacaré qui s’était réveillé le premier. J’entends un bruit étrange. »
Le deuxième jacaré entendit le bruit à son tour et ils réveillèrent tous les autres. Tous étaient très effrayés et couraient d’un côté à l’autre, la queue dressée.
Il y avait de quoi être inquiet parce que les bruits croissaient, croissaient. Bientôt ils aperçurent une espèce de petit nuage de fumée, très loin, et ils entendirent un bruit tchouf, tchouf, dans la rivière, comme si quelqu’un frappait l’eau, très loin.
Les jacarés se regardèrent les uns les autres : qu’est-ce que cela pouvait bien être ?
Commenter  J’apprécie          400
S'il est quelque chose vers quoi l'homme se sente entraîné avec une cruelle délectation, c'est, une fois qu'il a commencé, d'humilier son prochain jusqu'au bout.
Commenter  J’apprécie          350
Maria Elvira peut ne pas se souvenir de ce qu'elle a éprouvé pendant ses jours de fièvre, je l'admets. Elle n'en est pas moins parfaitement au courant de ce qui s'est passé, car on le lui a rapporté.
Il est dès lors impossible que je sois pour elle dépourvu de tout intérêt. De charme — Dieu me pardonne — qu'elle pense ce qu'elle veut. Mais d'intérêt, l'homme dont on a rêvé vingt nuits de suite, ça non ! C'est pourquoi son indifférence parfaite à mon égard n'est pas rationnelle. Quels avantages quelle vague chance de bonheur gagnerais-je en vérifiant cela ? Rien, que je sache. Maria Elvira se prémunit de la sorte contre mes éventuelles aspirations ; et rien de plus.
Ce en quoi elle a tort. Qu'elle me plaise désespérément, c'est entendu. Mais de là à ce que j'exige, moi, qu'elle honore une créance signée sur le bordereau d'une méningite, que diable ! ça non.
Commenter  J’apprécie          340
Un soir j'allai là-bas bien disposé à rompre et animé, pour cette raison, d'une mauvaise humeur manifeste. Inès se précipita pour m'embrasser mais, soudain très pâle, elle s'arrêta.
— Qu'as-tu ? me dit-elle.
— Rien, répondis-je avec un sourire forcé, en lui caressant le front. Elle laissa faire, sans prêter attention à ma main, en me regardant avec insistance. Enfin, elle détourna ses yeux crispés et nous passâmes dans le salon.
La mère entra mais, sentant l'orage venir, elle ne resta qu'un moment et disparut.
Rompre, c'est un mot court, facile ; mais commencer…
Nous étions assis et ne parlions pas. Inès se baissa, écarta ma main de son visage et me fixa d'un regard douloureux, me scrutant avec angoisse.
— C'est évident…, murmura-t-elle.
— Quoi ? lui demandai-je froidement.
La tranquillité de mon regard lui fit plus de mal que ma voix et son visage s'altéra :
— Que tu ne m'aimes plus ! articula-t-elle avec une oscillation lente et désespérée de la tête.

LA MORT D'ISOLDE.
Commenter  J’apprécie          342
Le cadavre de l'homme aux champignons n'avait toujours pas été retiré. Nous l'enjambâmes et courûmes chercher nos verres, car nous étions assoiffés. C'est alors que Gaspard s'approcha de moi et me demanda :
-Que lui est-il arrivé ? Qui est-ce ?
L'explication fut fournie par Lucile :
-C'était l'homme aux champignons. Ceux d'aujourd'hui sont vénéneux. Elle rit :-Ce sont ceux qui poussaient à l'endroit où mon père t'a trouvé.
Sur ces entrefaites, deux serviteurs vinrent prendre le cadavre et disparurent avec lui dans les noires profondeurs du verger. Une femme vint nettoyer les vomissures dont le marbre du sol était maculé. Mes parents s'approchèrent du perron en se tenant par la main :
-Everard, il n'y aura pas de champignons ce soir, dit Elvire.
-C'est bien dommage, répondit son mari. Ils avaient l'air si délicieux...

(S. Galindo, "L'homme aux champignons")
Commenter  J’apprécie          337
C'était moi qui venais rompre, et on prenait les devants. L'amour-propre, un vil amour-propre touché à vif, me fit répondre :
— Parfaitement. Je pars. Puisses-tu être heureuse… une autre fois.
Elle ne compris pas, et me regarda d'un air étrange. J'avais commis la première infamie ; et comme toujours dans ces cas-là, j'ai été pris du vertige de m'avilir encore plus :
— C'est clair ! lançai-je brutalement, parce que de moi, tu n'as pas eu à te plaindre… n'est-ce pas ?
C'est-à-dire : je t'ai fait l'honneur d'être ton amant, et tu dois m'en être reconnaissante.
Elle comprit mieux mon sourire que mes paroles et, tandis que j'allai chercher mon chapeau dans le couloir, son corps et son âme s'écroulaient dans le salon.
À l'instant même où je traversai le vestibule, j'éprouvai intensément combien je l'aimais, et ce que je venais de faire. Mon envie de luxe, de mariage mondain, tout cela creva dans mon esprit comme une plaie. Et moi qui m'offrais aux enchères aux laiderons fortunés du grand monde, qui me mettais en vente, je venais de commettre l'acte le plus outrageant que l'on puisse infliger à une femme qui vous a trop aimé.

La Mort d'Isolde.
Commenter  J’apprécie          330
Nous avions donc volé un paquet de cigarettes à cet individu sévère ; nous étions bien tentés de nous initier sur-le-champ à la vertu virile, mais nous attendîmes l'instrument. Il s'agissait d'une pipe que j'avais fabriquée moi-même : un bout de roseau comme fourneau, une fine tringle à rideau comme tuyau et, pour cimenter le tout, le mastic d'une vitre récemment réparée. La pipe était parfaite : grande, légère et de plusieurs couleurs.
Nous la transportâmes, Maria et moi, dans notre repaire entre les roseaux avec une onction ferme et religieuse. Cinq cigarettes y laissèrent leur tabac. Nous nous assîmes en levant les genoux, j'allumai la pipe et aspirai. Maria, qui dévorait mon acte des yeux, remarqua que les miens se remplissaient de larmes : jamais on n'a vu ni ne verra chose plus abominable. Malgré tout, je déglutis ma salive nauséeuse.
— C'est bon ? demanda Maria, alléchée, en tendant la main.
— C'est bon, répondis-je lui passant l'effroyable machine.
Maria aspira, encore plus fort. Moi, qui l'observais attentivement, je remarquai à mon tour ses larmes et le mouvement simultané de ses lèvres, de la langue et de la gorge, qui repoussaient cette chose. Mais elle eut plus de courage que moi.
— C'est bon, dit-elle les yeux pleins de larmes en faisant presque la grimace. Héroïque, elle porta à nouveau la tringle de bronze à ses lèvres.

NOTRE PREMIÈRE CIGARETTE.
Commenter  J’apprécie          270
- Mais, y-a-t-il un train qui passe par cette ville ?
- L'affirmer reviendrait à commettre une inexactitude. Comme vous pouvez le constater, les rails existent, même s'il sont un peu endommagés. Dans certaines localités ils sont simplement indiqués par deux lignes tracées à la craie sur le sol. Etant donné les conditions actuelles, aucun train n'est dans l'obligation de passer par ici, mais rien non plus ne l'en empêche. J'ai vu passer beaucoup de trains dans ma vie et j'ai connu quelques voyageurs qui ont pu les prendre. Si vous avez la patience d'attendre, j'aurai peut-être personnellement l'honneur de vous aider à monter dans un joli wagon bien confortable.
- Et ce train me conduira à T... ?
- Mais pourquoi vous entêtez-vous à aller à T ? Vous devriez vous montrer satisfait de pouvoir monter dans le train.

(J. J. Arreola, "L'Aiguilleur")
Commenter  J’apprécie          267
Quand je suis arrivé ma femme a couru vers moi comme une folle pour m'embrasser. Et aussitôt elle s'est évanouie. Il se sont alors tous précipités sur moi. Ils me regardaient avec des yeux de fous.
Ma maison ! Elle avait brûlé ! Détruite, effondrée avec tout ce qu'il y avait dedans ! C'était bien ma maison ! Ma maison ! Mais pas ma femme, pas ma femme à moi !
Commenter  J’apprécie          260
Cette nuit-là, l'eau monta encore d'un mètre, et le lendemain après-midi Candiyu eut la surprise de voir tout un banc, un véritable troupeau de grumes à la dérive qui passaient la pointe d'Itacurubi. Du bois à l'écorce blanchie et parfaitement sec.
Là, il tenait son affaire. Il sauta dans sa barque et pagaya à la rencontre de sa proie.
Cela dit, dans une crue du Haut Parana on trouve bien des choses avant d'atteindre la grume repérée. Des arbres, bien sûr, arrachés d'un seul coup, leurs racines noires à l'air comme des pieuvres. Des vaches et des mules mortes, en compagnie d'un bon nombre d'animaux sauvages noyés, tués par un coup de fusil ou une flèche encore plantée dans leur ventre. Des pyramides de fourmis entassées sur une souche. Et parfois, un tigre, des îlots de " camalote " et de l'écume à foison — sans compter, évidemment, les serpents.
Candiyu dériva, esquiva, huerta et manqua chavirer plus souvent qu'à son tour avant d'atteindre sa proie. Mais enfin il y était ; un coup de machette mit à vif la veine sanguine du bois de rose et en se courbant sur le tronc de bois il dériva de travers avec sa grume pendant quelques mètres. Mais les branches, les arbres qui passaient sans cesse, l'entraînaient.
Il changea de tactique ; il amarra sa prise à sa barque, et c'est alors que commença une lutte muette et sans merci, dans laquelle, en silence, il suait sang et eau à chaque coup de pagaie.
Dans une grande crue, une grume dérive avec une telle puissance que trois hommes hésiteraient avant de s'y risquer. Mais Candiyu n'était pas seulement très courageux ; il avait derrière lui trente ans de piraterie en eaux basses ou hautes et, de plus, il désirait devenir propriétaire d'un gramophone.

LES PÊCHEURS DE GRUMES.
Commenter  J’apprécie          260
Le capital réalisable du chantier s'élevait alors à sept mille grumes — un peu plus qu'une fortune — mais comme une grume de deux tonnes, tant qu'elle n'est pas au port, ne vaut pas un clou, Casthelum et compagnie étaient bien loin de s'estimer heureux.

LES PÊCHEURS DE GRUMES.
Commenter  J’apprécie          250
— Tous, n'importe quel mari, même le dernier, ferait un sacrifice pour gâter sa femme ! Et toi… et toi… je n'ai même pas une misérable robe à me mettre !
Une fois qu'elle a passé une certaine limite du respect pour l'homme, une femme peut en arriver à dire à son mari des choses incroyables.
La femme de Kassim franchit cette limite avec une passion au moins égale à celle qu'elle éprouvait pour les brillants.
Commenter  J’apprécie          250
Devant eux brillait maintenant une petite étendue de terre argileuse inculte qu'on n'avait même pas essayé de labourer. C'est là que le chiot vit soudain mister Jones qui le regardait fixement, assis sur un tronc. Old se leva en remuant la queue. Mais les autres, qui se levèrent aussi, avaient le poil hérissé.
— C'est le patron ! s'exclama le chiot, surpris par l'attitude des autres.
— Non, ce n'est pas lui, répliqua Dick.
Les quatre chiens s'étaient rapprochés et grognaient ensemble sourdement sans quitter des yeux mister Jones, qui demeurait immobile à les regarder. Le chiot, incrédule, allait s'approcher, mais Prince lui montra les dents.
— Ce n'est pas lui, c'est la Mort.
Le chiot se hérissa de peur et rentra dans le groupe.
— C'est le patron mort ? demanda-t-il anxieux.
Les autres, sans lui répondre, commencèrent à aboyer avec fureur, gardant leur attitude craintive.
Commenter  J’apprécie          240
Sa lune de miel fut un long frisson. Blonde, angélique et timide, le caractère dur de son mari glaça ses rêves enfantins de jeune mariée. Elle l'aimait beaucoup et, pourtant, c'est avec un léger frémissement que parfois dans la rue, quand ils rentraient ensemble le soir, elle lançait un regard furtif vers la haute stature de Jordan, muet depuis une heure. Quant à lui, il l'aimait profondément, sans le laisser paraître.
Commenter  J’apprécie          242
— Vous voulez aller à Fernando Póo ? Si vous y allez vous n'en reviendrez pas, je vous le garantis.
— Pourquoi ça ? objecta mon ami. Le paludisme ? Vous en êtes bien revenu, vous. Et je suis américain, moi.
À quoi l'autre répondit :
— D'abord, si je ne suis pas mort là-bas, Dieu seul sait pourquoi, car il s'en est fallu de peu. Ensuite, le fait que vous soyez américain ne vous protégera pas de grand-chose. J'ai vu, dans le bassin du Niger, plusieurs Brésiliens de Manaos et une quantité d'Antillais ; tous mouraient. On ne joue pas avec le Niger.
Commenter  J’apprécie          230
— Eh, roupilleur ! Lève-toi ! Elles vont te manger tout cru.
Benincasa s'assit brusquement sur son lit, ébloui par la lumière des trois lampes tempête qui remuaient d'un bout à l'autre de la pièce. Son parrain et deux péons aspergeaient le sol.
— Qu'est-ce que c'est ? Qu'est-ce que c'est ?, demanda-t-il en sautant à terre.
— Rien… Attention à tes pieds… La " correction ".
Benincasa avait déjà entendu parler de ces curieuses fourmis que nous appelons " correction ". Elles sont petites, brillantes, et marchent rapidement en formant une colonne plus ou moins large. Elles sont essentiellement carnivores. Elles avancent en dévorant tout ce qu'elles rencontrent sur leur passage : araignées, grillons, crapauds, vipères, et tous les êtres qui ne peuvent leur résister. Il n'est pas d'animal, pour grand et fort qu'il soit, qui ne fuie devant elles. Leur entrée dans une maison suppose l'extermination absolue de tout être vivant, car il n'est pas de recoin ou de trou, si profond soit-il, où le fleuve dévorateur ne se précipite. Les chiens aboient, les bœufs mugissent, et l'on est forcé de leur abandonner la maison sous peine d'être rongé jusqu'au squelette en dix heures. Elles restent au même endroit un, deux et même cinq jours, selon sa richesse en insectes, en chair ou en graisse. Quand tout est dévoré, elles s'en vont.
Commenter  J’apprécie          220
Il eut la vision du tramway, qui fuyait sur le plateau lunaire, sur un altiplano de lumière diffuse, et se perdait rapidement à l'horizon, poursuivi par une sombre nuée d'ailes.

Oscar Cerruto, Les Vautours.
Commenter  J’apprécie          200
La mère fit clairement comprendre au jeune homme qu'elle comptait ce soir-là sur la présence de son père.
— Ce sera difficile, répondit Nébel après un silence mortifié. Il lui est pénible de sortir le soir… Il ne sort jamais.
— Ah ! lança-t-elle seulement, avec un bref pincement de lèvres.
Il y eut une autre pause, lourde de présages cette fois.
— Parce que vous ne vous mariez tout de même pas en secret, n'est-ce pas ?
— Oh ! Nébel s'efforça de sourire. Ce n'est pas non plus ce que voudrait mon père.
— Et bien, alors ?
Nouveau silence, toujours plus orageux.
— Est-ce à cause de moi que monsieur votre père ne veut pas venir ?
— Mais non, non, madame ! s'exclama enfin Nébel, impatient. Il est comme ça, c'est tout… Je lui en reparlerai, si vous voulez.
— Moi, si je le veux ? Elle sourit mais ses narines palpitaient. Faites ce que bon vous semble. À présent, Nébel, voulez-vous bien vous retirer ? Je ne me sens pas bien.
Nébel s'en fut, profondément contrarié. Qu'allait-il dire à son père ? Ce dernier persistait toujours dans son opposition catégorique à ce mariage, et le fils avait déjà entrepris les démarches nécessaires pour se passer de son consentement.
— Rien ne t'en empêche, et tu peux même faire tout ce qui te chante. Mais mon consentement pour faire de cette cocotte ta belle-mère, jamais !
Trois jours plus tard, Nébel décida de couper court à tout cela et il profita d'un moment où Lidia n'était pas là.
— J'ai parlé à mon père, commença Nébel, et il m'a dit qu'il lui serait tout à fait impossible de venir.
La mère pâlit un peu cependant que ses yeux, dans un éclair subit, s'étiraient vers les tempes.
— Ah ! Et pourquoi ?
— Je ne sais pas, répondit Nébel d'une voix sourde.
— C'est-à-dire… que monsieur votre père craint de se salir en mettant les pieds ici ?
— Je ne sais pas ! répéta-t-il avec la même obstination.
— Est-ce que c'est un affront gratuit de la part de ce monsieur ? Qu'est-ce qu'il se figure ? ajouta-t-elle d'une voix maintenant altérée, les lèvres tremblantes. Mais qui donc est-il pour le prendre sur ce ton ?
Ce fut un coup cinglant qui fit se rebiffer en Nébel le sentiment enfoui de sa race.
— Ce qu'il est, je n'en sais rien ! répondit-il à son tour avec précipitation. Et non seulement il refuse de venir, mais il ne donne pas son consentement.
— Quoi ? Il ne donne pas quoi ? Mais pour qui se prend-il ? C'est bien à lui de faire des histoires !
Nébel se leva :
— Vous ne…
Mais elle aussi s'était levée.
— Si, si ! Vous n'êtes qu'un enfant. Mais demandez-lui d'où il sort sa fortune ! Volée, volée à ses clients ! Et ces airs qu'il se donne ! Son irréprochable famille sans tache, il en a plein la bouche ! Sa famille !… Demandez-lui un peu qu'il vous dise combien de murs il devait sauter pour aller coucher avec sa femme, avant son mariage ! Oui, et maintenant il en remet avec sa famille !… Très bien, allez-vous-en ; j'en ai jusque-là de ces hypocrisies ! Et bon vent !

UNE SAISON D'AMOUR.
Commenter  J’apprécie          200
Avec l'inondation l'eau filait sept nœuds et, au confluent du Guayra, le niveau était monté de sept mètres la nuit précédente. Après la grande sécheresse, les grandes pluies. Le déluge commença à midi et, pendant cinquante-deux heures consécutives, la forêt retentit d'un tonnerre d'eau. La rivière, devenue torrent, rugissait maintenant comme une avalanche d'eau rouge. Trempés jusqu'aux os, les péons, dont les vêtements collés au corps faisaient ressortir la maigreur, balançaient les grumes du haut du ravin ; chaque nouvel effort arrachait un cri de courage à l'unisson, et quand la grume monstrueuse dévalait enfin la pente par rebonds et s'enfonçait d'un coup de canon dans l'eau, tous les péons lançaient leur " a… hiju ! " triomphal.
Ensuite, les efforts acharnés dans la boue liquide, les palans qui lâchaient, les chutes sous la pluie torrentielle. Et la fièvre.
Enfin, brusquement, le déluge s'arrêta.

LES PÊCHEURS DE GRUMES.
Commenter  J’apprécie          200



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Horacio Quiroga (460)Voir plus

Quiz Voir plus

Masse critique

Grâce à l'opération Masse Critique de Babelio, vous pouvez ... ?

rencontrer des auteurs morts
recevoir des livres trop bien
danser avec les Ours au clair de lune

5 questions
554 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *} .._..