AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Jacques Lacarrière (282)


La sourate de la colline
A quoi donc servirait de courir le monde si j’ignore tout de la colline qui jouxte ma maison ? Enfant, je voulais déjà inventorier toutes les fleurs, toutes les plantes de mon jardin. Dénombre l’infini en somme, le grouillement, énumérer la multitude, apurer la profusion des choses. Il m’est resté de cette époque un goût microscopique pour le monde, la passion de l’infime, le désir de devenir un jour le géographe des brindilles. (p. 57-58)
Commenter  J’apprécie          30
Sur le rebord de ma terrasse, on a déposé sur des feuilles une figue tout embuée de rosée. Je froisse ces feuilles entre mes doigts --- senteur inoubliable d'aube renouée --- je froisse ces feuilles et je me dis : pourquoi ce monde finirait-il ?
Pourquoi ce monde devrait-il finir ? A notre échelle d'homme, s'entend, et non à celle de l'univers. Nous ne sommes que le derme le plus récent de la Durée, la pelure la plus frêle du Temps.
Commenter  J’apprécie          30
Pour Haci Bektas, l'essentiel n'était pas dans les rites, la musique ou la danse, dans les formes extérieures et extatiques de culte, mais dans la pureté intérieure et la sincérité du coeur. La "recette" de son enseignement était à la fois simple et difficile à mettre véritablement en pratique : "Dis toujours ce que tu penses et fais toujours ce que tu dis.
Commenter  J’apprécie          30
Ma maison est toujours imprégnée de cette sagesse sédentaire même si elle doit compter avec mon nomadisme. Car je vis au coeur de ce passé sans aucun sentiment passéiste. Cette histoire, cette ancestralité, ces fantômes, ces murs aux pierre ridées, je ne les ai pas spécialement recherchés.
Commenter  J’apprécie          20
Tu as chu incompris mais tu n'as pas chu oublié. Ta chute a servi d'exemple non à ceux qui rêvaient de voler mais à ceux qui vivent sans ailes.
Commenter  J’apprécie          20
Eh bien qu’attendons-nous dans cette désolation…
  
  
  
  
Eh bien qu’attendons-nous dans cette désolation ? Qu’attendons-
                                          nous encore ?
- car (pourquoi le cacher ?) nous attendons encore, au-delà
de la porte, de nos habits, de notre mort,
de nos yeux, dans l’obscurité flottante,
dans les chambres vieillies aux longs rideaux vacillants
qui descendent ostensiblement jusqu’à terre, pour laisser croire
que nous n’attendons pas.
                   Parfois,
quand j’ouvre les fenêtres, je crois voir les arbres sauter dans la chambre
tels des hommes bronzés, vigoureux, gauches dans leur vigueur, gênés
devant ma pâleur, moi qui vis sans soleil,
refermée sur moi-même. Et je me trouble. Je me sens
très exercée, pénétrante, comme si je venais
de faire mes gammes les plus dures à la harpe. Sur les murs
sont encore accrochées des partitions obscures comme des peaux de bêtes ;
   alors
je me hâte de sourire, de me justifier,
j’invente un prétexte et je vais à la cuisine,
apporte le plateau, les verres, la grande cruche de cristal,
laisse le tout sur la table ; la cruche est vide ; je ressors et entends les hommes
   restés seuls bavarder
avec une simplicité merveilleuse, insoupçonnée, sans voir
la cruche vide, le verre ébréché. Et soudain la nuit tombe.

                                    (Le retour d’Iphigénie)


// Yannis Ritsos (1909 – 1990)

/ Traduit du grec par Michel Volkovitch
Commenter  J’apprécie          20
Je pleure le soleil …



Je pleure le soleil et pleure les années qui viennent
Sans nous et je chante celles qui sont passées
Si tout cela est vrai

Les dialogues des corps et les barques avec douceur
  entrechoquées
Les guitares sous les eaux éteintes et rallumées
Les « crois-moi » les « non pas ça »
Tantôt dans l’air, tantôt dans la musique

Deux petits animaux, nos mains qui cherchaient
À monter l’une sur l’autre en cachette
Le vase de citronnelle aux portes ouvertes des cours
Et les bouts de mers qui arrivaient ensemble
Pa- dessus les murets, derrière les clôtures
L’anémone qui se posa sur ta main
Et le mauve qui trois fois trembla trois jours au-dessus
  des cascades

Si tout cela est vrai je chante
Le bois de la poutre et la tapisserie carrée
Du mur, la Sirène aux cheveux dénoués
Le chat qui nous observa dans l’ombre
L’enfant à l’encensoir et sa croix rouge
Quand le soir tombe sur l’escarpé des rochers
Je pleure l’habit que j’ai touché, le monde qu’il m’a donné.


// Odyssèas Elytis (1911 – 1996)

/ Traduit du grec par Michel Volkovitch
Commenter  J’apprécie          20
Souvent, il m'arrivait le soir, au cours des premiers jours de cette longue marche, de contempler mes pieds avec étonnement : c'est avec ça, me disais-je, que nous marchons depuis l'aube des temps hominiens et que nous arpentons la terre.
Commenter  J’apprécie          20
Ô lieu désert…



Ô lieu désert avec tes palmiers et tes ruines
quelle parfaite image tu donnes de ce beau désastre,
dans ce lieu sans mémoire
où seule existe la rêverie – pierre en miettes
avec orgueil dressant son désastre
et lui dans les hauteurs battant des ailes
chassant inhumainement tout l’humain ;
des décombres sanglants sombrent à l’horizon,
dans cette même ivresse dont les crépuscules s’allument
où que se couchent les Hespérides.


// Stratis Pascalis / Στρατής Πασχάλης (1958 -)

/ Traduit du grec par Michel Volkovitch
Commenter  J’apprécie          20
Icare : Quand un papillon vole, se souvient-il d'avoir été chenille ? Pense-t-il sans cesse à la terre, aux racines ? Croyez-moi, il a tout oublié de sa vie souterraine, autrement il ne pourrait voler. Moi aussi, à peine quitté le sol, j'ai oublié la Crète. Je croyais que voler, c'était simplement aller d'un endroit à un autre par le plus court chemin. Mais non : voler, c'est devenir oiseau. Dès que je vis le ciel se rapprocher et l'azur m'entourer, je me suis retrouvé soudain sans poids et sans mémoire. J'ai cessé d'être un homme dès l'instant où d'en haut j'ai vu sous moi la mer comme une coquille bleue.
Commenter  J’apprécie          20
À elles deux, elles ont au moins cent cinquante ans. Comment font-elles pour vivre toute l'année en cet endroit désert (il n'y a pas de route pour venir mais un chemin de terre carrossable en cette saison mais qui doit être impraticable à la première neige)? Quand je demande à la plus âgée: "Et si vous êtes malade, comment faites-vous? Le médecin vient t-il jusqu'ici?", elle me répond: "On s'arrange pour n'être pas malade."
Commenter  J’apprécie          20
L’arbre est le frère de l’arbre ou son bon voisin.
Le grand se penche sur le petit et lui fournit l’ombre qui lui manque.
Le grand se penche sur le petit et lui envoie un oiseau pour lui tenir compagnie la nuit.
Aucun arbre ne met la main sur le fruit d’un autre ou ne se moque de lui s’il est stérile.
Aucun arbre, imitant le bûcheron, ne tue un autre arbre.
Devenu barque, l’arbre apprend à nager.
Devenu porte, il protège en permanence les secrets.
Devenu chaise, il n’oublie pas son ciel précédent.
Devenu table, il enseigne au poète à ne pas devenir bûcheron.
Poème de Mahmoud Darwich dans le Géographe des brindilles
Commenter  J’apprécie          20
Le neptique est un éveillé au sens fort de ce mot, un homme qui ne dort jamais ou plutôt dont l'âme ne s'endort jamais, toujours présente, toujours instante devant Dieu. Ses yeux restent ouverts et lucides dans la nuit du corps et les profondeurs de l'anima, il est en permanence comme une flamme inadurante, investie d'une lumière incréée qui occupe tout l'espace de la méditation, qui brille dans le cœur de « l'abîme du cœur », y restaurant l'homme déifié par la conscience nouvelle, immarcescible d'être soudain lumière vivante.
Commenter  J’apprécie          20
Gains de la nuit

D'habitude le jour je rêvasse ou perds mon temps, je doute ou je m'incline, mais à la nuit tombée je cours de jardin en jardin et posant l'oreille sur l'écorce des arbres j'écoute l'antique sanglot.

Tàssos Livaditis
Commenter  J’apprécie          20
Aveugle


Le sommeil est lourd aux matins de décembre
noir comme les eaux de l’ Achéron, sans rêves,
sans mémoire, sans la moindre feuille de laurier.
La veille entaille l’oubli comme la peau qu’on fouette
et l’âme fourvoyée sortant des eaux brandit
des débris de peintures des enfers, danseuse
aux vaines castagnettes, qui titube
talons meurtris par le lourd piétinement
dans l’assemblée engloutie là-bas.

Le sommeil est lourd aux matins de décembre.
Chaque année en décembre c’est pire.
Parga* d’abord et puis Syracuse –
ossements des ancêtres déterrés, carrières
pleines de gens épuisés, infirmes, sans souffle
sang acheté sang vendu
sang dispersé comme les enfants d’Œdipe
les enfants d’Œdipe qui sont morts.

Rues vides, maisons aux visages grêlés
iconoclastes iconolâtres s’entre-tuant toute la nuit.
Volets barricadés. Dans la chambre
le peu de lumière se cachait dans les coins
comme la colombe aveugle.
                        Et lui
marchant à tâtons
dans la prairie profonde
voyait l’ombre
derrière la lumière.

Décembre 1945


//Yòrgos Sefèris / Γιώργος Σεφέρης (1900 - 1971)
/Traduit du grec par Michel Volkovitch
Commenter  J’apprécie          20
Les montagnes


D’abord il y eut la mer.
Je suis né entouré d’îles
Je suis une île surgie le temps de voir
La lumière, dure comme la pierre
Puis sombrer.
Les montagnes sont venues après.
Je les ai choisies.
Il fallait bien que je partage un peu le poids
Écrasant ce pays depuis des siècles.

Mai 1968


//Titos Patrikios / Τίτος Πατρίκιος (1928 -)
/Traduit du grec par Michel Volkovitch
Commenter  J’apprécie          20
Je marchais pendant quatre jours et quatre nuits sans manger ni boire. Le quatrième jour, j'arrivai a une caverne et, avant d'y pénétrer, je frappai a la porte selon la coutume des frères afin que le frère sortit et que je puisse l'embrasser. J'attendis. Je frappai a la porte jusqu'au milieu de la nuit: personne ne répondit
(...)
Je dis en mon cœur "peut être n'y-a-t-il point de frère en ce lieu". J'entrai dans la caverne en criant : " béni moi, mon père! " Lorsque je fus entré, je regardai autour de moi: Je vis un frère assis, gardant le silence. Je tendis la main aussitôt, je pris son bras. Il tomba en poussière dans ma main. Je palpai tout son corps, et je vis qu'il était resté ainsi depuis qu'il était mort. Je regardai autour de moi, je vis un manteau. Lorsque je le pris, il tomba lui aussi en poussière. Alors moi, je me levai, je fis une prière, je pris le manteau, je recouvris le cadavre, je creusai la terre, je l'enterrai, je sortis
Commenter  J’apprécie          20
Commencées dans les profondeurs et les ténèbres d'un souterrain la vie et l ascèse d'Antoine s'achève en ce lieu élevé, lumineux, d'où la mer Rouge apparaît "comme un nuage posé sur la terre" Après ses victoires sur le mal, il y mènera une existence quasi angélique et tous les épisodes de sa vie précédente se retrouveront inversés: les ténèbres deviendront lumière , les tentations miracles, et les démons des anges.
Commenter  J’apprécie          20
Le désert est un lieu inhumain. Mais que veut dire inhumain pour un copte? Cela veut dire : un lieu habité par d autres créatures que des hommes: par des anges et des démons. Dans le désert, nul homme ne peut vivre s il n est aidé par Dieu ou par ses anges, nul ne peut y demeurer sans affronter un jour ou l autre les assauts du diable: il doit y vivre avec les miracles et les tentations. Mais à force de fréquenter les anges, on finit par leur ressembler. Ce que les hommes du désert perdent en humanité, ils le gagnent en angélisme, et l on comprend que les peintres byzantins qui représenteront ces hommes d'Égypte sur les fresques du monastère de Cappadoce ou de Grèce les aient peints sous ce double aspect de sauvages et d'anges: visage émacié, habits en haillons, cheveux tombant jusqu'à terre, mais aussi regards perdus dans la contemplation d'une autre réalité, chair qui n est plus une chair.
Commenter  J’apprécie          20
Des arbres mythiques de la Grèce , l'olivier, de loin , est le plus mythique .N'a-t-il pas été inventé , donné aux grecs par Athéna?Il n'est pas né comme le cyprès de la métamorphose d'un humain mais bien de l'esprit et surtout du désir d'une déesse. Tout les arbres , même en Grèce , ne sauraient en dire autant!
Commenter  J’apprécie          20



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Jacques Lacarrière (959)Voir plus

Quiz Voir plus

Que font ces personnages de chansons ?

Que fait Eleanor Rigby, chantée par les Beatles ?

elle relève les parcmètres
elle ramasse le riz dans l'église après les mariages
elle part chasser le tigre
elle fait la cuisine

10 questions
51 lecteurs ont répondu
Thèmes : chanson , musique , culture générale , Noms propresCréer un quiz sur cet auteur

{* *}