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Critiques de Jenny Erpenbeck (12)
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L'Enfant sans âge



Non, ce n'est sûrement pas le tableau de la couverture qui m'a poussé à acheter ce livre. Pourtant le tableau est l'oeuvre du fameux peintre colombien Fernando Botero, intitulé "Girl with a Hoop", peint en 1983 et vendu chez Christies à New York le 24 mai 2017 pour la modeste somme de 667.500 dollars ! Question de goût, mais franchement je préfère le tableau avec quasiment le même titre "Fillette au cerceau" de notre Renoir de 1894.

Oh, et ce Botero, né à Medellín en 1932, ne peut être confondu avec son compatriote, l'écrivain Jorge Enrique Botero, auteur de l'ouvrage "Attends-moi au ciel, capitaine" duquel babounette/Christine de Bruxelles et moi-même ont rédigé une critique au début de l'année.



De Jenny Erpenbeck j'avais lu il y a 4 ans un ouvrage qui m'avait fort impressionné, mais qui est malheureusement et étonnamment pas traduit en Français "Aller Tage Abend" de 2012. Le titre n'est pas facile à traduire, mais l'idée en est : ce n'est pas fini jusqu'à ce que cela soit vraiment fini. Une oeuvre complexe dans laquelle il est question de mort de bébé, émigration, espoirs perdus. Émotionnellement dur à lire, mais riche par son contenu et approche. Avec la version anglaise "The End of Days", elle a d'ailleurs gagné le "Foreign Fiction Prize" (prix de fiction étrangère) outre-Manche en 2015.



Jenny Erpenbeck, née à Berlin-Est en 1967, a la culture dans le sang : ses grands-parents paternels étaient écrivains, son père physicien et philosophe, sa mère traductrice littéraire de l'Arabe vers l'Allemand. Elle même a étudié le théâtre à la Humboldt Universität et ensuite le théâtre musical à l'Académie Hanns Eisler de Berlin. En 1997, elle fut nommée régisseuse de l'opéra de Graz en Autriche.



"L'enfant sans âge" constitue sa toute première oeuvre littéraire, publiée en 1999 et traduite en Français par Bernard Kreiss, 3 ans plus tard. Elle a publié 4 autres livres, un recueil de nouvelles "Bagatelles" et une pièce de théâtre "Les chats ont sept vies" en 2011.



Une nuit, une créature "pâle et gigantesque" est trouvée dans la rue, paumée, avec un seau vide à la main. Cette fillette grosse et informe de 14 ans ne sait pas son nom et ne connaît pas non plus l'adresse où elle habite. Au bout de quelques recherches infructueuses, la police refile la fillette à un foyer.



L'histoire de cette "fillette-sans-nom" au foyer est tellement bien résumée dans la présentation de l'éditeur que je ne vois pas l'utilité de la refaire ici et je me permets dès lors d'y renvoyer explicitement.



Ce qui est frappant c'est que le portrait de cette héroïne sans nom soit dressé par une jeune femme. Jenny Erpenbeck n'avait, en effet, que 32 ans quand ce livre est sorti et il s'agissait de son début littéraire, qui allait tout de suite établir sa réputation comme valeur sûre au firmament de la littérature allemande.



La description des considérations intimes, réflexions personnelles, interprétations de son environnement, des adultes et autres enfants sont, à mon humble avis, digne d'analyses de psychiatres comme celles de Jung, Lacan et pourquoi pas Anna Freud ou Melanie Klein ? Je n'ai pas relevé de fausses notes, paradoxes ou contradictions, mais je ne suis pas psychanalyste bien entendu. Quoiqu'il en soit, cette description m'a ėmu et fasciné.



"L'enfant sans âge" n'offre pas une distraction plaisante, mais est écrit avec une telle maestria que je ne peux que recommander cette oeuvre de même pas 150 pages tout à fait à part.



PS : J'espère que Jenny Erpenbeck ne m'en voudra pas d'avoir rajouté sur Babelio le tableau de Botero que chez Albin Michel l'on a - non sans raison évidemment - retenu pour la couverture de cet ouvrage.

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Le Bois de Klara



Voilà une lecture originale, un peu déroutante, parfois, qui va me rester longtemps en mémoire en la personne de Doris, une enfant de douze dont il est question parmi d'autres personnages dans ce roman. Mais c'est elle qui symbolisera pour moi, ce livre.



Jamais livre n'a mieux décrit l'immuabilité des saisons ,du cycle de la nature, de la vie parallèle des insectes, d'un lieu et d'une demeure face à la folie cruelle des hommes. L'Histoire est racontée par bribes, et c'est la barbarie et l'anéantissement de l'homme par son semblable qui est la trame des pages.

Seul, un homme semble traverser toutes ces années, sans avoir à "choisir", sans paraître influencé par ce qui ses passe dans ce bois, c'est le jardinier : mais n'est-il pas le messager entre la nature, les arbres, les saisons et les simples mortels ?



Il y a une musique lancinante dans ces pages comme les redites de paragraphes.



Je ne sais pas trop bien décrire ce livre, je m'en rends compte mais sa lecture vous bouleversera certainement.
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Le Bois de Klara

Les lieux ont une histoire, car ils portent en eux la trace des époques qu'ils traversent et des personnes qui y ont vécu. En les occupant celles-ci ont procédé à la modification de leur 'aspect, cela au gré de leurs fantaisies ou de leurs capacités financières.

Ce roman témoigne de ce passage du temps sur "le Bois de Klara", un lieu situé au bord d'un lac non loin des quartiers Est de Berlin. Il fut, dans les années 1920, la propriété d'une jeune fille, puis de nouveaux propriétaires s'y installèrent qui louèrent ou sous-louèrent l'endroit. Ce fut successivement un espace de détente et de distraction pendant l'entre-deux guerres, un abri durant la 2ème guerre mondiale, un pâturage pour les chevaux de l'Armée Rouge, un enjeu immobilier par suite, et notamment après la réunification de l'Allemagne.

Les paragraphes sont courts et semblables à de petites touches imprégnées de mélancolie. Il y a dans ce roman un personnage "phare" qui paraît immuable, c'est le jardinier, celui qui d'années en années a servi de lien entre les occupants et les époques, mais qui, lui aussi, finira par disparaître.

"Le bois de Klara" est un très beau livre.
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Je vais, tu vas, ils vont

« Peut-être a-t-il encore bien des années devant lui, peut-être seulement quelques-unes. En tout cas, le matin, Richard ne doit désormais plus se lever tôt pour se rendre à l’université. Maintenant, il a le temps, voilà tout. Le temps de voyager, comme on dit. Le temps de lire. Proust. Dostoïevski. Le temps d’écouter de la musique. Avoir le temps, il va s’y habituer, mais il ne sait pas combien de temps ça va lui prendre. Quoi qu’il en soit, sa tête continue de travailler, comme toujours. Que va-t-il en faire, maintenant, de sa tête ? Et des pensées qui, dans sa tête, continuent de penser ? »



Professeur émérite maintenant retraité, Richard tourne en rond chez lui, dans la proche banlieue de Berlin. « Il doit faire gaffe à ne pas devenir dingue, maintenant qu’il reste seul, des jours entiers, sans parler à personne. »

En passant sur l’Alexanderplatz, il ne remarque même pas l’attroupement de migrants ayant entamé une grève de la faim pour réclamer la possibilité d’accéder à un travail. Mais, peu après avoir pris connaissance de ce mouvement, il en vient à adopter ces étrangers comme nouvel objet d’étude en allant à la rencontre de ceux que la ville a rassemblés dans un hébergement provisoire. Il entame ainsi une série d’entretiens avec eux …



Autant le dire tout de suite, il ne m’a pas d’emblée été sympathique, ce vieux professeur (il a soixante-douze ans) désœuvré, dont j’ai noté le comportement un tantinet maniaque. C’est d’ailleurs son attitude routinière, ce refus d’envisager une quelconque surprise dans le cours familier des choses, qui a vraisemblablement conduit sa femme, avec laquelle il n’a pas eu d’enfant, un choix de leur part, à s’éloigner de lui. Et puis, il a parfois des réflexions déplacées, projetant ses propres pulsions sexuelles sur la professeure éthiopienne d’allemand, qu’il imagine avoir envie de coucher avec des migrants, comme lui a envie d’avoir des relations avec elle. Il reste que, progressivement, son intérêt pour les migrants, synonyme au départ d’occupation mais qui se mue en préoccupation au sens large du terme, va l’amener à changer en s’impliquant de plus en plus personnellement et en faisant montre d’une générosité inattendue.



Au fil du roman, les rencontres de Richard permettent d’évoquer les divers parcours conduisant des migrants de différents pays à cette impasse que représente Berlin : les témoignages recensés sont prenants et frappent l’imagination. L’auteure, Jenny Erpenbeck, fait preuve d’un talent manifeste pour illustrer par le biais de personnes de chair et de sang ce que nous pensons connaître mais ne faisons qu’apercevoir, de loin. Quand Richard les approche, c’est nous qui sommes au plus près d’eux, des drames qu’ils ont traversés et de leur certitude actuelle que, tant qu’ils ne peuvent pas travailler, leur vie continue à leur échapper, elle est comme arrêtée.



Il faut noter aussi que le ressenti de Richard et ce qu’il est, s’inscrivent dans son histoire et dans celle de l’Allemagne, si bien qu’il établit parfois des ponts entre ce qu’il vit et ce qu’il a vécu, comme il en fait spontanément entre ce que lui racontent les migrants et la culture classique dont il est imprégné.



« Je vais, tu vas, ils vont » est un roman porté par une écriture hors du commun, dotée par endroits d’une scansion particulière et j’aurais plaisir à lire à nouveau l’auteure, dans un roman me convenant mieux. Dans celui-ci, il m’a manqué une histoire à proprement parler, celle du cheminement personnel du professeur n’étant guère consistante, pour y trouver mon compte : malgré l’intérêt du propos, l’absence de tension narrative m’a menée au bout d’un moment à ressentir un certain ennui. Mais si vos attentes en la matière ne sont pas les mêmes que les miennes, aucune hésitation à avoir : ce livre, riche en (r)enseignements (sur la réglementation européenne en particulier) et en réflexions sur la politique migratoire et la gestion des individus arrivés sur le sol allemand, est d’une indéniable qualité, tant littéraire que documentaire.
Lien : https://surmesbrizees.wordpr..
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Kairos

« Erpenbeck est un écrivain pour ruminants », ai-je écrit après avoir lu Aller Tage Abend et Heimsuchung. Eh bien, c'est moins le cas ici. Ce roman semble offrir une simple histoire d'amour entre une étudiante de 19 ans, Katharina, et un écrivain marié de 53 ans, Hans. Au départ, l'attirance mutuelle passionnée est charmante, mais il devient peu à peu clair qu'il s'agit d'une relation très malsaine, la jalousie et la violence en deviennent une partie intrinsèque, et pourtant les deux restent rivés l'un à l'autre. Cela m'a mis très mal à l'aise. Pour ne donner qu'un exemple : ils ont eu leur premier rapport sexuel sur les tons du Requiem de Mozart, ce qui en dit assez sur le côté obscur de la relation passionnelle.

Une constante dans l'œuvre d'Erpenbeck, et ici encore une fois un élément fascinant, est le lien qu'elle fait avec l'histoire allemande : le roman commence à Berlin-Est en 1986 et se termine après la chute du mur de Berlin ; des flashbacks montrent à la fois les années de guerre nazies et les premières années de la République fédérale et de la RDA ; et au final ce sont surtout les aspects douloureux du Wende de 1989-91 qui sont clairement mis en lumière. L'histoire politique renforce ainsi l'évolution difficile de la relation entre Katharina et Hans, et vice versa. C'est comme si l'écrivain voulait indiquer qu'il n'y a pas de fin heureuse dans les deux domaines, le personnel et le public.

Cela fait de ce livre une œuvre très sombre. Et le style renforce cela : c'est écrit sur un ton très détaché, Katharina et Hans bougent presque machinalement, même sans émotion. À un moment donné, l'histoire m'a même rappelé les images sombres et tranquilles du film « Himmel über Berlin » de Wim Wenders. Tout se passe comme si Erpenbeck voulait souligner le malaise à la fois relationnel et politique du Wende. Je ne peux pas m'en empêcher, mais cela ne me captivait pas vraiment ; malgré les éléments manifestement fascinants du cocktail, c'est un Erpenbeck moins réussi pour moi. Mais elle reste sans hésitation l'une des écrivaines les plus intéressantes du moment.
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Je vais, tu vas, ils vont

Richard est un universitaire, spécialisé en lettres classiques, qui vient juste de prendre sa retraite. Il est veuf, sans enfant et va devoir meubler ses journées. Il a bien les cartons à trier, cartons qu'il a ramené du bureau de l'université. Il a bien quelques rendez vous avec ses voisins, quelques balades, dîners, quelques invitations à des colloques, mais de moins en moins d'ailleurs. ...

Un jour, en passant sur l’Oranienplatz, à Berlin, il croise par hasard le chemin de demandeurs d’asile. Ceux ci se sont installés sur cette place et et leur camps devient un camps de protestation. Cela interpelle un peu Richard et au départ, il décide d'en faire un sujet d'étude. Il va aller à la rencontre de ses hommes, leur poser des questions et "jouer" au sociologue. Il va essayer de comprendre aussi toutes les démarches administratives que ces êtres doivent faire, pour être visibles et pouvoir aller de l'avant. Nous apprenons beaucoup sur ces démarches induites par le fameux accord "Dublin II". Ces directives considèrent malheureusement ses migrants comme des chiffres, des cas qu'il faut faire rentrer dans ces cases. "Il ne faut pas s'étonner, pense t il, si le mot action désigne tout autant nos actes que des titres de propriétés." Richard va alors apprendre à connaître plusieurs hommes et leurs différents parcours de vie, leurs espoirs. Comme lui, nous allons alors rencontrer Ithemba, le cuisinier, Zaïr, Rachid, le lanceur de foudre et serrurier, Osarobo, qui dompte les notes d'un piano, Ali qui rêve d'être aide soignant, Youssouf, qui fait la plonge et rêve d'être ingénieur.. Comme Richard, nous allons connaître la situation dans certains pays africains, comme le Ghana, le Niger, le Tchad, Nigeria... Nous sommes à Berlin et Richard a connu le mur et vivait du côté Est avant la chute du Mur, il connaît déjà les changements de son pays, de sa ville. D'un sujet d'étude, il va en fin de compte apprendre à connaître, apprécier, aider ces différents individus, qui comme tout un chacun ont des qualités, des défauts. "Maintenant aussi, il vivait un moment où il se souvenait que le regard d'un homme était aussi valable, que celui d'un autre. Quand on regarde, on n'a ni raison, ni tort".

Ce livre est touchant par ses différents portraits d'êtres qui vont apprendre à se connaître, à s’apprécier.

Ce livre est très documenté (nous apprenons beaucoup sur la situation de certains pays, ethnies (comme les touaregs), sur les directives mais il reste à la hauteur de ses histoires d'êtres humains, que ce soit Richard, ancien allemand de l'Est, qui va découvrir d'autres mondes et les différents migrants, avec chacun leur histoire, leur façon de subir ses absurdes contraintes administratives, leur espoirs. De belles pages d'échanges, d'espoirs, de désespoirs, de communion, (une belle soirée d’anniversaire où chacun a apporté un peu de soi à partager). Je n'avais jamais lu cette auteure allemande mais continuer de découvrir les différents textes de Jenny Erpenbeck.

#Jevaistuvasilsvont #NetGalleyFrance
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Le Bois de Klara

Dans cette maison proche de Berlin, l'auteur a passé, enfant, de merveilleux étés. Elle y revient un temps clandestinement, une fois qu'elle est vendue, et explore les archives pour retracer son histoire au fil du siècle.

Au départ il y avait le bois de Klara, la fille « bredine » du maire, qui a été vendu en 3 lots. C'était un lieu idyllique, au bord d'un lac, dans une nature enchanteresse, et les propriétaires successifs y ont installé leur demeure. Ils ont adoré ce lieu-refuge, lieu-privilège aussi, qui accompagnait leurs bonheurs et leurs malheurs intimes. Et si leurs vies étaient ballottées voire détruites par l’histoire du pays et ses remous dramatiques, le constant jardinier continuait à tondre, tailler, aménager, couper le bois…



Il y a donc un côté intime du quotidien bienheureux , les promenades, les baignades dans le lac, le bateau accroché au ponton… Les merveilleuses descriptions de Jenny Erpendeck n'ont pas manqué de faire remonter en moi le souvenir ancien de baignades féeriques dans des lacs allemands sauvages… (mais dan s le livre, c'est beaucoup plus subtil que ça). La nature sublime, indifférente aux tragédies, l'homme l'aménage au fil du siècle pour son confort, et son plaisir.



Mais l'Histoire est là qui s'approprie les lieux, et décide des destins. Chaque époque est l'occasion de le rappeler , de façon souvent allusive et habilement contournée : l'architecte nazi, le juif, la femme terrorisée par l'arrivée de l'Armée Rouge, le communiste récompensé de sa fidélité à l'idée dominante,... Tout ce que l'Allemagne a connu de tragédies au fil des ans, avec en fil rouge, les exils successifs et ce qu'ils impliquent d'abandon et de spoliation, où l'on laisse derrière soit des trésors cachés au pied des arbres, mais emmène ce qui ne pèse pas : la musique.



C'est donc une leçon d'histoire très particulière, par petites touches, à la mélancolie poétique, avec des leitmotivs. Si l'on croit longtemps que la maison et la nature vont résister à l'offense de l'Histoire, on apprendra au fil des pages que comme les hommes, les maisons ont leur vie, leur apogée, leur décrépitude et leur mort.



J’ai vraiment été très touchée par ce livre atypique, subtil et audacieux récit du destin du peuple allemand.
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Le Bois de Klara

Sur les bords du lac Tragique



Dans un joli bois une maison posée au bord d’un lac devient le point névralgique de plusieurs destinées tragiques. Des années 1920 à l’après chute du mur de Berlin, J. Erpenbeck évoque l’histoire allemande à l’aide des destins des différents occupants de cette maison. Le jardinier du bois et de la maison constitue le point d’ancrage de cette valse dramatique: de la fuite du nazisme au médecin est-allemand en passant par l’armée rouge...

L’écriture glisse habillement d’une voix intérieure à l’autre. J. Erpenbeck joue aussi avec la répétition poétique et hypnotique pour faire ressentir à la fois la permanence et l’évolution des lieux et des personnages. Une construction déroutante mais efficace au regard du sujet.
Lien : http://xg-melanges.tumblr.co..
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Le Bois de Klara

an-Claude Colbus- Editions Actes Sud

bois de klara.gifUn bois, un lac, un lieu, une propriété, au fil du temps ce bois, ce terrain, la maison construite dessus vont voir se succéder des propriétaires légitimes ou non. Au début du siècle un bois est dévolu à la fille d’un riche paysan, mais Klara n’a pas toute sa tête et le bois à sa mort sera morcelé, découpé, revendu en trois parcelles.

Douze personnages vont se succéder au fil du temps sur cette propriété, tous marqués par les péripéties de l’histoire : exil, déportation, invasion.

Parfois résidence cossue, havre de paix et de bonheur, on ajoute un ponton de baignade sur le lac, un hangar à bateaux, les enfants jouent, se baignent.





Parfois la maison, le lac, deviennent cachettes pour les objets de valeur on "enterre les pichets en étain entre les racines du grand chêne et la porcelaine sous le bosquet de pins" pendant que les chevaux de l’armée Russe s’approprient le jardin. Le bois de Klara change même parfois de nationalité.

Le terrain, la maison sont objet de tractation entre celui qui fuit (famille juive) et celui qui à un moment détient le pouvoir. l’arrivée du communisme apporte de nouveaux changements.

Témoin muet le jardinier, personnage fantomatique et anonyme Il ne fait pas partie de la maison " Lui ne possède ni terre ni bois, il vit tout seul dans une cabane de chasse abandonnée à la lisière de la forêt "

J’ai aimé l’originalité de ce récit, la trame historique à travers un lieu, l’art de Jenny Erpenbeck pour mêler vie quotidienne et grande histoire.

La lecture est parfois freinée par des sauts dans le temps que l’on ne comprend pas toujours, la chronologie n’est pas respectée et cela exige un peu d’attention. L’écriture est belle et j’ai aimé les titres donnés aux chapitres qui désigne le personnage par son métier : l’architecte, le soldat, l’écrivain. L’épilogue est d’une froideur technique qui fait frissonner.


Lien : http://asautsetagambades.hau..
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Le Bois de Klara

Critique de Victor Pouchet pour le Magazine Littéraire



Voilà un roman-cadastre : il se déploie comme on dessinerait sur la carte d'une propriété le tracé chaotique des drames successifs qui s'y sont déroulés. Dans ce bois, qui a appartenu à Klara dans les années 1920, puis fut découpé en trois parcelles, douze personnes s'installent tour à tour. Certaines ont l'espoir de trouver sur les rives paisibles de ce lac, à quelques kilomètres à l'est de Berlin, « un bout d'éternité », un hypothétique « chez soi ». Les soubresauts du xxe siècle ne leur en laisseront pas l'occasion : de l'extermination de la famille de drapiers juifs jusqu'à l'exil de l'architecte menacé par le régime communiste de RDA, le seul habitant à ne pas fuir est ce jardinier étrange qui maintient le rythme végétal des saisons lorsque l'Histoire déracine les arbres de son jardin. Avant la guerre, deux enfants s'amusent sur la pelouse : « Vous jouez à quoi ? - À se faire expulser dans le paradis. » Dans un même texte et sur un même terrain se croisent alors les petites nostalgies d'enfance perdue et les profondes déchirures de l'Histoire.
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Je vais, tu vas, ils vont

Aucun essai, aucun livre historique ne peut avoir autant de puissance que le roman de Jenny Erpenbeck! Et cela pour plusieurs raisons: pour l'écriture envoûtante qui entraîne le lecteur, pour les choix narratifs comme suivre le personnage principal à distance en utilisant la troisième personne. Ainsi l'attitude de ce professeur de lettres classiques, nouvellement à la retraite, face aux migrants surprend d'emblée: au lieu d'adopter l'attitude commune d'indifférence ou au contraire d'empathie démonstrative envers l'étranger qui souffre, il pose des questions, veut connaître le parcours de chacun. Il semble inaccessible aux sentiments mais c'est dans une véritable démarche intellectuelle qu'il arrive à mieux comprendre et à nous faire comprendre les enjeux des migrations d'aujourd'hui. Voilà vraiment la force du livre, montrer comment la vie des migrants a beaucoup de points communs avec la nôtre, comment l'Odyssée d'Homère annonce et reflète les migrations d'aujourd'hui à travers les aventures et les portraits tout en retenue à hauteur d'homme de ces migrants réunis à Berlin. Le professeur fait entrer dans son monde douillet et isolé la réalité crue et violente. Un livre bouleversant.
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Je vais, tu vas, ils vont

La finesse de son écriture ­litanique, le flux continu d’un texte où les tirets indiquant les dialogues disparaissent pour mieux servir la quête d’unité et susciter, sans grandiloquence ni ­culpabilisation, l’empathie avec ces nouveaux « damnés de la terre » que sont les migrants – rehaussée par la ­magnifique traduction de Claire de Oliveira –, tout concourt à rendre ces pages aussi belles à lire que nécessaires.
Lien : https://www.lemonde.fr/livre..
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