AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Jón Kalman Stefánsson (1146)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


À la mesure de l'univers

Petite recommandation : avant d'entamer la lecture du second volume du diptyque de Jon Kalman Stefansson, il est conseillé de lire « D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds ». Les allers et retours entre les époques et les lieux ainsi que l'orthographe complexe des noms des personnages nous obligent à rester bien éveillés mais le plaisir de la lecture est tel que l'effort de concentration s'avère payant.

Ari, venu du Danemark pour rendre visite à son père mourant est plus que jamais présent dans « A la mesure de l'univers ». Métaphores du « combat » entre la poésie qui vous soutient spirituellement et la pêche qui va sortir la nation de la pauvreté, les personnages sont admirables dans leur dureté, leur violence mais aussi leur sensibilité. Ils s'aiment mais ne se comprennent pas toujours comme Ari et Jakob. Les figures de femmes – Margret et la mère d'Ari – sont magnifiques dans leur aspiration à la liberté.

Roman d'ambiance, à l'écriture visuelle et lyrique, le dernier opus de Stefansson nous propose, à la manière impressionniste, des bribes de vie rythmées par des textes de chansons d'amour qui sont comme des petites madeleines.

De loin en loin, les retombées de la politique internationale ne font qu'effleurer la petite île volcanique jalouse de son indépendance et de sa singularité.

Superbe !

EXTRAITS

- Les poèmes sont bien utiles, ils peuvent vous servir de couverture quand le froid enserre le monde, ils peuvent être des grottes à l'écart du temps, des grottes dont les parois sont ornées d'étranges symboles, mais ils sont une piètre consolation quand vos os sont éreintés, quand la vie vous a éconduit ou quand, le soir, votre tasse de café est la seule chose qui vous réchauffe les mains.

- A quoi servent les poètes s'ils ne sont pas capables de nous aider à vivre ?

La distance qui sépare l'amour du bonheur est identique à celle qui le sépare du malheur.

- Laïka, une chienne errante de trois ans, est à bord d'une des fusées. Elle grogne et aboie, effrayée par les étoiles, solitaire, si loin de la vie, au service de la science.

- Si nous sommes incapables de parler, le silence que la mort laisse dans son sillage devient, avec le temps, plus vaste et plus pesant que la vie elle-même.


Lien : http://papivore.net/litterat..
Commenter  J’apprécie          40
À la mesure de l'univers





A baz'art on aime beaucoup l'univers de Jón Kalman Stefánsson aussi intime que lyrique et dense.

« A la mesure de l’univers » poursuit la chronique familiale débutée avec le sublime et flamboyant « D’ailleurs les poissons n’ont pas de pieds qu'on avait découvert en 2015.



ON y retrouve Ari où l'on avait quitté précédemment ,à la recherche de son passé entre Keflavik et le Norđfjörđur,et l'on

revoit Đorđur, Oddur,Margret,Gunnarson et les autres avec des alternances entre passé et présent que Jón Kalman Stefánsson maitrise avec un brio assumé.



En fait il n'y a que deux solutions : vous connaissez les précédents ouvrages du romancier, « Entre ciel et terre » « La tristesse des anges » et « Le cœur de l’homme » et bien évidemment ce « D’ailleurs les poissons n’ont pas de pieds » et vous êtes déjà en train de dévorer « A la mesure de l’univers" et cette chronique ne sert à rien, ou alors vous n’avez rien lu de ce grand auteur islandais et si c’est le cas fermez votre ordinateur courrez chez votre libraire préféré et plongez-vous sans tarder dans la prose ample et poétique de ce formidable romancier.



Ici sans doute l’écriture y est plus apre que d'habitude et l'amplitude plus contenue, mais on y retrouve cependant la même ambiance et les mêmes personnages qui nous avaient tant séduit .



Jon Kalman Stefansson nous embarque toujours avec la même maitrise dans l’histoire de son pays qu’il aime tant et qu'il nous fait tant aimer.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
Commenter  J’apprécie          270
À la mesure de l'univers

Une formidable saga familiale, que je poursuis après la lecture du premier opus «D'ailleurs les poissons n'ont pas de pieds».

Aux portes d'un passé, douloureux et magique à la fois, Jon Kalman Stefánsson nous entraîne d'une époque à une autre, d'une tranche de vie à une autre, d'une ambiance joyeuse à une autre bien plus sombre, et il le fait si bien, avec tant de fluidité et de souplesse, que les pages de ce roman sont une véritable invitation au voyage.



J'ai retrouvé avec plaisir sa plume poétique et délicate et cette atmosphère si unique si intense si calme et apaisante, si troublante parfois, qui se baigne d'une si belle musicalité dans laquelle, une nouvelle fois, je me suis délectée.



Il nous parle de la vie, ses moments magiques, ceux tragiques et ceux plus joyeux, dans lesquels on s'abandonne, ses désespoirs, ses déceptions, ses amours meurtries, ses plaies ouvertes et douloureuses, et ses espoirs aussi, dont celui de trouver la bonne place dans ce monde, sa place. «Chaque homme doit trouver sa place dans la vie, faute de quoi il est malheureux. C'est douloureux de voir un être humain à la mauvaise place dans la vie.»



Les passages avec la mère du narrateur, Ari, sont empreints d'une vive émotion et m'ont emportée bien loin, dans le monde des souvenirs...



Le tourbillon de la vie par Jon Kalman Stefansson, c'est quelque chose !



Une expérience littéraire belle et intense ! À tenter...à renouveler, pour ma part ;-)



Petite anecdote, en écrivant ce billet, j'ai relu beaucoup de passages, notamment ceux qui suivent, et pour vous témoigner à quel point l'écriture de Stefánsson est un voyage, où l'on oublie le temps, rien qu'en relisant ces passages, il m'a embarquée dans son monde, à tel point, que ma fille, d'un coup de téléphone (cruel ;-) m'a rebranchée à notre terre et m'a gentiment signalé qu'elle poireautait depuis dix minutes devant le gymnase. J'en avais oublié ma fille !! C'est aussi ça l'effet Stefánsson...
Lien : https://seriallectrice.blogs..
Commenter  J’apprécie          252
À la mesure de l'univers

Comme pour chacun de ses livres, la lecture de Stefansson est un enchantement. Son écriture poétique décrit à la perfection l'existence laborieuse de ces habitants de l'Islande aux conditions de vie plutôt difficiles, marqués par des générations de pêcheurs, tirant leur existence de la mer, du poisson, du rêve. Des vies parfois brisées, quelques moments de douceur, de tendresse, environnés par le silence de ceux qui ne savent pas parler, par la violence parfois, la trahison, la mort d'un enfant, l'incompréhension des proches, la folie…



Deuxième volet d'un diptyque, il continue l'exploration de l'histoire d'Ari à travers plusieurs générations, mêlée à celle de l'Islande. Un combat pour l'accomplissement des individus comme d'un pays, trop longtemps dépendants, d'une langue pas assez portée par la littérature, que l'auteur défend admirablement. A travers lui les voix d'hommes et de femmes trop longtemps oubliés, des paysages sublimes bien que très austères, des vies rudes mais traversées d'émerveillement comme celui de la grand-mère Margret découvrant le ciel étoilé à travers un télescope…



Le texte nous porte, plein de ces réflexions profondes sur la vie, de ces évidences essentielles qu'on ignore alors qu'y réside la sagesse. Et alors tout s'illumine, la complexité de l'âme humaine devient fluide, les sentiments s'expriment même s'il semble être un peu tard, mais il n'est jamais trop tard tant qu'on est vivant…

Commenter  J’apprécie          246
À la mesure de l'univers

J'ai lu ce roman un certain temps après le premier volet et j'ai eu un peu de mal à revenir dans cette histoire familiale. La plume de l'auteur est toujours aussi belle. LEs mots sont magnifiques. a tel point que je renonce à produire ne serait-ce qu'une seule citation tant l'écriture en elle même est marquante. J'ai rarement lu un auteur capable d'autant de poésie. Félicitation au traducteur de nous avoir rendu cela avec talent.

On continue donc à suivre cette saga familiale islandaise où le personnage central que l'on rechigne à appeler héros croise ses anciens camarades, ses anciennes amours et les membres de sa famille. Dans cette Islande là, la vie est dure. La mort rôde aux coins de rue ou sur la mer, les parents peuvent être violents, 'alcool noie tout ou presque et pourtant, l'amour filial est puissant...
Commenter  J’apprécie          51
À la mesure de l'univers

Un livre difficile à résumer tant les histoires et les époques s’imbriquent les unes dans les autres, à la manière de poupées russes. Au centre de l’histoire, le personnage d’Ari, que l’on découvre enfant orphelin de mère puis adolescent travaillant dans une usine de poissons et enfin adulte désabusé, de retour en Islande après avoir vécu plusieurs années au Danemark. Autour de lui gravitent les histoires familiales de son père, de ses oncles et tantes ainsi que de son grand père. Une chronique familiale complexe et torturée sur fond de paysages sauvages et solitaires.



"Ils se tiennent là, l’un face à l’autre, et n’ont pas la moindre idée de ce qu’ils doivent se dire, rien ne leur vient à l’esprit, tous deux sont des spécialistes du silence, qui se retrouvent ici pour comparer leurs versions".



« A la mesure de l’univers » s’est révélé être un livre dense et exigeant qui m’a apprivoisé petit à petit, parvenant à me prendre dans sa toile pour m’entraîner dans ses méandres. Ainsi, malgré les difficultés liées à l’alternance des époques et à la multitude de personnages aux prénoms typiquement islandais, je suis finalement parvenue à me laisser happer par cette saga familiale du grand nord. J’ai ressenti à la lecture un goût de bout du monde, une terre loin de tout, presque abandonnée, coupée du reste du monde et peuplée de personnages brutes au tempérament sauvage. L’auteur a su créer une atmosphère surannée, comme figée hors du temps, une ambiance qui se fait presque écrasante lors des description de paysages grandioses et inquiétants. Ainsi, progressivement, la menace se précise, les histoires s’épaississent et prennent corps, se font lourdes, plombantes mais c’est déjà trop tard! Prise au piège, je poursuis ma lecture au côté d’Ari, personnage secret et distant que j’ai désormais envie de percer à jour.



J’ai vraiment été séduite par la qualité de l’écriture de Jon Kalman Stefansson et par ses mots ensorcelants. Des mots qui vous enveloppent, vous endorment pour mieux vous frappez en plein cœur et ébranler votre âme. C’est âpre, rude, avec du tempérament : une oeuvre de caractère!
Lien : https://unlivredanslapoche.w..
Commenter  J’apprécie          10
À la mesure de l'univers

Lorsque j'ai décidé de lire A la mesure de l'univers de Jon Kalman Stefansson, je ne connaissais cet auteur que par les critiques élogieuses que j 'en avais lues sur Babelio.

J'avoue que j'ai été surprise lorsque j'ai commencé la lecture du roman et qu'il m'a fallu opérer un certain lâcher-prise avant de me laisser entraîner dans l'histoire de cette saga familiale sur trois générations. Stefansson balade sa lectrice ou son lecteur à différentes époques et opère un télescopage temporel qui va de l'entre deux guerres à l'époque actuelle. Même chose pour les lieux : Reykjavik, Keflavik - petite ville où débarque le héros principal Ari sur la demande de son père mourant, Jakob - parfois aussi quelque part dans l'univers...

Pourquoi ai-je accepté aussi facilement de perdre pied et de suivre Ari dans ce retour vers ses racines familiales ?

Les raisons sont multiples. Mais la plus évidente est la force et la densité de l'écriture de Stefansson lorsqu'il évoque ses obsessions majeures.

Celle de la mort, présente dès les premières pages du livre dans une très belle scène où une petite fille demande à sa mère si ça fait mal de mourir. Difficile dans une évocation comme celle-la de ne pas tomber dans le pathos ou le mièvre. Eh bien, non, Stefansson nous offre un tableau à la fois tragique et d'une incroyable douceur.

La violence physique exercée sur les femmes, sur les enfants ou tous ceux dont le seul défaut est d'être différent, irrigue également tout le roman et scande littéralement tous les moments forts.Mais il ne s'agit jamais d'une violence gratuite ou dépeinte avec une certaine complaisance. Stefansson n'en donne pas non plus une explication simpliste. Bien sûr il fait la part belle à l'alcoolisme apparemment omniprésent en Islande, sur fond de misère sociale. Ce n'est pas la seule explication. En arrière-plan, derrière les gifles et les coups assénés aux plus faibles, se dessine l'image d'une virilité masculine abusive qui ne trouve pas d'autres moyens que cette violence incontrôlée et incontrôlable pour exprimer son désarroi ou son mal-être. Et là encore comment ne pas être profondément ému lorsque le père d'Ari, Jakob, va accepter de laisser couler des larmes salvatrices : celles qu'il n'a jamais pu verser à la mort de sa femme... et qu'il va verser dans les bras de sa dernière compagne, Anna. Un très beau moment romanesque pour la lectrice ou le lecteur qui n'en pouvait plus de la violence de cet homme tout en tensions et non-dits.

Les figures féminines sont d'ailleurs de très beaux personnages dont la fragilité et la force cohabitent dans une belle promiscuité. J'ai été vraiment touchée par Margret, la grand-mère d'Ari, une femme vibrante, courageuse mais aussi dévoreuse de vie car elle n'hésitera pas à aimer deux hommes en même temps, ce qui dans les années trente n'était pas vraiment dans les moeurs surtout pour les femmes... L'amour transgressif est très présent dans le roman et il fait un beau contraste avec l'amour mère-enfant, leit-motiv, qui revient en boucle, notamment, dans l'évocation des relations d'Ari avec sa mère, morte alors qu'il avait cinq ans. Cela donne lieu à de très beaux passages fantasmagoriques, qui, dans une sorte de ralenti, évoquent les derniers moments de complicité passés entre eux. Moments vécus ? rêvés ? fantasmés ? On ne sait pas, on perd pied mais pour mieux se retrouver dans une autre dimension : "celle où l'univers nous traverse". C'est beau, consolant, apaisant et quel merveilleux contrepoids à la noirceur et au désespoir également omniprésents.

Dernier clin d'oeil de Stefanssoon à la fin du roman : le narrateur s'en va, quitte Ari ou plutôt il disparaît sans qu'on sache là non plus s'il a vraiment existé ou s'il n'a été tout au long de l'histoire qu'un double d'Ari et non un parent comme on le pensait. Trait d'humour habilement glissé et qui laisse le lecteur sur le chemin avec ses questionnements, ses doutes et peut-être l'envie de lire la suite des aventures d'Ari ;-)
Commenter  J’apprécie          525
À la mesure de l'univers

Deuxième tome de la Chronique familiale commencée avec "D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds", ce livre-ci raconte la suite du retour d'Ari en Islande, ses retrouvailles avec sa famille et ses amis, ses souvenirs d'enfance dans la petite ville de Keflavik dont le prélude nous prévient qu'il s'agit d'une "ville excentrée et surprenante, ses quelques milliers d'habitants, son port vide, son chômage, ses concessionnaires automobiles, ses camionnettes à hamburgers, et cette terre si plate que, depuis le ciel, on dirait une mer étoilée."



Le père d'Ari, Jakob, celui qui n'avait jamais pris la mer par obéissance à sa mère, va mourir ; tous les siens, vivants ou disparus sont présents dans sa vie, et c'est un peu tardivement qu'il comprend ses erreurs et comment il aurait pu vivre autrement. Ari l'ancien poète devenu éditeur, laisse remonter à sa mémoire des souvenirs, en désordre, comme lorsque l'esprit vagabonde d'une pensée à une autre ; sa mère morte jeune, son père qui ne parlait pas, des tantes plus qu'originales et des virées entre amis...



Comme à son habitude, l'auteur développe l'histoire qu'il veut raconter en nous parlant de moments choisis et en allant et venant tout au long de l'échelle du temps, entre jadis et maintenant ; il est question d'amour fou, d'écriture, de femmes battantes, de la liberté que l'Homme trouve en mer, du poisson qui fait vivre, de poésie surtout... Obsédé par la mort, une certaine violence qui peut s'abattre sur les plus faibles, les problèmes d'alcool et la magnificence de la Vie, J. K. Stefánsson nous entraîne dans son univers grâce à une écriture majestueuse pleine de lyrisme.



Et c'est beau, c'est très très beau ! "A vous écorcher le coeur de bonheur" (H. Artus, Lire)



Début du Postlude (p 459) : " Le matin se lève sur le monde. Il se lève toujours, quelque part, la lumière ne meurt jamais, mais certains restent dans les ténèbres, ils y disparaissent, et plus rien ne rappelle leur souvenir quand la clarté du jour arrive, si ce n'est la douleur de leur absence."
Commenter  J’apprécie          40
À la mesure de l'univers

Lire, c'est toujours une expérience de pensée. Aussi, parcourir « A la mesure de l'univers » de Jón Kalman Stefánsson, c'est accueillir d'autres parlers, d'autres caractères et d'autres paysages. Et c'est, confronté à cette altérité, reconnaitre étonnamment en soi des savoirs, des émois absolument universels. Notre simple vécu, le plus souvent, ne permet pas de rendre compte de nos expériences les plus fortes, de leur impact sur notre être. Parfois, seuls la fiction et un ailleurs peuvent suggérer l'indicible. Aussi, empiler des histoires simples, des personnages inconnus permet de décrire ici une réalité infiniment complexe.





Le quotidien de glace et de roches de l'Islande, de l'ile battue par les vents furieux de l'Arctique, c'est l'océan honni et désiré. Les communautés pauvres et taiseuses y sont minuscules, et les destinées à la mesure de paysages sans arbre. Tous les êtres semblent liés par d'obscures relations, par de puissantes habitudes collectives et surtout par l'inextinguible passion de la littérature. Dans ces pages, les souvenirs de trois générations, fragmentés en courts chapitres, se mêlent. Les viols, les poèmes, les beuveries, les amours, les incompréhensions et les ruptures crient la mort au passage. « le matin se lève sur le monde. Il se lève toujours quelque part, la lumière ne meurt jamais, mais certains restent dans les ténèbres, ils disparaissent, et plus rien ne rappelle leur souvenir quand la clarté du jour arrive, si ce n'est la douleur de leur absence» … et l'écriture.





La voix de ce splendide récit n'est pas celle d'Ari, le personnage principal du roman. Ballotté dans le courant des péripéties anciennes et présentes, drossé par les vagues du souvenir, il ne fait qu'apparaitre et disparaitre au gré des chapitres. Si le narrateur, lui, appartient bien à la petite communauté de Keflavik, s'il travaille à la poissonnerie, s'il se retrouve au bar ou à la table familiale, il demeure cependant inconnu du lecteur – un compagnon, un membre de la famille d'Ari ? L'histoire complexe est ainsi merveilleusement composée et très lyriquement racontée.





Ari, rentre à Keflavik, une petite ville pauvre de pêcheurs et d'employés désormais interdits d'océan et de base étatsunienne. Sur ces terres de l'extrême sud-ouest de l'Islande, enserrées par les flots et séquestrées par les glaciers, il retrouve de vieilles connaissances et se ressouvient. Adulte, il est le dernier maillon d'une longue chaine où se succèdent et s'engendrent – des légendaires grands parents à aujourd'hui – des générations vouées au poisson. Ari n'a pas su parler à ses proches en leur temps, il ne parviendra pas d'avantage à échanger avec son mourant de père au présent. Les destins inaccomplis, interrompus d'un grand nombre de personnages aux noms imprononçables sont la grande affaire de ce récit. «Tu ne sais donc pas que c'est un devoir de se servir des dons qu'on a reçus. Celui qui a une voix doit chanter. Celui qui a un cerveau conçu pour calculer doit résoudre des équations complexes. Celui qui comprend l'âme humaine doit devenir psychologue ou pasteur et consoler les autres. Personne ne t'a donc jamais dit que celui qui ne se sert pas de ses dons trahit la vie, qu'il se trahit lui-même et se condamne à mourir malheureux ? » Malheureux, Pordur ne sera pas grand poète et Jakob pas d'avantage pêcheur … L'empathie de l'auteur pour ses fourmillantes créatures est évidente, et aucune n'est laissée pour compte, toutes jouissent ici d'une égale dignité. Les existences, même les plus misérables, valent la peine d'être vécues. Et ce sont d'ailleurs les magnifiques personnages de femmes, mieux que les hommes trop souvent faibles dans leurs coquilles de muscles, qui sont à Keflavik le sel de la terre.
Commenter  J’apprécie          60
À la mesure de l'univers

« A la mesure de l’univers », c’est la suite de « D’ailleurs, les poissons n’ont pas de pieds ».

Dans ce roman Ari qui vit au Danemark rentre en Islande, à la suite d’un message de son père qui lui annonce sa fin proche.

A son retour il retrouve des lieux, des personnes et du coup des souvenirs remontent à sa mémoire.

Nous allons suivre l’histoire de sa famille depuis ses grands-parents jusqu’à aujourd’hui, ainsi que l’histoire de ses amis.

Ce qui est passionnant c’est que cette histoire est fortement impactée par l’histoire de l’Islande.

On va donc voir des personnages changer avec l’évolution économique du pays. Leur vie se déroule à Keflavik, ancien port de pêche où le poisson était transformé, devenue une ville de chômeurs.

Et cette évolution se traduit par de l’alcoolisme, de la violence et des drames.

C’est très bien fait, car le roman n’est jamais démonstratif ou théorique. C’est au fil de la lecture qu’on comprend l’impact des bouleversements économiques sur la vie des personnes.

Il n’y a pas que ça bien sûr. Les personnages évoluent aussi au fil du temps parce que c’est la vie, parce que le temps passe, distille l’ennui, la lassitude.

Tout cela est raconté de manière très lyrique, les phrases sont amples, le vocabulaire est riche. En lisant le livre je comprends que la poésie est importante en Islande. C’est perceptible dans le texte et c’est très bien écrit.

Je recommande les deux livres à lire lentement en les savourant.

Commenter  J’apprécie          10
À la mesure de l'univers

Je suis retournée voir mon commentaire sur le premier tome de ce dyptique, D'ailleurs les poissons n'ont pas de pieds de Jon Kalman Stefansson, question de me rappeler mon ressenti. Un certain laps de temps s'est écoulé avant que j'entreprenne la lecture du deuxième volet; l'urgence n'y était pas, contrairement à certaines sagas, je pense entre autres, à L'Amie prodigieuse d'Elena Ferrante. Mais je m'étais promis de continuer avec À la mesure de l'univers et curieusement cette fois-ci, les personnages se sont imposés sans effort et le récit m'a emportée beaucoup plus fortement que dans le précédent tome.

L'écriture y est toujours aussi belle, évocatrice et poétique; l'auteur a réussi à me transporter dans son univers islandais au climat rude et intense, à travers les époques et les destinées pas toujours heureuses des membres d'une famille de pêcheurs.

Une réconciliation bienvenue avec un auteur que je continuerai à lire.
Commenter  J’apprécie          110
À la mesure de l'univers

Car la littérature nordique, ce n’est pas que des polars…



La suite « D’ailleurs, les poissons n’ont pas de pieds », une saga islandaise du 20e siècle.



Sur un coup de tête, Arni est parti vivre au Danemark et est devenu éditeur. Sur une lettre de son père mourant, il revient en Islande des années plus tard. Les événements se mêlent aux souvenirs de jeunesse, les amours, les amis et la société islandaise.



Un roman d’émotions et d'introspection, mieux vaut avoir lu le premier tome, car les histoires sont tout à fait imbriquées.



Une belle écriture (chapeau à la traduction), un roman intense, de plongées dans l’âme humaine et de réflexions sur le destin.

Commenter  J’apprécie          340
À la mesure de l'univers

" 'Qu'adviendra-t-il de la justice et de la beauté si les idéaux périssent ? ' Une femme qui écrit comme cela doit être publiée. Et cette famille va devoir se décider à entendre sa voix dans le monde."



D'ailleurs, Les poissons n'ont pas de pieds et A la mesure de l'univers forment une saga familiale en deux tomes et nous plongent dans l'Islande des dernières décennies.



Comme dans Asta, Jon Kalman Stefansson se joue de la continuité et emporte son lecteur à travers les époques, les paysages et les personnes sans se soucier d'une quelconque linéarité. Le fil de ses réflexions et de sa poésie nous guide dans les fjords islandais, au cœur de la nature et de l'âme humaine, dont les tempêtes se confondent souvent.



J'ai retrouvé avec bonheur la plume de Stefansson, ses incises, ses envolées poétiques comme des descriptions parfois crues et réalistes. Plus encore que dans Asta, j'ai été saisie par la justesse avec laquelle Stefansson parle de l'humanité, des relations familiales, de ce qui se transmet de génération en génération. Il suffit d'une scène à Stefansson pour dire tout l'amour qui lie une mère à son fils, le désir vibrant et les réserves d'une femme, les désillusions d'un homme.



"N'y a-t-il donc, en fin de compte, aucune limite à ce qu'on peut changer, la lâcheté serait-elle la plus grande des entraves ?"



La façon dont il parle des femmes, de leur destinée si étroitement liée à la place que l'époque leur réservait m'a tout particulièrement touchée.



"Nous avons toujours été laissées pour compte, nous sommes cantonnées à être des mères, des femmes au foyer ou des prostituées, et quand on ose sortir de ces rôles, ce n'est jamais bien vu. C'est pour cette raison que nous sommes forcées d'agir comme des résistantes, forcées d'emprunter des voies secrètes, d'atteindre la maturité et de rassembler nos forces avant de paraître au grand jour. Sinon ils t'étouffent dès la naissance. Pas forcément par méchanceté, mais tout simplement par la bêtise de intrinsèque à la domination."



Une fois de plus, Stefansson a su me saisir en plein cœur avec ce style si particulier qui atteint des sommets de poésie tout en restant intimement uni au récit.



"Ce que le monde peut être idiot de croire qu'il suffit d'une seule unité de mesure, de penser que la nuit est aussi longue en minutes pour le solitaire que pour les amoureux, que le système métrique ait l'imagination et la faculté de compréhension nécéssaires pour mesurer toutes les distances, quelle que soit leur nature, dans l'univers de l'être humain ; comme si la distance entre cette lande et Reykjavic était identique pour de jeunes pieds en sang et pour, par exemple, une voiture bien chauffée."



Céline
Lien : https://enlivrezvous.typepad..
Commenter  J’apprécie          30
À la mesure de l'univers

"À la mesure de l’univers est la suite du roman D’ailleurs, les poissons n’ont pas de pieds". J'ai piqué cette "présentation de Babelio. Il y avait plus que cette phrase pour présenter ce roman, mais je n'ai pas voulu en dire plus. Je viens de finir cette lecture. J'aurais pu finir il y a plusieurs jours, quand il ne restait plus qu'une cinquantaine de pages, qu'en général je dévore en une heure...mais non. Depuis le début, je n'ai pas raté une seconde de battement pour prendre ce livre et lire un paragraphe, une phrase, un mot....ou juste le saisir pour permettre -peut être- à son essence de se communiquer à moi. Pourtant, proche de la fin, j'ai traîné. C'était carrément pathétique, vers les toutes dernières pages, de me voir lire une phrase puis prendre mon téléphone et jouer à Candy Crush!!!!. Parce que je ne voulais pas le quitter. Je ne vais pas vous dire de quoi il s'agit dans cette suite, parce que ce n'est pas le plus important. Il n'est pas question d'intrigue, de suspense ou de quoique ce soit de ce genre. C'est juste une histoire. Et paradoxalement, c'est à cause de ce que Kalmann Stefansson arrive à faire avec " juste une histoire"qu'il m'est impossible d'en dire plus, pour ne pas nuire à ce roman. Tous les matins, en prenant ma voiture pour aller au travail, la même pensée me persécute et me torture: " Tous ces gens avec qui je vais passer la journée, et ce depuis des années....ont ils conscience d'autre chose? sentent-t-ils autre chose? vivent-t-ils autre chose? sont-ils autre chose? Autre chose que cette bassesse, que ces rikikis du quotidien auxquels ils semblent consacrer toute leur énergie vitale? Est ce que des fois, même rarement, ils leur arrive de regarder le ciel pour une autre raison que de savoir le temps qu'il va faire? A la fin de la journée, la réponse est non!. Jon Kalman Stefansson me donne alors de l'espoir. Dans ces romans, il parle des gens du "commun" comme on dit, ceux qui sont écrasés par la vie, et à plus forte raison dans un pays dont les conditions de vie sont aussi difficiles qu'en Islande. Il raconte leurs préoccupations de base: se nourrir, s'habiller, s'amuser un peu, survivre....mais, au milieu de tout ça, il dévoile que chacun d'eux, au moins à un moment de sa vie, peut être à la toute dernière seconde de son existence, regarde son âme, écoute ses exigences, étend ses ailes et dévoile qu'il est plus que ça, qu'il a une part de divin qui n'a peut être pas eu l'occasion de s'exprimer, écrasée par la vie, mais qui existe et se revendique humaine, sensible...belle. Dans ces romans, flotte toujours une sensibilité, rehaussée ici et là par l'art, la littérature et l'écriture essentiellement, mais aussi la musique, la poésie surtout, ou tout simplement par le simple fait de se poser un instant, et d'avouer que tout est beau....sauf peut être la mort. Mais pour l'auteur, les morts, malgré la douleur qu'ils engendrent en disparaissant, arrivent à trouver le moyen de consoler ceux qui restent, ceux qui les pleurent, ceux qui ont raté l'occasion de vraiment les connaitre, en laissant en héritage un souvenir,un trait de caractère, un journal intime, des lettres ou un poème. J'ai rarement lu des textes aussi beau que ceux de Jon Kalman Stefansson. Et il m'est difficile d'expliquer comment, car son style est simple : des allées-retours entre plusieurs époques, des phrases dont le centre purement narratif est toujours entouré par une réflexion, une sensation ou une émotion, ce qui fait qu'on flotte en permanence, sans tomber dans le gnangnan....jamais. C'est toujours parfaitement juste. Voilà, je pourrais continuer comme ça longtemps, mais j'arrête là. Prochaine quête : Asta.
Commenter  J’apprécie          40
À la mesure de l'univers





Si vous avez aimé "D'ailleurs les poissons ont des pieds", il faut absolument mettre la main sur cette suite !

J'ai vu que l'on pouvait aisément lire ce roman sans avoir lu le premier avant, mais je trouve cela dommage, car on perd toutes les révélations et on s'attache si fort aux personnages qu'il me semble important de continuer à suivre leur aventure.



L'auteur continue sa chronique familiale en Islande, mais cette fois, l'espoir et les paroles sont de mise. Ari va confronter son père, il va tenter de se rappeler sa mère et essayer de comprendre qui est cette famille qui remonte jusqu'à Oddur et Margret.



Un roman tout aussi beau et fort que le précédent, je les recommande chaudement !
Commenter  J’apprécie          30
À la mesure de l'univers

Je vais la faire courte :

Je ne saurais rien dire de plus au sujet de ce roman

que je n'ai déjà dit à propos du premier tome de la série consacrée à Ari, D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds.

Rien dire.

De plus.





Ah si. Une chose. Non, deux ! Trois…





1. Il y a plus de magie entre les pages d'À la mesure de l'univers que dans toutes les étoiles de toutes les galaxies réunies.

2. En déguster les mots relève plus du plaisir d'enfoncer ses dents dans la brûlante tendresse du croissant que de celui de la lecture à proprement parler.

3. On lit à la page 410 : « Tu te rappelles ce qu'elle a écrit, environ un an avant de mourir, personne n'a plus envie de changer quoi que ce soit, si ce n'est, de temps en temps, de coiffure, et la manière dont les chaises sont disposées dans le salon ? Qu'adviendra-t-il de la justice et de la beauté si les idéaux périssent ? ».





Alors lisons !,

comme si c'était le dernier jour.

Pour que jamais Justice et Beauté ne se voient déroutées.

Lisons pour les vivants et puis les morts,

que toujours ils nous guident vers ce que la vie a de plus doux.





Mais déjà l'envie de m'égarer dans une infinité d'éloges revient,

plus immense que la mer qui borde le Fjord et emporte les hommes.

Et cela n'aurait pas vraiment d'intérêt.





Pour goûter À la mesure de l'univers, il faut avoir cédé au tome 1, D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds. Et pour cela, je ne saurais mieux dire qu'il y a quelques jours.

Emparez-vous de cette série comme on entame une traversée de l'océan à la nage.

Une traversée jusqu'à la lune,

éclairée par les mots d'un nuage en pantalon.




Lien : http://www.mespetiteschroniq..
Commenter  J’apprécie          81
À la mesure de l'univers

Quel roman magnifique !



Un récit où il est question d'amour, et de mort, de musique, beaucoup, de poésie aussi, beaucoup – il faut dire que les Islandais y portent une attention toute particulière, beaucoup plus que nous, qui avons perdu de vue l'importance d'en lire. Il souffle un vent de nostalgie sur ce roman qui parle de destinées, d'enfant orphelin, de morts injustes, des étoiles la nuit, de l'alcool qui entraîne la violence et les coups parfois sur ceux ou celles qu'on aime.



On va croiser Margret et Oddur, le grand-père d'Ari, les femmes Veiga, Lilla, Sigga, mais aussi Tryggvi, et Jakob, le père d'Ari, Anna, sa dernière compagne, mais aussi Pordur, Svavar, Arni et bien d'autres.



Ari rentre en Islande pour voir son père Jakob, qui va bientôt mourir. On découvre alors Reyflavik, une ville de pécheurs, parce que pécher du poisson c'est important.

« Si nous oublions de tirer le poisson de la mer, ce poisson qui compte de plus en plus et qui, bientôt, sera plus important que l'agriculture, eh oui, qui l'eût cru, nous peinerons de plus en plus à survivre et notre rêve d'indépendance ne se réalisera pas. » pense Oddur, alors que son fils Pordur, très doué pour l'écriture, rêvasse sur le bateau où Oddur règne en maître. Et c'est le drame. « Oddur souffle. Il s'approche lentement du poisson que Pordur vient d'abîmer, l'examine, l'attrape par la nageoire caudale, puis s'avance sans hésiter vers son fils qui lève les yeux, la tête ailleurs, toujours ce sourire aux lèvres – et là, Oddur le frappe. de toutes ses forces. L'énorme poisson rebondit sur la joue de Pordur si bien que la chair de l'animal est endommagée, elle éclate, il le frappe si fort que Pordur fait tomber son crocher et manque de passer par-dessus bord. Puis, c'est le silence. »



Jon Kalman Stefansson entremêle les époques – on suit trois générations d'islandais, des Fjords de l'Est jusqu'à Reyflavik, qui va beaucoup changer elle aussi, en une sarabande qui nous fait comprendre les connections, les legs qu'une génération donne à l'autre. le destin de ceux et celles qui avaient en eux ce besoin d'écrire, très souvent contrecarré comme Pordur face à son père Oddur. Parfois on n'est perdus : dans le même chapitre sont entremêlés plusieurs époques, mais ce sont comme les maillons d'une longue chaîne qui défile sous nos yeux, une continuité de destin dans cette saga familiale qui n'en finit pas.



Il y a des personnages de femmes magnifiques. Qui rêvent, qui aiment, qui lisent et écrivent, qui bataillent dans ce pays où le vie est dure et cruelle, qui ont des enfants, les chérissent, et disparaissent parfois beaucoup trop tôt.



Et puis il y a tous ces titres de chapitres, j'aimerais tous les citer : « quel fardeau la mort est pour la vie …aussi longtemps que quelqu'un est vivant », Qu'adviendra-t-il de la justice et de la beauté si les idéaux périssent ? » « Quelque part, à proximité de l'univers », « Quelqu'un pleure et Elvis a le pouvoir d'ouvrir les coeurs » « Comment est-il possible de créer une telle quiétude » ...



Encore un mot pour signaler une originalité sur la forme : l'auteur n'est jamais loin dans ce récit. Il se glisse auprès d'Ari, nous prend par la main pour nous entraîner à sa suite, et se retire, à la fin, comme à regret. « Je vois tout cela », nous dit-il, « la pierre qui devient terreau, Ari qui se gare devant la maison où sa belle-mère vit avec Mani. Je vois tout cela tandis que je m'unis peu à peut à l'averse de neige. Et je m'unis si radicalement à elle qu'on dirait que jamais je n'ai vraiment existé. » … Comme l'auteur, on se retire sur la pointe des pieds à la fin de ces 438 pages.



Il y aurait encore tant à dire pour vous convaincre de découvrir l'écriture de Jon Kalman Stefansson. Parler de nostalgie, de personnages très loin géographiquement, mais tellement proches qu'on croit, en fermant le livre, les avoir côtoyés de près.

Magnifique, oui, vraiment.


Lien : https://versionlibreorg.blog..
Commenter  J’apprécie          496
À la mesure de l'univers

Et bien non, j'ai trouvé que ce deuxième tome était de trop. La fin avait conclu toutes les intrigues, premières et secondaires. Ici, le père d'Ari est malade, et celui-ci tente de lui parler vraiment, profondément une dernière fois. On suivra aussi Margret, dont la trajectoire a un peu évolué : de femme sans doute malade (peut-être bipolaire, dans le précèdent tome, avec une alternance entre mélancolie et euphorie), elle devient femme qui s'émancipe, en suivant son coeur auprès d'un instituteur. On se questionne : est-ce que Stefansson a voulu coller plus près à son personnage, quitter le qu'en dira-t-on, la folie si facilement attribuée aux femmes libres ? ou est-ce l'inspiration qui l'a guidé vers d'autres contrées ? On ne saura pas, et ce n'est pas bien grave. En revanche, ce qui l'est, c'est que la légèreté du précédent tome a disparu, que celui-ci est à nouveau plombé par une lourdeur mélancolique qui me rappelle plus la trilogie du gamin que D'ailleurs les poissons n'ont pas de pieds.



Je suis en train de préparer une vidéo sur Jon Kalman Stefansson " La naissance d'un poète", je vous partagerai le lien très prochainement. Lien : https://www.youtube.com/watch?v=IKgRikgsnoU
Lien : https://www.youtube.com/watc..
Commenter  J’apprécie          00
À la mesure de l'univers

Avec la lecture de D’ailleurs les poissons n’ont pas de pieds, le lecteur avait suivi Ari de retour en Islande, à la suite du courrier reçu de sa belle-mère et du colis envoyé par son père Jakob, lui annonçant que c’était la fin pour ce dernier.

Une longue pérégrination dans l’histoire de cette famille et ceci sur trois générations, vie riche battue par les vents furieux de l’Arctique, sous la colonisation danoise, la présence américaine, séquelle de la deuxième guerre mondiale. L’omniprésence voire l’omnipotence de Oddur le grand-père d’Ari, homme courageux certes mais inflexible quand il s’agit d’embarquer un de ses fils, même si celui-ci doit périr.

Et Ari à travers ses souvenirs de retour au pays, nous raconte les destinées individuelles, viols, alcool, ruptures, amours folles, et la mort encore et toujours, inéluctable.

Son destin à lui est d’être séparé de sa femme et de ses trois enfants qu’il a peu vu depuis la séparation. Les causes en sont vagues mais l’on peut supposer qu’il porte en lui un mal-être qui l’a conduit à partir loin.

Le retour est un véritable tsunami pour lui et durant la lecture de ce premier volume la rencontre avec le père ne s’est pas fait.

« Ari monte la pente légère et aperçoit au loin l’immeuble où vit son père, chaque pas le rapproche de cette résidence pour personnes âgées, le rapproche de Jakob, le père et le fils ont vécu ensemble pendant vingt-deux ans, ensemble, ils ont affronté une mort et des temps difficiles. Ensemble, mais pourtant si loin l’un de l’autre. »

Ari est totalement habité par les spectres de sa famille et comme eux il erre dans leur histoire.

Dans ce volume les individualités se font la part belle, et Ari est en empathie avec chacune d’elle, il comprend qu’il s’est construit avec eux plus ou moins consciemment, car lorsque l’on est jeune, la perception des choses est plus floue.

C’est aussi un roman charnel avec de belles histoires d’amour, l’auteur sait écrire de très beaux portraits de femmes, qui sont fortes et n’abdiquent pas devant la vie des hommes plus sombres, qui souvent sont enveloppées des vapeur de l’alcool qui coule à flots.

Cet opus est un tourbillon de vie qui fait que chaque chose mérite d’être vécue, ne serait-il pas lâche de ne pas aller au bout de ses songes, de ne pas surmonter les obstacles pour y arriver ?

Chez Jón Kalman Stefánsson il semble que c’est la seule question qui mérite d’être posée.

Cette construction diffractée dans laquelle le lecteur est plongé apporte une force exceptionnelle, et au fur et à mesure le noir s’efface pour nous faire voir un ciel étoilé que seul celui qui reste debout peut voir.

C’est une lecture d’un bonheur absolu, nimbée de poésie, sous-tendue d’une philosophie de la vie qui doit nous habituer pour vivre et non survivre.

« Le matin se lève sur le monde. Il se lève toujours, quelque part, la lumière ne meurt jamais, mais certains restent dans les ténèbres, ils y disparaissent, et plus rien ne rappelle leur souvenir quand la clarté du jour arrive, si ce n’est la douleur de leur absence. »

C’est unique, je ne connais pas d’autres écrivains qui font faire de tels voyages, une beauté absolue comme celle des aurores boréales.

©Chantal Lafon


Lien : https://jai2motsavousdire.wo..
Commenter  J’apprécie          63
À la mesure de l'univers

Ari revient en Islande, à Keflavik, après des années d'absence, et cherche à revoir son père Jacob. L'intrigue, assez épurée au premier abord, vous amène auprès de personnages variés, selon un fil temporel très hâché. N'essayez pas trop de comprendre mais laissez vous porter par la poésie et la précision des mots choisis par l'auteur. Chacun de ses personnages porte en lui un univers d'émotions, de sentiments, de réflexions sur le monde. Chacun de ses personnages est à la mesure de l'univers.

J'avais déjà lu Asta du même auteur, qui m'avait décontenancé avant de m'émerveiller sur les dernières pages, je m'étais dit que le voyage littéraire en valait la chandelle. Pour celui-ci, j'étais encore plus perdue (sûrement parce que je n'avais pas sous la main le premier tome) mais bien décidée à ne pas m'en formaliser. J'ai trouvé la lecture douce et agréable, et je pense que je le relirai un jour pour profiter encore de toutes ces belles réflexions sur la vie et notre rapport au temps et aux autres.
Commenter  J’apprécie          00




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Jón Kalman Stefánsson Voir plus

Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1740 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur cet auteur

{* *}