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Critiques de João Guimarães Rosa (39)
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Mon oncle le Jaguar

La terre n'est que poussière, le chemin sauvage. Ici, dans le Sertao, tout le monde peut venir, parce qu'ici il n'y a rien. Un soleil ivre de rage tourne dans le ciel et dévore le paysage de terre et de sel où se découpe au passage l'ombre du jaguar. Une cabane perdue aux abords d’une forêt, un petit feu et un hamac juste au-dessus. Le parabellum à la ceinture, je m’approche, la silhouette encore plus triste qu’une musique de bandonéon. Là-bas, un vieux probablement à moitié indien à moitié animal. Solitaire depuis des années, quelques négros qui l’ont accompagné qui ont été tué, comme des cangaceiros de la libération. La bouteille de cachaça bien entamée, conjuguée au soleil enragé, il soliloque dans un mélange de sa langue indienne, de brésilien et de feulement d’animaux. Il n’a plus vraiment l’habitude de croiser des âmes sur la poussière de ces terres.



D’ailleurs, son langage est difficile à suivre, à comprendre par moment, à croire que sa cachaça est frelatée. Il discourt de façon incessante, me racontant les jours où il a tué tels négros, ou tels jaguars, tout au pluriel, car c’est un grand chasseur, le plus grand, l’unique… Si bien qu’il a commencé à se transformer lui-même en jaguar dans ses moments de délires, les griffes acérées prêtes à me sortir le cœur de mon poitrail. On se partage la bouteille, de mon pan de chemise j’essuie le goulot. Ouah, elle cogne, la cachaça du Sertao. Comme un vieux charognard il crache sur la gueule jaune des caboclos, Antonio Des Morte ou les Capangas machos à la solde des fazendeiros... Calé dans mon fauteuil, avec vue sur les chiottes, je m'appelle Bernard.



Une rencontre presque mystique qu’on n’oublie pas, même si on ne comprend pas tout de cette langue et de ces étranges mots tupis. Une première rencontre qui se veut presque plus ethnique que littéraire où les délires de l’homme reviennent souvent sur ses regrets, ceux d’avoir chasser les siens, car avec le temps, il est devenu lui-même jaguar dans l’âme et la peau, alors lorsqu’il se rend compte qu’il a tué son oncle, le jaguar, massacré ainsi sa famille pour les peaux et quelques cruzeiros…
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Diadorim

C'est en lisant la présentation ici-même de Diadorim que ma réflexion s'est approfondie en ce qui concerne ce que Babelio identifie comme la littérature SUD-américaine. Pour un européen, je suppose que la différence importe peu mais il y a trois amériques: amérique centrale, amérique du nord et amérique du sud. Des auteurs comme Alejo Carpentier ou Carlos Fuentes n'appartiennent ni à l'amérique du sud ni à l'amérique du nord. Peut-être faudrait-il modifier l'appellation: non pas littérature sud-américaine, ce qui exclut Fuentes et Carpentier, mais littérature latino-américaine.

Revenons à Diadorim et son résumé: «En Amérique du Sud, João Guimarães Rosa (1908-1967) est, avec Jorge Luis Borges, le géant continental du siècle.» Oui, en effet, si l'on exclut Fuentes et Carpentier, si Chamoiseau, Alexis, Depestre, ou le très grand, le titan Aimé Césaire sont exclus.

Avec Diadorim, Rosa est l'auteur d'un seul et unique roman, ce qui fait de lui un géant...

Et Borges, un faiseur de petites oeuvres, très conceptuelles et formalistes, cérébrales et apolitiques. En somme, de petits géants, ou des grands nains, ou des géants à genoux, ou...

(Quand on sait les dizaines de révolutions, les centaines de coups d'état, la multiplicité des dictatures et des régimes coloniaux (encore aujourd'hui, les dictatures molles d'Ivan Duque, les coups d'état parlementaires contre Pedro Castillo et Manuel Zelaya, le retour du refoulé avec Jeanine Áñez, entre fascisme et racisme exterminateur), il est très très très étrange de voir à l'oeuvre un écrivain reconnu comme Borges qui se tient à l'écart des tensions et des revers de son époque.)

Bref, c'est sans doute une image fantasmée pour lecteur blasé que celle de l'amérique du sud, une amérique de perroquets et d'exotisme, une amérique du baroque et de la surcharge, alors qu'il s'agit bien plutôt d'une terre d'injustice imbibée de sang, peuplée de millions de fantômes d'Indios et de millions d'africains, tous voués à un esclavage total.
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Mon oncle le jaguar et autres histoires

Auteur et recueil encensés… On se demande bien pourquoi… Probablement parce qu'encore une fois, on confond contenu de l'ouvrage et auteur. Alors oui ! L'auteur est brésilien (un peu d'exotisme) et parle des peuples brésiliens minoritaires (et opprimés). Mais ce n'est pas suffisant pour crier au chef-d'oeuvre (même ma libraire de référence, Millepages à Vincennes, le fait). En réalité, les nouvelles sont inintéressantes et soporifiques. Les lire est un supplice. D'autant plus que l'auteur ne cesse d'inventer des mots et de pratiquer le néologisme. Cela, mélangé au vocabulaire typique et non traduisible des peuples brésiliens, fait qu'au final on a beaucoup de mal à comprendre ce qu'on lit. Cela m'a fait penser à un auteur, bien français cette fois, qu'on encense également et que je trouve personnellement inintéressant et pénible à lire : Boris Vian. Les deux se ressemblent énormément. Si vous hermétique à l'un, inutile de perdre votre temps à lire l'autre. Au final, vous l'aurez compris, mieux vaut passer son chemin sur ce livre (même si la couverture de cette édition est belle et attire l'oeil).
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Diadorim

Livre monologue de 900 pages que j'ai lu très lentement en 1 mois, chose inhabituelle pour moi.



Suivant le lecteur, on y trouvera un roman d'aventure dans le Brésil du début du 20ème siècle (dans l'arrière pays sauvage ou sertao), un roman initiatique avec aussi une allégorie religieuse du mal (le démon), ou encore un labyrinthe inextricable dans ce langage parlé mêlant de nombreux mots empruntés à différentes langues (l'auteur était polyglotte) , avec de nombreux mots locaux pour désigner notamment la faune et la flore.



Ce roman est encore un roman d'amours homosexuelles platoniques, avec un petit tour de passe passe dans le final que je ne spoilerai pas.



Pour être honnête, je ne sais pas pourquoi cette lecture a été aussi lente pour moi. Peut être le peu d'action et le mode d'écriture m'ont il poussé à m'endormir inexorablement après une trentaine de pages lues dans mon lit le soir... Vers la moitié du livre, je me suis même posé la question de savoir si j'allais poursuivre ma lecture ou pas, faisant du sur place avec Riobaldo. Mais au final, je suis extrêmement heureux d'avoir terminé ce livre qui m'a marqué énormément.



Une critique lue par ailleurs (ZeBebelo ici) résume très bien ce livre : "car c'est bien cela qu'est Diadorim, une traversée du sertão avec toutes ces embûches, les belles et mauvaises rencontres, ces beaux et moins beaux paysages." Ou encore : "ne lisez pas Diadorim... tentez Diadorim!".



On peut s'arrêter à chaque phrase tant la poésie transparaît dans la prose. Plus prosaïquement, il m'a fallu relire plusieurs passages plusieurs fois pour m'y retrouver dans cette narration parfois discontinue. Et souvent, même en relisant, je n'ai pas toujours tout bien compris!



Bref, je n'oublierai pas Diadorim et je ne peux que vous encourager à tenter le voyage...

















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Sagarana

Comme pour celle de Diadorim, je suis insatisfait de ma première critique, où je me contentais de "synopsiser" ma nouvelle favorite de ce recueil : "L'heure et le tour d'Augusto Matraga".



Une relecture de quelques nouvelles fait ressortir certaines des obsessions de JGR : le temps et les occasions manquées. Le temps passé, le temps qui passe. Nos erreurs qui restent ou qui ressurgissent. Pas étonnant pour un auteur qui a clos son chef d'oeuvre, Diadorim, par une lemniscate !



Quoique nous fassions, le temps passé nous rattrapera toujours, que ce soit en bien ou en mal d'ailleurs. Un bon souvenir peut donner autant le cafard qu'un mauvais. Notre passé est-il notre pire ennemi ? Voué à nous hanter même quand notre situation actuelle est meilleure que celle d'autrefois, voué à nous rappeler nos choix, nos oublis etc.



Comme ce personnage, qui après une vie de vagabondage parsemée d'escroqueries en tout genre, s'installera dans une petite bourgade du sertão et montera un commerce tout à fait licite et florissant. Mais au hasard d'une rencontre, son passé resurgira et...



Marche aussi avec le gros bras, frôlant la mort après une trahison, qui profitera de sa survie pour choisir la voie de la rédemption... Mais là encore, le passé tentateur s'en mêle...



Ou ce personnage, frappé de "saudade" de sa terre natale et de tout ce qu'il y a laissé, après être parti sur un coup de tête à la Capitale pour vivre la vie qu'il prétendait mensongèrement avoir mené. La vie simple convenait-t-elle mieux à ce mythomane que la vie rêvée qu'il vit pourtant comme souhaitée ?



Idem pour ce personnage qui a fuit à la grande ville après une affaire d'honneur qui a mal tourné. Mais le temps qui passe veut-il dire qu'il nous oublie ?



Ou ces amours manqués par couardise ou bêtise, qui ne cessent de nous tourmenter...



Une des plus belles allégories du temps qui passe, de ce recueil, est quand l'auteur décrit une course-poursuite entre deux ennemis mortels, dont l'un fuit en ligne droite et le second use de détours et de raccourcis, ce qui fait que la droite est coupée de tangentes trop longues ou de sécantes trop courtes. Parfois, nous arrivons trop tard, parfois nous montons trop tôt dans le train.



Enfin, c'est ce qui rend la Vie belle. Nous savons ce que nous avons, nous devinons ce que nous avons loupé. Peut-être ce que nous possédons est ce que nous pouvons rêver de mieux ou peut-être que nos mauvais choix nous ont fait passé à côté de la vie que nous aurions mérité. Et l'inverse est vrai aussi.



Nous le saurons de toute manière jamais donc autant vivre notre vie telle qu'elle est!



Sagarana est le premier texte publié de l'auteur. Son style est loin d'être "diadorimesque" mais reste malgré tout très agréable à lire. Et nous y découvrons un vrai talent humoristique de JGR.



Je conseille de débuter l'oeuvre roséenne par ce texte avant de tenter Diadorim.
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Mon oncle le Jaguar

Mon oncle le Jaguar fût ma deuxième expérience roséenne et fût assez semblable à ma première, Diadorim.



Tout d'abord, nous faisons face à la même trame narrative, à savoir : un narrateur s'adressant dans un long monologue à un narrataire qui n'a pas loisir d'intervenir dans la conversation, le premier nommé répondant à chaque fois à sa place.



Il faut se mouiller la nuque, bien plus que pour Diadorim, pour bien entrer dans cette courte nouvelle tant la langue est spéciale et décontenançante. Mélange de portugais vulgaire, de tupi mais aussi de grognement de félin.



Car le thème principal du récit est le félin. A proprement parler de l'once (onça en portugais), plus connu dans notre pays sous le terme de jaguar, et de sa relation/cohabitation avec l'Homme.

Le narrateur nous raconte sa mission qu'un riche propriétaire lui a confié : désonçer (pour reprendre le terme employé dans la nouvelle. Comprendre : exterminer les jaguars) les terres de ce dernier. S'en suit une introspection et un cheminement spirituel qui poussent notre "héros", métis d'un père portugais et d'une mère amérindienne, à changer son fusil d'épaule et de se prendre d'affection pour ses "soeurs" onces.

Le tout dans un mélange de croyances amérindiennes mais aussi chrétiennes qui caractérisent bien la dualité et l'errance psychologique du personnage.



Ce fût au final une belle expérience.

Petite nouvelle difficile d'accès mais qui mérite que l'on tente l'expérience.



P.S. : cette édition de la nouvelle n'est plus éditée. Se reporter vers Mon oncle le jaguar et autres histoires.
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Diadorim

Lorsque je furète en bouquinerie, je ne fais pas que chercher les romans se trouvant sur ma wish, je suis attentive aux autres et lorsque je tombe sur des auteurs dont le nom semble être hispanique, je lis le 4ᵉ afin de voir s’il pourrait participer au Mois Espagnol et Sud-Américain. Bingo avec celui-ci !



Un roman culte, qu’ils disaient… L’un des plus grands livres qu’on ait jamais écrits. Diantre, fallait plus en jeter, j’étais déjà conquise à l’avance !



Mon édition 10/18 fait 630 pages et le style de l’auteur m’a déconcerté dès le départ : pas de chapitrage, des dialogues peu nombreux et inclus dans le texte. Heureusement qu’il y avait des paragraphes, sinon, j’aurais sauté des lignes sans même m’en rendre compte.



Je ne peux pas dire que j’ai détesté ce roman, ni que l’écriture était merdique. Que du contraire, le style est riche, très riche, trop riche, peut-être, car on passe d’une langue vulgaire à une poétique (ou l’inverse), c’est bourré de néologismes, ardu, obscur et on a, de temps en temps, l’impression que notre narrateur ne parle pas bien le Brésil.



Anybref, le narrateur est un grand bavard et qu’il a tendance à raconter trop, dans un récit monolithique, ce qui m’a lassé, avant que je n’arrive à la moitié du récit.



De quoi ça cause, ce roman ? C’est l’histoire de Riobaldo et de sa bande armée, des jagunços, qui sont des brigands à la solde des grands propriétaires terriens (les fazendeiros), des gardes du corps, généralement embauchés par les propriétaires de plantations et les « colonels » dans les arrière-pays du Brésil.



Dans cette partie de l’arrière-pays (le sertão), une région semi-aride, on pratique l’élevage et ce sont des zones de non-droit où tous les sales coups sont permis.



Ces brigands, sont souvent associés à des politiciens véreux (pléonasme), ou libres de toutes attaches. Ils pratiquent le racket, bref, ils sont un peu des mafiosi qui vous demandent de les payer pour assurer votre protection.



Notre Riobaldo, ce guérillero au service de riches propriétaires terriens, bossant aussi parfois pour des politiciens, des hommes de guerre, vivant comme un hors-la-loi, nous raconte donc tout et son histoire est un mélange d’histoire de guerre, d’aventures, d’amour, de western. C’est aussi un récit halluciné, comme sous emprise de drogues.



Ce roman n’est pas facile à lire, il est touffu, part dans tous les sens, est inclassable, si ce n’est avec les romans qui divisent les lecteurs : ceux qui ont réussi à le lire et ceux qui se sont paumés dedans. Je me suis paumée, même si je me suis accrochée et finalement, j’ai sauté des paragraphes après avoir peiné dans la première moitié.



Bon, ce texte n’était pas pour moi, trop ardu, trop dense, trop lyrique… Les aventures de Riobaldo et de ses guérilleros étaient semées d’embûches, comme le fut ma lecture, chaotique, de ce pavé qui est devenu indigeste.



Si vous êtes tenté de vous attaquer à ce monument de la littérature, allez-y lentement, picorer un peu tous les jours, faites durer le plaisir, sinon, la nausée arrivera vite et vous serez incapable de terminer ce roman (pourtant, la fin est belle et recèle une belle surprise).



Bon, j’ai tenté le coup, j’ai raté… Pas grave !


Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Mon oncle le jaguar et autres histoires

Je suis restée hermétique à la majorité des nouvelles de ce recueil. Je comprends, grâce à la postface, que l’écriture de l’auteur est faite pour déranger, interroger, qu’il ne faut pas chercher à tout comprendre… mais il y a des limites à l’expérimentation selon moi.

Dans la majorité des nouvelles je me suis trouvée embourbée dans des phrases faisant peu, voir pas, de sens, des histoires qui n’en sont pas, des narrations qui font au-delà de l’expérience.



Assez ironiquement l’une de celles que j’ai apprécié est celle qui ne se compose que de paroles, et même pas d’un dialogue étant donné qu’un seul personnage s’exprime. C’est l’une des nouvelles que j’ai su apprécier, grâce au jeu du langage. Ce fait me fait donc dire que ce n’est pas la langue expérimentale qui m’a posé soucis, mais bien ce désir d’une écriture ne faisant pas sens.



En somme ce n’est absolument pas un recueil que je conseille à tout le monde. Il faut s’y plonger dans ayant parfaitement conscience qu’on va lire des nouvelles qui sortent de l’ordinaire, qui sont là pour déranger, pour emmener le lecteur très, très, très loin.

Malheureusement je n’ai pas su faire ce voyage, et ma lecture s’en est trouvée alourdie et, malheureusement souvent, ennuyante.
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Sept-de-Carreau, l'âne du Sertão

"C'était un petit âne gris, maigrelet, résigné. Il venait de Passe-Temps, de Conceição-des-Crêtes, ou du sertão d'on ne sait trop où." Il doit son sobriquet Sept-de-Carreau à l'un de ses propriétaires, joueur de cartes. Il est désormais un âne vieillissant dans la ferme du Major Saulo, lequel n'hésite cependant pas à le réquisitionner pour accompagner un important convoi de boeufs, de vaches et de taureaux, jusqu'à la gare du bourg. C'est la période des pluies diluviennes, qui succèdent à la sécheresse, et des crues tout aussi redoutables. Le style de João Guimarães Rosa, né dans le Minas Gerais, est irrésistible et à l'image de cette nature si sauvage du sertão, qu'il a parcouru lorsqu'il y était médecin. La postface évoque une traductrice désemparée. Sur certains aspects il appartient à une tradition orale et populaire : João Guimarães Rosa imite à la perfection la faconde des bouviers, des sang-mêlé pour quelques- uns, et leur art de raconter des histoires, des histoires drôles mais aussi sanglantes. Sur d'autres aspects João Guimarães Rosa, qui aime les expérimentions, les jeux de langage, appartient au modernisme et son érudition le porte également vers une certaine forme d'hermétisme.
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Diadorim

C’est un petit chef d’œuvre de presque 600 pages que délivre Rosa par l’intermédiaire de Riobaldo le narrateur. C’est un long monologue qui nous parle de Diadorim, un gardien de troupeaux dans le sertao brésilien lieu abandonné des dieux. Des dieux? Il n’y en a jamais eu, nous sommes seuls sauf peut-être le diable s’interroge le narrateur mais même pour lui il n’est pas sûr. C’est un roman d’aventures. Riobaldo et Diadorim s’aiment d’une manière chaste et ce dernier est perçu comme un être idéal presque parfait. Un livre prenant, pas toujours simple à suivre dans sa narration parfois chaotique mais d’une incroyable beauté.
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Buriti

BURITI de JOÀO GUIMARÃES ROSA

Retour au Brésil et plus particulièrement dans le Sertão pour l’inauguration d’une chapelle qui sera l’occasion d’une grande fête. Dans cette langue si particulière d’Amérique du sud, l’auteur de Diadorim nous livre une fresque pleine de poésie et de tendresse.
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Diadorim

Livre immense sur le sertao, sorte de plaine semi-forestière du Brésil, tout est raconté oralement par le personnage principal, un jagunço (bandit) nommé Riobaldo, et est assez centré sur un de ses compagnons, Diadorim, avec lequel il entretient une relation pour le moins ambiguë. Nous suivons le personnage parmi ses souvenirs, la narration n'est pas linéaire. Sur tout le roman plane l'ombre d'un pacte avec le Diable. La fin m'a beaucoup surpris.
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Diadorim

Ma sixième lecture en quatre longues années m'a fait prendre conscience que ma "critique" était bien fade pour l'unique représentant et prosélyte, à ma connaissance, de la guilde roséenne.



Sixième lecture mais toujours ce plaisir immuable à chaque page, un peu comme si chaque matin, ma dulcinée me regardait avec le regard du premier jour.

Ce sentiment est indescriptible, ce que ce roman m'inspire est inénarrable.



Livre inclassable.

C'est la raison pour laquelle on ne peut que l'aimer ou rester totalement indifférent à son pouvoir. Ce que je peux aisément concevoir puisqu'il m'a fallu plusieurs essais avant d'être happé par l'univers roséen.



Une fois aspiré dans le sertão du Minas, cher à l'auteur, on ne peut en sortir. Car c'est bien cela qu'est "Diadorim", une traversée du sertão avec toutes ces embûches, les belles et mauvaises rencontres, ces beaux et moins beaux paysages.



Comme pour une randonnée, il faut prendre son temps pour bien apprécier ce qu'on l'a sous les yeux. Riobaldo le dit si bien : "Ce que mes yeux ne voient pas aujourd'hui, il se peut que je l'endure le surlendemain". Ce n'est pas vraiment ma sixième lecture car je ne l'ai pas encore achevé. J'ai décidé de prendre mon temps pour bien appréhender chaque trésor que recèle ce long monologue. Je le picore comme un religieux picore son Livre Saint ou un poète un recueil de poésie. Je me surprends à méditer pendant de longues heures certains passages que je n'avais pas vu lors de mes précédentes lectures... "Diadorim" n'est pas un livre qui se lit d'une traite finalement.



Certainement un grand passionné de mythologie grecque et de Grèce Antique, que ce soit pour ses sources d'inspiration pour la plupart des scènes qui parsèment cette oeuvre que pour les noms de la plupart de ses personnages, Guimarães Rosa nous entraîne dans une odyssée mineira. Riobaldo étant un Ulysse Brésilien qui vivra bien malgré lui de belles aventures et qui sera obsédé par une grande question : peut-on vendre son âme à... rien ?



Comme le dit Vargas Llosa dans sa préface, chacun appréhende ce livre et l'interprète à sa façon. "Diadorim" est pour moi une grande aventure humaine, comme le sont l'Iliade et l'Odyssée, dont les fresques épiques touchent notre âme immortelle d'enfant rêveur. Fresques constellées de passages d'une profondeur et d'une beauté infinies.



À mon sens, il n'est pas question d'aimer ou de détester "Diadorim", il est juste question de lui laisser une chance de nous toucher au plus profond de notre conscience.



D'ailleurs, j'ai changé mon mantra. Ce n'est plus "Lisez Diadorim" mais "Tentez Diadorim".



Roséennement.
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Diadorim

J'ai commencé ce livre avec de (trop) grandes attentes, ayant lu qu'il faisait partie des chefs d'oeuvre de la littérature mondiale. Le narrateur déroule son récit de sa vie de "jagunço", sorte de mercenaire dans la campagne hostile du Brésil. C'est une sorte d'Ulysse (au sens de Joyce) qui vit une vie d'aventurier. Il faut probablement avoir une veine d'amateur de poésie pour pénétrer ce récit et son style. A titre personnel, je n'ai pas réussi à adhérer à cette oeuvre. Les critiques dithyrambiques laissées par d'autres Babéliens me font dire que, effectivement, je ne devais pas être dans le bon état d'esprit quand j'ai lu ce livre.
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Sagarana

Il est trop fort, João Guimarães Rosa.

On attaque, on se dit oh la la quelle galère ! que ça va être chiant de lire tout ça ! et puis non : le rythme indolent de ses intrigues, au fil des digressions, se laisse finalement dévorer avec frénésie et enchantement.



Parce que franchement, les aventures d'un petit âne au bord du rencart qui accompagne un troupeau de bovins et bouviers, ça intéresse qui ? Et pourtant, c'est finalement et superbe et passionnant. Toutes les nouvelles du recueil sont comme ça : il prend un argument mince comme du papier à cigarettes et il en fait une promenade enchanteresse dans son sertão de prédilection.



Ah oui, ça se passe dans le Nordeste brésilien des années trente. Mais attention, on est pas dans le folklorique pénible. Son amour de tout ce qui fait cette région colore d'une toile de fond fascinante des histoires et sentiments par ailleurs très universels. Là encore, avec son air de ne pas y toucher, il est très très fort.



C'est blindé de paragraphes évoquant la flore et la faune de ces contrées, dont on ne connait évidemment rien. Mais ça se lit pour le plaisir des mots, comme autant de poésies mystérieuses. Je me demande quand même si je suis seul à pouvoir lire tout ça en me fichant éperdument de savoir à quoi ressemble un sabiá, l'herbe-à-balais, un pourpier, l'herbe moulambo, des joás, un gervão, un jabiru acromégalique, les marias-noires… et en y prenant plaisir. En plus, la traduction est remarquable, elle rend compte avec merveille de l'inventivité originale qui ne s'exerce pas uniquement dans tous ces noms bizarres, mais transforme des substantifs en verbes, et vice versa, et crée de nouveaux mot par agglutination.



Quand aux intrigues et personnages, ils nous sont à la fois si lointains et si proches. La plupart sont bien arriérés, leurs histoires souvent pitoyables, et pourtant ils deviennent nos frères et l'on vibre de partager des sentiments qui sont finalement les nôtres. On croise des hommes fiers et des fiers à bras, des sorciers et des malades, des gosses et des vieillards, des méchants, des retors, des malins et d'autres juste plus braves. Et le narrateur, à la fois acteur mais systématiquement un peu désengagé, qui nous transmet son amour des gens, des paysages et des animaux de ce rude pays. Teinté de pointes d'humour qui ne gâchent rien.



Il est vraiment très fort.
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Diadorim

Les morts c'est en silence que l'on parle d'eux

Note de l'éditeur Un véritable tour de force sur le plan de la langue. Une des œuvres les plus abouties du siècle (Mario Vargas Losa)

"En Amérique du Sud, João Guimarães Rosa (1908-1967) est, avec Jorge Luis Borges, le géant continental du siècle. Comparé à la fois à La Chanson de Roland, à l'Énéide et au Docteur Faustus de Thomas Mann, Diadorim est un roman d'amour et d'aventures, tout ensemble mythique, réaliste et romantique, classique et novateur. Si ce livre est le roman de la littérature brésilienne, il est aussi, en raison d'un travail unique sur la langue, une des grandes œuvres de la littérature universelle" Titre original Grande Sertao Veredas (1956)

Ce roman d'amour et d'aventures est considéré comme LE roman de la littérature brésilienne, mais il est aussi une des grandes œuvres de la littérature universelle

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Diadorim

Zone géographique en grande partie semi-aride, située dans les états des régions centre et nord-est du Brésil, le «sertão» non seulement se déploie concrètement sur une superficie de près d'un million de kilomètres carrés, mais constitue en même temps un vaste territoire culturel et symbolique dans l'imaginaire collectif brésilien, à l'image du légendaire «far-west» pour les nord-américains, ou de l'immense et immémorial «outback» pour les australiens.

Dans DIADORIM (GRANDE SERTÃO: VEREDAS), les décors naturels correspondent plus particulièrement au sertão dit des «Gerais» (prononcer «Geraïs ») - «terres-générales» de l'état du Minas s'étendant également au-delà des frontières, dans les états voisins de Bahia et Goiás, et, pour l'essentiel, bordant la vallée du grand fleuve São Francisco. Arrière-pays dominé par des «fazendas» où l'on pratique essentiellement l'élevage, très peu urbanisé, zone de non-droit par excellence, les bandes armées de «jagunços» y font plus souvent la loi. Brigands à la solde des grands propriétaires terriens, d'hommes influents de tous bords (voire même par moments associés et financés par des politiciens véreux afin de combattre des factions rivales, sous couvert de «lutte contre le banditisme»), mais pouvant aussi évoluer libres de toute attache, en groupes nomades constitués de plusieurs dizaines d'individus, ceux-ci subsistent notamment grâce à l'hospitalité et à la générosité des «fazendeiros» et d'autres autochtones, ou bien, à défaut, de racket - sorte de «pizzo», argent contre protection -, voire au besoin, de pillage tout court. Commandées par des leaders vénérés et tout-puissants, garants d'un code d'honneur strict à faire respecter, les bandes de jagunços sillonnent interminablement, à pied et à cheval, les «chapadas» - plateaux gréseux limités par des escarpements prononcés –, faisant halte la plupart du temps dans les « veredas » - vallées de terre argileuse où l'eau et une végétation accueillante, constituée essentiellement de «buritis», le grand palmier-bâche brésilien, sont toujours présentes. Voilà en gros pour l'univers dépeint par Guimarães Rosa, situé ici au tournant du vingtième siècle.

Il s'agit là, incontestablement, du chef d'oeuvre majeur de la littérature brésilienne du XXème siècle. GRANDE SERTÃO : VEREDAS (dont le sous-titre original «O diabo na rua, no meio do redemoinho» - «Le diable dans la rue au milieu du tourbillon» - a été supprimé dans son édition française) est, au même titre que l'Ulysse de James Joyce, un roman labyrinthique aux sens multiples, inépuisables: une cathédrale brute plantée en plein milieu du «sertão» brésilien.

Sa publication, en 1956, a provoqué un véritable séisme littéraire dans le pays: l'oeuvre a été dans un premier temps très mal-accueillie, majoritairement incomprise. Un article paru dans une revue littéraire éditée à Rio de Janeiro («Leitura»), co-signé par de nombreux poètes et romanciers renommés de cette époque, s'était vu titré : «Ecrivains qui n'arrivent pas à lire Grande Sertão : Veredas» (!). L'oeuvre non seulement outrepassait complètement, mais pulvérisait littéralement tous les canons du roman régionaliste, genre toujours très en vogue dans la littérature brésilienne à ce moment, inauguré par le classique «Os Sertões», de Euclides da Cunha, publié en 1902. Extrapolant radicalement les codes en vigueur du genre, la culture « sertaneja», orale, rustre et populaire permettait à l'auteur de procéder à des innovations langagières et à un traitement littéraire dignes des expérimentations les plus avant-gardistes du XXème siècle, suscitant d'emblée, comme pour ses prédécesseurs les plus célèbres en la matière, le rejet et l'incompréhension de ses contemporains.



Livre-monde échappant à toute norme extérieure à son univers propre, GRANDE SERTÃO : VEREDAS forge une syntaxe, un lexique et une grammaire qui lui sont propres, rebelles à toute codification purement rationnelle ou strictement consensuelle. Un chercheur-linguiste ayant travaillé sur le texte du roman aurait déniché non moins de 8 000 mots qui ne figureraient dans aucun dictionnaire! Puisant à la fois dans les racines de la langue portugaise et dans la richesse léguée par la diffusion historique de la lusophonie aux quatre coins du monde, mais surtout et avant tout, directement aux sources vivantes de la langue orale régionale et incarnée du sertão des Gerais, la langue forgée par GRANDE SERTÃO : VEREDAS s'ouvre à des multiples significations : langue-fleuve débordant de morphèmes-poissons (rien que pour le mot «démon», 56 synonymes auraient été dénombrés !!), de références à la nature et à la flore locales, de vocables choisis pour leurs résonnances purement sensibles ou émotionnelles, de phrases segmentées par une ponctuation inaccoutumée, plutôt intuitive que rationnelle, se ramifiant en constructions grammaticales sans fil prédéfini, dans une quête quichottesque assumée de pouvoir réussir à métamorphoser le langage écrit en expérience réelle.

Pour l'avoir lu en version originale, je comprends maintenant pourquoi GRANDE SERTÃO : VEREDAS est classé parmi ces livres considérés en principe intraduisibles. (Déjà en tant que lecteur parfaitement lusophone l'ayant lu en sa version originale, j'ai eu souvent le sentiment de ne pas réussir à «traduire» mentalement ce que j'étais en train de lire, sans en «réduire» considérablement le sens, navigant sans cesse entre une lecture «à la narration» et une lecture «en bloc» et «à la sensation». Par ailleurs, jamais auparavant je n'ai ressenti, en lisant un roman, une sensation aussi aiguë de cette désespérante platitude recherchée sans cesse par notre cerveau..!). Objet de multiples traductions en différentes langues étrangères (dont deux versions, à ce jour, en langue française), ainsi que de nombreuses thèses universitaires, études, articles de spécialistes, linguistes, critiques littéraires et traducteurs, ce roman hors norme a souvent été désigné - entre autres par l'écrivain Mario Vargas Llosa, auteur de la préface à l'édition française - comme «une des oeuvres formellement les plus abouties du siècle».

Attention néanmoins, lecteurs potentiels de DIADORIM, il ne faut surtout pas s'attendre pour autant à une lecture inaccessible au commun des mortels, hermétique, absconse ou destinée à une poignée de happy few, critiques littéraires, universitaires prétentieux ou intellectuels de service…Pour faire court, GRANDE SERTÃO : VEREDAS n'est pas, par exemple, l'ULYSSE de Joyce. (Ô, qu'il n'est pas facile, n'est-ce pas, de ne pas catégoriser, ne pas hiérarchiser ou caricaturier les oeuvres et les êtres..! Bref.)

DIADORIM donc, loin de là, peut tout simplement être lu comme un récit d'aventures et/ou comme un roman d'amour. Riobaldo, personnage-narrateur du livre remémore et narre son passé de jagunço à un interlocuteur-lecteur, dont il imagine et anticipe par moments les réactions à ce qu'il raconte : ses pérégrinations à travers le sertão des Gerais, son amour sublimé et transgressif pour Diadorim, ses moments de gloire et de détresse, ses joies et ses faiblesses, ses combats pour la justice telle qu'il la conçoit, ses rencontres avec le diable, «dans la rue au milieu du tourbillon»...

Constitué à partir de cette matière première violente - dans le sens étymologique du mot : force incontrôlable- de vie et de mort, présente partout dans le monde, cette histoire maintient le lecteur constamment au plus «près du coeur sauvage» (Joyce) qui fait pulser la nature et la condition humaine ; tout le roman étant traversé - selon une formule consacrée par Joseph Conrad , dans «Au coeur des ténèbres»- par un souffle puissant, «earth et unearthly», à la fois terrien et surnaturel, cru et lyrique, épique et dramatique, chevaleresque et faustien, particulier et universel.

Oui ! «Le sertão est partout». «Le sertão est à l'intérieur de nous-même.»





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Diadorim

Si vous êtes amateur de Lucky Luke il faut absolument lire ce roman d'aventure. L'intrigue se passé dans le 'far ouest' de Brésil. Il y a un peu de tout: du sexe, des batailles à main armé, des longues promenades à cheval et une discussion à ne pas finir sur le bien et le mal. Avec quelques réserves c'est une excellente lecture pour le chalet.
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Mon oncle le Jaguar

Livre aussi beau qu'étrange, aussi étrange que beau.

Difficile d'en parler.

Dans la forêt amazonienne, un homme perdu se réfugie dans la cabane d'un chasseur.

Cet homme qui vit là est un métis abandonné par son père un homme blanc, et qui pleure la mort de sa mère une indienne de l'une des tribus qui peuplent la forêt.

Il a été assigné dans cette cabane pour chasser les jaguars qui menacent les villages à l'orée de la forêt.

Mais tous l'ont abandonné à son sort dans cette cabane de la forêt.

Alors petit à petit, il a quitté le monde des hommes qui l'ont délaissé pour celui des jaguars qu'il était censer tuer mais qui l'ont adopté.

Ce récit est en fait un long monologue de cet homme qui explique qui il est, ce qu'il est.

C'est une mélopée qui mélange à la fois le portugais, la langue des indiens toupi et la langue des jaguars.

Etrange livre que le traducteur nous conseille de lire à haute voix.

Mais même à haute voix, il n'est pas facile de pénétrer dans cet univers, l'univers de ces hommes qui peuplent la forêt amazonienne et dont la langue est un chant qui oscille entre les sons humains et ceux des animaux qu'ils cotoient.

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Diadorim

Lire Diadorim c'est commencer un récit sans fin, s'embarquer dans une grande odyssée dans le sertão brésilien, c'est se laisser emporter par le fleuve puissant du monologue ininterrompu de Riobaldo, Tatarana, jagunço malgré lui en quête d'amour, de justice et de paix. Riobaldo, qui tel Ulysse n'aspire qu'à la quiétude d'un foyer et l'amour d'une femme, mène sa barque ballottée au gré des tentations et des batailles dans l'immensité du sertão.Un roman fleuve à l'ambiance toute particulière, à découvrir absolument.
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