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Citations de Julien Green (916)


Elle marchait avec lenteur, peu soucieuse de retourner à sa chambre, et, comme elle passait devant un café, un ouvrier en sortit. C’était un jeune homme. Elle eut le temps de voir son visage violemment éclairé par la lumière blafarde, ses yeux dont le blanc brillait, ses joues imberbes, un peu maigres. Il s’arrêta en la voyant et la regarda, les mains aux poches. Elle traversa aussitôt et se mit à marcher un peu plus vite, lorsqu’elle l’entendit venir derrière elle. (…) Un instant, elle eut l’idée d’appeler au secours, mais la crainte du ridicule l’en empêcha. De même, elle n’osait courir ; cela donnerait plus d’audace, peut-être, à cet homme. Elle pressa le pas, fit de grandes enjambées et, au lieu de continuer tout droit jusque sur la place, prit une ruelle, la première qu’elle rencontra à sa droite.
Ce fut là qu’il la rejoignit. Elle se retourna brusquement, le dos au mur et souffla : « Allez-vous- en ! » Mais il se tenait immobile devant elle. Sa casquette posée de côté sur sa tête laissait échapper des cheveux noirs qui luisaient comme du métal. Ses traits étaient fortement marqués, ses yeux noirs autant qu’on pût en juger. Une cravate rouge flottait lâchement autour de son cou dont elle accentuait la blancheur. Il rit à voix basse.
« De quoi avez-vous peur ? » demanda-t-il.
La main d’Adrienne se crispa sur son parapluie. Elle reprit :
« Laissez-moi tranquille, ou j’appelle. »
Le jeune homme la regarda une seconde, puis haussa les épaules.
« Je ne voulais pas vous faire de mal », dit-il.
Et il s’en alla. Elle l’entendit qui s’éloignait en sifflant une valse à la mode. Tout d’abord, elle se félicita de s’être si bien tirée d’affaire, puis brusquement un regret immense l’envahit. Dans sa solitude quelqu’un était venu à elle et elle l’avait repoussé. Etait-ce parce qu’il portait une cotte et qu’il l’avait abordée sans la connaître ? Ah ! qu’est- ce que cela pouvait faire? Elle se souvint de sa voix un peu grave, presque tendre, comme de quelque chose de déjà si loin que jamais elle ne pourrait le retrouver. Si cet homme revenait, elle lui parlerait sûrement, mais reviendrait-il ? Ne l’avait-elle pas découragé ?
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Il fallait qu'elle vît partir Mme Legras pour se rendre compte à quel point la compagnie de cette femme odieuse lui était nécessaire. Elle n'essayait même pas de s'expliquer une contradiction monstrueuse, elle la subissait comme on subit quelque chose que l'on ne se sent pas la force de combattre. En quoi cela pouvait-il l'aide de connaître l’origine et la nature de sa servitude, de savoir ce qui l'obligeait à rendre visite à Mme Legras tous les jours? Elle préférait ne pas s'interroger.
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Quelle joie trouvait-elle à contempler cette maison banale ? Si encore la personne qui l’habitait avait pu lui venir en aide, mais cette personne ne la connaissait pas. Et puis qu’est-ce que cela voulait dire : venir en aide ? Venir en aide contre qui ? (…) Pourquoi n’était-elle pas heureuse ? Qu’avait-elle donc ? Des larmes montaient à ses yeux. Tout à coup elle se sentit dominée, appelée par quelque chose qu’elle ne connaissait pas. Elle traversa la rue en courant et vint coller ses lèvres au mur du pavillon.
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Des années s’écoulèrent ainsi dans une monotonie profonde. (…) Une distraction était impossible, et, comme si elle obéissait à un ordre tacite, Adrienne en vint peu à peu à disposer de son temps suivant un mode précis et d’une façon aussi rigoureuse que dans un couvent. Elle aussi connut le besoin d’accomplir sa tâche à un instant donné, mais, par une contradiction singulière, cela lui déplaisait, et elle ressemblait à une religieuse qui n’a plus la foi, mais qui conserve pour la règle une espèce d’attachement irrité, parce que c’est la règle qu’elle s’est choisie.
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Vous êtes ridicule, cria-t-elle de l'antichambre, tout le monde se moque de vos manies. Vous vous croyez bonne parce que vous lisez la Bible tous les soirs, mais vous n'êtes pas meilleure que moi, que vous tourmentez.
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Une fois de plus, elle eut l'impression qu'elle s'était égarée dans la vie comme on s'égare dans un pays inconnu.
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Tu es jeune, tu es très belle, reprit Miss Charlotte. J'ai raté ma vie, Elizabeth. Ne rate pas la tienne.
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Julien Green
J'écris mes livres pour savoir ce qu'il y a dedans.
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4 juillet 1979
Je lis la Genèse en hébreu avec plus de facilité que je ne l'aurais cru possible, car voilà quelque temps que je ne l'avais lue qu'en grec.
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31 décembre 1979.
Cinquante mille Russes à Kaboul par un pont aérien, c'est de l'occupation pure et simple, pour ne pas dire annexion. Le président des Etats-Unis déclare à Brejnev que si les Soviets envahissaient le Pakistan, l'Amérique interviendrait militairement. C'est faire cadeau à la Russie de l'Afghanistan. Voilà pour le Nouvel An !
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Julien Green
"Un beau visage c’était le commencement de la souffrance pour moi."
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21 août 1978.
Monseigneur Riobé, évêque d'Orléans, est mort dans des circonstances un peu mystérieuses. Son cadavre a été trouvé nu dans un camp de nudistes. Son anneau pastoral avait disparu. Que penser ? Il vaut mieux n'en penser rien. Le Père Dodin cite Bernanos : "Il a eu la mort d'un autre." De même que le cardinal Daniélou n'a pas eu sa mort, mais celle d'un pécheur dont il a pris la place.
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20 août 1978.
A Oxford, grande émotion. On a découvert qu'un des "dons" avait un chat, or les chats sont interdits à l'université, non les chiens. On a demandé au "don" de se séparer de son chat. Il a refusé avec une véhémence telle qu'il a fallu réunir un conseil pour décider de la conduite à suivre. Cela a duré cinq heures. Finalement il a été décidé que le chat serait nommé "chien honoraire" et la paix est revenue. Que cela est anglais et de quelle charmante façon...
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Il était resté là une demi-heure, peut-être plus. Mais comment sa joie s'était-elle changée en désespoir ? Le voilà qui revenait chez lui, plus triste et plus accablé qu'avant. Pourquoi, tout d'un coup, son sort était-il lié à celui d'une femme qu'il avait rencontrée dans la rue ? Quelles étaient les lois folles qui régissaient la vie des êtres ? S'il détestait cette femme, que ne la fuyait-il ? Et si le désir seul l'attachait à elle, que ne se réjouissait-il de la facilité avec laquelle la vie arrangeait les choses ?
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Demain, s’il la revoyait, il aurait peine à la reconnaître, au premier instant, et, peu à peu, elle reprendrait à ses yeux son aspect véritable, et c’était à ces caprices du souvenir, à ce jeu d’un visage se montrant et disparaissant tour à tour que, par une longue habitude de son coeur, il jugeait de la profondeur de son désir
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Ta conscience t’instruira
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Après des années et des années d'aventures, de désillusions, de dégoûts, il arrive un moment où l'âme n'en peut plus et refuse d'obéir au corps, de le suivre dans sa honte. Sans doute, cette fille lui avait écrit, lui avait donné rendez-vous à cet endroit, mais s'il était venu ce n'était que par lâcheté, par mollesse, et pour s'épargner à lui-même les regrets d'avoir négligé une occasion qui lui était offerte ; car il savait bien qu'elle ne voulait pas de lui, et il se méprisait d'être là, assis sur le banc qu'elle lui avait indiqué. Il eût été pourtant bien incapable de s'en aller à présent ; cela aussi, il le savait.
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À certains moments de ma vie, j'ai trouvé un réconfort dans le simple fait que je mettais pas écrit ce qui me souciait le plus. Il me semble, alors que mon coeur est le plus troublé, que je fais passer une partie de mon malaise sur la page blanche et que là, emprisonné par les jambages des lettres, mon ennui se dissipe quelque peu. C'est peut-être l'origine de toute une série de livres qui n'avaient d'autre raison d'exister que de rendre la paix intérieure à qui les écrivit.
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«  Notre vie est un livre qui s’écrit tout seul. Nous sommes des personnages de roman qui ne comprennent pas toujours bien ce que veut l’amour » …
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Auprès de lui [Keats], (...) Lord Byron n'était qu'un bellâtre fleurant le cigare, effrayé surtout de grossir, homme à femmes, homme à succès, poète se vendant bien.
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