Citations de Larry Tremblay (217)
... pas la peine d'aller jusqu'au bout avec la vie si elle est toujours pareille.
Mais que peut un souvenir
sans le cœur qui lui a donné vie?
Si Amed pleurait, Aziz pleurait aussi. Si Aziz riait, Amed riait aussi. Les gens disaient pour se moquer d’eux : « Plus tard ils vont se marier. »
La nuit des temps, maman m’a raconté, c’est la première nuit du monde. Il faisait si noir que le premier rayon de soleil qui a percé la nuit a hurlé de douleur.
J’étais un enfant de novembre. Un mois que les gens détestent. Ils ne supportent pas sa gravité, son dénuement, ses paysages gris et sobres. Ils ne comprennent pas la beauté intérieure de ce mois, ils ne peuvent pas la soupçonner..
Dans cette ville ensevelie sous la neige plusieurs mois par année, l’arrivée du printemps ne manquait jamais de déclencher une hystérie végétale. Les fleurs perçaient avec rage la terre encore gelée et, en un jour, lançaient leurs couleurs et leurs parfums à la face du ciel. Les bourgeons éclataient aux branches..
Le théâtre du corps
c’est l’enfer de l’âme
les blessures affleurent
en autant d’appels d’être
On ne mélange pas les couleurs
on les marie
aussitôt
elles accouchent
Souvent, avant de retrouver son mari déjà couché, elle allait dans le jardin. Elle s’asseyait sur le banc placé devant les roses et respirait les odeurs riches qui montaient de la terre humide. Elle se laissait bercer par la musique des insectes, levait la tête en cherchant la lune des yeux. Elle la regardait comme si c’était une vieille amie qu’elle venait de rencontrer. Certaines nuits, la lune faisait penser à une empreinte d’ongle dans la chair du ciel. Elle aimait ce moment où elle se tenait seule devant l’infini. Ses enfants dormaient. Son mari l’attendait dans leur chambre et elle existait peut-être comme une étoile qui brillait pour des mondes inconnus. En contemplant le ciel, Tamara se demandait si la lune avait connu le désir de la mort, celui de disparaître à jamais de la face de la nuit et de laisser les hommes orphelins de sa lumière. Sa pauvre lumière empruntée à celle du soleil.
Mickaël mesurait à quel point la guerre efface les frontières entre le monde des adultes et celui des enfants.
Le deuil qui me hante est la chose la plus étonnante qui me soit arrivée dans la vie.
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"Pour moi, il n'y a toujours eu qu'une seule chose à peindre: le corps et son cri."
"Je ne peignais pas de paysage. Ma peinture ne supportait pas le grand air. Pas besoin de montagnes, de rivières, de déserts, de pâturages ni de plages léchées par les vagues. Encore moins de soleil, de lune, de nuages. Ton corps me suffisait à peindre l'univers."
- Tu n'es pas juste quand tu accuses ton frère d'être un meurtrier. Comment savoir ce qui s'est passé dans son coeur quand il a réalisé ce qu'on attendait de lui ? On l'a trompé jusqu'au dernier moment. Je ne sais pas, il a peut-être été drogué...
- Vous ne savez pas de quoi vous parlez, monsieur.
- Tu as raison, je ne sais rien. J'ai osé écrire une pièce sur la guerre dans la plus totale ignorance de ce qu'elle comporte, de ce qu'elle provoque. De quoi je me mêle, hein ?
- Je ne voulais pas vous blesser.
- Mais tu l'as fait.
- Je m'excuses, monsieur.
- Ne t'excuse pas. C'est bien parfois que dans notre existence quelque chose arrive parfois à nous secouer, à nous sortir de nos banalités.
Il régnait dans la maison une tristesse mouillée. L’air s’était alourdi malgré la brise qui venait des fenêtres ouvertes. La maison faisait du silence comme les orangers faisaient de la lumière. » p 90 a 1
Ces comités de vigilance créés pour tuer dans l'œuf tout mouvement de rébellion, ont vu le jour dans le foulée des revendications de groupes d'hommes stériles ou atteints d'une maladie grave dont les femmes ont voulu se débarrasser. En parallèle, d'autres groupes d'hommes se sont organisés pour avoir le droit de poursuivre leurs études. (p87)
Je pense à des choses effroyables: donner mon cours avec une ceinture d'explosifs autour de la taille. Faire tout sauter en citant Dostoïevski. Crever, au milieu de mes étudiants, en hurlant "Vive la littérature!" (...) Mais pour quelle cause? Pour libérer la littérature?
CES MOTS-LÀ :
bout de la langue
plaine en sang
dents de fer
contrebande
paquet de poison
éternité sombre
fiestas hilares
asphyxie
paysage désolant
jet de bave
note larguée
symphonie misérable
gueules cassées
yeux durs
billes sans larmes
les mots tombent sur la terre
la transforment en boue
les mots entrent dans ses entrailles
lui volent sa pesanteur
je sens les phrases
grouiller sous mes bottes
j’agrandis ma bouche
avec la barre d’un cri
je dégueule plus fort
mot crasse
mot orage
salive acide
syllabes meurtrières
barbelés de cris
mot génocidaire
mot pétrole
mot diamant de sang
combien d’autres fois
faut-il coudre nos bouches
charniers où notre langue
se décompose ?
que neige-t-il dans nos phrases ?
L'éternité a toujours existé. C'est le temps qui est venu après. Le temps, ça ne dure pas. Le temps, c'est l'enfant de l'éternité.
Le paradis est fait d'eau, de sol, de ciel
Et d'un regard que rien n'arrête.
Le regard est la matière secrète de l'espace.
Ne le tuez jamais.