AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Marcel Proust (1052)
A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du ..

Proust, que j'ai lu dans la belle édition NRF (collection Blanche), ne m'a donné qu'une envie : le gifler. Et pas une banale claque sur la joue. Non. Je parle ici d'une gifle violente comme on en voit dans les dessins animés de Bugs Bunny (vous savez, quand il met une brique dans son gant pour ensuite s'en servir afin de foutre une bonne claque à Daffy Duck).



Quel homme déplaisant ce Proust. Mais enfin, quel adulte consacre le quart de sa vie à vivre dans le passé, cloîtré dans un appartement, à refuser le présent, pour ainsi écrire un interminable cycle de romans sur la mémoire? Et si au moins sa jeunesse avait été un tant soit peu intéressante. Mais non! Cinquante page à se remémorer ses jérémiades d'enfant qui refusait de se coucher le soir car il voulait un dernier bisou de sa maman. Cinquante pages!



Commenter  J’apprécie          101
A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du ..

Que dire de Proust qui n'a pas était dis ? Cet auteur est un magicien . Il est le seul à réussir à passionner le lecteur avec des sujets relativement banals , mais qui entre ces mains sont de vraies mines d'or pour les amateurs de phrases qui on du sens , qui prennent le temps qu'il faut pour exprimer une idée , avec une maestria des mots . Proust c'est un héros , un génie de la littérature qui n'aura jamais d'égal. Tout lecteur doit avoir lu un des ces livres dans sa vie . Incroyable et magnifique .
Commenter  J’apprécie          101
A la recherche du temps perdu, tome 4 : Sod..

C'est non sans plaisir que j'ai retrouvé tous les personnages de la Recherche dans ce tome central, dans lequel Proust a glissé de nombreux traits d'humour. Nous y approfondissons la connaissances des personnalités du baron de Charlus et d'Albertine, à travers le thème de l'inversion, abordé dès le début du roman. La réception chez la princesse de Guermantes offre, une fois de plus, une délicieuse visite des salons aristocratiques. C'est également l'occasion de retrouver le "petit noyau" Verdurin : la Patronne, son mari et les "fidèles", le tout me paraissant encore plus ridicule que lorsqu'on les rencontre pour la première fois, dans Du côté de chez Swann.

Le roman se clôt sur la décision du narrateur d'épouser Albertine, de quoi donner assurément envie de lire le suivant !
Commenter  J’apprécie          100
A la recherche du temps perdu, tome 6 : Alb..

Tome 6, avec certaines péripéties énormes parfois préservées du spoiler permanent sur Proust.



Publié en 1925, le 6ème tome de la « Recherche », et le deuxième à être publié de manière posthume, souffre quelque peu par endroits, il faut le reconnaître, de l’absence des frénétiques relectures finales dont l’auteur avait le secret, et dont on mesure à cette occasion à quel point elles étaient nécessaires pour maintenir la cohérence de l’ensemble, et tout particulièrement la cohérence chronologique de cet édifice si subtil, si enchevêtré, et parfois si fragile… Du coup, le lecteur pourra sourire, le cas échéant, des quelques murakami-harukieries qui se glissent cette fois dans la narration proustienne, et qui infestent également modérément « Le temps retrouvé » (personnages redonnant la même information à la même personne à quelques dizaines de pages d’intervalle, événements réputés avoir eu lieu à deux moments distincts,… sans que ces incohérences mineures puissent être imputées à quelque maladie dégénérative ayant saisi tel ou tel protagoniste…) – « La prisonnière », bloc très homogène et presque monolithique à l’échelle de la « Recherche », en était de ce fait préservée, semble-t-il.



XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX

ATTENTION : si « À la recherche du temps perdu » n’est pas à proprement parler un roman à suspense, il n’en reste pas moins que les paragraphes suivants, à propos de ce sixième tome, contiennent, massivement, ce qu’il est convenu d’appeler des… SPOILERS !!! Vous voilà prévenu : si vous voulez bénéficier d’une lecture « vierge » du roman, passez maintenant votre chemin et n’allez pas plus loin.

XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXX



Après le départ brutal d’Albertine à la fin du tome précédent, le lecteur peut s’imaginer un instant, et l’auteur lui fournit habilement quelques raisons de le penser, que la narration va entamer un nouveau cycle d’allers-retours et de volte-faces amoureuses dont Swann d’abord, Saint-Loup un peu ensuite (avant que les révélations de « Sodome et Gomorrhe » n’aient là aussi quelque peu changé le regard du lecteur sur le personnage), et le narrateur lui-même enfin et surtout, nous avaient fourni les modèles précoces.



Racine, abondamment cité dans ce premier chapitre de plus de 100 pages, résonne étrangement dans le chassé-croisé de lettres, de télégrammes et de quiproquos qui, durant quelques jours, introduisent des accents d’authentique tragédie, dont la magnitude va se révéler avec le coup de théâtre, soigneusement orchestré comme tel, avec la part d’incrédulité et de déni qui y est attachée, que constitue la mort accidentelle d’Albertine, par cette providentielle – du point de vue de la narration et de l’épiphanie qui va désormais pouvoir se construire, finalement – chute de cheval : le cours des choses est désormais irrémédiablement changé, et le narrateur va longuement s’interroger sur ce caractère irrémédiable, précisément – tout en plongeant, montrant ainsi au lecteur que les voies de la « guérison » sont décidément bien curieuses, et que Marcel est décidément, encore ici, bien aveugle à lui-même, dans une enquête rétrospective détaillée sur les mœurs et les tromperies, réelles ou supposées, d’Albertine, donnant à lire l’écho puissant des pages de « La prisonnière », mais aussi de celles, plus anciennes, de "Sodome et Gomorrhe", voire de "À l'ombre des jeunes filles en fleurs". Et les réactions de Marcel aux informations issues de cette enquête aiguillent d’ailleurs le lecteur, par indices, vers une toute autre « Recherche », qui pourrait être entièrement écrite à partir des innombrables silences, omissions, palinodies et non-dits du narrateur, tout au long de l’œuvre, semant le doute sur bien des passages apparemment anodins des cinq premiers tomes, alors que l’on approche maintenant du terme de la quête : la relecture (du passé) invitant à la relecture (de l’œuvre), en somme.



« J’avais eu beau, en cherchant à connaître Albertine, puis à la posséder tout entière, n’obéir qu’au besoin de réduire par l’expérience à des éléments mesquinement semblables à ceux de notre moi, le mystère de tout être, tout pays, que l’imagination nous a fait paraître différents, et de pousser chacune de nos joies profondes vers sa propre destruction, je ne l’avais pu sans influer à mon tour sur la vie d’Albertine. »



Le chapitre II, avec ses 50 pages, est « déjà », nimbé d’un cynisme ne disant pas son nom, et malgré les dénégations du narrateur, celui du deuil et du retour à la normale, plus rapide que le lecteur ne s’y attendait sans doute, et contenant déjà les germes des aveux d’égoïsme et d’égotisme (Stendhal semble largement de retour dans ce tome, après le balzacien « Sodome et Gomorrhe » et le - au fond - très hugolien « La prisonnière ») qui foisonneront dans « Le temps retrouvé ». Retour au monde, et considérations plus urgentes qu’auparavant, semble-t-il, sur la nécessité de l’écriture (mais sans que les « moyens » d’échapper à la procrastination ne veuillent encore se révéler…),



« Mais pour d’autres amis, je me disais que, si l’état de ma santé continuait à s’aggraver et si je ne pouvais plus les voir, il serait agréable de continuer à écrire, pour avoir encore par là accès auprès d’eux, pour leur parler entre les lignes, les faire penser à mon gré, leur plaire, être reçu dans leur cœur. Je me disais cela, parce que les relations mondaines ayant tenu jusqu’ici une place dans ma vie quotidienne, un avenir où elles ne figureraient plus m’effrayait, et que cet expédient qui me permettrait de retenir sur moi l’attention, peut-être d’exciter l’admiration, de mes amis, jusqu’au jour où je serais assez bien pour recommencer à les voir, me consolait ; je me disais cela, mais je sentais bien que ce n’était pas vrai, que si j’aimais à me figurer leur attention comme l’objet de mon plaisir, ce plaisir était un plaisir intérieur, spirituel, solitaire, qu’eux ne pouvaient me donner et que je pouvais trouver non en causant avec eux, mais en écrivant loin d’eux ; et que, si je commençais à écrire, pour les voir indirectement, pour qu’ils eussent une meilleure idée de moi, pour me préparer une meilleure situation dans le monde, peut-être écrire m’ôterait l’envie de les voir, et la situation que la littérature m’aurait peut-être faite dans le monde, je n’aurais plus envie d’en jouir, car mon plaisir ne serait plus dans le monde, mais dans la littérature. »



Et ce n’est évidemment pas par hasard que, parallèlement au processus de deuil et d’oubli (rapide !) d’Albertine dans lequel est lancé le narrateur, le récit détaillé de la bonne fortune mondaine d’Odette et de Gilberte après la mort de Swann survient au même moment de la narration, la cruauté, l’ingratitude et « l’ironie du sort » n’étant jamais nommées, mais extrêmement présentes.



Les deux courts chapitres finaux de ce sixième tome (de 25 et 28 pages respectivement) préparent et annoncent largement, fût-ce encore à phrases couvertes, les révélations et l’aboutissement à venir : le séjour à Venise, si souvent évoqué depuis l’origine et Combray, permet à la fois de réajuster au moment « présent » la dichotomie nom / pays qui structurait la vision de l’imagination chez Marcel, ancrée jusqu’alors presque exclusivement dans sa double confrontation à Balbec, d’effacer « finalement » Albertine, et de récapituler les fondations d’une esthétique « neuve » qui va bientôt pouvoir s’épanouir, tandis que le voyage de retour avec sa mère permet à Marcel de clore symboliquement sa jeunesse - la mort de sa grand-mère lui ayant déjà fourni la fin de l'enfance, en apprenant d’elle certaines pièces familiales manquantes d’une part, et le mariage de Gilberte avec Saint-Loup, clôture d’un passé par excellence, d’autre part.



Tout est prêt pour l’épiphanie.

Commenter  J’apprécie          100
A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

C'est avec grand plaisir que j'ai lu ce deuxième tome de la Recherche. Le narrateur y découvre les jeunes filles, entre Gilberte dans la première partie et Albertine et ses amies dans la seconde et, avec elles, les amours de jeunesse. Ses vacances aux bains de mer de Balbec donnent lieu à de superbes descriptions de la mer à l'aspect changeant. Bref, un roman à la hauteur du tome précédent !
Commenter  J’apprécie          100
A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du ..

Attention, chef-d'oeuvre : c'est LE roman de la jalousie, servi par une écriture envoûtante. On se dit en le lisant, à l'instar de ses autres opus de La Recherche (dont celui-ci se lit comme un roman à part

), que Marcel Proust a tout compris des méandres de l'âme humaine, des moindres sentiments qui nous habitent. Toute l'oeuvre de ce grand écrivain français (le plus grand selon moi) est à découvrir d'urgence...
Commenter  J’apprécie          100
A la recherche du temps perdu, tome 5 : La ..

Là, mes amis, j'ai peur. Très peur. Des types bardés de diplômes littéraires ont déjà dit tout plein de choses intelligentes sur A la recherche du temps perdu. Alors j'ai l'air malin. Surtout qu'en plus La prisonnière n'est pas mon favori dans l'aventure de la madeleine perdue...







Les mauvaises langues racontent que Proust ce sont des phrases sans fin, que pendant des pages entières le narrateur épluche ses atermoiements, bref qu'il ne se passe pas grand chose et que c'est d'un ennui total.



Y'a parfois un peu de ça, je l'avoue. Surtout dans ce volume. (Nââân, j'exagère)







Pour ceux qui auraient lâché leur lecture à la page 40 du premier volume, sachez que depuis le narrateur a grandi, a fréquenté le beau monde (Du côté de Guermantes et aussi Sodome et Gomorrhe), et a convaincu la jeune Albertine de venir vivre chez lui dans son appartement parisien délaissé pour un temps par ses parents. La prisonnière aurait dû s'appeler Sodome et Gomorrhe 3, le découpage est d'ailleurs assez artificiel pour toute La recherche... Ne pas s'attendre à des scènes osées, évidemment. Le narrateur (appelons le ainsi pour le moment) soupçonne Albertine d'avoir des tendances gomorrhéennes et il est jaloux des femmes qu'elle a pu rencontrer ou qu'elle pourrait voir ou revoir... D'où de longs passages où il épluche ses sentiments, ses stratégies compliquées du style "puisqu'elle accepte de ne pas sortir, c'est que cela ne risquait rien, donc elle peut sortir"... Ce qui ne l'empêche pas de regarder d'autres jeunes filles, de désirer et redouter le départ d'Albertine. Excellemment décrit, évidemment, et le narrateur assume totalement le ridicule éventuel de son attitude.







J'admets donc que ce ne sont pas mes passages favoris, même si brillants et fins.







Ce qui a boosté ma lecture, c'est de savoir que j'allais y retrouver la mort de Bergotte et le petit pan de mur jaune ( ça tient drôlement bien la route, on ne s'en lasse pas), la clan Verdurin (la "Patronne" y est toujours excellente, ceux qui n'aiment pas Proust pourraient bien ne lire que les réceptions chez les Verdurin, on s'amuse vraiment beaucoup), et surtout Charlus, personnage de plus en plus pathétique mais attachant justement, c'est là que Morel le repousse et les Verdurin le virent de leur salon... Et sa sortie grandiose avec la reine de Naples. Quelle classe, cette reine!







J'oubliais Françoise, fidèle au poste et détestant Albertine, et ajoute qu'Oriane de Guermantes, son salon, ses mots et ses vacheries sont quasi absents.Mais je sais que je la retrouverai par la suite.







Voilà, voilà, le résumé, ça c'est fait.







(Au fait, chers z'élèves peut-être égarés ici, sachez que mon objectif principal est de convaincre de lire Proust et que je n'ai pas l'intention d'en faire une étude approfondie. Alors faites comme moi, lisez vous-mêmes. Proust c'est comme le sport, ça se découvre sur le terrain. Seul le narrateur passe ses journées allongé... )







Il n'a pas fallu moins que la lecture de Proust contre la déchéance pour relancer une lecture de A la recherche du temps perdu enlisée depuis trois ans au moins du côté de Sodome et Gomorrhe. Lecture commune avec maggie, merci à elle! Resteront La fugitive et Le temps retrouvé, j'espère trouver des co-lecteurs, et j'aurai terminé ma troisième lecture de l'oeuvre. Et dernière, vraisemblablement, même si je n'exclus pas de me délecter de certains passages ultérieurement. Mais n'anticipons pas.







Qu'on aime ou pas, le roman est si fabuleux qu'à chaque lecture on remarque de nouveaux passages et on n'a pas l'impression de relire... Alors, fort égoïstement, je ne vais pas faire une étude de A à Z de La prisonnière, mais déposer ici quelques moments de lecture, qui auraient sans doute été autres avant ou après...







Pour tenter de prouver que la lecture de Proust peut être réjouissante, un premier passage included Madame Verdurin écoutant une oeuvre de Vinteuil (des pages géniales sur l'effet de la musique sur le narrateur, mais bon, j'ai dû sélectionner)(hélas)







"Madame Verdurin ne disait pas 'Vous comprenez que je la connais un peu cette musique, et un peu encore! S'il me fallait exprimer tout ce que je ressens vous n'en auriez pas fini!' Elle ne le disait pas. Mais sa taille droite et immobile, ses yeux sans expression, ses mèches fuyantes le disaient pour elle. Ils disaient aussi son courage, que les musiciens pouvaient y aller, ne pas ménager ses nerfs, qu'elle ne flancherait pas à l'andante, qu'elle ne crierait pas à l'allegro."











http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/a/a2/Vermeer-view-of-delft.jpg/230px-Vermeer-view-of-delft.jpg







La mort de Bergotte (et je vous passe les considérations ironiques de Proust sur les maladies et les médecins...)(le pauvre devait savoir de quoi il parlait...)



"Enfin il fut devant le Ver Meer qu'il se rappelait plus éclatant, plus différent de tout ce qu'il connaissait, mais où, grâce à l'article du critique, il remarqua pour la première fois des petits personnages en bleu, que le sable était rose, et enfin la précieuse matière du tout petit pan de mur jaune. Ses étourdissements augmentaient; il attachait son regard, comme un enfant à un papillon jaune qu'il veut saisir, au précieux petit pan de mur. 'C'est ainsi que j'aurais dû écrire, disait-il. Mes derniers livres sont trop secs, il aurait fallu passer plusieurs couches de couleur, rendre ma phrase en elle même précieuse, comme ce petit pan de mur jaune.' "











Les robes de Fortuny :



"Ainsi les robes de Fortuny, fidèlement antiques mais puissamment originales, faisaient apparaître comme un décor, avec une plus grande force d'évocation même qu'un décor puisque le décor restait à imaginer, la Venise tout encombrée d'orient où elles auraient été portées, dont elles étaient, mieux qu'une relique dans la châsse de Saint-Marc, évocatrices du soleil et des turbans environnants, la couleur fragmentée, mystérieuse et complémentaire. Tout avait péri de ce temps, mais tout renaissait, évoqué, pour les relier entre elles par la splendeur du paysage et le grouillement de la vie, par le surgissement parcellaire et survivant des étoffes des dogaresses."







"Si (...) je trouvais la duchesse ennuagée dans la brume d'une robe en crêpe de Chine gris, j'acceptais cet aspect que je sentais dû à des causes complexes et qui n'eût pu être changé, je me laissais envahir par l'atmosphère qu'il dégageait, comme la fin de certaines après-midi ouatée en gris perle par un brouillard vaporeux; si au contraire cette robe de chambre était chinoise avec des flammes jaunes et rouges, je la regardais comme un couchant qui s'allume; ces toilettes n'étaient pas un décor quelconque remplaçable à volonté, mais une réalité donnée et poétique comme est celle du temps qu'il fait, comme est la lumière spéciale à une certaine heure."







Pour en prendre plein les yeux, et plus de détails encore, voir ici.







L'hommage à Swann http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/d/d0/Tissot_Cercle_Detail.jpg



"Et pourtant, cher Charles Swann, que j'ai si peu connu quand j'étais encore si jeune et vous si près du tombeau, c'est déjà parce que celui que vous deviez considérer comme un petit imbécile a fait de vous le héros d'un de ses romans, qu'on recommence à parler de vous et que peut-être vous vivrez. Si dans le tableau de Tissot représentant le balcon du Cercle de la Rue Royale, où vous êtes entre Gallifet, Edmond de Polignac et Saint-Maurice, on parle tant de vous, c'est parce qu'on voit qu'il y a quelques traits de vous dans le personnage de Swann.







Balcon du Cercle de la Rue Royale, Jame Tissot, 1868







Et Marcel? Puique Marcel il y a quand même...



"Mon chéri et cher Marcel, j'arrive moins vite que ce cycliste dont je voudrais bien prendre la bécane pour être plus tôt près de vous. (...) Toute à vous, ton Albertine."







"Cette habitude vieille de tant d'années, de l'ajournement perpétuel, de ce que M. de Charlus flétrissait sous le nom de procrastination" laissent ses projets au point mort, mais les aubépines et les pommiers en fleurs, la madeleine, tout cela revient au fil du roman, et lui rappellent son désir d'être un artiste.







"En abandonnant en fait cette ambition avais-je renoncé à quelque chose de réel? La vie pouvait-elle me consoler de l'art, y avait-il dans l'art une réalité plus profonde où notre personnalité véritable trouve une expression que ne lui donnent pas les actions de la vie?"








Lien : http://en-lisant-en-voyagean..
Commenter  J’apprécie          105
À la recherche du temps perdu - Intégrale

Ce qui m'a poussé à ouvrir ce monument de la littérature est une question entendue à la radio par une dame : "A tous ceux qui me disent qu'ils ont lu la Recherche, je demande "Mais que devient Mme Verdurin ?"

Piqué au vif par cette remarque, je me suis précipité sur cette excellent édition Quarto (merci Françoise Cibiel). A raison d'une lecture quotidienne, 2 mois et demi pour achever les 2400 pages. Une épreuve dont on ne ressort pas indemne. On repense au "La vie est trop courte, Proust trop long" d'Anatole France. Rien à regretter pourtant. Je vous le conseille vivement pour l'été, à lire dans un coin calme et frais.
Commenter  J’apprécie          100
À la recherche du temps perdu, tome 3 : Le ..

Dans une vidéo youtube Guy Schoeller raconte que Gaston Gallimard lui avait appris à lire Proust de la manière suivante : « Vingt pages par jour du lundi au samedi ». Tout comme le premier tome, cette vitesse de lecture est très agréable pour se baigner dans le fleuve proustien sans s'y noyer. Cela crée un rendez-vous quotidien avec juste ce qu'il faut pour savourer ou patienter lors des rares passages m'ayant paru longs. de plus cela permet d'avoir une autre lecture en parallèle.



Les deux premières parties furent un régal à la hauteur du tome 2 « À l'ombre des jeunes filles en fleur » : toujours autant de maximes philosophiques et de réflexions sur la société de l'époque. Les aventures du narrateur sont passionnantes à suivre jusqu'à la troisième et dernière partie où le narrateur disparait complètement : l'écrivain va dresser un portrait de l'aristocratie de l'époque sur presque deux-cents pages. C'est très long et malheureusement peu passionnant pour moi.



Heureusement le baron de Charlus réapparait sur la fin, ce personnage bouffonesque et totalement dans l'excès me fait beaucoup rire.



Challenge Pavés 2024

Challenge Multi-défis 2024
Commenter  J’apprécie          90
A la recherche du temps perdu, tome 5 : La ..

Dans ce volume, la prisonnière c'est Albertine. Malgré tout ce qu'elle a pu caché je l'ai plainte du début à la fin.

Qu'on ne me dise pas qu'il est question d'amour quand un homme fait escorter celle qu'il aime par Andrée, son amie, qui lui fait au retour de chaque sortie un compte-rendu détaillé. Où sont-elles allées ? Qui Albertine a-t-elle rencontré ?

Le narrateur, on sait enfin qu'il se nomme Marcel ( car son prénom est cité ici pour la première fois ), pense d'Albertine qu'elle a des désirs pervers, mais qui est le plus pervers des deux sinon lui ? Un homme qui se sert du corps de son amie, de sa présence, de son sommeil, pour atteindre l'apaisement sans tenir compte des sentiments de la jeune fille. Il est souvent indifférent, voire méprisant. Il l'attend impatiemment, s'imaginant à longueur de journées où il reste enfermé chez lui, s'emprisonnant lui-même, où elle peut être, ce qu'elle fait et avec qui. Plus il est jaloux moins il a envie de la quitter car il l'aime uniquement dans la jalousie, la tristesse et la souffrance. Enfin l'aimer, ce n'est pas le terme exact quant à ce qu'il ressent pour elle. La jalousie associée à la possession ne font pas bon ménage avec l'amour. Il ne supporte pas que la jeune fille puisse lui échapper et ne pas lui appartenir corps et âme. Il voudrait entrer en rivalité avec les amant(e)s d'Albertine, la leur arracher et sortir vainqueur du combat.

Cependant quand Albertine reprend une attitude soumise et plus ou moins tendre elle ne l'intéresse plus, elle l'ennuie. C'est dans ces moments qu'il aimerait rompre définitivement. D'ailleurs il fait preuve d'un certain sadisme en lui disant que tout est fini, qu'il faut en arrêter là, qu'elle doit partir et ne plus chercher à le revoir, jamais. Et il espère au final une réconciliation sur l'oreiller après lui avoir fait peur et que ça lui aura servi de leçon.



Cette relation entre eux ça ressemble à tout sauf à de l'amour. L'amour, inutile de dire qu'il est fait de passion, de tendresse profonde, de douceur, de partage, et surtout de confiance.

Le narrateur a tout du pervers manipulateur. Voilà c'est dit... Il ne la frapperait pas mais ses mots sont méchants, ses questions et ses accusations sont assassines. Même si Albertine a menti, même si elle a réussi à le tromper pendant son séjour où elle vit avec Marcel dans l'appartement familial déserté des parents, je serais tentée de dire que c'est bien fait pour lui, qu'il n'aurait que ce qu'il mérite en retour de ce qu'il lui fait subir quotidiennement, allant pousser le bouchon un peu trop loin en cherchant par tous les moyens à l'empêcher de se rendre où elle veut, seule ou accompagnée de lui, pour qu'elle ne rencontre pas ses anciennes amies.



A la recherche du temps perdu, tome 5 : La Prisonnière est tel un huis-clos étouffant. Marcel Proust développe la jalousie du narrateur qui livre ses états d'âme du début à la fin du récit.

Et à vrai dire ça m'a exaspérée de le voir obnubilé par Albertine jusqu'à chercher les plus petits indices de sa tromperie, vouloir en faire une femme-objet façonnée de ses mains à sa disposition, surveillant ses moindres faits, gestes et paroles. Pour lui elle a tous les vices, elle est menteuse, dit tout et son contraire. Mais il pense l'aimer à sa manière tout en enrageant de ne pas la posséder complètement car s'il dispose de son corps il n'a pas accès à ses pensées, à ses secrets.



Mis à part le couple Albertine/Marcel qui bat de l'aile, Mme Verdurin s'est chargée de détruire celui de Charlus avec Morel à l'issue d'un soirée où M. de Charlus a récolté tous les honneurs en mettant avec ses invités la Patronne de côté. Vexée, humiliée, elle décide de se venger sans attendre. Ses propos mensongers et diffamatoires font mouche et Mme Verdurin  arrive à retourner Morel contre Charlus qui, assommé, voit son bonheur s'effondrer.



Un volume au récit assez complexe de par les réflexions contradictoires du narrateur que je n'ai aucune envie d'appeler par son prénom parce que décidément je ne me sens pas du tout proche de lui, n'arrive pas à lui trouver d'excuses quant à son comportement envers Albertine. Il aurait dû partir de Balbec seul, la laisser mener une vie libre et quant à lui partir à Venise comme il en rêvait et s'y faire de nouvelles relations charnelles et éphèméres.



Ce cinquième tome fini nous laisse avec l'image de malles remplies et d'une hirondelle qui vient de s'envoler, laissant le narrateur seul avec sa conscience. Je ne suis d'ailleurs pas mécontente qu'elle l'ait quitté de sa propre initiative avant qu'il n'ait eu le plaisir de lui demander en premier de s'en aller. Bref il récolte le résultat logique de sa jalousie maladive et de sa possessivité.

Et elle, l'aimait-elle un peu ? Qu'attendait-elle de lui ? Des questions restent sans réponses. Voyant son amour sans réciprocité ou la rupture proche, ou les deux, ou un avenir commun avec un semblant de vie conjugale en restant prisonnière de lui et de sa jalousie morbide, tous ces paramètres ont certainement pesé dans la balance pour qu'elle le quitte aussi subitement.

Certainement qu'Albertine ( sans la rendre noire comme du charbon comme le fait le narrateur ) a des choses à se reprocher, et peu importe, on l'apprendra bien assez tôt, mais là le calvaire a assez duré pour elle. Il aurait dû se douter qu'une jeune fille qui était gaie et libre comme l'air iodé de Balbec finirait par devenir triste et par s'étioler comme une fleur en manque d'eau avec pour seul compagnon un jeune homme rigide, soupçonneux et morose flanqué d'une servante qui en plus la déteste, voyant en elle une enjôleuse et une intrigante, ayant prévenu le jeune homme " qu'elle lui ferait du chagrin ". Du chagrin qu'il sait se provoquer lui-même. 

Les voilà tout deux libérés du piège mental qui les enfermaient dans une relation malsaine.

La liberté retrouvée pour Albertine qui pourra aller papillonner dans d'autres lieux et son malheureux compagnon qui peut-être s'apercevra de ses erreurs, peut-être même qu'elle lui manquera et qu'il réalisera qu'il l'aimait vraiment, mais trop tard pour lui. Je crains le pire dans le volume suivant vu qu'on va certainement le retrouver en train de faire son Calimero. A suivre donc...
Commenter  J’apprécie          90
A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du ..

Je suis pas peu fière. D'être allée au bout de ce premier volume de la recherche du temps perdu. A mon rythme, en un mois, entrecoupé d'autres lectures. Mais j'ai vraiment adoré cette expérience de lecture. J'ai été surprise de découvrir une narration fluide et une plume très agréable à suivre, alors que je craignais une certaine résistance, parce qu'on connaît tous la réputation du style proustien, ces si longues phrases, son vocabulaire exigeant. Mais on se laisse très facilement envelopper par ce style.

J'ai bien aimé le début de Combray, le fameux passage de la Madeleine est absolu époustouflant de génie d'écriture. Mais je pense que c'est Un amour de Swann qui m'a le plus plu, et cette façon de décortiquer toutes les étapes du sentiment amoureux, et de la jalousie aussi. J'ai beaucoup apprécié aussi les longs passages contemplatifs, les descriptions de la nature, celle de Combray ou celle du Bois à la toute fin. Et la façon de l'auteur de décortiquer chacune de ses perceptions pour les ériger en un grand tout à l'universalité saisissante.
Commenter  J’apprécie          90
À la recherche du temps perdu, tome 3 : Le ..

Le narrateur et ses parents habitent désormais dans un appartement de l’hôtel particulier des Guermantes dans le faubourg Saint-Germain.

Il se prend d'amour pour la duchesse, n'hésitant pas à faire des promenades quotidiennes afin de se trouver sur son chemin, attitude qu'on pourrait qualifier aujourd'hui de " lourde " et qui va finir par exaspérer la duchesse.

Le jeune homme part retrouver son ami Robert de Saint-Loup à Doncières dans sa caserne. Il va y passer quelque temps par amitié mais pas uniquement, car il a en tête de demander à son ami de lui présenter sa tante.

L'amour est aveugle... Mon dieu ce que j'ai pu le trouver ridicule dans ce rôle d'amoureux transi, au fond pas vraiment amoureux de la duchesse mais plutôt de ce que le nom de Guermantes représente à ses yeux dans tout son mystère. Un nom qui prend sa source et renaît du passé à Combray où, enfant, il passait ses vacances.

Bref, ses amours dans ce volume restent au point mort parce qu'il ne tombe amoureux que de femmes qui restent inatteignables. Il fantasme, fantasme beaucoup jusqu'à ce qu'il voie la réalité en face.

Il arrive à obtenir un rendez-vous avec Mme de Stermaria par l'intermédiaire de Saint-Loup qui lui a presque promis que le soir même il l'aurait dans son lit.

Le narrateur était en attente impatiente de ce tête-à-tête, fébrile, imaginant la scène dans tous les détails. Le rendez-vous est annulé et Saint-loup le retrouve quasiment à chialer comme un môme à qui on aurait retiré un jouet de ses mains. Larmes qu'on aura pas vu couler à la mort de sa grand-mère pourtant adorée. Le narrateur est tout en contradictions.



Albertine fait son retour mais d'Albertine il n'est plus amoureux. Il n'est même plus son ami. Pourtant il va réussir à lui arracher des caresses et un baiser sur la joue. Baiser qu'il avait fantasmé depuis longtemps et que finalement ne s'avère pas comme il l'avait imaginé.

Albertine n'est plus dans son corps de jeune fille en fleurs, son vocabulaire a un peu évolué depuis Balbec mais pas assez pour le satisfaire. Le jeune homme est un brin méprisant, ça lui ferait du bien de tomber de haut. Situation qui risque de lui arriver plus tôt qu'on ne le croit.



Dans " À la recherche du temps perdu, tome 3 : Le côté de Guermantes ", le narrateur arrive à ses fins en fréquentant les salons mondains, celui de Mme de Villeparisis puis de fil en aiguille le salon hiérarchisé de la duchesse de Guermantes où les conversations s'éternisent. Et c'est franchement d'un ennui total pendant une bonne partie du volume, pas la peine de se mentir, de mentir aux autres, de crâner en disant que tout Marcel Proust est un régal même si on aime son écriture. Tout n'est pas passionnant. L'action est absente. Côté intrigue il ne se passe rien de particulier. On a l'impression de temps qui passe très très lentement.

Je me dis que ces aristocrates devaient bien s'emmerder dans ces réunions où les sujets tournent autour de l'affaire Dreyfus et de leurs petites personnes. Dans la haute société du faubourg Saint-Germain, les personnages ( la plupart détestables et oisifs ) sont tout occupés du soin de leur généalogie et cultivent le savoureux plaisir de la médisance. Oriane de Guermantes aura ainsi le plaisir de comparer Mme de Cambremer à une vache.

Elle devrait éviter d'ironiser, de fanfaronner et de balayer devant sa porte quand on apprend que son mari accumule les conquêtes. Elle devrait faire profil bas mais reste méchante avec son entourage, allant jusqu'à annuler une permission de sortie accordée à son valet par son mari. La simple vue de la joie sur le visage du valet à l'idée de pouvoir passer quelques heures avec sa promise lui a suffi pour supprimer la permission. Par sadisme, parce qu'elle-même n'est pas heureuse et frustrée ?

Le narrateur apprendra que de Norpois aurait dit de lui qu'il était un flatteur à moitié hystérique. Il en est honteux pour sa réputation.

La famille de Robert de Saint-Loup s'en donne à coeur joie de critiquer sa " cocotte " ( Une surprise totale pour le narrateur qui l'avait connue dans un bordel, eue pour rien, alors qu'elle plume Saint-loup ).

Sa famille veut donc le faire rompre et envoie l'oncle Charlus pour espionner ses allées et venues.

Charlus qui voudrait bien diriger la vie du narrateur et lui donne rendez-vous chez lui. Le jeune homme se fait malmener et hurler dessus sans rien y comprendre. Celui-ci est-il si naïf pour n'avoir encore pas compris ce que Charlus attend de lui ? Suite au prochain épisode.



Celui qui m'a fait le plus de peine c'est Charles Swann qu'une maladie grave commence à défigurer. D'après ce qu'il confie à Oriane de Guermantes, ses jours seraient comptés. Les Guermantes, aussi bien elle que son mari, Basin, restent pour le moins circonspects, doutant de la vérité à propos de la confession de Swann, voire indifférents. Le plus important pour eux est de ne pas arriver en retard à leur soirée. Ils ont assez perdu de temps, comprenons-les les pauvres ! De plus Oriane a eu une faute de goût vestimentaire, elle a mis des chaussures noires avec sa robe rouge. Son mari lui ordonne presque aussitôt d'aller les changer pour ses rouge qui seraient mieux assortis à la robe.

Quelle futilité, quelle bêtise, quelle tristesse... J'étais à deux doigts de faire cocotte-minute devant cette froideur et ce manque d'empathie.



Malgré ce snobisme, les médisances, les mesquineries, les longueurs assez décourageantes dans ce volume, heureusement subsiste quelque chose d'autre d'indéfinissable et d'addictif qui pousse à lire le volume suivant. Est-ce comme entretenir une intimité avec les mots, le texte, le narrateur, certains personnages ? C'est en tout cas assez profond et indéfinissable pour continuer à se promener sans se perdre dans ce labyrinthe qu'est la Recherche.















Commenter  J’apprécie          90
À la recherche du temps perdu - Intégrale

Que dire sur Proust qui n'aurait pas déjà été dit ?

Cette oeuvre est l'essence même de ce pourquoi on écrit et on lit des livres.

Si vous êtes l'une de ces âmes nées nostalgiques, et qui sait être émue par une atmosphère, un souvenir, un éclat de lumière, alors cette oeuvre monde est faite pour vous.

À mon sens, elle explore principalement ce qui tient lieu d'éternité en-dehors du spectre religieux. Le célébrissime épisode de la madeleine en est l'un des exemples : où survivent ces souvenirs qu'un rien imprévisible peut ramener à la mémoire ?

Ce sont ces instants que le narrateur personnage (puisqu'il ne s'agit pas d'une réelle autobiographie, bien que Proust l'oublie parfois en cours de route) va essayer de chercher pendant plusieurs milliers de pages, pour composer une oeuvre à venir que l'on ne lira jamais, affrontant la question douloureuse du temps qui passe, de ce qui reste, de ce qui change, de l'amour, de la noblesse, de la matière et de la mémoire pour reprendre Bergson...

C'est l'une de ces lectures amicales, à la manière de Montaigne, qui parasite notre vision du monde au point de la voir ensuite partout.

Je m'étais lancé dans sa lecture il y a 10 ans, pendant 8 mois, sans lire autre chose, et elle fait désormais partie intégrante de ma vie intime.

C'est une lecture difficile, parfois pénible, mais qui touche à plusieurs moments, sans prévenir, au sublime, à ces instants de lecture où tout ce que l'on est s'exclame : "il est donc possible de dire cela avec des mots !"
Commenter  J’apprécie          90
A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du ..

On a un peu fait à Proust la réputation de "boss final du game" littéraire, celui dont on referme l'oeuvre en se disant que maintenant, on est un lecteur "résilient" en mesure de se frayer un passage à travers toutes les jungles de papier. C'est à la fois justifié et exagéré.



D'un côté, il est vrai que ce n'est pas à la portée du premier venu. Sans en remettre une couche sur la syntaxe archi-labyrinthique qui caractérise le style, on peut souligner le caractère intermédiaire de l'oeuvre entre réalité et fiction, le fait qu'il n'y a pas d'histoire à proprement parler mais plutôt une suite non-linéaire d'anecdotes où l'auteur s'intéresse plus profondément à la construction des affects et des obsessions, pleins de faux paradoxes, plutôt qu'à l'édification d'une intrigue à portée éducative ou divertissante. Proust a quelques phénomènes psychologiques à décrire, principalement sur la mémoire, et il n'est pas question de lâcher le morceau avant d'avoir décrit chaque phénomène dans toute sa complexité et toute sa portée. La fiction, largement inspirée par sa propre vie et celle de ses connaissances, n'est là que pour fournir un vivier d'explicitation, une galerie d'exemples sans lesquels toute démonstration reste abstraite. Dès lors, il est absolument évident que le livre est illisible pour un lecteur peu endurci, non seulement à la littérature de fiction, mais plus spécifiquement au roman voire à l'essai psychologique.



Cela étant, d'un autre côté, j'ai trouvé le propos beaucoup plus accessible que nombre de romans qui sont, eux, de pures fictions (coucou Balzac, coucou Duras). La prose n'est pas du tout impersonnelle, avec de l'enthousiasme, de la confusion, de l'humour, beaucoup d'observations d'un recul remarquable sur la bonne société de ce début de XXème siècle. Là où tout un chacun voit et ressent ce qui l'entoure sans s'y arrêter, l'auteur appartient à cette espèce d'individu qui non seulement voit et ressent, mais veut comprendre le lien entre le réel et la sensation induite ; cela passe par une description méticuleuse dont un détail parfois minuscule entraîne des associations d'idées généralement inconscientes, sauf dans la tête du narrateur ou de Swann, ce qui, par mimétisme, invite à poser un regard plus attentif sur le monde. Au-delà de l'art littéraire, il y a là une encyclopédie d'oeuvres et d'artistes contemporains ou antérieurs à Proust, souvent tombés dans l'oubli collectif, qui incite le lecteur à aller écouter un morceau de Saint-Saëns par-ci, à chercher des images de la chapelle Sixtine par-là ; bref, l'activité du lecteur ne se limite pas seulement au texte mais s'étend aussi à la redécouverte des très nombreuses références esthétiques du récit. Quelle que soit la résonance, parfois inégale du propos tenu par l'auteur (impression d'ailleurs assez proustienne), il est plaisant d'avoir le sentiment constant de lire un grand écrivain de bout en bout, et non pas par intermittences.



Une oeuvre pas du tout évidente, donc, mais en vue de laquelle cela vaut vraiment le coup de s'aguerrir comme lecteur. Même ainsi, une seule lecture n'est vraisemblablement pas suffisante pour tout saisir, mais suffisamment marquante par endroits pour accepter d'y revenir par passages.
Commenter  J’apprécie          90
A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du ..

Une fois lancé, impossible de s’arrêter ! Marcel Proust m’a hypnotisé dès les premières lignes de Du côté de chez Swann. Il convoque nos propres souvenirs à travers les siens pour une mise à nu et un travail introspectif.

 

Une fois mes appréhensions et mes craintes envolées, j’ai plongé dans un autre monde, loin, très loin du quotidien et de ses actualités.

 

Pour ce premier tome, ma lecture a été aisée. Proust se révèle même à être très drôle parfois ! L’appareil critique m’a beaucoup aidé dans la compréhension de certains passages.

 

L’envoutement est dû à la délicatesse et la finesse des détails donnés dans les lieux, les personnages, les sensations et les sentiments éprouvés lors des différentes pérégrinations du narrateur. à Combray ou à Paris. J’avais l’impression de ressentir les mêmes choses que lui, les mêmes odeurs, les mêmes saveurs, les mêmes sons lorsqu’il sent, goute ou entend. C’est un coup de foudre littéraire !

 

La partie 1 trouve sa suite dans la partie 3. La partie 2 sur la vie de Swann, et de sa passion amoureuse avec Odette de Crécy, peut se lire indépendamment. Sur ce dernier point, je ferais une prochaine publication avec le livre édité aux éditions le Livre de poche.

Commenter  J’apprécie          90
A la recherche du temps perdu, tome 1 : Du ..

Pour moi, il est sans doute le meilleur de la langue française, car il correspond exactement à ma sensibilité émotionnelle,tant dans le ressenti du narrateur que dans l’analyse des événements, puis le style répond idéalement à mes goûts de narration et mes envies d’envolées poétiques ou nostalgiques. [...] Sur ce premier tome, une nouvelle lecture m’a surprise dans mon appréciation générale de l’histoire. La première fois, avide de connaître le dénouement des amours de Swan, j’avais trouvé la première partie un peu difficile à lire, à la hauteur de sa mauvaise réputation, presque ennuyante, notamment ce premier chapitre, tout simplement incompréhensible. En revanche, avec le recul, connaissant désormais tous les personnages et leur profondeur, je me suis délecté de cette première partie; et ce premier chapitre fut passionnant ! Tout reprenait place et sa juste mesure: j’ai été impressionné de voir la cohérence de cette œuvre écrite et développée sur tant d’années.
Lien : https://www.instagram.com/p/..
Commenter  J’apprécie          90
A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

Après l'enfance retrouvée que nous avons découverte dans le premier volume de la recherche, Proust s'attaque ici à l'adolescence, aux premières amours, aux expériences solitaires, de groupe, exclusives... Ce sont toutes les émotions d'un âge durant lequel chacun s'ouvre avant de mûrir qui rayonnent ici. En fleur.

Le souffle vit toujours dans la prose de Proust, ce souffle qui vous a animé, qu'il rappelle en n'écrivant pas au rythme d'une histoire , mais à celui des émotions et du souvenir qu'elles laissent. On croise la société de l'époque, ici. Industrieuse, tiraillée entre un ancien et un nouveau monde, déjà. Proust survole tout ceci. Les émotions sont le seul guide de ce texte, et c'est ainsi qu'à partir de ceci il nous fait comprendre, ressentir, cela. Plutôt que de raconter.

Des années plus tard, je poursuis mon immersion dans le monde de Marcel Proust avec ce deuxième volet, comprenant mieux peut-être ses intentions, du pas lent qu'il nous impose. Magique.

Commenter  J’apprécie          90
A la recherche du temps perdu, tome 6 : Alb..

Albertine, retenue « prisonnière » dans le roman précédent, s'est enfuie « avec ses malles » et le narrateur va devoir faire le deuil de son amour d'abord, puis le deuil à proprement parler d'Albertine avec tout ce que cela comporte de jalousie rétrospective.

D'abord il se comporte en amoureux maladroit en envoyant Saint-Loup espionner la belle toujours soupçonnée de saphisme chez les Bontemps, puis une erreur de son ami Bloch plaidant sa cause auprès de cette même famille et, pour couronner l’ensemble, il a des ennuis policiers, pour avoir invité chez lui, une petite fille pour se consoler et à laquelle il a donné cinq cent francs.



« Il y a des moments dans la vie où une sorte de beauté naît de la multiplicité des ennuis qui nous assaillent, entrecroisés comme des leitmotive wagnériens… »



Dès lors, on assiste à une sorte d’enquête du narrateur, une recherche du passé au présent qui doit déboucher sur l’avenir. C’est aussi le temps des retrouvailles avec Gilberte, à présent Mlle de Forcheville, Odette s’étant remariée après la mort de Swann. Le temps de la revanche a en quelque sorte sonné pour Gilberte, méprisée dans les salons et notamment celui des Guermantes pour être la fille du « juif Swann. » Petit à petit, elle conquiert le monde et bien sûr, son mariage avec Saint-Loup n’y est pas étranger.

On peut établir, puisque le narrateur le permet, un parallèle en négatif dans sa relation entre lui et Albertine avec celle de Swann et d’Odette. Swann avait gardé Odette jusqu’à sa mort et la voyait chez elle tandis que le narrateur a retenu Albertine chez lui et elle s’est enfuie.



« Car bien souvent pour que nous découvrions que nous sommes amoureux, peut-être même pour que nous le devenions, il faut qu’arrive le jour de la séparation. »



Il continue néanmoins à se faire du mal après cette rupture pour le moins définitive. Il envoie des enquêteurs et on lui rapporte ce qu’il pensait d’Albertine mais souvent en pire. Sont-ce des ragots ou pas ? Il développe aussi cette interrogation se consolant avec Andrée par exemple. Commence alors une longue méditation sur les mensonges des uns et des autres, que ce soit les amours cachées d’Albertine ou le mépris affiché puis « réparé » de la duchesse de Guermantes envers sa mère.

Il se console aussi à Venise dans un voyage avec sa mère. Tout dans la ville lui rappelle Combray « en plus lumineux ». Il s’évade seul dans les rues, pris par la beauté de la ville que ce soit l’architecture, les peintures où il retrouve par exemple certains manteaux à la mode dans un tableau de Carpaccio - qui lui rappelle Albertine bien sûr – et les jeunes filles même, « une jeune marchande de verrerie à la carnation de fleur » :

« La beauté de ses dix-sept ans était si noble, si radieuse, que c’était un vrai Titien à acquérir avant de s’en aller. »



Revenu de Venise, le narrateur retrouve Gilberte devenue Mme de Saint-Loup et qui se plaint des tromperies de son mari et l’homosexualité de Robert de Saint-Loup est révélée. Une fois encore, le narrateur revient en arrière, rassemblant les indices qui iraient dans ce sens :



« Je me rappelai que le premier jour où j’avais aperçu Saint-Loup à Balbec, si blond, d’une manière si précieuse et rare, contourné, faisant voler son monocle devant lui, je lui avais trouvé un air efféminé, qui n’était certes pas l’effet de ce que j’apprenais de lui maintenant, mais de la grâce particulière aux Guermantes, la finesse de cette porcelaine de Saxe en laquelle la duchesse était modelée aussi. »



De même, Gilberte lui avoue qu’elle l’a aimé au premier regard et il s’imagine qu’Albertine ressuscitée lui eût dit la même chose.



Encore une fois, on ne le répétera jamais assez, chacun peut se retrouver dans Proust. Françoise Sagan, paraît-il, conseillait dans son « ordonnance de lecture », de lire Albertine disparue, pour soigner les chagrins d’amour. On sourit souvent, en effet, de ce retour en amnésie.

Commenter  J’apprécie          90
À la recherche du temps perdu, tome 3 : Le ..

Que se passe-t-il chez les Guermantes, dans le salon le plus prestigieux du faubourg Saint-Germain que Marcel souhaite intégrer à tout prix ? Pas grand-chose, hélas ! Hormis quelques sourires crispés et toutes sortes de méchancetés en robe du soir.

Je me suis poliment ennuyée dans ce 3ème tome... que j’ai trouvé plus mondain, plus politique - il y est beaucoup question de l’affaire Dreyfus- et bien plus long que les précédents.

Les salons parisiens y tiennent une place importante et ce n’est pas toujours facile d’identifier chaque personnage et sa lignée, de suivre les intrigues, les poisons et les cachotteries. Ce qui est certain : Proust a toujours l’ironie parfaite, la formule juste pour révéler la laideur et la vacuité derrière les monocles et sous les chapeaux.

À la fenêtre des salons, on respire un peu : c’est toujours la grâce de Marcel qui nous entraîne d’une rencontre à l’autre, d’une fulgurance à l’autre, et nous fait vivre des scènes bouleversantes et inattendues, notamment avec le personnage le plus chahuteur et le plus sorcier de tout le roman : le baron de Charlus.



J’ai bien entamé le tome suivant qui dépasse toutes mes espérances : j’aime tellement la sensibilité de Marcel, sa manière d’ouvrir des milliers de tiroirs à partir d’un détail, de construire des mondes autour d’une sensation, que j’ai du mal à lire autre chose.
Commenter  J’apprécie          91
A la recherche du temps perdu, tome 2 : A l..

À l’ombre des jeunes filles en fleurs, sous la brise de leurs éventails, vautré sur une plage normande et le dos malaxé de mille petites mains : voilà comment je m’imaginais Marcel dans ce deuxième volet de La recherche avant ma lecture. Sauf que pas du tout 😅 Le petit Marcel est devenu un adolescent chétif et mélancolique, de plus en plus sensible et rêveur, qui se fait malmener de bout en bout par des têtes à claques. Alors on s’amuse de ses fantasmes, de son désir naissant, de ses rougissements, de ses ruses pour se faire aimer et de ses maladresses. Mais on partage surtout ses attentes fiévreuses, sa rage, ses soupirs, ses lettres impatientes puis déchirées, sa tristesse inconsolable.



Je crois que j’ai encore plus aimé ce 2ème tome que le 1er, parce que c’est celui de l’apprentissage et des rencontres décisives pour Marcel : il aime de tout son cœur, souffre, apprend le renoncement et la séparation ; et il rencontre des amis merveilleux, des personnalités pittoresques qui l’éveillent à la littérature, à l’art et à la sagesse.



La lecture est parfois difficile car les phrases sont comme des trains auxquels Proust rajoute des wagons à l’infini. On se dit : « Mais quand est-ce que ça s’arrête ? Se serait-il endormi sur sa machine, le front enfoncé sur les touches ? » Quand enfin se pose le point final, on est épuisé, on a perdu l’idée de départ et il faut reprendre du début... J’essaie donc de me laisser porter et de prendre ce qui me plaît : la poésie inimitable, les images sublimes qui naissent à profusion et la finesse de l’analyse.

Ce que j’aime avant tout : l’incroyable capacité de Proust à déplier un monde à partir d’un détail. La joue d’une femme fait éclore un bouquet de roses ou pointer l’aurore ; les gâteaux et les buissons d’aubépine sont bavards de souvenirs d’enfance ; la mer est une montagne aux cimes bleues que le soleil désigne d’un doigt souriant. Il ajoute de si belles parures à la réalité, que tout mérite d’être souligné et mémorisé. La seule phrase que j’ai réussi à retenir m’accompagne tous les jours : « Pour la première fois je sentais qu’il était possible que ma mère vécût sans moi, autrement que pour moi, d’une autre vie. »
Commenter  J’apprécie          90




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten


Lecteurs de Marcel Proust Voir plus

Quiz Voir plus

Que savez-vous de Proust ? (niveau assez difficile)

De combien de tomes est composé le roman "A la recherche du temps perdu" ?

5
6
7
8

8 questions
533 lecteurs ont répondu
Thème : Marcel ProustCréer un quiz sur cet auteur

{* *}