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Critiques de Marco Lodoli (22)
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Iles : Guide vagabond de Rome

Lu en V.O.



La Rome de Lodoli n’existe dans aucun guide touristique classique, il nous entraine la voir avec des yeux grand ouverts.

Loin de nous détailler les monuments, les églises, les places assaillies par les touristes, il nous invite à y vagabonder, à nous laisser ensorceler par de petites découvertes. C’est une invitation à se perdre en gardant un œil plus attentif, plus curieux.

Le livre est un recueil d’articles écrits par Lodoli pour le journal La Repubblica. Lodoli imagine Rome constituée d’îles mais ces îles ne se réduisent pas à des lieux physiques, c’est également un voyage mental, un voyage dans le passé et le présent, à la rencontre de places, quartiers, églises, tableaux oubliés, bars, restaurants bon marché, plaques commémoratives. À ces descriptions se greffent des réflexions, des sentiments, des états d’âme, des anecdotes, des personnages.



Ce parcours m’a diverti, m’a étonné souvent, m’a fasciné.

Tout le livre est baigné de poésie, il est délicat et l’on y sent le grand amour qu’a Lodoli pour Rome

Il me donne envie de revoir Rome, et de retrouver la Rome de Lodoli !

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Iles : Guide vagabond de Rome

Ces textes sont des îles en ce qu'ils mettent hors du temps des moments et des lieux de Rome que le regard et l'empathie de l'auteur isolent au cours de ses vagabondages. C'est bien mieux qu'un guide car chaque texte réserve une surprise établissant des ponts entre passé et présent, nous offrant des points de vue originaux sur les lieux et ses habitants avec un ton souvent humoristique où l'auteur n'oublie pas de critiquer la société actuelle insipide dans sa marche vers l'uniformisation. C'est un bonheur d'errer et se perdre à ses côtés en compagnie de poètes, d'écrivains, de peintres, architectes et sculpteurs aussi bien que gens anonymes, vieilles prostituées, ferrailleurs, pompiers...qui viennent à notre rencontre et s'invitent dans le cours de nos rêveries. Je dis nous car l'auteur sait nous embarquer avec lui dans un quotidien plein de charme où les pâtes et les pizzas, les pâtisseries mais aussi les églises et les places secrètes, oubliées des touristes prennent une saveur inconnue.



"À quoi peut bien ressembler le championnat du monde de pizza, l'idée épuise rien que d'y songer... je sais que les vainqueurs sont presque toujours des membres du clan Lezzi, des gens qui sur la pizza en savent plus long que le diable... Pour les Lezzi, la pâte levée est un socle capable de soutenir n'importe quel ingrédients, c'est la rex extensa, la substance infinie sur laquelle étaler toutes ses envies : je les crois capables d'inventer des pizzas enchantées aux copeaux de mélancolie, à la graine de courage, de larmes et de rêves." p 102-103



Marco Lodoli nous dévoile généreusement et poétiquement ses découvertes et c'est ainsi que : "Un bar de banlieue peut abriter un continent, un modeste magasin de fleurs ressembler à une forêt, et un mendiant jeté sur le trottoir révolter tout autant qu’une guerre. Et il n’est même pas certain qu’un endroit de la ville soit plus fascinant ou attachant qu’un autre : tout est affaire d’alchimie entre les sentiments et les choses qui se tiennent devant nous, et qui en fin de compte sont dans l’âme. « Tu t’ennuies parce que tu es ennuyeux », disait une grande Romaine, Elsa Morante : mais si l’on reste curieux et perméable au monde, il n’est pas un jour qui n’ait le pouvoir de nous étonner, probablement chaque instant." p 129



Cette lecture vous offrira un monde sans fin, un voyage dont on ne voit pas le bout et quel bonheur de découvrir en levant le nez par exemple "un bel âne volant" oui vous avez bien lu, un âne volant qui risque de disparaître si la commune ne fait pas un petit effort.

"Nous sommes attaché à cet âne volant et nous voulons continuer à le voir voler, porté par le courant changeant de nos illusions et nourri du grain de nos songes. Redonnons-lui un peu de couleurs et de vent."

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Nouvelles îles : Guide vagabond de Rome

Nouvelles îles : c'est en effet la suite des chroniques de Marco Lodoli dans La Repubblica , décrivant comme des îles des petits morceaux de Rome.

Il y a moins de petites statues ignorées et d'escaliers cachés que dans le premier volume de ce « Guide vagabond de Rome ». Il s'agit plus souvent de rappeler l'origine d'objets ou de d'endroits connus : la statue de l'épouse de Garibaldi sur le Janicule, la première école de Maria Montessori, la statue équestre de Marc Aurèle... Il y a surtout des évocations d'écrivains ou de peintres oubliés, et plus encore de l'ambiance de certains coins de ville : une plaque posée par un inconnu, disant qu'il s'est perdu, un arbre, quelques artisans (qui en savent plus sur la réalité de la vie économique que les experts du sujet)...

Tout semble prétexte à Lodoli pour nous donner son humeur du jour : l'effet de la chaleur, le vague à l'âme devant la vue sur la ville, une bibliothèque, une inscription en latin... Le résultat est parfois simple : un peu écolo, un peu regrettant les effets du néolibéralisme, beaucoup nostalgique, mais sans rien en lui qui pèse ou qui pose. Il est tout de même très riche d'information sur des points d'histoire, et sur tout ce qui fait le fond culturel du romain instruit d'aujourd'hui.

Comme la langue de Lodoli et la traduction de Louise Boudonnat sont toujours aussi précises et poétiques, ce volume aussi est absolument indispensable pour se mettre dans l'ambiance avant un séjour à Rome, ou pour en rêver.
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Iles : Guide vagabond de Rome

Une forme raffinée de blog.



Qui est capable d'écrire à Michel-Ange (« Je parle bien de Michel-Ange Buonarroti, le plus grand artiste de la Renaissance, l'un des cinq génies absolus sur terre ») en l'appelant « vieux Mike », sous prétexte qu'une de ses statues est moins géniale ne peut pas être tout à fait mauvais.



J'aime bien l'idée du billet quotidien, surtout dans un journal, surtout quand il parle de la société et de la langue (sujets souvent liés).* Marco Lodoli ne m'est malheureusement pas accessible en italien, et son sujet n'est pas la langue, pas même principalement la société romaine. Il s'agit de Rome, de quelques coins (ou îles) qui pour la plupart passeraient facilement inaperçus. Mais il s'agit de Rome vue par des yeux d'aujourd'hui, souvent très cultivés, et aussi gourmands ou amateurs de football, bref par les yeux d'un grand nombre de romains. De Rome telle qu'on la vit ou telle qu'on devrait la vivre, connaissant son passé et savourant longuement son présent.

Ce n'est donc pas surtout un guide de Rome, même vagabond, plutôt un recueil de textes souvent poétiques, rêveries d'un promeneur (occasionnellement automobiliste) solitaire, témoin de son temps autant que de sa ville, dans une langue superbe.** Si je me suis amusé à marquer sur un plan de ville les numéros des chapitres aux lieux dont ils parlent, c'est plus pour me familiariser avec les noms des rues, des places et des églises que dans l'espoir d'aller les voir.*** Je recommande sa lecture pour se mettre dans l'ambiance avant un voyage, ou tout simplement pour le plaisir de découvrir une belle écriture, amoureuse d'une ville.



*J'ai découvert par un recueil (Der Dativ ist dem Genitiv sein Tod) Zwiebelfisch, ensemble de chroniques absolument nécessaire pour comprendre l'allemand d'aujourd'hui. Si quelqu'un pouvait me donner le nom d'un chroniqueur de The Independent dans les années 70-80, il me ferait un plaisir énorme : je n'ai retenu que son billet : « The mushy peas way (ou guide?) to English), que je connaissais par cœur (j'y ai appris je crois : « what's your poison » et « that will put hair on your chest »). Plus près de nous j'aimais les chroniques de Claude Sarraute (et auparavant de Robert Escarpit, qui se souvient de lui ?), dans Le Monde.

** Merci à la traductrice Louise Boudonnat, dommage que Babelio n'ait pas enregistré son nom sur la fiche du livre.

*** D'autant qu'il s'agit parfois de visions éphémères, voire d'instants magiques, comme ceux où, passant au bon moment au bon endroit, on a une brève vue d'une Rome distante et compacte, ou simplement l'illumination soudaine de boutiques de luminaires.

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Nouvelles îles : Guide vagabond de Rome

Ce livre étant épuisé, je l'ai donc lu en VO.

Je poste donc ma critique sur la version française et sa version italienne.

Version italienne sur laquelle j'ai d'ailleurs posté les citations



Pour faire la liaison entre les deux ouvrages de Lodoli, à défaut de pont entre les îles, partons d'une île romaine microscopique, leur centre du monde 

"Nous aussi, Romains, nous avons notre petite idée sur la question, même si on a un peu honte d'en parler, tellement la chose paraît prosaïque et futile. On sait tous que le centre du monde n'est pas l'autel de Saint Pierre, ou la stèle impériale du Colisée, encore moins l'obélisque de piazza del Popolo ou bien l'eau universelle de la fontaine des Quatre-Fleuves à piazza Navona. C'est beaucoup moins que cela, deux fois rien en apparence, aucun chercheur en cosmologie ne s'est penché sur ce que nous savons être le nombril du monde, alors nous nous taisons, mais il suffit d'un regard pour se comprendre. Nous, Romains, nous n'avons jamais douté du point précis où Dieu a planté l'extrémité de son compas pour créer le monde. Courage, nous n'avons pas à en rougir. Eh bien, ce point, c'était la petite plate-forme ronde de ciment sur laquelle montait l'agent de police, le pizzarclone, pour régler la circulation sur piazza Venezia. L'homme en uniforme, symbole dérisoire de l'autorité, entamait son étrange gesticulation perché sur son plot, essayait de mettre un semblant d'ordre au tohu-bohu et se récoltait en retour les injures et la grogne. "



À l'issue de son premier volume, après ces 133 îlots de beauté et de poésie romaines, on aurait pu croire que Marco Lodoli avait fait le tour la Ville Éternelle. 

Mais il confirme que la ville offre plus à celui qui est en mesure de fouiller les détails, donne tant à celui capable de de s'esquiver, livre plus de secrets à celui qui sort de la foule, se dévoile à celui qui emprunte des chemins de traverse, gratifie celui qui vagabonde au hasard, concède ses mystères à celui qui musarde.... 



Alors Marco Lodoli, intarissable et curieux, cette fois nous emmène à la découverte de nouvelles îles au fil des saisons...faisant fi du temps.  



Ce temps qui se contracte et se dilate, qui a la capacité de se cristalliser en un instant et de s'étirer vers l'éternité, c'est un éclair et un ciel sans fond. Et si nous voulons sentir l'interaction de cette multiplicité d'intervalles étonnamment imbriqués les uns dans les autres, fugaces et denses, il n'y a qu'un endroit pour cela : Rome et ses errances... 

Par les insignifiants charmes urbains. Il faut savoir y retenir le temps et apprendre à se dépoussiérer le regard pour en éprouver l'instant profond.

Comment croire que l'on peut voir dans la vitrine d'un magasin une dizaine de mètres du mur Servien - une enceinte défensive élevée à partir du VIᵉ siècle av. J.-C. autour des sept collines de Rome pour protéger la ville antique ? 



Comment trouver la Porte Magique, témoignage ancien d'une Rome des mythes et des mystères ?

Porte énigmatique, qui ne mène nulle part, reste d'une villa où séjourna un médecin alchimiste, qui disparu laissant derrière lui des traces d'or pur et d'obscurs manuscrits contenant de nombreux symboles et formules alchimique. Convaincu que les écrits mystérieux contiennent le secret de la pierre philosophale, le propriétaire fit graver la "recette" magique sur la "Porte alchimique", également appelée "Porte du ciel" et "Porte hermétique" : des symboles planétaires, chacun associé à un métal, des pyramides, des cercles, des inscriptions en latin et en hébreu et une étoile à six branches, le sceau de Salomon.

Cette porte attend toujours qu'on la déchiffre.... Avis aux amateurs



Comment trouver l'arbre des merveilles ? 

"Cette fois, j'aimerais vous accompagner tous pour admirer l'un des spectacles naturels les plus étonnants que l'on puisse rencontrer dans le monde. J'aimerais vraiment être là pour retrouver mon émerveillement dans vos yeux, pour écouter vos commentaires étonnés, pour profiter de votre émerveillement devant un arbre sans pareil. Nous sommes dans le jardin de l'Université pontificale Saint-Thomas d'Aquin, plus connue sous le nom d'Angelicum, au sommet de la colline du Grillo. C'est un endroit extraordinairement serein, plein d'arbres fruitiers et de silence, à des années-lumière de l'agitation de la ville. Les étudiants en théologie s'y promènent pendant leurs pauses, et le jeune Karol Wojtyla avait l'habitude de venir s'y reposer, bien des années avant qu'il ne devienne pape.



À l'entrée, à droite d'une statue de saint Joseph, se trouve un grand olivier, jeune et vigoureux. Mais soudain, on se rend compte que l'arbre a quelque chose d'étrange, quelque chose de plus : des branches de figuier partent du tronc. Et ce n'est pas tout, il y a aussi des branches de palmier et une frondaison de laurier. Quatre arbres en un, comme par miracle !

Qui sait, ce sont peut-être les oiseaux, ce sont peut-être les vents qui ont déposé des graines étrangères dans cet olivier, ce sont peut-être la pluie, le soleil et la chance qui les ont fait si bien pousser, toujours est-il que quatre mondes végétaux se tiennent compagnie, se nourrissant du même tronc. L'olivier méditerranéen dialogue avec le palmier oriental, la sensualité  du figuier se mêle à la spiritualité du laurier, et tout bourgeonne et se développe sous la lumière du printemps romain.C'est l'arbre des merveilles, un résumé, un condensé, un concentré botanique de lieux et d'histoires lointaines, la synthèse verdoyante de nombreuses pensées et sentiments. Il est impossible de ne pas se laisser séduire par une telle beauté. Il est difficile de partir, on a envie de s'asseoir sous cet arbre protéiforme pour recevoir une leçon d'harmonie et contenir en paix nos contradictions infinies et vitales."



" Rome est une ville qui ne fait jamais table rase: les époques, les siècles, les années, les jours s'accumulent. Possible qu'aucune minute enfuie ne se perde entièrement. De fait, nous avons la Rome antique et médiévale, le XVle siècle et la Renaissance, le XVIIe siècle et le Baroque, la Rome papale et umbertienne, la Rome fasciste et l'après-guerre, le boom économique, suivi des années de plomb, les années fric et le nouveau millénaire, hier et aujourd'hui : le minutieux catalogue a tout répertorié, le marbre et les feuilles jaunies font pareillement partie de la mémoire de la ville"



Comment, il réussit à se mettre à la place de Santa Margherita peinte par Guerchin, que personne ne voit car comme elle le dit si bien :  « Proprio accanto al Mosè di Michelangelo mi tocca stare, guarda te che sfortuna…» (Juste à côté du Moïse de Michel-Ange, me voilà coincée, regardez ma malchance...)



Comment comprendre, dans l'église San Marcello al corso, ces tombes superposées, de l'oncle cardinal et son évêque de neveu, soutenues par des livres empilés. Là où nous emportons nos livres dans sur notre île déserte, l'évêque les emmènent de vie à trépas, vers une île éternelle,.... 

L' auteur de nous guider dans « la reine des catacombes », pour y découvrir la plus ancienne représentation de la Vierge à l'Enfant, une fresque du début du Ille siècle. Elle n'a pas la grâce des madones de Raphaël ou de Bellini, mais elle est la première, et c'est assez pour nous surprendre. 



Alors après ces multiples vagabondages je vais suivre le conseil de l'auteur, non sans l'avoir remercier pour avoir partagé ses trésors, ces angles morts ou perdus, ces vedute littéraires : 

Finalement on se dit que c'est ça, Rome, une mosaïque de fragments disparates qu'il semble impossible de faire coïncider: pourtant, il suffit d'une rue pour raccommoder ce patchwork en un paysage cohérent, il suffit d'un quart d'heure dans le sens contraire du vent, pour que l'on trouve un endroit magique, paisible, d'une quiétude inespérée au milieu du vacarme que peut représenter une capitale, un simple détour, un minuscule pas de côté, un détour fortuit, un regard qui s'élève et l'on bascule sur une île insoupçonnée.... 



"Le meilleur point pour se laisser glisser dans cette paisible inertie est sans conteste le petit bar sous l'étroit portique; on peut s'asseoir à l'une des quatre tables et ouvrir un livre de poésie. La nuit qui descend estompera lentement les quelques phrases que nous sommes en train de parcourir, tandis que l'alcool d'un Campari soda brouillera les mots qui continuent à flotter dans notre tête. Fermons tranquillement le livre, étirons les jambes et restons là sans plus penser à rien. Un chien traverse la place, un enfant joue avec l'eau de la fontaine, et l'on est bien."



Et songer à cette magnifique devise que l'on peut lire via Veneto: Roma lenta quia eterna. Et que nous pourrons ressortir chaque fois que quelqu'un nous reprochera notre indolence: Rome est lente parce qu'éternelle.... 
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Iles : Guide vagabond de Rome

On peut éplucher tous les guides de la terre, on tombera forcément sur cette phrase: « c'est un pays riche de contradictions ». 

Un lieu commun qui désormais fait sourire, qui tinte comme une ritournelle tellement mélodieuse qu'elle finit par sonner creux : et cependant rien n'est plus vrai. 



Tout espace, aussi uniforme et cohérent soit-il, comporte ses éléments discordant. Tous ces guides vous emmèneront toujours aux mêmes endroits, aux mêmes belvédères, pour admirer les même perspectives, dans ce flux incessant où tels des pénitents nous cheminots, puis nous attendons, pour prendre la même photo que celui qui nous précède.... 

Et nous repartons "ravis", mais qu'a-t-on emporté en nous de cet instant, ces secondes de temps tant attendues et promises par quelques lignes....



Il y a bien certains guides qui tentent de nous pousser à entreprendre quelque chose qui tient de l'exceptionnel : faire un pas de côté.... 

Goethe écrivit : Un arc-en-ciel qui dure un quart d'heure ne se regarde plus, suggérant par là que les spectacles les plus stupéfiants ne subsistent que quelques instants. Le coeur vibre puis se lasse rapidement. Et c'est devenu encore plus vrai, depuis que le tourisme est devenu phénomène de masse, phénomène boulimique où il faut enchaîner le plus de musées, de monuments, de vues en un minimum de temps. 

Et si un livre pouvait nous donner envie de regarder cet arc-en-ciel plus longtemps, pour en emporter avec nous un peu, de cette décomposition des lumières... 



Et bien dans cet ouvrage de Marco Lodoli, les pages égrainées s'adressent aux flâneurs. Elles s'attardent en compagnie de tous ceux qui sauront se contenter d'une traînée de silence ou d'un fragment de lumière. 

"Ces cent trente-trois fragments modulent page à page une respiration ; ils sont les pulsations de cette chair un peu difforme, écornée par le temps, et dont, jour après jour, beauté enfle ou se creuse, Ces éclats recomposent une unique silhouette et ce style en morceaux est le mieux adapté au corps d'une ville qui est par excellence la plus fractionnée, la plus stratifiée des cités."

Et comme, je le disais plus haut c'est un pays riche de contradictions, la première des contradictions vient du titre :" Iles: guide vagabond de Rome", pour une ville qui ne comporte qu'une île l'Isola Tiberina....



Alors que vient faire ce pluriel, et bien peut-être est-ce finalement la notion d'isolement, terme dont l'étymologie est rattachée à « île » par l'intermédiaire de l'italien isola, et la solitude sont souvent recherchés dans les îles, que ce soit volontaire ou non que nous propose l'auteur.... 



Îles, îlots de bonheur de poésie loin du tumulte de la ville. Comme des parenthèses enchantées, voire inattendues. Car dans ses vagabondages, l'auteur nous emmène de découvertes en découvertes.... 



De silences bruyants en bruits silencieux : 

"Après avoir joué des coudes des heures durant pour s'infliger une méga-exposition, on n'a plus guère envie d'entrer solitaire dans une église ou un petit musée pour contempler un simple tableau, qui, par-dessus le marché, est mal éclairé et un peu écaillé. Le caractère exceptionnel de Rome réside pourtant dans ses chefs d'œuvre à moitié enfouis, dans ces trésors qu'il faut chercher et dénicher dans la pénombre d'une ruelle ou d'un cloître. L'être et l'oeuvre d'art se rencontrent silencieusement, presque en catimini, à l'instar d'un premier rendez-vous, sans clameur ni sunlight. Et puis l'amoureux revient sur les lieux des années plus tard, renouer avec l'intimité et le plaisir. Chaque fois que je passe devant l'église de Trinità dei Monti, je ne résiste pas à l'envie de saluer la magnifique Déposition de Daniele da Volterra, peintre du XVIe siècle, surnommé facétieusement le Braghettone parce qu'il a mis des « caleçons » à tous les nus cle Michel-Ange dans la chapelle Sixtine"



De perspectives en perspectives : 

"Il est des oeuvres d'art dans lesquelles l'intelligence est, semble-t-il, l'ingrédient primordial, où chaque détail a l'air conçu par un esprit imbu de sa propre excellence. Ce sont des œuvres qui mettent un peu mal à l'aise tant elles sont parfaites, il y a en elles quelque chose de surhumain, une ambition démesurée, un goût purement mental pour les défis impossibles. A Rome, l'œuvre de ce point de vue la plus troublante est ce que l'on nomme La Perspective de Borromini, qui se trouve dans le palais Spada sur piazza Capodiferro. On peut admirer autant de fois que l'on veut ce chef-d'œuvre, il n'en finira pas de nous subjuguer, et de manière toujours plus intense.

Il s'agit d'une galerie percée dans une belle cour intérieure, un jardin secret orné de trois bigaradiers enchanteurs : nous examinons attentivement la galerie qui semble longue de trente ou quarante mètres, les colonnes doriques diminuent dans le lointain, les motifs du pavement se réduisent au fur et à mesure que l'oeil plonge vers le fond à la jonction des deux haies, où le regard converge sur une statue antique. Mais l'ensemble n'est que pure illusion, un fracassant tour de prestidigitation qui nous laisse pantois. La galerie mesure en réalité à peine huit mètres soixante, et la colonnade, le dallage, la voûte en berceaux sont réalisés avec une science architecturale qui défie la rétine.

On se dit, d'accord, c'est encore une de ces astuces baroques, une de ces conceptions alambiquées qui roulent dans la farine le simple spectateur. Et pourtant nous ne pouvons nous empêcher de retourner vers cette mise en scène baroque, car un élément nous échappe, car ce drôle de tour de passe-passe a la faculté de nous émouvoir.

Et puis un jour nous lisons ces mots, merveille d'esthétique morale, écrits par le cardinal Bernardino Spada : On voit un immense portique aux proportions infimes, un long sentier surgit dans un espace minuscule. Prodige de l'art : image d'un monde trompeur. Grandes sont les apparences, petites sont les choses pour qui les observe de près. La grandeur terrestre n'est qu'illusion. Voilà, finalement, nous comprenons ce qui nous bouleversait: cette galerie n'est pas seulement un jeu subtil d'intelligence, elle est beaucoup plus que cela, elle est la quintessence du monde condensée en quelques mètres."



De prises de position en position éprises : 

" Notre pays est lui aussi, semble-t-il, en train de chanceler sur cette tabula rasa plastifiée qui martèle les mots succès, argent, productivité. Et pour cette même raison, le résultat des prochaines élections, qui pourrait être le dernier pas vers la stérilisation de la pensée, nous fait froid dans le dos: le rabot et le papier de verre sont déjà à l'oeuvre depuis pas mal de temps, une main plus énergique et puis tout sera lisse."



De clair obscur, en obscure clarté :

" Mais aujourd'hui nous avons aussi besoin de réconfort. Entrons dans la petite salle où sont exposées deux œuvres de jeunesse du Caravage : Le Repos durant la fuite en Égypte et La Madeleine Pénitente. Les deux cadres sont accrochés côte à côte et ont quelque chose en commun que nous ne saisissons pas de prime abord. À droite, la Madone épuisée par sa longue pérégrination s'est endormie avec l'Enfant Jésus dans les bras, tandis qu'un ange joue au violon la partition musicale que Joseph tient ouverte devant lui. Marie, les yeux clos et les cheveux noués, sommeille la tête abandonnée sur l'épaule. En revanche, dans l'autre cadre, Madeleine vient juste de renoncer à sa vie scandaleuse. Les bijoux et les onguents gisent sur le sol, elle a elle aussi la tête inclinée sur l'épaule, mais ses cheveux sont défaits, La vierge et la prostituée, la pureté et le péché ; et c'est la même femme ! Caravage, qui puise au réel, a choisi un seul modèle pour des deux visages. Ainsi Marie et Madeleine sont égales et différentes, comme deux gouttes d'eau, comme deux larmes."



L'auteur de nous rappeler un principe bouddhique qui "prétend que la totalité de notre être est une émanation de nos pensées : il est bâti sur nos pensées, constitué de nos Pensées. Et par moments je me dis que les choses procèdent vraiment ainsi, que notre esprit convulsif accouche de cette existence névrotique. Il est urgent alors de s'accorder une trêve dans la journée, de mettre un frein à cet emballement cérébral, et par la même occasion à celui de notre quotidien. Il faut des lieux propices, des îlots silencieux où pouvoir se réfugier, même si c'est l'affaire de peu."



Et même si ce ne sont que des trêves littéraires, elles font un bien fou... Tant elles sont magiques, étonnantes, révélatrices, surprenantes. Et elles deviennent au fur, des lieux que l'on marquent dans un petit carnet qui deviendra précieux lors d'un prochain voyage romain, car le tour de force de l'auteur et de communiquer ses coups de cœur, tel un passeur, en toute discrétion, que ce soit une église refuge, une pâtisserie réconfortante, des néologismes tellement évocateurs quant il parle des ces étourdissantes églises baroques, avec leur débauche de funambulanges et d'équilibrichrists... 



En résumé, ces îles de Lodoli sont comme il le dit lui-même : " Les îles, ce sont des tableaux, des arbres, un simple square, des coins où la beauté a trouvé un refuge, mais aussi des interstices, quelques minutes secrètes dans la journée écrasante, des secondes précieuses, un trésor." 

Et c'est certainement ce qui fait de Rome, La città eterna.... 



Et Marco Lodoli est à l'image de ces vestales qui une fois l'an, en mars, rallumaient le feu et s’assuraient ensuite qu’il brûle pour le reste de l’année. Leur travail n’était pas à prendre à la légère car le feu était lié aux fortunes de la ville. S’il venait à être négligé, un malheur s’abattrait sur Rome... 

Tant qu'il y aura des auteurs pour nous fournir de belles pages sur Rome, le malheur en sera maintenu au loin... 
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Nuove isole. Guida vagabonda di Roma

Pour faire la liaison entre les deux ouvrages de Lodoli, à défaut de pont entre les îles, partons d'une île romaine microscopique, leur centre du monde 

"Nous aussi, Romains, nous avons notre petite idée sur la question, même si on a un peu honte d'en parler, tellement la chose paraît prosaïque et futile. On sait tous que le centre du monde n'est pas l'autel de Saint Pierre, ou la stèle impériale du Colisée, encore moins l'obélisque de piazza del Popolo ou bien l'eau universelle de la fontaine des Quatre-Fleuves à piazza Navona. C'est beaucoup moins que cela, deux fois rien en apparence, aucun chercheur en cosmologie ne s'est penché sur ce que nous savons être le nombril du monde, alors nous nous taisons, mais il suffit d'un regard pour se comprendre. Nous, Romains, nous n'avons jamais douté du point précis où Dieu a planté l'extrémité de son compas pour créer le monde. Courage, nous n'avons pas à en rougir. Eh bien, ce point, c'était la petite plate-forme ronde de ciment sur laquelle montait l'agent de police, le pizzarclone, pour régler la circulation sur piazza Venezia. L'homme en uniforme, symbole dérisoire de l'autorité, entamait son étrange gesticulation perché sur son plot, essayait de mettre un semblant d'ordre au tohu-bohu et se récoltait en retour les injures et la grogne. "



À l'issue de son premier volume, après ces 133 îlots de beauté et de poésie romaines, on aurait pu croire que Marco Lodoli avait fait le tour la Ville Éternelle. 

Mais il confirme que la ville offre plus à celui qui est en mesure de fouiller les détails, donne tant à celui capable de de s'esquiver, livre plus de secrets à celui qui sort de la foule, se dévoile à celui qui emprunte des chemins de traverse, gratifie celui qui vagabonde au hasard, concède ses mystères à celui qui musarde.... 



Alors Marco Lodoli, intarissable et curieux, cette fois nous emmène à la découverte de nouvelles îles au fil des saisons...faisant fi du temps.  



Ce temps qui se contracte et se dilate, qui a la capacité de se cristalliser en un instant et de s'étirer vers l'éternité, c'est un éclair et un ciel sans fond. Et si nous voulons sentir l'interaction de cette multiplicité d'intervalles étonnamment imbriqués les uns dans les autres, fugaces et denses, il n'y a qu'un endroit pour cela : Rome et ses errances... 

Par les insignifiants charmes urbains. Il faut savoir y retenir le temps et apprendre à se dépoussiérer le regard pour en éprouver l'instant profond.



Comment croire que l'on peut voir dans la vitrine d'un magasin une dizaine de mètres du mur Servien - une enceinte défensive élevée à partir du VIᵉ siècle av. J.-C. autour des sept collines de Rome pour protéger la ville antique ? 



Comment trouver la Porte Magique, témoignage ancien d'une Rome des mythes et des mystères ?

Porte énigmatique, qui ne mène nulle part, reste d'une villa où séjourna un médecin alchimiste, qui disparu laissant derrière lui des traces d'or pur et d'obscurs manuscrits contenant de nombreux symboles et formules alchimique. Convaincu que les écrits mystérieux contiennent le secret de la pierre philosophale, le propriétaire fit graver la "recette" magique sur la "Porte alchimique", également appelée "Porte du ciel" et "Porte hermétique" : des symboles planétaires, chacun associé à un métal, des pyramides, des cercles, des inscriptions en latin et en hébreu et une étoile à six branches, le sceau de Salomon.

Cette porte attend toujours qu'on la déchiffre.... Avis aux amateurs



Comment trouver l'arbre des merveilles ? 

"Cette fois, j'aimerais vous accompagner tous pour admirer l'un des spectacles naturels les plus étonnants que l'on puisse rencontrer dans le monde. J'aimerais vraiment être là pour retrouver mon émerveillement dans vos yeux, pour écouter vos commentaires étonnés, pour profiter de votre émerveillement devant un arbre sans pareil. Nous sommes dans le jardin de l'Université pontificale Saint-Thomas d'Aquin, plus connue sous le nom d'Angelicum, au sommet de la colline du Grillo. C'est un endroit extraordinairement serein, plein d'arbres fruitiers et de silence, à des années-lumière de l'agitation de la ville. Les étudiants en théologie s'y promènent pendant leurs pauses, et le jeune Karol Wojtyla avait l'habitude de venir s'y reposer, bien des années avant qu'il ne devienne pape.



À l'entrée, à droite d'une statue de saint Joseph, se trouve un grand olivier, jeune et vigoureux. Mais soudain, on se rend compte que l'arbre a quelque chose d'étrange, quelque chose de plus : des branches de figuier partent du tronc. Et ce n'est pas tout, il y a aussi des branches de palmier et une frondaison de laurier. Quatre arbres en un, comme par miracle !

Qui sait, ce sont peut-être les oiseaux, ce sont peut-être les vents qui ont déposé des graines étrangères dans cet olivier, ce sont peut-être la pluie, le soleil et la chance qui les ont fait si bien pousser, toujours est-il que quatre mondes végétaux se tiennent compagnie, se nourrissant du même tronc. L'olivier méditerranéen dialogue avec le palmier oriental, la sensualité  du figuier se mêle à la spiritualité du laurier, et tout bourgeonne et se développe sous la lumière du printemps romain.C'est l'arbre des merveilles, un résumé, un condensé, un concentré botanique de lieux et d'histoires lointaines, la synthèse verdoyante de nombreuses pensées et sentiments. Il est impossible de ne pas se laisser séduire par une telle beauté. Il est difficile de partir, on a envie de s'asseoir sous cet arbre protéiforme pour recevoir une leçon d'harmonie et contenir en paix nos contradictions infinies et vitales."



" Rome est une ville qui ne fait jamais table rase: les époques, les siècles, les années, les jours s'accumulent. Possible qu'aucune minute enfuie ne se perde entièrement. De fait, nous avons la Rome antique et médiévale, le XVle siècle et la Renaissance, le XVIIe siècle et le Baroque, la Rome papale et umbertienne, la Rome fasciste et l'après-guerre, le boom économique, suivi des années de plomb, les années fric et le nouveau millénaire, hier et aujourd'hui : le minutieux catalogue a tout répertorié, le marbre et les feuilles jaunies font pareillement partie de la mémoire de la ville"



Comment, il réussit à se mettre à la place de Santa Margherita peinte par Guerchin, que personne ne voit car comme elle le dit si bien :  « Proprio accanto al Mosè di Michelangelo mi tocca stare, guarda te che sfortuna…» (Juste à côté du Moïse de Michel-Ange, me voilà coincée, regardez ma malchance...)



Comment comprendre, dans l'église San Marcello al corso, ces tombes superposées, de l'oncle cardinal et son évêque de neveu, soutenues par des livres empilés. Là où nous emportons nos livres dans sur notre île déserte, l'évêque les emmènent de vie à trépas, vers une île éternelle,.... 

L' auteur de nous guider dans « la reine des catacombes », pour y découvrir la plus ancienne représentation de la Vierge à l'Enfant, une fresque du début du Ille siècle. Elle n'a pas la grâce des madones de Raphaël ou de Bellini, mais elle est la première, et c'est assez pour nous surprendre. 



Alors après ces multiples vagabondages je vais suivre le conseil de l'auteur, non sans l'avoir remercier pour avoir partagé ses trésors, ces angles morts ou perdus, ces vedute littéraires : 

Finalement on se dit que c'est ça, Rome, une mosaïque de fragments disparates qu'il semble impossible de faire coïncider: pourtant, il suffit d'une rue pour raccommoder ce patchwork en un paysage cohérent, il suffit d'un quart d'heure dans le sens contraire du vent, pour que l'on trouve un endroit magique, paisible, d'une quiétude inespérée au milieu du vacarme que peut représenter une capitale, un simple détour, un minuscule pas de côté, un détour fortuit, un regard qui s'élève et l'on bascule sur une île insoupçonnée.... 



"Le meilleur point pour se laisser glisser dans cette paisible inertie est sans conteste le petit bar sous l'étroit portique; on peut s'asseoir à l'une des quatre tables et ouvrir un livre de poésie. La nuit qui descend estompera lentement les quelques phrases que nous sommes en train de parcourir, tandis que l'alcool d'un Campari soda brouillera les mots qui continuent à flotter dans notre tête. Fermons tranquillement le livre, étirons les jambes et restons là sans plus penser à rien. Un chien traverse la place, un enfant joue avec l'eau de la fontaine, et l'on est bien."



Et songer à cette magnifique devise que l'on peut lire via Veneto: Roma lenta quia eterna. Et que nous pourrons ressortir chaque fois que quelqu'un nous reprochera notre indolence: Rome est lente parce qu'éternelle.... 
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Grand Cirque Déglingue

Rocco, Mariano et Ruggero, respectivement concierge, élève et professeur au sein du même lycée, sont tous trois anarchistes. Ils décident de voler des enfants-petits-Jesus dans les crèches des églises, la veille de Noël. Quant à Sara, la sœur de Mariano, elle a disparu...

J’ai passé mon temps à chercher qui était qui au sein de ce récit malin, tendre et mélancolique. Ma quête figure bien celle des trois amis vers leur idéal, vers Sara...

J’avoue avoir trouvé cela lassant, peut-être parce que je ne suis pas adepte d’une vision trop éthérée de la femme, trop « pure ». De plus, quelques paroles profondément misogynes m’ont plus que gêné. Une expérience moyenne.
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Nouvelles îles : Guide vagabond de Rome

Autre balade en bonne compagnie dans les petits et grand secrets de Rome ;Lors d’un récent séjour nous avons pu en tester l’intérêt . Et c’est aussi une façon d’être attentif aux détails alors que tant d’écrasantes splendeurs saturent nos regards.
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Les prétendants

Je n'ai lu que le premier volet ("La Nuit") de cette trilogie romanesque. J'ai commencé le deuxième mais j'ai rapidement arrêté, comprenant qu'il fonctionnait sur le même modèle que le premier. En résumé : une très belle écriture (superbe traduction), de jolis effets de style et une atmosphère onirique (voire surréaliste) qui servent mal une histoire qui ne va nulle part. Pourtant, j'ai bien cru au départ à une intrigue prenante : un jeune idéaliste se fait embaucher comme coursier par un mystérieux patron qui le charge de remettre d'étranges enveloppes à des inconnus....Malheureusement, alors que la trame aurait pu développer cette intrigue un brin "thriller", l'auteur choisit le surréalisme, les (certes belles) leçons de philosophie un peu sybillines...Bref, pour moi, une tentative intéressante débouchant sur une histoire assez incompréhensible qui ne m'a pas donné envie de lire la suite. Dommage !
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Les prétendants

Trois récits différents dont le point commun est Rome et dont chaque personnage principal a la prétention de réaliser son désir le plus cher.

Constantino,de La Nuit, jardinier modèle d'un maître qu'il ne voit jamais,attend l'amour.

Luca,du Vent, refuse la mort et veut l'anéantir.

Tito,des Fleurs,le plus statique,se sait destiné à devenir poète et il attend, attend que ce moment vienne. Toute une vie.

Autre point commun: le héros se sait observé par un être,invisible à ses yeux, et dont seule une lumière,derrière une fenêtre,atteste la présence .

Il subit la suprématie du "roi du monde",celui qui voit,qui sait, et il l'accepte.

C'est un livre original,dépaysant,débordant d'imagination,dans lequel je suis restée plongée.
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Snack-Bar Budapest

Ah ça, si j'avais pu m'attendre à un tel roman ! C'est bien la première fois que j'ouvre un livre en ayant une idée totalement erronée de ce qu'il contient. La couverture assez esthétique mais à dominante blanc

m'avait orientée vers un livre pour jeunes adultes (rappelez-vous de la collection Médium de chez L'école des loisirs qui a bercé mes tendres années) avide de fraiches aventures. Il faut dire qu'en général je déteste lire les quatrième de couverture. Comme les films, dont je lis rarement le synopsis, je m'oriente vers les livres avec une sorte d'instinct.



Mais là l'ambiance est assez sombre dans cette histoire qui se passe en majorité dans le monde de la nuit. Notre narrateur dépose celle qu'on suppose être sa copine à l'hôpital pour se faire avorter. Lui reste dans la petite ville balnéaire à errer en plein hiver. De cette zone de flou absolu on commence à entrevoir les tenants de l'affaire : pourquoi ils en ont été réduits à l'avortement, en premier lieu.

L'homme dont on ne connait pas le nom arpente les rues désertes qu'on image parfaitement dans le froid insufflé par la solitude et le temps peu clément. On apprend que c'est un ancien avocat reconverti dans la récupération de l'argent des machines à sous. Bizarre, bizarre que cette reconversion !

Dans ce contexte assez trouble, il s'en va donc trouver Molécule, jeune patron de la pègre locale et tenancier d'un établissement aussi louche que fastueux. Une relation s'instaure entre ces deux-là : entre notre narrateur (constamment appelé "Maître" par ceux qui le côtoient) et la bande à Molécule. L'un est désenchanté, l'autre rêve de paillettes, de luxe et d'un Las Vegas à ciel ouvert. On comprend donc qu'ils s'associent pour le meilleur et surtout pour le pire. Car Molécule est craint dans la ville, qu'il règne sur un réseau de voyous et de prostituées, ses plans n'ont donc pas à être contrariés.

Mais pourquoi le titre du livre? Le snack-bar Budapest est l'endroit miteux où séjourne notre héros. Lieu quasi abandonné tenu par une famille assez discrète, c'est autour de ce repaire plutôt tranquille que tout va se jouer.

Et en filigrane, on pense à Milena, la jeune fille laissée à l'hôpital se faire "dégonfler la chambre à air" et on se dit qu'elle est bien loin de se douter tout ce qui se trame.



Autant l'avouer, ce n'est vraiment pas dans mes habitudes de lire des polars, thrillers ou autres romans d'intrigue. C'est donc avec une pointe d'appréhension et légèrement penaude que je me suis lancée dans la lecture de cet ouvrage. Ma crainte principale était de tomber sur un enquêteur en bonne et dûe forme, sur un meurtre à résoudre ou sur des descriptions à la limite du soutenable. Mais on est (heureusement) bien loin de tout ça et c'est un roman très gentillet auquel on a affaire.

Les auteurs s'attachent plus à nous décrire un lieu, un élément déclencheur d'une certaine tension et tout l'emballement qui s'ensuit qu'une enquête policière comme dans les bons vieux polars qui se respectent. Mais laissez-moi vous dire que tous ces ingrédients, bien loin de me décevoir, ont contribué à me faire avancer dans l'ouvrage avec une curiosité grandissante. Car la nouveauté exalte, car tout ce que je découvrais dans ce roman ce n'était pas une nuit opaque porteuse de tous les dangers, mais l'ombre de choses incontrôlables dont on démêle les fils dans les dernières pages.



Un roman surprenant ! Là on peut le dire, c'est une découverte !
Lien : http://shereads.canalblog.co..
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Les Promesses

D'une rare sensibilité, ses textes sont pleins de poésie, ses personnages toujours animés par une quête de sens qui conduit invariablement à la marginalité (ou plutôt en est à l'origine). Sylvain Prudhomme lui rend un vibrant hommage dans "Par les routes"
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Iles : Guide vagabond de Rome

Vous voulez échapper au troupeau moutonnier des déambulations touristiques dans Rome ? Alors emboitez le pas de Marco Lodoli . Il vous fera connaître les détails minuscules qui donnent son humanité à la fresque grandiose , le thème discret qui valorise la symphonie : places oubliées , vieux bistrots , statues ignorées mais parlantes , il nous entraîne dans ce qu’il y a de plus savoureux dans la découverte d’une ville , une déambulation heureuse , empathique et savante . Et le livre fermé s’allume , dévorant, le désir de mettre nos pas dans les siens .
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Les Promesses

Trois portraits. Trois tableaux. Écriture picturale qui trace avec finesse les contours de personnes dont on s’éprend très vite au-delà de leurs différences respectives. Lodoli excelle dans la description du ressenti, il pénètre au cœur de ses êtres de fiction et les rend profondément humains.

Nous lisons Les Promesses comme on regarderait des femmes et des hommes exister sous nos yeux : ils pensent, respirent, aiment, doutent et décident tandis que l’on s’attache à tout ce qui leur arrive.

Écriture au style raffiné.

Superbe lecture.
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Les prières

Une nouvelle trilogie romanesque, envoûtantes équipées de personnages tendus par l'exigence d'une inaccessible vérité.
Lien : https://www.la-croix.com/Cul..
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Les Promesses

Après en avoir entendu un extrait à la radio, j'ai eu envie de découvrir ce livre, écrit en trois parties : Sorella, Italia et Vapore. Sorella est le récit à haute voix d'une bonne sœur ; elle n'aime rien, pas même Dieu. Cette nonne est en confrontation feutrée avec la mère supérieure, qui lui impose de s'occuper de tout petits enfants. Sorella les déteste et les maltraite en quelque sorte, sauf un, Lucas, qui aurait été adopté. Impossible de terminer cette première partie, trop dérangeante de cruauté, avec une héroïne incohérente.

Pourtant l'écriture est exceptionnelle, si touchante qu'elle accentue le malaise de l'histoire. La narration continue, sans chapitres, provoque une sorte d'apnée.

Italia est le prénom d'une femme qui a grandit dans un institut à Rome pour orphelins. Elle est préparée à une vie de labeur au sein d'une famille qui lui est désignée à ses vingt ans. Elle n'aura pas de vie à elle. Italia scrute les moindre faits et gestes des membres de la famille, elle est parfois semblable à un robot, sans affect, tout à son dévouement à cette famille pour qui elle ne représente rien. Des occasions, rares, se présentent pour qu'elle s'en échappe. Mais elle n'en fait rien. La famille se délite peu à peu, c'est vraiment désespérant. Elle décrit toutes les étapes de déchéance pour chacun, sans pathos.

J'étais impatiente d'en finir alors que je restais subjuguée par le style, la sensibilité extrême des phrases.

Vapore commence plus légèrement, comme un conte : une femme âgée se fait conduire à sa maison de campagne mise en vente. Le jeune vendeur lui fait raconter ses souvenirs en attendant la visite. Elle se laisse faire volontiers. Il vient la chercher tous les jours, qu'il y ait ou non une visite. Les confidences sont de plus en plus douloureuses. Vapore est le nom de son mari disparu, magicien errant, difficile à vivre au quotidien. J'ai avalé la fin, écrasée par ce récit. Quel dommage de mettre tout ce talent d'écriture au service de la noirceur la plus banale, celle qui touche le plus sûrement. Je suis sortie de cette lecture très profondément déprimée. Raymond Carver a écrit aussi des histoires tristes avec beaucoup de talent, sans jamais m'affecter à ce point.
Lien : http://objectif-livre.over-b..
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Boccacce

Drôle et grimaçant.....
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Les Promesses

S'il ne mâche pas ses mots pour dénoncer le berlusconisme, ce prof de lettres tente d'en oublier les ravages en écrivant des fables pleines de magie.
Lien : http://rss.nouvelobs.com/c/3..
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Les Promesses

Les histoires vont crescendo. Il m'a semblé que le fil de ma lecture s'est accéléré au fur et à mesure de chacune de ces trois histoires.

Vapore m'a transportée.

Sorelia et Italia m'y ont guidé doucement sans me laisser de souvenir impérissable...
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