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Critiques de Mark Z. Danielewski (162)
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La Maison des feuilles

Oui, c'est bel et bien un monument auquel on a affaire… dans la lignée des gros bazars que la littérature américaine sait si bien produire, comme « L'Infinie Comédie » de DFW, partageant ce goût pour les longues (!) notes de bas de page… Mais dans la Maison des Feuilles, elles sont très habilement intégrées à la mise en page, et les renvois vers les annexes — exhortations au lecteur à voyager sans linéarité apparente dans l'ouvrage — posent ce livre comme une véritable expérience ayant conquis un vaste public, malgré sa forme universitaire intimidante.



Objet littéraire mouvant, mises en abîmes structurées en gros plat de lasagnes, vrai-faux-vrai roman d'épouvante, fausse-vraie-fausse thèse universitaire, pleine de références exactes et de pitreries plus ou moins visibles, piétinant le lecteur un peu naïf ou distrait, tout en restant étonnamment « facile » à suivre et « digeste », malgré l'omniprésence des ténèbres…



Roman des solitudes qui mènent aux folies, rempli du vertige face au néant, opposé à l'infinité des histoires personnelles, du pullulement mécanique et exponentiel des propos, thèses et théories dans la société occidentale (on y voit clairement une raillerie de certaines branches du savoir, la sémiologie en premier…), le plein et le vide s'entredévorant sous nos yeux…



Expérience multiple, difficile à résumer, forcément personnelle, d'où je sors après 4 jours plutôt sombres avec un mauvais goût dans la bouche : le remarquable équilibre entre les trois principales couches romanesques ne tenant pas l'épilogue, les boucles ne bouclant pas, la symbiose synthétisante perdue dans le noir, laissant sans vie le reste des notes et annexes non-consultés lors des précédentes lectures. Etonnante étanchéité finale pour une construction de cette ampleur : Zampanò restera sous terre, sans épitaphe, alors que les cinq étoiles lui étaient jusqu'alors promises…
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La Maison des feuilles

CHEF D'OEUVRE !





Alors les amis, j'en ai lu des OLNI dans ma vie. Je les cultive, même. Mais des comme ça, jamais !





Débordant d'inspiration créatrice qu'on ne pensait peut-être pas possible en littérature, DANIELEWSKI prouve qu'on peut toujours créer de nouvelles DIMENSIONS littéraires. Un roman bâti comme une ILLUSION. Une prouesse.





### NOTE DE L'ÉDITEUR DE CETTE CRITIQUE : L'auteure supposée de la présente critique ayant été retrouvée morte la tête sur son clavier, un pot de verni violet renversé à côté d'elle et des griffures sur le parquet autour, nous avons récupéré ce fichier word sur lequel elle travaillait. Nous l'avons enrichi des notes et commentaires figurant sur des post-it que nous avons trouvé à côté, frénétiquement remplis d'une écriture qui, pourtant, ne semblait pas être la sienne. Ces apports et renvois seront signalé d'une [*].

Attention, certaines de ces notes n'étaient plus intégralement lisibles, comme si des griffes avaient lacéré le papier à certains endroits. Elles seront reproduites en l'état et signalée par des KKK.

Enfin, nous avons conservé la typographie et ce qui semblait être des coquilles, n'ayant pu demander à l'auteure si c'en était réellement… #





Le pitch commence comme un roman fantastique standard : Un photoreporter renommé, Navidson, sa femme Karen et ses deux enfants (Chad et DAISY) emménagent dans une MAISON… capricieuse. Un jour, une nouvelle PIECE apparaît qui crée la stupeur. Bientôt, un MUR se décale, une PORTE apparaît qui donne sur un COULOIR et, horreur suprême, celui-ci change de volume à mesure qu'on ME PÉNÈTRE… Pire encore, des GÉMISSEMENTS semblent provenir des PROFONDEURS de cette MAISON qui devient, très vite, LABYRINTHIQUE pour qui franchit certains SEUILS. [*]





[* le SURMOI veille au maintien des refoulements des pulsions dans le ça. KK est issu des apprentissages durant l'ENFANCE, période de dépendance de l'humain avant son autonomie. KK se forme avec l'intériorisation des interdits, et notamment le principal qui structure la vie humaine : l'interdit dKKKKKKKKK.]





Passé la surprise, et tous les efforts pour rationaliser la chose, Navidson l'aventurier organise une exploration avec des professionnels (alpinistes notamment), tandis que, derrière le sourire de FACADE qu'elle a façonné devant son MIROIR de poche lorsqu'elle était plus jeune, Karen SOMBRE dans la peur panique de découvrir ce que CACHE cette maison, et tente désespérément de convaincre le personnage de Navi de regarder ailleurs. Leur expédition est filmée et sera diffusée et visionnée dans un premier temps dans un cercle restreint, puis copieusement commentée, décryptée, tout le monde tentant de discerner le vrai du faux, de comprendre ce phénomène scientifique ou paranormal. La MAISON vient-elle d'une FAILLE spacio-temporelle ? Grandit-elle en fonction des peurs de ceux qui y pénètrent ? Est-ce un trucage ? Est-on dans un roman d'horreur, ou fantastique ou psychologique ? Ou bien plus encore ?? Toutes les théories sont envisageables en littérature, c'est cela qui est formidable et maintiendra votre curiosité.





Mais évidemment, « c'est là que les emmerdes ont commencé ».





Tout d'abord, en tant que lecteur futur HABITANT de cette maison DE feuilles, je vous conseille de la visiter sommairement avant de l'entamer. Familiarisez-vous avec sa STRUCTURE, ses différentes ENTRÉES, ses PIÈCES et ses ANNEXES au bout du couloir, heu en fin d'ouvrage. Car nombre de renvois vont sans arrêt tenter de vous faire PERDRE le FILs de votre lecture, afin de vous faire comprendre la désorientation des personnages. C'est la première magie de ce livre : l'expérience immersive. [*]





[* in : https://www.babelio.com/auteur/Mark-Z-Danielewski/9257/citations/2794066 ]





Ensuite, pour vous perdre ou vous aider un peu plus, et vous faire ressentir ce que c'est que d'explorer quelque chose d'EXPONENTIEL, ce livre comporte différents niveaux de lecture :





« Ceux qui explorent le labyrinthe, et dont le champ de vision est restreint et fragmenté, sont désorientés, tandis que ceux qui contemplent le labyrinthe, que ce soit en le surplombant ou l'étudiant sur plan, sont émerveillés par sa complexité. »





1/ Premièrement la description, dans un style très journalistique, de ce que montrent les vidéo des explorations. C'est grosso modo ce que vous ressentez en regardant le célèbre Projet Blair Witch.





2/ Puis les notes et commentaires qu'a pris Zampano, un vieillard aveugle (un aveugle qui mate un film et l'annote, sérieux ?), sur ce film. Il nous apporte de solides références culturelles et des RÉFEXIONS (!) sur le contenu du film, le message qu'il véhicule et, surtout, la vie de ses personnages. Mais ce vieillard est mort, ce qui nous amène au troisième niveau de lecture.





3/ Les notes et commentaires d'un jeune homme oscillant en permanence entre DÉLIRE psychotique et delirium tremens, ayant découvert les notes du vieil aveugle décédé, qu'il commente à son tour ! Son style est particulièrement PERCHÉ. Ses récits relèvent du vomi de pensée les lendemains de fête. Mais il nous met la puce à l'oreille, ce dénommé JOHNNY ERRAND, parce qu'on se demande en quoi son récit sert l'histoire. Pourquoi on nous raconte sa vie de fêtard, quel rapport avec une maison qui semble paranormale ? Nous ne pouvons décrocher nos yeux de sa loghorrée fascinante. Car ses incompréhensibles péripéties, d'apparence sans queue ni tête, finissent par laisser entrevoir une histoire dans l'histoire… Il est principalement cité en notes de bas de pages, mais celles-ci s'immiscent dans l'histoire principale et entre les gloses de Zampano, elles enflent jusqu'à prendre toute une partie des pages normales ; Son récit, c'est sûr, se mêle à l'histoire principale autant qu'elle nous en détourne. [*]





[* le ÇA KKKKKKKKK réservoir libidinal, le siège des pulsions (dans lesquelles vont puiser le surmoi et le moi). Une partie du ça est HÉRÉDITAIRE, innée, une autre partie est acquise, issue des REFOULEMENTS KKKKKKKKKK ]





Après je voulais vous raconter un truc mais, malheureusement, je me suis réveillée dans la voiture. le pare-brise était pété, comme moi, Chou avait disparu, sa ceinture était coupée, maculée de sang. Comme moi. Comme le monde ne cessait de tourner à tout vitesse avec le temps, j'ai cligné des yeux mais cette boule en moi ne disparaissait pas. Pour la faire disparaître, j'ai tendu le bras vers la boîte à gant où je planque toujours une fiole de Jack Daniel's, mais je ne trouvais qu'un couteau à cran d'arrêt ensanglanté et mes allumettes de chez DAYSINN et ce putain de MIROIR de poche, dans lequel je m'entraine chaque jour à faire croire que TOUT VA BIEN !!!!! Et là j'ai commencé à voir rouge, REDWOOD, des images de mon père se superposaient à tout ce merdier et tout les chats et chiens de mon enfance me léchaient les joues et la bouche, et cette odeur dégueulasse qui me retournait l'estomac, qui vient toujours de moi, sur moi, partout autour, alors j'ai pris une pilule jaune fluo qui m'a aidé à y voir clair, choppé mon Pelikan favori et pris des notes je ne sais plus où pour me rappeler ce que je voulais vous dire. Sauf que là tout de suite je m'en rappelle plus. ECG plat. BIIIIIIIIIIIP. [*]





[*] Les personnes atteintes de trouble de personnalités multiples ont plusieurs identités et des trous de mémoire sur les événements de tous les jours, les informations personnelles importantes et les événements traumatiques ou stressants, ainsi que beaucoup d'autres symptômes, y compris la dépression et l'anxiété. mrkrnje KKKKKK





4/ En plus de tout ça, vous trouverez comme annoncé, en fin d'ouvrage, en ANNEXES de cette MAISON-livre, un tas de PIÈCES comme un TRÉSOR, sensées avoir été découvertes par Zampano ou encore ajoutées par J.E.





Par un JEU incessant de renvois, ces PIÈCES font le lien entre les différents récits. Elles sont les pièces manquantes du PUZZLE pour lier les bouts que nous avons déjà assemblés. On y trouve : les LETTRES d'une mère internée dont la vie présente des similitudes avec un autre personnage des récits [*], ainsi que des possibles liens avec JE et de JE avec l'auteur lui-même ; des poèmes d'un mystérieux Pelikan, des textes à décoder, des photos, des images à regarder attentivement et d'autres moins, etc…





[* KKK MOI est l'agent de liaison entre les différents instances et le pôle de la réalité. Il se construit par adaptation au réel, et en instaurant des moyens de DÉFENSE pour éviter les sources de déplaisir issu du contact entre l'énergie pulsionnelle et la RÉALITÉ extérieure. ]





« Nous inventons tous des histoires pour nous protéger. » Eh ben laissez-moi vous dire que là, on tient une carapace en titane !





Ce qui nous amène à un point crucial de cette lecture : Comment faire la différence entre les informations importantes et les autres ? Rien de mieux qu'un mode d'emploi extrait du livre pour y répondre : Il s'applique à l'exploration du labyrinthe, mais comme on explore un labyrinthe de pensées, elle DEMEURE pertinente [*]. Sinon mon meilleur conseil : lisez comme vous voulez et ECLATEZ-VOUS !





[* in : https://www.babelio.com/auteur/Mark-Z-Danielewski/9257/citations/2791171 ]





L'ensemble est foisonnant et LES PERSONNALITÉS MULTIPLES. Les explications de Zampano sur le film semblent pouvoir aussi expliquer des bouts de la vie d'autres personnages comme Johnny où la mère internée. D'autres passages, notes, pièces semblent abscons… Mais plus on avance, plus des portes s'ouvrent entre les informations et un (ou des ?) schéma se profile… le point commun à tous les perso est-il la maison qui les a affectés ? Ou ce qui les lie est ailleurs, plus profond ? Dès lors, vous voudrez RÉSOUDRE L'ÉNIGME de la maison-labyrinthe, car l'auteur vous fera douter et vous questionner jusqu'à la fin : Roman PROTÉIFORME et MOUVANT, il s'adapte au DÉDALE de vos déductions pour devenir aussi énorme que la somme de vos suppositions, errances, voltes-faces et enjambées. En fil d'Ariane, mes post-it sur lesquels revenir en cas de doute sur le chemin à prendre. Car ce roman lui-même est CONSTRUIT comme un labyrinthe.





(Note à moi-même : Penser à retrouver un dénommé Chou…) (TROUVER COMMENT MASQUER CETTE ODEUUUUUR !!! ) (Et penser à CODER cette critique sinon ils vont ù$krn€$KRN$$@krn)





Pour que vous viviez l'expérience de sauter d'une pièce à l'autre, en ayant l'impression Que l'histoire que vous venez de lire est bien plUs grande que le nombre de pages que vous avez lu, l'auteur joue des pièces et annexes qu'il vous fait vIsiter au gré de ses notes de bas de page ; et pour vous faire emprunter un couloir puis revenir sur vos pas, vous perdre dans les méandres du labyrinthe comme ses personnages, pour lE vivre avec eux, il vouS renvoie à une note dans la marge qui se poursuiT page suivante, puis sur une dizaine de pages, achevant sur un autre renvoi à une note… que vous trouverez sur la colonne de droite de la page d'à côté, écrite à l'envers, si bien qu'une fois que vous avez tourné le livre pour la lire dans le bon sens, autant dire faire un demi tour pour revenir sur vos pas, vous poursuivez de pages en pages Jusqu'à revenir au paragraphe de l'histoire que vous aviez quitté avant la première note de bas de pagE.





???

(ceux qui se demandent pourquoi j'ai mis 3 ??? ont loupé quelque chose : revenez sur vos pas !!!)





Aussi, visuellement, la double page de la maison représente bien le plan du labyrinthe qu'il décrit : un couloir au milieu, des entrées à gauche et à droite qui donnent sur des passages plus ou moins secrets d'une efficacité douteuse, qui vous ramènent souvent à votre point de départ s'il ne parviennent pas à vous égarer entre temps ! Et parfois même des trouées spacio-temporelles au milieu, qui semblent vous faire avancer plus vite mais vous obligent toujours à reculer pour mieux sauter dans la suivante. Si, à un moment donné, par exemple autour des pages 140-150 de mémoire, vous vous retrouvez paumés, à ne plus savoir où vous en êtes à force de jongler entre les multiples entrées de cette lecture, vous repenserez à ce que j'essaye de vous expliquer. A ce moment-là, vous serez probablement exactement où l'auteur voulait vous amener [*].





[* in : https://www.babelio.com/auteur/Mark-Z-Danielewski/9257/citations/2794066 ]





Mais le génie de l'auteur n'est pas seulement d'accorder la forme au fond, ni d'être un puits de références, ni de savoir si bien changer de style en fonction des personnages. Son génie est d'arriver à jouer avec nous, en plaçant toutes les informations au bon endroit. Pire, il est lisible dans n'importe quel sens (mais je vous conseille de lire le livre en suivant ses indications, même s'il peut se lire aussi différemment, cf la critique de Chou_dOnee^^ [*]).





[* in : lien en fin de critique. ]





[Bon SANG mais QUI est Chou ??????????]





Au total, l'auteur s'inspire de beaucoup de choses, dont notamment :

. le LIEN HYPERTEXTE, ou le syndrome du Quai 9 trois quart : par le jeu des renvois après un mot, on tombe toujours sur une masse d'informations à digérer ; Cette impression est amplifiée par le fait que le mot maison soit toujours écrit en bleu, comme une surbrillance sur laquelle cliquer et derrière laquelle se cache un univers entier comme un monde parallèle ;

. le cinéma en général, et j'y ai retrouvé certains de mes films cultes et notamment, en masqué pour ne pas spoiler : qui m'ont tout de suite orientée vers une théorie - mais je soupçonne l'auteur d'avoir monté une histoire qui, comme la maison, s'adapte à toutes vos autres références (ainsi, comme le test de Rorschach, votre interprétation pourrait bien en dire plus sur vous que sur ce livre...), voire peut-être n'est pas vraiment faite pour qu'on résolve l'énigme :





« Le monde des adultes, toutefois, produit des devinettes d'une variété différente. Elles n'ont pas de réponses et sont souvent qualifiées d'énigmes ou de paradoxes. Mais la trace d'une formulation propre à la devinette corrompt ces questions et fait résonner l'écho de la leçon la plus fondamentale : il doit y avoir une réponse. de là naît le tourment. »





Navidson nous dit bien pourtant que la maison n'est que ce qu'elle est. Mais peut-on lui faire confiance quand tous les personnages nous suggèrent l'inverse (et que l'un des personnages de son histoire s'appelle DELIAL = DÉMENTI !!) ? Nos narrateurs sont aussi peu fiables les uns que les autres, alors lecteur de fantastique ou de thriller pscychologique : il y en pour tous les cerveaux ! Mais c'est tellement bien fait, et je me suis tellement amusée, que pour une fois, moi qui n'aime pas les fins ouvertes, je me disais que ce ne serait pas si grave si, à la fin, l'auteur préférait laisser le lecteur se convaincre d'une explication qui lui convient :





« Ce qu'on voit dépend de l'endroit où l'on se trouve, ce qui fait que, dans le même temps, les labyrinthes sont simples (il n'existe qu'une seule structure physique) et doubles : ils incorporent simultanément l'ordre et le désordre, la clarté la confusion, l'unité et la multiplicité, l'art et le chaos. Ils peuvent être perçus comme un chemin (un passage linéaire mais détourné vers un but) ou comme un motif (un dessin absolument symétrique)... Notre perception des labyrinthes est ainsi intrinsèquement instable : changez de perspective et le labyrinthe semblera changer. »





. c'est aussi un entre le livre dont vous êtes le héros, l'escape game, le rubik's cube et le super cluedo, mais les lecteurs qui n'aiment pas jouer en lisant s'y retrouveront en lisant simplement ;

. et puis des références culturelles et artistiques à gogo que je vous laisse traquer (regardez bien les images dans le livre !!!).





Loin de copier ce dont il s'inspire, DANIELEWKI transcende tout ça, créant une oeuvre à part-entière, unique et au-dessus de tout ce que j'ai lu jusqu'à présent. Ce bouquin a eSsuyé 32 refus avant d'être édité ; Mais c'est peut-être ce qui lui a donné son délicieux côté mille-feuilles ébouriffé aujourd'hui (ah non pardon, ça, c'est les post-it que j'ai collé un peu partout autour en le lisant…), et a contribué à la richesse de sa composition. D'abOrd publié sur internet, il a fait l'objet de plusieurs éditions depuis qui l'ont étoffé. Qui sait, à la prochaine édition on aura peut-être le double de pageS à explorer de nouveau, et on pourra réemployer notre lecture et notre interprétation !





Coup de coeur absolu pour ce roman - et c'est rare.





## L'éditeur tient à préciser qu'à part l'auteure de la critique, aucun animal n'a été maltraité durant les scènes décrites : les chiens et chats n'ont pas été battus ni égorgés, et Chou, le mari, n'a pas été trucidé à coups de couteau de pique-nique : Vous pouvez le retrouver sur la page de sa critique en suivant le lien ci dessous : il l'a écrite de l'ASILE où il est… INTERNE ! ##
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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La Maison des feuilles

Ils m'ont fait pénétrer dans cette arrière-salle qui ressemblait à une vieille classe d'école désaffectée et qui puait l'humidité, la moisissure.

Ils étaient quatre. Ils ont allumé un feu dans l'âtre. Ils ont commencé à m'interroger.

- Votre nom ?

- Berni_29.

- C'est pas un nom, ça !

- Je tiens à garder l'anonymat.

- Profession ?

- J'écris des chroniques sur Babelio, mais de manière bénévole.

- C'est pas un métier, ça. Nous savons déjà cela. Nous vous suivons depuis plusieurs mois sur ce réseau, ce fameux groupuscule. Vos 617 critiques ont été examinées au peigne fin, elles sont subversives, même celles qui, soi-disant, s'adressent aux enfants. Celui qui m'interrogeait marqua un silence ridicule comme s'il voulait peser le poids d'une sentence implacable. Je ne voyais pas trop bien où il voulait en venir. Vous étiez en possession de ça quand nous vous avons arrêté. Pouvez-vous nous en parler ?

L'un de ses collègues s'est levé et a jeté sur la table devant moi ce livre La Maison des feuilles, d'un certain Mark Z. Danielewski.

- Vous avez cinq minutes pour nous faire un résumé de l'histoire de ce livre, de ce qu'il contient.

- L'histoire, les histoires c'est-à-dire les trois histoires ou bien ce qu'il recèle véritablement ? Ce n'est pareil. Je me mis à rire, d'un rire qu'ils ont sans doute jugé insolent. L'un d'eux agacé s'est levé de son siège pour me gifler.

- Ne jouez pas sur les mots.

- Mais justement, ce livre joue sur les mots, ou je dirai plus précisément : joue avec les mots. Celui qui m'avait giflé s'est encore levé. Son compère l'a retenu par l'épaule. Laisse tomber, Holloway ! On va plutôt examiner de près ce qu'il y a dans ce foutu bouquin qui semble si intéressant.

Ceci n'est pas pour vous, j'ai lancé goguenard.

Ils ont feint de ne pas m'entendre, ils ont ouvert le livre, ont commencé à balayer les pages, l'un d'eux s'est mis à retourner l'ouvrage dans tous les sens, il ne comprenait pas pourquoi le texte lui apparaissait ainsi avec des typographies différentes, des notes de bas de page qui prenaient parfois brusquement le dessus sur le texte principal, des textes à l'envers qui se lisaient en biais ou de bas en haut formant parfois une échelle qui invitait le lecteur à mettre le pied sur les premiers barreaux des phrases pour atteindre...

Mais c'est quoi ce truc ? Sa voix était devenue étrange, résonnait dans la pièce, c'est comme s'il parlait devant un antre béant qui renvoyait sa voix dans un écho distordu. Je ne sais pas ce qu'il lui a pris, il s'est mis à plonger la main dans l'une des pages qui s'ouvrait comme un gouffre, il a continué à tendre la main qui semblait happée et alors j'ai vu cette main disparaître, puis le bras tout entier, il criait il appelait à l'aide ses comparses, son corps vacillait et s'apprêtait à être avalé par les mots, englouti par la page, ses collègues ont crié. Hé Jed ! Ont tenté de le rattraper. Ils étaient trois à essayer de le retenir par le corps par les jambes, ils étaient de piètres pantins devant mon visage mutique. Alors le livre les a avalés tous les quatre, j'ai attendu de voir le pied du dernier disparaître complètement. Alors je me suis levé, j'ai refermé le roman sur eux comme une porte qu'on claque d'un coup. Je me suis approché de l'âtre ou brillaient encore quelques cendres. J'ai pensé à ces mots : Ash Tree Lane, le lieu où résidait cette maison. Et j'y ai jeté le livre. Il est devenu comme un brasier, il est devenu des cendres comme le reste. Alors je suis reparti. Vers d'autres horizons, d'autres rivages, d'autres livres sans doute mais c'est à peu près la même chose car les livres sont des rivages, des horizons impossibles, des brasiers aussi qui nous embrasent.

Si des tortionnaires n'ont pas réussi à me faire dire ce que j'en pensais, alors...

Plus tard les cendres se sont reformées autour d'un livre qui continuera son histoire, je le sais…



La Maison des feuilles est une oeuvre semblable à une matriochka.

On pourrait croire qu'il y a trois histoires dans ce livre : celle de Johnny un apprenti tatoueur qui découvre par hasard une thèse écrite par un vieil homme, un certain Zampanò. Cette thèse porte sur un film documentaire qui est la colonne vertébrale du récit, The Navidson Record.

Les pensées de Johnny figurent en bas de page, et très vite ses pensées débordent sur la thèse de Zampanò, jusqu'à devenir un récit parallèle intercalé qui nous fait souvent perdre le fil de là où nous en étions.

Et puis très vite nous sommes happés par le documentaire qui raconte la vie d'un couple presque ordinaire, Karen Green et Will Navidson et leurs deux enfants Chad et Daisy qui emménagent dans une vieille demeure datant de 1720, en Virginie. Un jour Will découvre par hasard une porte derrière un placard et cette porte donne sur un couloir étrange. C'est le début d'un vertige…

Tandis que commence une expédition pour explorer les antres de cette maison, nous voyons surgir les dessins des enfants Chad et Daisy qui montrent leur peur, ils sont peut-être les seuls êtres vivants de ce livre à être bien réels. Ils se terrent, sont oubliés dans les marges de ce livre.

« La marge, c'est ce qui fait tenir les pages ensemble. », disait Jean-Luc Godard.

Mais il y a une quatrième histoire, la nôtre, lorsque nous sommes en train de lire ce livre. Car ce livre n'est pas comme les autres.

Ce livre ressemble à une énigme par sa forme vertigineuse, ses mises en page, sa typographie changeante, évolutive… Il nous tient, nous prend à la gorge, il nous intrigue, nous séduit, nous résiste… Ce texte dans sa forme devient brusquement aussi vaste que ce que recèle ce couloir sans fin, sans fond. Il est façonné de mises en abymes effroyables qui ouvrent la boîte de Pandore et font entrer dans les pages des figures mythique comme le Minotaure, la baleine de Jonas…

Si l'on avance page après page, on sera perdu... Il faut lâcher prise, accepter d'être perdu, de trébucher…

Le texte se met physiquement à se transformer en ce qu'il raconte.

Je me suis demandé si cette lecture n'était pas un voyage dans les pures ténèbres de l'imaginaire et de la forme, au-delà de ce qui pourrait ne ressembler qu'à un livre. Au bout de quelques pages, j'ai reposé La Maison des feuilles sur ma table de chevet et je savais déjà que ce livre se livrait comme une clef vers un couloir dément qui me conduirait tout droit dans les méandres de ma propre psyché.

J'ai pris peur…

Oui, tout comme cette maison, ce livre est plus vaste à l'intérieur qu'à l'extérieur…

Oui, ce livre est un vrai labyrinthe ou chaque lecteur tentera de trouver sa sortie dans cette complexité qui vient porter le récit.

Mais il y a sans doute autant de façons de lire ce livre qu'il n'y a de lecteurs. Je vous en livre ici quelques-unes :

FAÇON BLAIR WITCH PROJET

- Ça va ?

- …

- Mais tu es où ?

- Là-bas, j'arrive…

- Merde, mais c'est qui alors, c'est qui là à côté de moi, tu es où ? Viens vite ! Putain mais c'est qui là si ce n'est pas toi, là….

FAÇON EDMOND ROSTAND

Descriptif : « C'est un antre ! … c'est une grotte ! … c'est un gouffre ! …

Que dis-je, c'est un gouffre ? … C'est un labyrinthe ! »

FAÇON LA DISPARITION PAR UN CERTAIN G.P.

Voilà un bouquin ahurissant ! Un roman ? Oui.

Quant à sa construction pour finir : imagination ? fiction ? Non, illusion !

Mais soyons clair, tout disparait à la fin, tout disparaît, la maison, nous tous, tout !

La maison fut un amas qui brûla, soudain…

FAÇON MAXIME LE FORESTIER

♫ C'est une maison des feuilles

Accrochée à nos psychés ♪

On y vient à pied, on ne frappe pas ♫

Ce qui vivent là furent avalés♪

FAÇON UN CERTAIN LECTEUR DE BABELIO SPÉCIALISTE DE TOLSTOÏ

Verba sub acumen stili subeant necesse est…

FAÇON CONSULTATION CHEZ LE PSY

- Vous me dites que lorsque vous avez quitté ce livre, vous avez eu l'impression d'être propulsé hors de l'utérus de votre mère.

- C'est cela Docteur.

- Était-ce une sensation douce ou violente ?

- Je ne sais pas Docteur, c'était la première fois.

- Et comment vous vous sentiez dedans.

- Bien, très bien même. Je n'ai qu'une envie, c'est d'y retourner.

FAÇON MISSION IMPOSSIBLE

Votre mission, Berni, si vous l'acceptez, sera de rédiger une critique de ce livre qui puisse être comprise de tous les lecteurs.

Il va de soi que si vous échouiez dans votre mission, vous ne seriez pas couvert par la communauté de Babelio.

Ce livre s'auto-détruira dans les cinq secondes. ♫ Ttt ttt ttt ttt ttt ttt ttt ttt ttt !!! ♫



Il s'agit dans ce livre non pas de célébrer un texte mais son cheminement labyrinthique, ses vertiges, ses limbes, ses fractales.

Au fur et à mesure que j'avançais dans les méandres de ce livre, j'ai eu peur de découvrir le dénouement rationnel qui viendrait sceller définitivement l'histoire comme une porte qui se referme sur le vide abyssal. Au fond, je n'avais qu'une seule peur, c'était de quitter cette lecture, car j'étais habité par ce livre…

La maison des feuilles n'est peut-être rien d'autre qu'une histoire d'amour mal comprise.

« Ne demande jamais ton chemin à quelqu'un qui le connaît, car tu ne pourrais pas t'égarer ! »

Nahman de Braslaw



Dans cette lecture commune, je remercie mes compagnons de route, Sandrine (HundredDreams), Doriane (Yaena), Nicola (NicolaK), Paul (El_Camaleon_Barbudo) et Jean-Michel (Michemuche). Sans eux, je me serais perdu à jamais dans les limbes de ce livre.

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La Maison des feuilles

Tout commence par une critique dithyrambique dans un magazine féminin. On annonce un « livre-culte », un livre hors du commun, un livre étrange, déroutant mais « cultissime » ! Et ça, ça nous interpelle !

Alors on va à la librairie, on le trouve dans les rayons, on le prend dans les mains et là, première constatation : il n’est pas comme les autres. Il est lourd, dense, et de forme presque carrée. On le feuillette pour mieux s’imprégner de son contenu et là, c’est la stupeur… On trouve différentes polices, des paragraphes non justifiés, des pages ne contenant qu’un mot au milieu, ou en bas, ou en haut, des mots en couleur bleue (ce n’est qu’à la lecture proprement dite que l’on constatera qu’il n’y a que le mot maison écrit en bleu, comme dans le titre), certaines pages ont même des textes écrits à l’envers, en miroir, des textes encadrés insérés au milieu d’un autre texte…. On se demande alors vraiment si on aura le courage de lire cette « chose ». Et puis on se dit que si les critiques l’ont qualifié de « culte » c’est probablement qu’il faut voir au-delà de l’apparence… Même si le contenant est un peu loufoque, voyons le contenu !

Donc, on l’achète et…..il reste deux mois sur la table de nuit car on n’ose pas l’affronter. Puis, un matin, (ou plutôt un soir), on se sent d’attaque et on ouvre « La maison des feuilles » et on comprend très vite, presque tout de suite, pourquoi tous l’ont couronné et encensé ! On se laisse prendre par sa magie, par sa puissance. Au bout d’à peine quelques pages, on sent déjà bien qu’à la fin de ce livre, on ne sera plus comme avant.

L’histoire qui est le fil conducteur de ce roman (car malgré tout il s’agit bien d’un roman), est très prenante, à la limite de l’angoisse et réveille en nous nos plus anciens cauchemars de maison hantée, de monstres qu’on devine mais qu’on ne voit jamais…Les passages angoissants sont savamment dosés et alternent avec des paragraphes parlant de tout autre chose : il faut mettre son esprit au diapason et ne pas perdre le fil !

Le chapitre sur les labyrinthes est extraordinairement bien construit : on croit se perdre dans les dédales du (ou plutôt des) texte, puis on retrouve une sortie, puis non, c’était une impasse, il faut se replonger dans les couloirs, dans les notes de bas de pages, dans les circonvolutions du livre : c’est un véritable labyrinthe mais aussi un véritable tour de force qu’a accompli là Danielewski et on ne peut éprouver qu’une admiration sans borne, teintée d’une pointe de jalousie, il faut bien l’admettre…Pourquoi n’a-t-on pas un tel génie ?

On comprend aussi qu’il lui ait fallu 12 ans pour l’écrire, et que le traducteur ait pris un tel plaisir à transcrire ce texte.

Il n’y a qu’un mot qui nous vienne à l’esprit, même s’il peut en choquer quelques uns : c’est jouissif !



Pour conclure, je conseille vivement cette expérience à tous ceux qui aiment VRAIMENT les livres !

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La Maison des feuilles

Je viens d'achever le nouveau livre phénomène de la maison d'édition Toussaint Louverture, un roman qui fait l'objet d'un culte grandissant auprès des lecteurs. Vous trouverez même sur Internet de nombreux forums de discussion et d'échange consacrés à ce livre, en raison de la complexité et de l'ambiguïté du texte.



Pour la petite anecdote, ma curiosité était déjà piquée avant sa publication. Lorsque je l'ai aperçu en librairie, mis en valeur sur un présentoir, je l'ai pris dans mes mains en étant convaincue de l'acheter. Mais en le feuilletant, sa lourdeur et sa complexité apparente m'ont impressionnée et je l'ai reposé. Et puis, lorsque plusieurs ami.es babéliotes ont voulu se lancer dans cette expérience littéraire en lecture partagée, je me suis jointe à eux.



Ma lecture s'est apparentée à une plongée en eau trouble : au départ enthousiasmée par ce roman atypique, je me suis aussi retrouvée plusieurs fois seule, perdue dans l'obscurité sinueuse de ces couloirs labyrinthiques, ne sachant plus si je devais continuer, rebrousser chemin ou abandonner.



« C'est comme s'il y avait autre chose, une chose au-delà de tout ça, une histoire plus vaste en train de se profiler dans le crépuscule, et que pour une raison inconnue je suis incapable de voir. »



En sortant de cette maison, je suis partagée entre plusieurs ressentis : j'ai conscience d'avoir vécu une expérience de lecture rare, mais l'intrigue est si complexe que je ressors avec plus de questions que de réponses.

Si je suis arrivée au bout de ce livre-monument, je dois en remercier mes compagnons d'aventure, Doriane (Yaena), NicolaK, Jean-Michel (michemuche), Berni_29 (Bernard), et Paul (El_Camaleon_Barbudo).



*

Alors de quoi parle vraiment ce livre-phénomène ?

La famille Navidson emménage dans une vieille maison datant de 1720 et remarque rapidement qu'elle est plus grande à l'intérieur qu'à l'extérieur et que ses caractéristiques physiques changent, laissant apparaître une nouvelle porte et un couloir obscur et glacial qui s'enfonce dans les ténèbres sous la maison.

Le mari, Will, photographe célèbre lauréat du prix Pulitzer, décide alors d'installer des caméras dans toute la maison afin de réaliser un film documentaire, à la manière du "Projet Blair Witch".



En marge de cette histoire, nous suivons un autre récit, celui de Johnny, un jeune drogué qui emménage dans l'appartement d'un vieil homme décédé depuis peu. Celui-ci a laissé dans une malle un manuscrit fait de fragments de feuilles de papier que Johnny décide de remettre bout à bout.



*

Ces deux récits se déploient sur deux fils narratifs parallèles, mais semblent se répondre, comme un écho. Cette trame est d'apparence assez simple, mais c'est sans compter un pêle-mêle de notes de bas de page, de digressions, de fausses références, de renvois à des annexes de plusieurs dizaines de pages en fin de livre, de poèmes, de dessins, de citations, de photos, de textes codés, de détails superflus au milieu d'autres essentiels, et d'histoires secondaires qui mènent à des impasses ou pas !



Mark Z. Danielewski s'amuse également à jouer sur les mots, à glisser de nombreuses références littéraires, historiques, mythologiques ou cinématographiques. Ainsi, j'ai vu des clins d'oeil à « Alice aux pays des Merveilles » ou à « Alice de l'autre côté du miroir ». L'ambiance rappelle aussi la série télévisée "American Horror Story ». L'auteur s'appuie également sur le récit de Jonas et de la Baleine, sur celui du labyrinthe du minotaure. Il évoque encore la boîte de Pandore pour n'en citer que quelques-unes.



Et là vous commencez à saisir toute la complexité de ce récit qui surprend par ces différents niveaux de lecture.



L'idée sous-jacente de l'intrigue est brillante, mais rien n'est jamais expliqué, ni finalisé. La maison est un labyrinthe où tout est à double sens : cette maison des feuilles en perpétuelle mutation est comme un miroir qui renvoie une image déformée. Les interprétations sont donc multiples et dépendront de la perception de chacun.

La narration place ainsi le lecteur en position où il doit lui aussi choisir son propre chemin pour évoluer dans le tunnel et trouver la sortie. Bien sûr, vu l'ampleur du défi, le doute s'installe dans notre esprit. On se demande si on ne fait pas fausse route, même si l'histoire nous rappelle parfois d'autres romans déjà lus.



« [C]eux qui explorent le labyrinthe, et dont le champ de vision est restreint et fragmenté, sont désorientés, tandis que ceux qui contemplent le labyrinthe, que ce soit en le surplombant ou l'étudiant sur plan, sont émerveillés par sa complexité. Ce qu'on voit dépend de l'endroit où l'on se trouve, ce qui fait que, dans le même temps, les labyrinthes sont simples (il n'existe qu'une seule structure physique) et doubles : ils incorporent simultanément l'ordre et le désordre, la clarté la confusion, l'unité et la multiplicité, l'art et le chaos. Ils peuvent être perçus comme un chemin (un passage linéaire mais détourné vers un but) ou comme un motif (un dessin absolument symétrique)... Notre perception des labyrinthes est ainsi intrinsèquement instable : changez de perspective et le labyrinthe semblera changer. »



*

Une maison, rien de plus banal.

Et pourtant, l'auteur a réussi l'exploit de me la rendre mystérieuse, intrigante et menaçante. Sa forme mouvante et impénétrable, ses murs qui se construisent et se déconstruisent, les grondements qui jaillissent de ses profondeurs ont piqué ma curiosité. Cette maison m'a semblée vivante, avalant ceux qui osent s'y aventurer, les dévorant de l'intérieur jusqu'à les digérer.



Mais, autant l'histoire des Navidson m'a fascinée, autant je suis restée très distante de celle de Johnny Truant : je suis malheureusement restée indifférente aux émotions de ce jeune homme dont la vie tourne inlassablement autour de ses conquêtes féminines, de sa sexualité, de ses angoisses remontant à la petite enfance et de son travail dans un salon de tatouage. Je n'évoquerai même pas sa façon d'évoquer les femmes. Indifférente au récit de Johnny pour lequel je n'ai eu que peu d'empathie, j'ai décroché lorsque je m'éloignais trop longtemps du récit des Navidson.



*

Et puis, il y a beaucoup de choses à dire sur l'objet-livre. Il est vraiment très lourd. En ouvrant le livre, on découvre un texte qui se lit à l'endroit et à l'envers, en diagonale et puis, on ne sait plus trop comment le lire. On le tourne et le retourne, c'est original, voire amusant.



*

« La maison des feuilles » est sans aucun doute une expérience de lecture unique, mais ce livre n'est pas facile à lire. J'ai été contente de participer à cette expérience littéraire. L'objet-livre, sa mise en page, l'originalité de son thème, son incroyable complexité et ses multiples significations valent le détour.



J'aurais aimé avoir un coup de coeur. Cela n'en est pas un, mais j'ai passé un bon moment. Je garde toutefois cette impression d'une lecture inachevée et je ressens une sorte de frustration de ne pas avoir réussi à percer tous les mystères de cette maison.



Pourtant, cette lecture maintenant terminée, je ressens que cette maison continue à m'habiter, preuve que ce roman est vraiment prenant. Je repense aux idées, aux théories qu'elle soulève et au final, me reste cette question : qu'est ce qui était réel et qu'est-ce qui n'était qu'illusion ?
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La Maison des feuilles

Flash spécial, que se passe t’il à Ash Tree Lane ? Notre journaliste michemuche est sur place, que se passe t’il muche ? -Il était à peu près 23heures quand des voisins de cette paisible localité de Virginie ont entendu des grondements venant de la maison de la famille Navidson. Ils ont aperçu des personnes sortant de la dite maison et ont appelé la police pensant avoir affaire à de vulgaires délinquants. -Pardon lieutenant que pouvez-vous dire au sujet cette affaire, -nous avons interpellé quatre personnes complètement bizarres, Caméléon, Yaena, Nicola, Berni, et hundred dream, on pense à une rave party qui aurait mal tourné, ils tiennent des propos complètement hors sol. Caméléon par exemple est tout vert, il convulse en disant sans cesse Delial Delial, ou Berni, je pense que c’est le cerveau du gang

- [ ] f =c/2[(n/L)2+(m/1)2 +(P/H)2]1/2 Hz . pour Yaena, Nicola et hundreddream leurs cas sont inquiétants, elles sont déshydratées et leurs températures corporelles sont descendues très bas ,nous sommes en juillet , et en plus toutes les trois cherchent des allumettes en criant à tue tête Jonnny Zampano ° 1même combat…..

°1

La maison des feuilles est labyrinthique, c’est une expérience dont certains ne reviendront pas, ou si ils reviennent leurs charges mentales sera tel qu’ils risquent de se perdre dans les couloirs de la maison. « Quand des propositions mathématiques se rapportent à la réalité, elles ne sont pas certaines ; quand elles sont certaines, elles ne se rapportent pas à la réalité. » Albert Einstein.

Voilà, j’ai terminé la maison des feuilles de Mark Z Danielewski, ce roman hors norme n’est pas facile, tellement dense, on avance dans le noir, à tâtons, il fait froid, on entend des bruits inquiétants , on cherche des indices .

Finalement je me suis laissé porter, la maison des feuilles c’est comme une baïne, elle vous emporte, on ne peut pas lutter, laissez vous porter et tout ce passera bien. Merci à Paul, Bernard , Doriane notre éclaireuse, Nicola et Sandrine pour cette lecture commune.
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Les Lettres de Pelafina

Série de lettres extraites du monument « La Maison des Feuilles », livre bien difficile à trouver de nos jours à un prix décent… Pour le chasseur (ou cueilleur, pêcheur, etc., selon votre sensibilité) de livres usagés, ce petit recueil sorti chez Folio peut faire office de lot de consolation, voir de mistigri, toujours dans nos pattes, comme un coquetier face au graal…

Ce n'est finalement pas sur internet (où mes alertes enregistrées pour l'occurrence « Danielewski », sur de nombreux sites, m'inondaient de mails pour ces « Lettres de Pelafina »), mais dans un magasin d'occasion bien connu des bruxellois (et de certains professionnels français…) que j'ai fini par trouver, un jour de grande activité, le gros pavé, posé sur une table, bien en évidence, pour le prix de deux bières… J'ai dû pour l'occasion pousser un cri… J'aurais volontiers mordu la personne qui aurait tenté de l'attraper avant moi…

Voilà pour la petite histoire, qui j'espère fera garder espoir aux nombreux lecteurs en recherche de ce livre culte, dont la version « full color remastered » (sont forts ces ricains), n'a pas encore (?) été éditée en France…



Et ce petit livre dans tout cela ? Difficile de juger, ces lettres étant un élément important sans être central de l'histoire, elles disposent bien d'une « qualité » suffisante pour être abordées seules, mais en perdent de leur puissante charge émotive. Bien qu'en ma possession depuis longtemps, je ne les ai lues avant d'avoir achevé le gros… ce qui complique l'appréciation de leur existence séparée…

Les neufs lettres inédites peinent seules à justifier l'achat à posteriori…

Réservé aux fans ?
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La Maison des feuilles

La Maison des feuilles est un récit très particulier tant sur le fond que sur la forme. Tout part du Navidson Record un film tourné comme un documentaire qui montre la maison de Karen et Will Navidson. Jusque-là rien d’exceptionnel me direz-vous. Sauf que ces films tendent à prouver que cette fameuse maison est plus grande à l’intérieur qu’à l’extérieur. Mais en plus cette maison semble faire « pousser » d’étranges couloirs tels des excroissances. Ça tombe bien Will est un photoreporter chevronné et cette exploration de la Maison semble des plus prometteuses. Autant inviter quelques potes et voir ce que ça donne.



Mais tout n’est pas si simple car, s’ajoute à cela sous forme de notes, annexes, références et autre paperasses en tous gens et en tous sens, les commentaires de Zampanó qui a entrepris d’analyser les films de Will. Etrange pour un aveugle. Là déjà on est dans le puzzle niveau expert. Mais loin de s’arrêter là, l’auteur a la bonne idée de faire hériter Johnny Errant de tous les écrits de Zampanó. Et on est reparti pour une couche d’annexes sous forme de lettres, notes de bas de pages taille XXL, et références tantôt véridique tantôt farfelues. On a dépassé le niveau puzzle on est passé en mode labyrinthe niveau Dédale et je crois bien que je n’ai pas trouvé Ariane. Jamais là quand on a besoin d’elle ! Des codes, des renvois, des passages entiers barrés, des sous-entendus, des mystères, des bribes, des choses en surplus autant d’infos qui en amuseront certains et qui en saouleront d’autres. Trois histoires donc qui s’imbriquent, s’enlacent et fusionnent au point d’être indissociables. Ok je prends, je suis donc passée en mode Sherlock Holmes pleine d’enthousiasme et à l’affut du moindre détail.



Toujours sur la forme le récit de Will Navidson est raconté en mode caméra embarquée, du genre paranormal activity ou le projet Blair Witch mais dans l’esprit Inception voir Matrix. Mais oui je vous l’ai dit c’est labyrinthique. Le fait est que je n’ai pas du tout adhéré à ce côté faux documentaire, ce qui a un peu douché mon enthousiasme.



Mais j’ai continué à jouer le jeu allant aux renvois, suivant tout dans l’ordre, essayant de faire des rapprochements, décodant la lettre codée, tournant le livre dans tous les sens et j’ai trouvé ça plutôt amusant dans l’ensemble mais certains passages m’ont vraiment parus soporifiques et je me serais bien passé des histoires de fesses de Johnny (pan pan… ? non mais sérieusement !) mais il se peut que certains apprécient.



Peut être est-ce dû à tous ces enchevêtrements et ces complications mais côté personnages je ne suis pas non plus convaincue. L’empathie est restée au vestiaire même si je reconnais que les personnages sont finement travaillés d’un point de vue psychologique. J’aurais aimé qu’on s’attarde plus sur les enfants, un passage concernant leurs dessins est très intéressant mais voilà ce ne fut qu’un passage. Et puis non seulement personne ne s’est attardé sur les enfants mais en plus personne ne s’est occupé d’eux non plus. A quoi bon avoir créé ces 2 protagonistes pour les laisser dans un coin et ne rien en faire ?



Côté ressenti ce n’est pas folichon non plus pas de peur, d’angoisse, ou d’enthousiasme.



Par contre, l’exploitation du thème de la folie sous des formes variées est complexe et appréciable de même que la réflexion sur la frontière entre le réel et l’imaginaire un peu à la Shutter Island est interessante. Mais voilà des bouts, des morceaux, des extraits, et beaucoup de frustration.



L’écriture est irréprochable avec de belles envolées lyriques où on sent le potentiel et l’imaginaire riche qui anime l’auteur. Mais la forme repousse tout cet imaginaire et vous ramène illico dans un monde de caméras, de mesures,... bref ce n’est pas très drôle et parfois ça tourne à l’indigeste.

Ce livre je l’aurais abandonné si Sandrine (HundredDreams) Bernard (berni) Nicola, (NicolaK), Paul (El_Camaleon_Barbudo) et Jean-Michel (Michemuche) ne m’avaient pas accompagnés dans les couloirs sombres et froids de cette maison. Même s’ils ont piqué tout le chocolat !



Je me suis accrochée à eux et à leur humour, espérant que ce livre valait la peine que je fasse un effort. Malheureusement j’ai tourné la dernière page et la désagréable impression d’une promesse non tenue m’a envahie. L’impression d’être face à quelque chose d’inutilement compliqué et de laborieux. Ce livre est contraignant et exigeant, il demande beaucoup mais donne peu.



Je n’ai pas réussi à percer la carapace de ce livre, pas réussi à rentrer au cœur, il m’est apparu comme superficiel et sans âme ce qui ne veut pas dire qu’il l’est. Je suis peut être passé à côté du message de l’auteur ou alors il n’y en avait tout simplement pas. A vous de vous faire une idée, vous trouverez peut être ce qui n’a cessé de m’échapper ou peut-être pas.



Mais attention, vous êtes prévenus, vous entrez dans la quatrième dimension…

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La Maison des feuilles

C’est l’histoire d’une famille qui emménage dans une maison, y vit un cauchemar étrange, et filme le tout. En fait, c’est plutôt l’histoire d’un vieux qui a vu le film de la famille qui emménage dans une maison, y a vécu un cauchemar étrange et a filmé le tout, puis a lu toutes les analyses de ce film, a fait ses propres recherches et en a écrit des centaines de pages. Non, c’est pas ça, c’est l’histoire de Johnny, un type un peu fêtard, un peu paumé, à l’esprit torturé, qui tombe sur les notes du vieux qui a écrit au sujet du film de la famille qui a emménagé dans une maison, y a vécu un cauchemar étrange et a filmé le tout. Vous avez suivi ? Non ? C’est normal. « La maison des feuilles » est un roman impossible à résumer, à raconter. Le genre de bouquin dont on ne sait pas dire ce qu’il raconte tout en le percevant, au fond de soi, dans le mystère de son propre cerveau reptilien. « La maison des feuilles » est un grand livre.



« La maison des feuilles » emprunte le schéma, déjà sinueux et exigeant, du récit enchâssé, mais celui-là ne ressemble en rien à ceux usant de ce motif narratif que j’ai pu lire avant. Rien de comparable avec « le manuscrit trouvé à Sarragosse » ou « Melmoth ». Les chefs-d’œuvre précités sont des ouvrages déroutants et exigeants qui demandent au lecteur une implication et de la concentration, mais ces bouquins, tout en adoptant un schéma narratif complexe, racontaient une histoire (ou des histoires) finalement assez classiques dans lesquelles on pouvait retrouver les éléments du monomythe du voyage du héros cher à Campbell. « La maison des feuilles » me semble s’éloigner du monomythe et propose quelque chose de vraiment inédit, tant dans la forme que sur le fond. Je pense que chaque lecteur y verra une histoire différente selon sa personnalité et son vécu. Si le livre aborde, brillamment, une multitude de thèmes, notamment une réflexion passionnante sur l’image, celui qui la fait, celui qui en est le sujet, celui qui la regarde, le sujet principal de « la maison des feuilles » m’est apparu comme étant celui de la confrontation à ses démons intérieurs, à soi-même. Il y a un côté très psychanalytique dans le roman. Mais rien de clinique là-dedans. Malgré la froideur apparente du dispositif narratif, le bouquin s’adressait vraiment à moi. Ce n’est pas la psyché des personnages qui était analysée, disséqué, autopsiée sous la plume de Danielewski, c’était ma propre psyché. Je suis moi-même une hyper-sensible, une âme tourmentée, avec des traumas, des blessures intérieures, des fêlures. Je suis une personne en constante fuite de ses monstres intimes. Lire « la maison des feuilles », voir ses personnages se confronter à leurs démons intérieurs, m’a forcée à interrompre ma fuite. « La maison des feuilles » a placé ces monstres personnels que je fuis depuis très longtemps, devant moi et m’a forcée à les regarder, et ce faisant, à me regarder moi-même. Une expérience très personnelle, très intime, secouante, dérangeante, violente, presque intrusive mais passionnante.



Avec « la maison des feuilles », Danielewski a créé une œuvre magistrale, exceptionnelle, totalement hors-norme, qui dépasse le cadre littéraire. Il y a trop de livres dont on a dit, de façon abusive, que c’était du jamais vu. Ici, le terme n’est pas galvaudé, vous n’avez jamais lu un livre comme « la maison des feuilles ». Les livres ont toujours un sujet propre à lui-même. Le sujet de « la maison des feuilles » c’est son lecteur. En lisant « la maison des feuilles » on se lit soi-même. Ce n’est pas une expérience toujours agréable, elle est parfois même douloureuse mais c’est passionnant.

Finalement, si je devais dire ce que raconte « la maison des feuilles », je dirais que c’est l’histoire d’une personne trimballant pas mal de blessures intérieures qui lit l’histoire de Johnny, un type un peu fêtard, un peu paumé, à l’esprit torturé, qui tombe sur les notes d’un vieux qui a écrit au sujet du film de la famille qui a emménagé dans une maison, y a vécu un cauchemar étrange et a filmé le tout.

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La Maison des feuilles

C’est l’impression d’être une vieille fille avec mes petites habitudes, tous les matins après mon chocolat, et mes sprits, je m’attable devant mon clavier Azerty pour écrire, pour redonner à mon égo une place de choix dans ma tête de con, ça m’amuse, et je prends mon pied…



Mais il est l’heure de se mettre au boulot, sortir les dossiers, analyser l’ampleur de l’ennui qui m’attend, dépossédé de toute motivation prolétaire…



Putain de merde j’ai rendez vous avec mon patron dans un cabinet d’architectes, pour discuter boulot, moi qui aimerais parler voyages, plongées, lectures, que dalle, ça parle capitalisme et meubles sur mesure, moi fringué en chemise à carreaux et jeans, le poil à l’air, au milieu des costards, coincés dans cette atmosphère apathique, je respire l’aigri par mon comportement, doux rêveur qui se laisse bercer par leurs caprices d’archi :



- Pardonnez-moi mon réveil brutal, mais le meuble là, il vole ?

- Euh oui, tout à fait, pour des raisons esthétiques ils nous semblaient très artistiques qu’il puisse voler

- Oui mais je ne suis pas magicien

- C’est vous le technicien, nous les rêveurs

- Eventuellement je peux vous proposer des petits ballons gonflés à l’hélium

- De quelle couleur les ballons ?



J’ai déjà décroché, absorbé par toutes ces nanas qui se trémoussent leur maquillage de classe avec grâce, déjà perdu de cet univers qui m’échappe de plus en plus, j’ai pris un coup dans la gueule, victime récente d’une crise existentielle qui me fait de l’œil, d’un mal de vie à la con, pas vraiment légitime au regard de la misère du monde, mais égoïstement je ferme les yeux sur ma petite personne pour retrouver cette sérénité désertée au prix de l’amour irrationnel…



Il me reste cette petite chose qui dandine son cul, petite bouille blondinette à bouclettes, un chouchou dans les cheveux, un petit bidon à croquer, un sourire espiègle, un caractère à la con, un papa à la con qui profite de ce petit machin qui fou le sourire partout la gueule…



Hier après le taf je l’ai emmené au parc, toboggan, balançoire et c’est le bonheur tout bête qui se balance :



- Pousse papa, pousse papa…

- Je te pousse je te pousse

- Papa à Gwenn, assis à côté de Gwenn

- Attends je matte les mamans



C’est tout con des fois, un peu à l’eau de rose, mais c’est du kif en miniature, ça vous câline la tronche à coups de bisous, ça vous sourit l’innocence, t’es là à prendre ton pied, à t’occuper de ton petit souci d’amour, qui roule du cul quand elle coure, qui saute partout, dopé à l’énergie, pot de colle à souhait, un régal de la vie, sucré, qui vous aime sans condition… Et puis le retour à la routine qui vous convient mais parfois plombée par des événements bien compliqués à gérer, ou le temps s’égraine au fil des journées, des semaines et des mois qui défilent, sans trop comprendre pourquoi des fois l’histoire tranquille d’une vie pépère part en sucette, inutile de se torturer indéfiniment, il faut savoir redonner un peu de sens à ce qui n’en a pas, et le vent souffle les feuilles dans mon appartement aux cris de ma fille qui réclame son chocolat du soir :



- Un seul parce que après tu ne vas plus rien bouffer

- Un seul vui… non deux, un tuc, un chocolat

- T’es dure en affaire toi



A plus les copains

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La Maison des feuilles

Cela faisait longtemps que je recherchais ce livre. Quelle ne fut pas ma surprise en découvrant qu'il était réédité en cherchant un cadeau (pour moi) pour Noël !

Oui je me fais toujours un cadeau, je l'ai bien mérité :-).

Il était empaqueté d'un film plastique, je me le suis alors emballé d'un un joli papier cadeau et attendus Noël pour le feuilleté.

J'ai cru à une plaisanterie en apercevant des pages semi-blanches, écrit à l'envers, avec plein d'annexe et autres documents.



Mais à peine je l'ai eue, je me suis jeté dessus. Il m'a fallu une semaine pour le lire…

Je suis donc mitigé…

J'ai adoré lire dans tous les sens, lire deux histoires en même temps. Découvrir cette maison si bizarre que j'aurais fuie plus qu'exploré… Mais tout cela pour ça…



Un livre à découvrir pour son originalité, pas pour son histoire… S'il n'y avait pas eu toute cette panoplie, cette décoration, ces textes dans tous les directions, je pense que l'histoire en elle-même n'aurait pas suffi à en faire un best-seller…



Bonne lecture !



ET BONNE ANNÉE  2023 !

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La Maison des feuilles

Comment en suis-je venu à lire « La Maison des Feuilles » de Mark Z. Danielewski moi ? QUI n'avait aucune appétence pour ce genre de bouquin ! Tout d'abord ma chérie Onee en a eu envie. C'est normal, c'est elle la défricheuse de trucs bizarres (voir ma mise au supplice avec « Enig Marcheur »). Et pour éviter que je me débine, elle a commandé deux fois ce livre. Une fois pour elle, une fois pour moi. Comme je suis près de mes sous, je ne pouvais pas reculer, j'ai lu.





Mais je n'avais pas envie de paSser mon temps avec des notes de bas de pages tentaculaires, des digressions labyrinthiques, des annexes énigmatiques, etc. J'ai donc proposé à Onee que ma lectUre se ferait au premIer degré c'est-à-dire en liSant l'histoire principale d'un trait, tout de go. A la fin, soit j'aurai épuisé mes ressources de lecteur et mettrai fin à une ennuyeuse épreuve, soit JE continuerai en redémarrant la lecture exclusivement avec les bas de page et l'histoire parallèle qui s'y déroulait.





? Et c'est comme ça que j'ai été accaparé par ce livre.





Prenons tout d'abord mon premier degré de lecture. C'est un univers à la « Blair Witch Project ». Pour ceux qui sont nés après 1999, « le Blair Witch Project » est un film sensé être tiré d'une récupération de cassettes vidéos expliquant la disparition de jeunes vidéastes dans une forêt qu'on dit hantée. On voit les jeunes dans leur progression filmés par eux-mêmes, jusqu'à une scène finale assez flippante dans le sous-sol d'une maison.





Dans la Maison des Feuilles, on va suivre un brillant photoreporter, Will Navidson, qui filme tout ce qui va arriver d'étrange dans la maison où il emménage avec son épouse Karen et leurs deux enfants, Chad et Daisy. le couple bat un peu de l'aile. L'installation dans cette maison doit permettre de le ressouder. Mais ce n'est pas du tout ce qui va arriver. D'étranges portes s'ouvrent sur des couloirs, des vestibules et des escaliers sans fin, dans lesquels Navidson ne souhaite qu'une chose, partir en exploration, alors que Karen, elle, ne veut qu'une chose, qu'il n'y aille pas !





Un ami universitaire, des aventuriers, et le frère de Will vont venir à la rescousse. Les explorations vont prendre un tournant cauchemardesque et dramatique. L'ambiance dans laquelle nous sommes plongés est celle d'un film d'horreur des années 90 à petit budget vraiment angoissant. Les caméras suivent la descente aux enfers sans effets spectaculaires. Mais Will Navidson nous est présenté comme un génie du montage et de l'image.





Ceci n'est que le premier degré vous ais-je dit. Les cassettes vidéos semblent avoir été récupérées et on nous explique qu'elles ont été diffusées auprès du public sous le titre « le Navidson Record ». En outre, un film tourné par Karen uniquement aurait été ajouté aux aventures qui se sont passées dans la maison à proprement parlé. Et ce matériau cinématographique serait devenu une mine d'or pour tout un tas d'érudits et d'universitaires, qui en a fait un objet d'étude et de fascination.





A partir de là, on arrive au deuxième degré de lecture. Un vieil homme, nommé Zampano, aurait récupéré l'intégralité des films, et aurait compilé toutes les analyses savantes, en les annotant, en les critiquant et en les complétant. Mais ce travail l'aurait rendu fou.





Un jeune homme, Johnny Errand, tombe sur l'oeuvre du vieil homme juste après la mort suspecte de celui-ci. Son cadavre n'avait rien d'anormal, mais autour de lui, se trouvaient des traces de griffes de plusieurs centimètres de long, profondes d'un ou deux centimètres, faites tout récemment dans le parquet.





Et c'est à partir de là qu'on débouche sur le troisième niveau de lecture, celui qui retrace tant bien que mal l'histoire de Johnny Errand. Cette partie est écrite à la première personne. On se trouve donc dans la tête du personnage principal. Il est extrêmement brillant mais totalement déséquilibré. Son enfance aurait été plus que difficile. Sa mère aurait tenté de le tuer, et il aurait perdu son père dans un accident de voiture quelques années après l'internement de sa génitrice. Dans les familles d'accueil où il est ensuite passé, il n'aurait eu que des problèmes. Il aurait sombré dans la violence, celle qu'il faisait subir aux autres en se querellant sans cesse, et celle qu'il aurait subie, notamment de la part d'un tuteur ancien militaire sadique.





Les pages dans lesquelles nous suivons Johnny Errand sont entrecoupées des annotations et explications concernant le Navidson Record. Mais elles prennent un aspect de plus en plus psychédélique au fur et à mesure de bouffées délirantes qui assaillent le narrateur.





Puis arrive ce que j'appellerai le quatrième degré de lecture, à savoir les lettres écrites par celle qui est présentée comme la mère de Johnny Errand, alors qu'elle était internée. On se trouve clairement devant la prose d'une cinglée. Il y a même une lettre qu'il faut déchiffrer comme dans un message codé pour espions. Ici, heureusement que ma Onee Chérie avait abordé ce passage avant moi, car elle avait eu le courage de décrypter la lettre. J'ai donc compris bien des choses en découvrant le message caché.





J'ai trouvé que ce quatrième degré donnait un éclairage extrêmement intéressant pour l'intégralité du livre. J'ai eu l'impression que Mark Z. Danielewski nous conduisait dans l'esprit et l'histoire tourmentée d'un ou de plusieurs schizophrènes. Et c'est à partir de là que plusieurs hypothèses ont vu jour. Comme Onee finissait sa lecture quasiment en même temps que moi, nous avons comparé et discuté de nos diverses impressions, suggestions, et interprétations. Et chose merveilleuse, alors que nous n'avions pas du tout abordé la lecture de la même manière, nos conclusions se rejoignaient.





Ce livre est alambiqué et riche. Mon expérience en deux temps prouve qu'il peut cependant être abordé sans complexe comme un livre ordinaire. de magnifiques poèmes s'y trouvent et peuvent mettre être découverts et appréciés en eux-mêmes. Mais j'ai l'impression qu'il vaut mieux l'explorer en plongeant dans ses méandres tels qu'ils sont proposés page par page.





Mention spéciale à l'éditeur Monsieur Toussain Louverture. Cette deuxième édition, agrémentée de photos, composée de textes parfois dans tous les sens, est un OVNI littéraire. Il semblerait qu'on puisse s'attendre à une troisième édition, qui donnera encore une vision différente, voire d'une quatrième car le sujet est si vaste.





Et maintenant j'ai envie d'un polar très classique pour reposer mes pauvres neurones…du genre où une folle hystérique assassine son mari avec un couteau à beurre dans un véhicule accidenté, se macule de sang et de tripes avec des dénommés Jack et Daniels, des tahitiens arrivés du Tchad, qu'elle noie illico avant de jeter leurs corps dans un trou sans fond. JE ME DEMANDE SI PAR HASARD JE NE SERAIS PAS EN TRAIN DE MOURIR.


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La Maison des feuilles

Inclassable, diablement complexe, La Maison des feuilles offre davantage une expérience, une sorte de quête, qu'un moment de lecture. Le lecteur doit se frayer un chemin dans ces pages aux interlignes serrés où les notes affluent, faisant le roman tout autant que le corps principal du texte. Parodique, parfois drôle, déchirant, inquiétant, agaçant, ce livre est étonnamment magnétique, impossible à lâcher malgré ses abords souvent abscons (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2022/08/25/la-maison-des-feuilles-mark-z-danielewski/)
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L'épée des cinquante ans

Critique de Alexis Brocas pour le Magazine Littéraire



En 2000, il publiait La Maison des feuilles, qui pourrait se décrire comme un compte rendu d'exploration fantastique : un photographe achète une maison et découvre, derrière une porte qui devrait donner sur le jardin, un labyrinthe infini qui ne cesse de se reconfigurer. Le livre témoignait de ce métamorphisme en usant de multiples artifices visuels (calligrammes, textes se déroulant en parallèle, inscrits en miroir) et par l'insertion de codes que les passionnés se sont épuisés à éclaircir. On pouvait alors parler d'« avant-garde » sans craindre de donner dans ce que Julien Gracq appelait la « critique de gaillard d'avant » - où l'on crie nouveauté comme les vigies d'antan criaient « terre ».

Après s'être fourvoyé dans le très hermétique O Révolutions, Mark Z. Danielewski revient avec L'Épée des cinquante ans, texte témoignant toujours de sa fantaisie graphique, mais parfaitement intelligible. Il s'agit même d'un conte pour enfants, avec cinq orphelins, une épée magique, une vallée de Sel, une montagne qui démultiplie ses grimpeurs, un armurier sans bras... Mais un conte pour enfants destiné aux lecteurs de Danielewski, conceptuel donc, et centré sur un art commun aux journalistes, aux chirurgiens et aux spadassins : l'art de la coupe.

Tout commence par une soirée de Halloween. S'y retrouve Chintana, couturière thaïlandaise, Belinda Kite, « plus mauvaise langue de Chicago East », qui lui a volé son mari, une poignée d'orphelins et leur assistante sociale. Apparaît un conteur dont l'ombre émerge directement des ténèbres et peut se projeter sans lumière. Aux enfants il va conter l'histoire de « l'épée des cinquante ans » - ainsi appelée car ses victimes doivent attendre leur cinquantième anniversaire pour tomber en petits morceaux. Avant de se livrer à une terrible démonstration.

Tout cela pourrait relever de la seule cruauté innocente propre aux contes - et s'y borner - si l'auteur ne donnait, par des trouvailles de son cru, un tout autre relief à son histoire. D'abord cette note liminaire expliquant que le roman a été conçu à partir de cinq entretiens coupés et croisés - note qui justifie la forme générale du texte, tout en propositions décrochées, et les guillemets de cinq couleurs qui les encadrent. Le lecteur comprendra vite qu'il s'agit de cinq orphelins, mais qu'il n'est pas forcément utile de vouloir reconstituer leurs cinq entretiens. Il y a ensuite ces broderies illustratives (c'est un conte pour enfants) qui joueront elles aussi un rôle dans la narration - coudre, n'est-ce pas l'inverse de couper ? Enfin, citons ces mots-valises (ou plutôt mots télescopés comme pour montrer les coutures du texte), ces autres qui se dissolvent, s'étalent, tombent au sol. Comme dans l'insondable Maison des feuilles, ce sont ces procédés qui donnent à l'intrigue fantastique sa dimension abyssale. Celle-ci ne peut se sonder que par une relecture. Alors certains éléments anodins - ou disposés pour apparaître ainsi de prime abord - prennent une autre importance : le métier de Chintana, sa coupure au pouce, cette fenêtre qui s'ouvre sans explications... Qu'est-ce qu'un bon romancier conceptuel ? Un romancier qui envisage ses textes comme les plasticiens envisagent leurs installations, certes, mais après les avoir pensés comme des oeuvres littéraires.

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La Maison des feuilles

House of Leaves

Traduction : Claro



Réflexion que l'on peut qualifier d'abyssale sur les apparences et ce que nous percevons de la réalité aussi bien par l'oeil que par l'oreille, "La Maison des Feuilles" se présente sous l'aspect, assez innocent à première vue, de deux récits, le second surlignant le premier. De temps à autre, les notes de "l'Editeur" viennent éclairer ou assombrir le second texte.



C'est un vieillard étrange et retrouvé mort depuis peu dans une chambre qu'il avait pris soin de calfeutrer contre la lumière du jour et, de façon générale, contre l'extérieur, qui a rédigé le premier texte. Son nom était Zampano - comme le héros de "La Strada" de Fellini. Et son récit d'ailleurs concerne le cinéma puisqu'il n'y est question que du film réalisé par Will Navidson sur les aberrations spatiales qu'il a enregistrées au coeur de la maison qu'il venait d'acheter loin de New-York. Titre du film en question - devenu film-culte, nous l'assure Zampano : le "Navidson Record."



A la mort de Zampano, son "héritage", ce manuscrit biffé et raturé en tous sens, ce pavé énorme et où s'exprime toute l'érudition et la passion de celui qui l'a écrit, a atterri entre les mains de Johnny Errand, un trentenaire au roman familial assez corsé et qui, depuis un temps qui ne sera pas indiqué au lecteur, vivote comme il peut en travaillant pour un salon de tatouage. Quand il ne travaille pas, Johnny Errand le bien nommé ("La Maison des Feuilles" est bourrée de clins d'oeil du même type) fait la bringue et abuse de l'alcool et de toutes les substances, licites ou pas, qui permettent d'oublier la réalité - ou de la faire reculer, tout simplement. Et puis, bien sûr, il y a le sexe. Mais peu à peu, au fur et à mesure qu'il avance dans la lecture du manuscrit de Zampano, Johnny va remplacer tout ça par l'incroyable, la prodigieuse histoire du "Navidson Record".



Au début, le lecteur trouve inutiles et même carrément superflus les notes et apartés de Johnny. Jusqu'au moment où il se rend compte que, tout comme elle a permis à Zampano d'aller jusqu'au bout de lui-même, l'affaire du "Navidson Record" est destinée à faire atteindre à Johnny une nouvelle dimension de son être.



"La Maison des Feuilles" se vit comme une forme de voyage initiatique à travers bien des choses : d'abord la maison elle-même mais aussi la culture de l'image qui est la nôtre, l'imaginaire fantastique que nous nous sommes formé en visualisant toutes sortes de films d'horreur (ou plutôt en acceptant que soient mis en images les bons vieux mythes avec lesquels la littérature nous avait déjà fait faire connaissance ) et, encore plus profond, nos angoisses personnelles les plus profondes (l'image des parents, la sexualité, la Mort et, pire que la Mort, le Néant ...), le terrible sentiment de solitude qui nous accable d'autant plus pesamment que nous vivons en groupes de plus en plus importants, la quête de Dieu, de ce qu'il est, de ce qu'il n'est pas, de ce qu'il ne peut pas être (qui nous fait revenir à la quête de la vie intra-utérine, la maison des Navidson pouvant symboliser la matrice originelle), l'espoir, le désespoir, le ... la ...



D'une construction exemplaire, "La Maison des Feuilles" ne demande en fait à son lecteur que quelques minuscules efforts (s'adapter à son format, suivre les instructions qui nous recommandent de consulter l'annexe tant et non pas celle qui la précède chronologiquement, se poster devant la glace pour lire certains textes en écriture-miroir, mettre notre livre la tête en bas ou sur le côté pour suivre la progression du récit, etc ...) pour lui faire partager ses fabuleuses richesses - que les amateurs de livres et de cinéma devineront peut-être plus rapidement que les autres cependant.



En bonne logique, toute personne née dans les cinquante dernières années du XXème siècle devrait se sentir concernée par "La Maison des Feuilles" et y reconnaître l'essence même de ce siècle entièrement dominé par l'emballement des technologies, la précipitation des événements et le galop déchaîné des images s'annulant l'une l'autre avant de se réunifier pour former à nouveau, et dans la plus totale, la plus absolue des contradictions, une réalité à nouveau cohérente.



"La Maison des Feuilles", c'est moi, c'est vous, c'est votre voisin, c'est la fin d'un siècle qui allait trop vite et le début d'un autre qui prend la même direction, c'est une vision à la fois débridée et concise de la société où nous sommes nés et où nous mourrons, c'est toute notre culture occidentale ...



... et c'est aussi un roman fantastique, un film d'épouvante, une réflexion philosophique, un film mystique, un documentaire sur le rôle déterminant de l'image dans notre civilisation, une boîte de Pandore, une bibliothèque qui n'en finit pas, un escalier qui n'en finit pas ...



... et, plus simplement, un sacré bon roman. ;o)
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La Maison des feuilles

A l'image des poupées russes, ce roman comporte plusieurs histoires, imbriquées les unes dans les autres, dont la principale concerne une maison très étrange, puisqu'elle semble beaucoup plus grande à l'intérieur qu'à l'extérieur.

Et ça, ce n'est que le début, car très rapidement, des pièces et des couloirs sombres apparaissent alors qu'ils n'existaient pas un instant plus tôt.

Les habitants d'abord étonnés vont entreprendre une véritable expédition au sein de cette demeure qui ne répond pas du tout aux règles élémentaires de la physique et qui les fait pénétrer dans un univers de ténèbres et de terreur.

J'ai adoré l'ambiance angoissante et très oppressante qui nous envahit dès qu'on lit les pages se rapportant à cette maison.

Par contre, je n'ai pas adhéré à la mise en page certes originale, mais très difficile à lire quand on a de mauvais yeux, car de très nombreux passages sont écrits beaucoup trop petits.

De plus, les histoires secondaires et les notes en bas de pages, innombrables, m'ont rapidement lassé et j'ai carrément sauté des pages entières.

A vouloir produire un roman exceptionnel par sa forme, l'auteur a peut-être perdu pas mal de lecteurs en route.
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La Maison des feuilles

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Quel livre étrange ! Cela semble être l'histoire d'une famille, les Navidson, qui découvrent une nouvelle pièce dans leur maison, pièce qui semble plus grande que ladite maison. Mais les notes de bas de page racontent une toute autre histoire jusqu'à prendre des pages entières.



L'expérience littéraire est intéressante. A l'instar des personnages de ce livre, nous perdons tout nos repères et n'arrivons plus à distinguer folie et réalité. Outre les notes de bas de page, c'est toute la mise en page du livre qui est mouvante.



Parfois il faut lire le livre sur le côté, quand ce n'est pas directement à l'envers. Certaines pages ne comportent qu'un mot, dans d'autres c'est le texte qui s'adapte à l'action. C'est réussi, nous sommes totalement immergés dans ce livre.



Mais si j'ai apprécié l'expérience que propose ce livre en tant qu'OLNI, je suis moins convaincue par les deux intrigues. Celle des Navidson, intéressante sur le papier, est trop longue et reste trop en surface pour être réellement captivante. Quant à l'intrigue de Johnny Errand, elle m'a plus agacée qu'autre chose. J'ai trouvé ses états d'âmes inintéressants et redondants. De plus le personnage m'est apparu très vite antipathique, notamment sur son rapport avec les femmes.



Bref, l'expérience était intéressante, même si les deux intrigues étaient trop longues.
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La Maison des feuilles

Cela va être compliqué de faire la chronique de la Maison des Feuilles, en premier lieu car c’est un livre complexe dans le fond et la forme, mais surtout parce que je ne suis pas sûr d’avoir tout saisi. La Maison des Feuilles est un texte vertigineux quasiment hypnotique. Il est écrit à trois voix. Tout d’abord, il est question d’un film le « Navidson Record » dont les images montrent la vie de la famille Navidson dans leur nouvelle Maison. Ensuite, c’est Zampanò qui a fait des recherches et analyses sur le film. Enfin, le troisième récit est celui de Johnny Errand, qui rédige une sorte de journal intime. Là où le livre se transforme en abîme, c’est que les trois textes sont en interaction permanente.



Cependant le texte fait aussi écho à cette Maison particulière dont les murs semblent s’agrandir, et dont les couloirs deviennent des labyrinthes sombres et froids. Une histoire terrifiante dont Lovecraft aurait certifié la puissance narrative de Danielewski. Celui-ci rajoute encore une couche de complexité dans la forme du texte (écrit en miroir, à l’envers, en triangle,…) avec des notes et des annexes qui renvoient en avant, en arrière, c’est-à-dire un autre labyrinthe. La lecture devient parfois épuisante, seul le désir d’en découdre avec les mots, permet de tenir.



Johnny Errand est employé dans un atelier de tatouage. Un soir, il reçoit un coup de fil de son ami Lude lui proposant de le rejoindre pour visiter l'appartement d'un vieil aveugle nommé Zampanò, récemment décédé. Dans l'appartement, les deux hommes découvrent un manuscrit rédigé par Zampanò lui-même, l'étude académique d'un film documentaire intitulé le Navidson Record.



Navidson a décidé de filmer la vie de sa famille dans leur nouvelle maison. Un jour en rentrant chez eux, la famille découvre une nouvelle pièce dans la maison. En étudiant cet étrange phénomène, Will Navidson s’aperçoit que les dimensions internes de la maison excèdent celles externes, et la maison semble s’agrandir de jour en jour. Jusqu’au moment où un couloir sombre et froid apparaît dans le mur de leur salon. Sa longueur suggère que le couloir devrait s'étendre dans leur jardin, mais tel n'est pas le cas. A partir de maintenant, mystères et terreurs s’amplifient.



C’est donc une véritable expérience littéraire que nous propose Danielewski. Un labyrinthe stylistique dans lequel il développe aussi des thèmes comme l’architecture, l’enfance, les mythes antiques, la folie, l’amour, la mort. Tous ces thèmes se font écho au sens propre et figuré. Cette maison aura-t-elle raison de votre santé mentale…



Avez-vous eu des expériences littéraires très spéciales ?


Lien : https://jmgruissan.wixsite.c..
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La Maison des feuilles

C'est mon fils qui m'a offert La maison des feuilles.

Il m'a fallu peu de temps pour me questionner.

Voulait-il que je devienne fou ?

Ou, au contraire, souhaitait-il que mon cerveau se développe et faire exploser mon Q I ?

Non, mais vous qui n'avez pas eu cet ouvrage entre les mains , vous ne pouvez pas savoir.

Vous n'imaginez même pas quel genre d'OLNI (Objet Littéraire Non Identifié) a écrit Mark Z. Danielewski.

Lui, par contre, je ne voudrais pas être dans sa tête. Pour écrire un truc pareil, ce doit être un beau bazar là-haut. Là encore, je n'imagine pas un légiste en train d'en étudier le cerveau, nul doute qu'il y perdrait sa science.

La maison des feuilles c'est....

Enfin, c'est.....

Pfffff ...un vrai truc de fou.

Une construction diabolique.

Et cette maison... c'est lui aussi qui en a fait les plans ?

Bien sûr. Quand on voit l'architecture, oui, c'est le mot qui convient, de son roman, on comprend.

Enfin !

Au début on ne comprend rien.

On essaye.

Mais c'est d'une telle complexité.

Il paraît que nombreux sont les lecteurs qui abandonnent. On ne sait pas ce qu'on leur avait promis, mais il ne s'y retrouve pas.

Danielwski est fou. Je persiste et je signe.

En 700 pages, il n'a qu'un objectif.

Égarer le maximum de lecteurs.

Si, si, je vous l'assure. Je l'entends rire sous cape.

C'est le diable en personne.

Il traite ses lecteurs comme ses personnages.

Parce que là aussi, il n'y va pas de main morte.

C'est à la manière de l'OCNI (Objet Cinématographique Non Identifié) Blair Witch, qui fit fureur en son temps, qu'il nous entraîne, à la suite de ses protagonistes , dans un labyrinthe infernal.

Tout est filmé.

Une maison sous vidéo surveillance.

Et quand les caméras fixes ne suffisent pas, ce sont les personnages eux mêmes qui enregistrent, faits et gestes, caméra sur l'épaule.

Si vous vous demandez comment ces pauvres gens vont se sortir du piège tendu par l'écrivain,  inquiétez-vous, vous aussi de votre sort.

À un moment vous aurez des choix à faire.

Emprunterez-vous le bon chemin ?

Vous égarerez-vous ?

Irez-vous dans le mur ou gagnerez-vous la sortie ?

Je ne vous donnerais pas de clés mais si vous vous lancez dans l'aventure, attendez-vous à des turbulences.

Un conseil, celui que m'a donné mon fils lorsqu'il m'a offert ce cadeau (empoisonné ?) : Ne feuilletez pas le livre et ne cherchez pas à en savoir plus sur lui.

Si vous n'abandonnez pas en cours de route, vous risquez de trouver cette lecture, déroutante, mais terriblement captivante.

Sinon, celà reste un très bel ouvrage qui aura toute sa place dans votre bibliothèque. Certainement le livre le plus étrange de la mienne.

À ne pas offrir à tous les cerveaux sous peine d'implosion...
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La Maison des feuilles

En préambule et pour les personnes ayant déjà lu le livre, je précise que j'ai lu la version où le mot maison est imprimé en bleu sur la page de couverture.



La maison des feuilles : roman mille-feuilles, roman atypique, roman dérangeant, roman… épuisant. Un vrai labyrinthe.

Comme la maison dont le récit principal tente de décrire le lieu dans le lieu, le récit dans le récit tente d'appuyer notre lecture ou de nous égarer selon les épisodes.

Alors il faut s'accrocher et pratiquer quelques gestes de gymnastique pour la nuque car oui vous allez vous retrouver la tête en bas, sur le côté voire même le corps planté devant un miroir pour déchiffrer certaines phrases. Si cela ne vous décourage pas je continue… Et je sens que je vais en baver à essayer de résumer….



Johnny Errand est un jeune homme un peu paumé qui vivote entre son boulot d'apprenti tatoueur et les sortis enivrées avec son pote. Un soir, il découvre un mauscrit chez Zampano, un vieil aveugle qui vient de mourir. Le manuscrit se révèle être un essai sur un film « Le Navidson Record ».

Dès lors, le récit se transforme, l'histoire principale devient le script de ce film agrémenté des analyses de Zampano et en note de bas de pages, les commentaires et digressions de Johnny Errand sur sa propre vie.



Le Navidson Record est un reportage réalisé par un ancien photographe sur la reconstruction de sa relation avec sa famille dont le symbole est l'achat d'une maison. Sauf que dans cette maison, un couloir apparaît soudain qui donne sur un entrelacs de pièces. L'exploration de ce nouveau lieu se révèle bientôt impossible et le réalisateur doit faire appel à des explorateurs expérimentés. Cet autre monde défie la physique : ses dimensions ne peuvent tenir dans la maison, les pièces, couloirs et escaliers changent constamment de format.



La maison des feuilles est un roman à sensations. Mais au-delà de l'aspect fantastique et horrifique, la structure du récit est source de confusion. Au début je lisais le récit principal et les notes de bas de pages avant d'abandonner et de me concentrer uniquement sur le récit principal puis de reprendre le début du livre et de lire les notes de bas de page. Avec cette méthode ce sont bien deux récits différents qui apparaissent et je ne suis pas sûre que ce soit la meilleure méthode hein ^^.



Quoiqu'il en soit et même si ma critique vous paraît confuse, après tout je reste dans le thème…, j'ai beaucoup aimé ce livre. D'abord parce qu'il m'a sorti de ma zone de confort : il faut réfléchir à comment lire et retrouver le texte dans le texte en rattachant les notes de bas de page (le récit de Johnny Errand) à l'analyse Zampano du Navidson Record. Je me suis laissée porter par les étrangetés sur le fond du récit mais aussi sa forme. J'ai tenu bon en suivant un des conseils donnés dans le récit : la meilleure façon de sortir d'un labyrinthe c'est de poser une main sur le mur et d'avancer sans jamais lâcher ce mur. J'ai donc fait plusieurs fois le tour du roman en découvrant de nouvelles choses à chaque fois.



Si vous êtes en quête d'originalité vous n'allez pas être déçus.
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