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Citations de Mathias Enard (928)


Doucement se déchirent les lèvres du vent
Le bruit d'un livre qui s'ouvre font tes pas dans la neige

Et je te vis comme une poésie au dos du coeur

Malgré la vieillesse et le gel. p 92
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La douleur s'efface peu à peu, toutes les douleurs s'effacent, la honte est un sentiment qui imagine l'autre en soi, qui prend en charge la vision d'autrui, un dédoublement.
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... je ne peux m'empêcher de songer à la honte et l'embarras, la honte et l'embarras de toutes les déclarations d'amour qui tombent à plat, ... nous jouons notre sonate tout seuls, sans nous apercevoir que le piano est désaccordé , pris par nos sentiments : les autres entendent à quel point nous sonnons faux, et au mieux en conçoivent une sincère pitié, au pire une terrible gêne d'être ainsi confrontés à notre humiliation qui les éclabousse alors qu'ils n'avaient, le plus souvent, rien demandé p 97
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je voudrais retrouver un jour tiède entre Agami et Marsa Matrouh, à quelques kilomètres d'Alexandrie, sur la plage immense, c'est le soir la Méditerranée est métallique le ciel rosi le sable doux, je regarde vers le large le phosphore pur de la mer fait cligner des yeux dans la lumière oblique, deux formes glissent hors de l'eau, elles sautent l'une derrière l'autre et étincellent, deux gerbes irisées viennent vers la côte à petits bonds, deux dauphins, deux dauphins jouent dans la mer tiède à quelques encablures du bord, je n'en ai jamais vu, je me lève, ils sont si proches qu'on voit leur rostre étinceler, ils cabriolent devant moi, il n'y a personne d'autre, alors bien sûr je cours ils semblent si réels vus au ras des vagues, j'en ai les larmes aux yeux, jamais je n'ai assisté à un spectacle pareil, un spectacle pour personne, ils caracolaient pour moi seul, dans le soir d'une côte déserte, un cadeau du hasard ou de Thétis la généreuse, je me suis jeté dans l'eau, un linceul de fraîcheur m'a recouvert, les deux formes d'argent se découpaient sur le ciel rose, le goût de sel me remplissait la bouche, j'ai nagé doucement vers eux, c'était la beauté qui m'appelait, la beauté le calme et le bonheur pur de l'harmonie du monde, je nageais vers les deux dauphins, doucement pour ne pas les effrayer, je voulais les suivre, je voulais les suivre, je les aurai suivis jusqu'à la demeure de Poséïdon aux crins d'azur, c'était un beau couchant pour disparaître, un beau soir pour mourir ou vivre éternellement dans le sillage des mammifères marins, ils m'ont senti arriver, perçu mes vibrations dans les vagues, je n'étais pas digne d'eux, je n'en étais pas digne
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Puisque ce sont des enfants, parle-leur de batailles et de rois, de chevaux, de diables, d'éléphants et d'anges, mais n'omets pas de leur parler d'amour et de choses semblables.

Citation d'introduction
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J’étais prêt au départ. Je n’avais plus de famille depuis près de deux ans, plus d’amis depuis deux jours, plus de valises depuis deux heures. L’inconscient n’existe pas ; il n’y a que des miettes d’information, des lambeaux de mémoire pas assez importants pour être traités, des bribes comme autrefois ces bandes perforées dont se nourrissaient les ordinateurs ; mes souvenirs sont ces bouts de papier, découpés et jetés en l’air, mélangés, rafistolés, dont j’ignorais qu’ils allaient bientôt se remettre bout à bout dans un sens nouveau.
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Trois mots espagnols tournent dans sa tête comme une mélodie:

Reyes, batallas, elefantes
Battaglie, re, elefanti.

Il les consignera dans son cahier, comme un enfant garde férocement son trésor de cailloux précieux.
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Michel-Ange sent aussi mauvais qu'un barbare ou un esclave du Nord à peine capturé, son visage est disgracieux... sa voix est pleine de colère et sans raffinement, ses mains sont dures, usées par le ciseau et le marteau de son art
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Je ne cesse de désirer que lorsque mon désir
Est satisfait, que ma bouche atteint
La lèvre rouge de mon amour,
Où mon âme expire dans la douceur de son haleine.

(Un poème persan)
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L'avantage, c'est qu'aujourd'hui les livres ont si peu de poids, sont si peu vendus, si peu lus que ce n'est même plus la peine de les interdire.
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Maja mon amour,
Les mathématiques sont un voile posé sur le
monde, qui épouse les formes du monde, pour l'envelopper entièrement ; c'est un langage et c'est une matière, des mots sur une main, des lèvres sur une épaule ; la mathématique s'arrache d'un geste vif : on peut y voir alors la réalité de l'univers, on peut la caresser comme le plâtre des moulages, avec ses aspérités, ses monticules, ses lignes, qu'elles soient de fuite ou de vie. Ce voile, cette nappe sur le monde, c'est aussi le linceul dans lequel je m'enveloppe quand vient l'heure du départ - ce drap qui va me couvrir, ce papier qui me recouvrira, ce fantôme qui me survivra, je connais leurs fibres, leur trame, je sais décrire le paysage qu'ils forment, découvrir leurs accidents, entrevoir les radiations qu'ils émettent et même leurs spectres secrets. Je sais dire : Maja, ta peau aimée, à chaque pore sa singularité, et toi équation sans sommeil, amour sans résolution, je regarde la mer et je t'attends. Oh je sais, le temps a passé, les lieux, les horreurs, les frondes, les enfermements, les libérations, les soupirs, les joies, les menaces, les peurs.
Je regarde la mer et j'attends.
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Il était venu pour l'argent, pour dépasser Vinci et se venger de Jules II, et voilà que la tâche le transforme, tout comme la Pietà ou le David l'ont métamorphosé. Michel-Ange est modelé par son œuvre.
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Tout ce que je veux, c'est être libre de voyager, de gagner de l'argent, de me promener tranquillement avec ma copine, de baiser si j'en ai envie, de prier si j'en ai envie, de pécher si j'en ai envie et de lire des romans policiers si ça me chante sans que personne n'y trouve rien à redire à part Dieu lui-même. Et ça, ça va pas changer tout de suite, j'ai dit.
(...)
Tous les jeunes sont comme moi, j'ai ajouté. Je me sentais soudainement en verve. Les Islamistes sont de vieux conservateurs qui nous volent notre religion alors qu'elle devrait appartenir à tous. Ils ne proposent qu'interdiction et répression. La gauche arabe, ce sont de vieux syndicalistes qui sont toujours en retard d'une grève. Qui est-ce qui va me représenter, moi?
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J'ai cherché à t'aimer pour ne pas avoir à te tuer.
Tu t'es endormi.
Il faut en finir.
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ÉCLATS DE POLOGNE
I
Un wagon de grumes encombre la gare de Sobibor :
La blancheur de la neige ne cache ni la peine des bouleaux
Ni la douleur des pins
Attristés par leur sève,
Chargée de cendres.

II
Le vide, l'absence, le froid.
La théorie des vases communicants
Remplit nos coeurs à Zamosc.
L'un en face de l'autre,
Nous buvons sans savoir
Qui nous buvons.
Nous nous aimons sans comprendre
Cette vérité première de la vodka :
Le givre, la glace
Ne font pas oublier le feu. p 26-27
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... nous nous croisons, nous nous courons après, des années, dans le noir et quand nous pensons tenir enfin des mains entre les nôtres, la mort nous reprend tout.
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C'est chose étrange que la mémoire; je suis incapable de retrouver son visage d'hier, son corps d'hier, ils s'effacent pour laisser la place à ceux d'aujourd'hui, dans le décor du passé
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Cette volonté d'en finir. Parfois il faut agir quand les flammes deviennent trop hautes, trop pressantes; j'ai observé Bassam rentrer de la mosquée après la prière, dire deux mots, bonsoir Lakhdar, mon frère, se jeter dans le canapé - Mounir s'est enfermé dans sa chambre; j'ai échangé deux banalités avec Bassam avant de me réfugier dans mon réduit et de regarder des heures durant le cirque de la rue des Voleurs, tous ces gens qui tournaient dans la nuit.
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… l’humilité de la vie nomade est une des images les plus fortes de l’Islam, le grand renoncement, le dépouillement des oripeaux mondains dans la nudité du désert — c’est cette pureté, cette solitude qui m’attirait moi aussi. Je voulais rencontrer ce Dieu si présent, si naturel que ses humbles créatures, dans le dénuement complet, s’appellent « les chiens de Dieu ». Deux visions s’opposaient vaguement dans mon esprit : d’un côté le monde des « Mille et Une Nuits », urbain, merveilleux, foisonnant, érotique et de l’autre celui du « Chemin de La Mecque, du vide et de la transcendance ; Istanbul avait signifié ma découverte contemporaine de la première forme — j’espérais que la Syrie me permette non seulement de retrouver, dans les ruelles de Damas et d’Alep aux noms enchanteurs, la rêverie et la douceur sensuelle des Nuits, mais aussi d’entrevoir, au désert cette fois-ci, la lumière avicennienne du Tout. p 157
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je surveillais la bande noire du Nil au parfum de poisson-chat, striée par les lumières plongeantes du nouvel opéra sur l’île de Guézira, magnifique silure aux longues moustaches lumineuses, je lisais Cités à la dérive, sans bien comprendre, sans reconnaître dans les manigances des ombres entre les pages mes propres pas de mouchard international, tout comme aujourd’hui, assis sous ma valise, immobile à plus de cent kilomètres à l’heure, je me laisse porter à travers le crépuscule sans avoir peut-être réellement conscience du jeu auquel je participe, des fils qui me tirent aussi sûrement que ce train m’emporte vers Rome, et dans ce doux fatalisme auquel vous poussent la lassitude et l’insomnie mes yeux se perdent au milieu du soir de décembre et des lucioles de givre que le train allume par instants sur les arbres sans feuilles p 31
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