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Critiques de Maurice Pons (156)
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Mademoiselle B.

Plus personne n'aime Freud depuis qu'Onfray l'a roué de bourre-pifs pour lui apprendre à se bourrer de coke et à bourrer un demi mètre de gaze dans le pif d'Emma Eckstein, une brave féministe, qui saignait donc du nez, organe dont la muqueuse comme chacun sait détermine les symptômes génitaux et gnagnagna... C'est vrai que c'est exaspérant à la fin de tout ramener au cul comme ça! Dans ma psychologie, par exemple, il y a aussi les nuages et la mer. Sans double entendre. Ce qui me frappe dans toutes ces psychanalyses de femmes, ces cas d'hystérie, apanage forcément féminin, ces sorcières épileptiques proches des catégories médiévales, c'est la fascination/répulsion machiste des analystes comme des écrivains. Dans l'inquiétante étrangeté (un beau texte littéraire à part ça) Freud écrit : « les hommes névrosés déclarent que le sexe féminin est pour eux quelque chose d'étrangement inquiétant. » Belle auto-analyse! L'inquiétante étrangeté, poursuit-il, c'est aussi l'animisme refoulé qui déboule ; l'âme comme « premier double du corps », « assurance de survie », qui devient  « l'inquiétant avant-coureur de la mort ». Mademoiselle B incarne ces deux étranges inquiétudes : sexe féminin et immortalité. Pons écrit : « la créature velue, sans bras ni jambes, tient à la fois du vampire chiroptère et de la sphinge bréhaigne. Et pourtant elle est une femme. (...) Elle a au bas du ventre, l'insidieuse bouche d'ombre. » Patient suivant !



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Les Saisons

Les babeliotes Michfred, Palamède et les autres ont tout dit, et très bien dit. C'est un livre aux nombreuses références bibliques, complètement atypique, voire totalement barré ! Un bijou à lire toutes affaires cessantes.
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Les Saisons

Décédé en 2016, Maurice Pons reste avant tout dans les mémoires pour un livre culte publié aux éditions Juillard en 1965 : Les Saisons.

Réédité de façon régulière par les éditions Christian Bourgeois depuis, le roman développe en réalité la nouvelle La Vallée paru en 1960 dans la revue des Lettres Nouvelles.

Volontiers qualifié de trésor méconnu de la littérature française par ses lecteurs, qu’est-ce qui rend Les Saisons si inoubliable ?



Dans la vallée…

« Il arriva par le sentier de la cluse, vers le seizième mois de l’automne », ainsi commence les 215 pages des Saisons.

Que sait-on à propos de cette histoire ?

Qu’elle nous est narrée du point de vue de l’étranger, un certain Siméon, qui s’installe dans un village totalement perdu quelque part en montagne, dans un endroit lugubre appelé La Vallée par ses habitants miséreux.

Où nous trouvons-nous réellement ? Nul indice véritable même si le décor ressemble à s’y méprendre à la France rurale d’un autre âge.

Si une rivière coulait jadis près du village, La Belière, elle a disparu depuis longtemps et seule perdure la culture de la lentille, unique aliment de la commune qu’on utilise également sous la forme d’un alcool locale pour le moins décapant.

Principale particularité de la région, il n’existe que deux (longues) saisons : seize mois d’automne pluvieux et quarante mois d’hiver glaçant.

Les conditions de vie, forcément terribles, ne laissent que peu de chances aux habitants, condamnés à survivre dans la pourriture et le froid.

Sur ce tableau peu engageant, Maurice Pons accouche d’une galerie de personnages étranges, aussi bon que mauvais, toujours répugnants et inquiétants. Les deux douaniers-gendarmes gèrent les affaires courantes, le seul café-hôtel du village, aussi pourrissant et délabré que tout le reste, est tenu par une obèse antipathique au possible que tous appellent la veuve Ham (un « jambon » de cinq tonnes au corset monstrueux) et les soins « médicaux » sont assurés par un ivrogne reclus avec son âne décharné et répondant au sobriquet du Croll (celui-ci faisant office de rebouteux, médecin et vétérinaire, rien que ça).

Autour de ce joli monde, les (rares) animaux apparaissent comme malades, faméliques, mourants… on s’en sert volontiers pour se réchauffer l’hiver en les maintenant contre soi plutôt que comme du bétail à consommer.

En nuances de noirs, Les Saisons se concentre sur le changement consécutif à l’arrivée de Siméon, un narrateur pourtant radicalement différent.



L’espoir des lettres

Siméon, contrairement aux villageois primitifs et dégoûtants qui l’entourent, cultive un goût pour le beau et pour demain. S’il est arrivé dans ce coin du monde, c’est à la fois pour fuir un passé que l’on devine particulièrement atroce (puisqu’il a perdu sa sœur Enina torturée à mort dans de troublantes circonstances) et pour écrire un avenir meilleur.

Car, chose importante, Siméon se considère comme écrivain. Même s’il n’a jamais écrit un seul bouquin, il entretient un journal intime dont Maurice Pons nous livre certaines passages.

Réfléchissant sur le rôle de l’écrivain et sur le rôle de l’écriture, procédé à la fois cathartique pour Siméon et témoignage d’une époque qu’il souhaite révolu, Les Saisons étouffe progressivement cette écharde de beauté et d’espérance dans la pourriture qui entoure son héros candide et naïf.

L’écriture, travail manuel qui vise à exhumer la beauté du monde, même le plus terrible, se heurte ici à l’ignorance, la violence et la déshumanisation.

Si Siméon vient d’un pays chaud et désertique, le froid ne lui apporte finalement aucune libération, au contraire…

La mort du beau, la terreur du désespoir

Maurice Pons dresse donc un tableau d’une noirceur extrême qui dérange sans cesse. Entre ses personnages tour à tour écœurants, troublants et violents, le français façonne un monde où la plus infime lueur d’espoir crève et étouffe. Dans la boue. Dans la glace. Dans la pourriture.

Même lorsque Siméon tombe amoureux de Clara, image virginale au yeux du Candide étranger qu’il représente, la finalité de cette non-relation fantasmée s’achève dans un coït ritualisé et répugnant où la tendresse n’a rien à dire.

De passages marquants et choquants, Les Saisons n’en manquent pas.

Du vêlage d’un fœtus rongé par les vers au cadeau grouillant d’une grand-mère oubliée en passant par les multiples amputations subies par Siméon, Maurice Pons choque par sa noirceur absolue.

De son héros, il ne reste qu’un être humain misérable aussi estropié que ses hôtes et aussi désarmés par la Nature et ce qui l’entoure, de son rêve d’enfant-messie et du pouvoir de la science, il ne reste qu’un col infranchissable et un cimetière de moutons.

Perle de noirceur, Les Saisons laisse le lecteur à bout, glacé et effaré.



Voyage au cœur d’un enfer rural et montagnard où la pourriture ronge et où le froid tue, Les Saisons détonne par son aventure pétrie de noirceur et son caractère de fable désespéré où rien ne sauve l’être humain. Fascinant jusqu’au bout, le roman de Maurice Pons mérite largement sa réputation.
Lien : https://justaword.fr/les-sai..
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Métrobate

Eté 1945, château en bord de mer. Un jeune précepteur énigmatique et fascinant vient semer le trouble dans la famille Rivière.



Tout juste réédité, le premier livre de Maurice Pons, lu d'une traite.

Partage d'enthousiasme, obligé, pour un livre qui mérite des lecteurs.

Merveille de narration elliptique (ou, l'art de tout dire dans les non-dits).

Merveille de finesse psychologique (ou, les personnalités rendues palpables par le regard innocent d'Hervé, élève appliqué, adolescent à l'aune frémissant de sa sensualité, narrateur qui décrit beaucoup mieux qu'il ne comprend).

On devine dès le début que ce jeune professeur bien toiletté, venu de la capitale, dupe tout son monde, qu'il change de visage comme de chemise, dès lors la question est, que recouvre cette duperie?

... Bonheur de se laisser captiver, tenir en haleine par la crispante appréhension de la découverte à venir, celle du "secret derrière la porte" de ce petit phénomène de basse-cour, tombé du ciel comme de nulle part, auréolé de son propre discours ; joli coeur faisant soupirer le poulailler ; glosotateur né, acteur raffiné, impertinent supérieur, nanti qui aime se faire choyer ;  insupportable (pour le lecteur), insupportablement attachant... oui mais, qu'à cela ne tienne, les pages défilent... les indices s'accumulent... le non-dit devient CRIANT, la page va bientôt déborder...



Les scènes de fin feraient les délices du scénariste qui aurait la bonne idée de s'en emparer.



Occasion de se remettre un peu (et il ne faut ici rien en dire) dans la perspective d'époque.



Merci à François Angelier pour sa recommandation.

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-regard-culturel/le-regard-culturel-chronique-du-jeudi-18-avril-2024-4110058



... à Christian Bourgois pour cette ressortie.

Lu dans la foulée : "Rosa", farce singulière, autre texte de jeunesse. En postface, Pons nous dit que :



Pour moi [...] qui écris assez peu — c'est le moins que je puisse dire ! —, rien ne me semble plus réconfortant que de voir mes premiers ouvrages appréciés encore et réédités, année après année. C'est la meilleure façon de les empêcher de mourir, c'est ma façon à moi de ne pas vieillir, de retrouver, avec des générations de nouveaux lecteurs, la fervente espérance du débutant, que, comme tout écrivain, j'ai bien dû commencer par être. [...]



Par ce livre je découvre Pons.

D'une réédition l'autre, je m'attaque aux Saisons.
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Les Saisons

Maurice Pons, "Les Saisons".

Une couverture colorée, un titre qui sent bon le terroir et les cerisiers en fleurs. Tu imagines une oeuvre romantique bourée de jolies descriptions ? Une ode lyrique à la nature et aux éléments, un bouquin printanier, pastoral, gentillet ?

Penses-tu ! T'es loin du compte, l'ami ! Dans cette contrée étrange, oubliée des dieux, point de flocons légers, de papillons mutins ou de feuillages multicolores... Mais des tempêtes de neige, des cloaques fangeux et des ruines sordides remplies d'énergumènes hargneux aux moeurs dépravées, alors là oui, tu peux y aller !



Je suis entré dans ce livre à tâtons, sans trop savoir à quoi m'attendre. Un peu comme Siméon, en somme, l'écrivain voyageur, le promeneur naïf et attachant de ce conte surréaliste.

Comme lui, j'ai déboulé dans ce roman comme en terre inconnue, comme lui j'ai ouvert de grands yeux en progressant dans les rues crasseuses d'un village de damnés, et comme lui j'ai pris en pleine face l'hostilité des autochtones ! Dans le pays, on n'aime pas bien les étrangers, vois-tu...

Ça, plus la misère, la bouffe fadouille (spécialité unique : lentilles matin midi et soir, faut aimer...) et le climat complètement fou (16 mois de pluies diluviennes, suivis par 40 mois de neige et de glace) : si j'étais toi je commencerais peut-être à chercher d'autres destinations pour cet été !



Heureusement, le style de Maurice Pons est savoureux et j'ai souri, parfois, devant la délicieuse absurdité de certaines scènes (cf. les deux "douaniers sans frontières" qui rivalisent de bêtise, ou les déclamations colorées de la grosse "Cinq Tonnes", tenancière difforme d'un hôtel-restaurant désert), j'ai frémi à la lecture des comptes rendus opératoires du Croll, le géant borgne qui fait office de chirurgien dans le pays (âmes sensibles s'abstenir...), j'ai tremblé sous les bourasques, j'ai frissonné avec la vieille voisine muette prisonnière du gel, j'ai eu de la peine pour le pauvre Siméon qui perd progressivement ses illusions et l'usage de ses membres, et j'ai saisi avec effroi, en même temps que lui, l'ampleur du désenchantement qui pèse sur cette région maudite.

C'est à la fois dément et merveilleux, effrayant et jubilatoire.



Il faut un talent rare pour peindre avec un tel brio ce microcosme infernal : Maurice Pons excelle en la matière et je ressors ébloui de cette lecture inclassable, teintée d'une obscure mais indéniable poésie ! On peine à croire que ce roman, qui n'a pas pris une ride, a déjà plus de cinquante ans.

S'il est vrai, comme le stipule la 4ème de couverture, que les lecteurs des Saisons forment une "confrérie d'initiés", qu'il "se connaissent et se reconnaissent entre eux" je suis ravi et honoré de faire aujourd'hui partie du club ! Toi qui me lis, n'hésite à te joindre à nous : plus on est de fous, etc...
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L'oiseau bariolé

C'est le récit douloureux jusqu'à l'insupportable de ce que va vivre durant des années de guerre un petit garçon que ses parents envoient dans une campagne lointaine, croyant bien faire, pour le mettre à l'abri des troubles, des violences, des persécutions. Fatale erreur. Ce que connaîtra l'enfant sera bien pire que tout ce que l'on peut imaginer. Chassé, rejeté, persécuté de tous les cotés, maltraité par tous ceux qui prétendent le recueillir, seul, dramatiquement seul du début à la fin, le plus dur est finalement la lucidité et le fatalisme avec lequel il raconte les sévices qu'il subit. Au long de cette lecture terrifiante, on s'arrête maintes fois, on a envie de fermer définitivement le livre, de crier pour que çà s'arrête tant il y a de quoi devenir fou.

J'ai cru longtemps qu'il s'agissait d'un récit autobiographique, l'auteur, enfant juif polonais caché chez des paysans pendant la seconde guerre mondiale, ayant forcément cotoyé le rejet, le fanatisme et la haine. Il n'en est rien, l'essentiel du roman est de la pure invention, alors de quoi a-t-il été le témoin impuissant, ou de quels obscurs fantasmes a-t-il nourri son récit, pour parvenir à un tel niveau dans la description de la violence à l'égard d'un enfant et dans la détresse de cet enfant séparé de ses parents ?

L'oiseau bariolé est celui qui, différent des autres, est pour cette raison l'objet de toute leur haine et de toute leur cruauté. Il a dû se sentir bien différent, Jerzy Kosinski, pour écrire ce livre.
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Rosa

Chronique fidèle des événements survenus au siècle dernier dans la Principauté de Wasquelham comprenant des révélations sur l’étrange pouvoir d’une certaine Rosa qui faisait à son insu le bonheur des plus malheureux des hommes.

Rosa ne fonctionne pas seulement pour le plaisir pris à se plonger dans l’un de ces récits posant un narrateur historiographe qui fouille les archives d’un royaume oublié. Rosa marque aussi par son énigme policière imprégnée de fantastique, puis qui emprunte à l’érotique et sème les pistes d’un hédonisme volontairement naïf. Ecrit en 1967, ce roman montre une fois de plus (si on pense au cauchemar rural des Saisons), la distance que prend Pons avec l’idéologie de son temps. Le voyage acidulé dans le ventre de la matrone Rosa semble une hallucination trop ironique pour être prise au sérieux et la vénération de la couche amoureuse (plutôt que de la chambrée militaire) sonne comme l’épanchement nocturne de puceaux effarouchés. Un régal pour les Happy Few qui sauront déchiffrer l’humour sous-jacent. S.N.
Lien : http://lafemelledurequin.fre..
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Mademoiselle B.

J'avais aimé du même auteur "Le passager de la nuit". J'ai voulu retrouver le même plaisir à la lecture de "Mademoiselle B" : à la différence du premier, iI s'agit d'un roman assez attrayant du genre thriller, mais il est loin d'avoir la même envergure.

Le narrateur est Maurice Pons lui-même en sa personne, je veux dire par là qu'il manifeste beaucoup de contentement de soi allié à une légère ironie pour le rendre plus digeste. Pourquoi pas, c'est son droit.

Maurice Pons, donc, est témoin dans le village de Jouff où il s'est retiré (à une centaine de km de Paris) , des morts suspectes de plusieurs hommes qui ont approché de près une certaine Mademoiselle B. On comprend que cette créature vêtue de blanc, dont on ne voit jamais les mains, mi femme mi chauve-souris, est un des avatars des fameuses "dames blanches" qui peuplent les mythologies de toutes nos régions françaises, porteuses de mort aux individus de sexe masculin avec lesquels elles entrent en contact, en les attirant dans leur maison ou en faisant de l'auto-stop la nuit à la croisée des routes dangereuses.

L'auteur a repris ce thème attractif mais l'a noyé sous un trop plein d'anecdotes sans lien avec lui, créant des digressions qui noient l'efficacité de l'argument. Pourtant, et cela sauve le livre, le ton du début, léger, un peu grivois, humoristique malgré la mort omniprésente, souligne le basculement dans la noirceur de sa seconde partie.

Ce roman fait passer un agréable moment.

Détail anecdotique qui marque bien les années 70 par opposition aux nôtres (le roman est de 1973) : l'auteur se vante avec une grande complaisance d'être à l'origine des fugues répétées d'une jeune fille de 17 ans. Son copain le juge d'instruction, ancien camarade de classe, goguenard, lui arrange le coup en le plaisantant sur son goût pour les très jeunes filles auprès desquelles il lui envie ses succès. La jeune fille en question, elle, ira en maison de correction.

Pour des faits similaires, Gabrielle Russier a été incarcérée à plusieurs reprises en préventive et condamnée à un an de prison avec sursis. Elle s'est suicidée dans son appartement marseillais en 1969.
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Les Saisons

Je viens de terminer Les saisons de de Maurice Pons.

Simenon, écrivain en devenir décide de s'installer dans un village au creux d'une vallée reculée.

La rudesse des saisons car il n'y en que deux, quarante mois de gel et quarante mois de pluie est tout aussi invivable que celle des habitants.

Simenon, au physique peu avantageux voire laid et pauvre veut donner l'espoir à ce village damné. Pour lui.l'aboutissement est l'écriture de son livre.

On le suit au gré d'événements crasseux et sordides, de l'infection nauséabonde de son pied jusqu'à sa perte.

Du très beau avec du glauque.

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Les Saisons

« Il arriva par le sentier de la cluse, vers le seizième mois de l’automne, qu’on appelait là-bas : la saison pourrie. »



Ainsi débute ce roman d’une frappante singularité, mêlant de manière hypnotique le grotesque et l’absurde, l’humour glauque et l’exécrabilité. C’est dans un hameau de montagne lugubre, poisseux et habité par de pauvres hères repoussants, que le narrateur extérieur nous invite pour nous conter l’histoire de cet étranger nommé Siméon, qui voulut s’abstraire du monde pour raconter ses douleurs intérieures en écrivant un livre. Dans cette vallée étroite fermée par un verrou glaciaire, où le gel bleu d’un hiver interminable succède à l’automne diluvien, ne poussent que des lentilles dont les villageois tirent leur seule pitance ainsi qu’un tord-boyau parfaitement corrosif.



Bien décidé à s’établir dans cet outre-monde d’une affligeante laideur, Siméon est prêt à subir toutes les avanies et à consentir à tous les sacrifices. Rien ne peut dépasser en horreur les souvenirs du désert où il a tant perdu. Alors cette eau qui tombe continuellement du ciel lui paraît une bénédiction capable de le laver de son passé. Louana, fillette mongoloïde aussi délurée que colérique et à qui rien n’échappe, est la première à le voir arriver dans la vallée. Suivra toute une galerie de personnages dignes d’une cour des miracles : la veuve éléphantiasique Ham, tenancière de l’unique café-auberge, l’imposant Croll, borgne et rebouteux de son état, une paire de douaniers au zèle ridicule, le vieil unijambiste Raurque, et jusqu’à la maigrelette épouse Dogde dont Siméon s’éprendra. Mois après mois, saison après l’autre, l’étranger découvrira les usages de ces habitants aux mœurs répugnantes ou drolatiques.



« Quand un monde est inhabitable, on le change, ou on en change. » Alors quels prodigieux changements Siméon parviendra-t-il à impulser dans cette vallée oubliée de Dieu ? Un récit tour à tour ignoble et cocasse qui se lit entre répugnance et fascination. On se prend à frémir ou à faire la grimace, à sourire ou à secouer le chef, mais dans une telle narration, nulle indifférence. Un classique sortant à n’en pas douter des sentiers battus.
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Les Saisons

On ne sait pas grand chose de Siméon, le personnage au centre de ce récit, à part qu'il vient d'une contrée désertique et lointaine, où il a vécu l'enfer, où il a vu ses proches mourir.



Et s'il arrive un jour dans ce village de montagne isolé et miséreux où il pleut à longueur de journée, c'est qu'il a prévu de s'installer dans un coin tranquille, seul, pour écrire. Écrire un livre, son oeuvre, qu'il mûrit depuis tant d'années mais qu'il n'a encore jamais pu commencer, trop occupé à survivre qu'il était.



Écrire pour expier, pour racheter les horreurs des hommes, pour que tout ce qu'il a vu et enduré n'ait pas été complètement en vain.



Mais les villageois, aux moeurs cruelles et frustes (pour ne pas dire totalement dégénérées), façonnées par des années de survie dans ce climat impitoyable, ne vont pas accepter si facilement qu'un étranger, qui plus est un "savant", fasse irruption dans leur communauté repliée sur elle-même, leur renvoyant l'image de toutes sortes de possibles auxquels ils ne croyaient plus.



Le résumé décrit ce texte comme un "diamant noir de la littérature française". J'ai trouvé cette description tout à fait appropriée.



On est plongé dans une suite de scènes surréalistes, qui oscillent entre le tragicomique, le glauque et le sordide (âmes sensibles s'abstenir), mais qui sont émaillées de lueurs d'espoir perçant ça et là, que Siméon tente envers et contre tout de maintenir vives : le projet d'écrire, de revoir la jeune femme, la chaleur d'un petit chat, l'espérance d'un papillon!



C'est beau, c'est rude, c'est extrêmement mélancolique. Un livre empli d'images fortes, qui vont me hanter longtemps.
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Les Saisons

[Relecture] et bien m’en a pris car certains passages très forts ont fini par en occulter d’autres avec le temps. Deuxième claque donc.



« Quand un monde est inhabitable, on le change ou en en change. »

« C’est une maison honnête, ici, dit enfin la bonne femme. On ne garde pas sa pourriture. »



Publié pour la première fois en 1965 chez Julliard et réédité aux Editions Bourgois, ce monument de la littérature est aujourd’hui disponible dans la collection “titres” (de neuf vêtue). Tout en gardant son statut de “livre culte”, il risque bien d’élargir le cercle restreint des initiés (“ceux qui savent”) pour conquérir un public avide de sensations romanesques, nouveau récipiendaire alerté par la réputation sulfureuse qui précède le livre.



Quand Siméon, écrivain velléitaire et procrastinateur, fuyant un douloureux passé, arrive aux confins d’une terre, il pense trouver au coeur de cette vallée l’endroit idéal pour y poser ses quelques rames de papier et ses crayons.

Qu’on l’accueille comme il se doit par un crâne de mouton qu’on lui jette dessus et qui lui éclate un ongle de pied, qu’on l’abreuve d’injures et de quolibets dès les premiers échanges, Siméon, aussi laid que naïf, n’y voit que rites d’initiation et consigne par écrit sous formes de considérations anthropologiques, ses premiers pas dans ce monde nouveau.



Mais au Royaume de Pourriture, si les saisons passent et se ressemblent, alternant des mois de gel bleu et de pluies diluviennes, il en ira autrement des péripéties du protagoniste, objet de vindicte de ce qui ressemble furieusement au rebut de l’humanité. Dans ce vallon où ne pousse que la lentille, déclinée en galette, soupe et tord-boyaux, Siméon apprendra à se plier aux absurdes coutumes du village, à vivre au milieu d’une galerie de personnages, il faut le dire, plus affreux les uns que les autres. Quitte à être phagocyté et y laisser quelques morceaux.



On trouvera rarement dans un seul livre une telle conjonction d’événements où horreur, absurdité, laideur, grotesque, hargne, hostilité, dégoût, décadence... se lisent en partage.



Une exubérance saugrenue, des scènes hallucinantes et inoubliables, une écriture au service du détail renforçant les sentiments de malaise, une noirceur brillante et assumée, il y a tant de choses à dire sur ce livre éclatant où pourtant jamais ne perce un bout de ciel.



Sachant tout cela, vous saurez si ce livre est pour vous ou non.





De Maurice Pons, et très différent, je conseille également “Le passager de la nuit”.



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Les Saisons

Parcourant l'exposition « Les Saisons » de l'artiste Lionel Estève au Musée d'art contemporain (Belgique), j'ai entendu évoquer le roman du même titre de Maurice Pons.



Découverte pour moi de ce livre dit « culte ».

Un choc, un questionnement.

Des images qui surviennent brûlantes jusqu'à l'écoeurement.



Une impression de livre intemporel.

Miroir à chaque époque pour chaque génération.

La lecture à sa sortie en 1965 ne fut certainement pas la même qu'à notre époque.



Comment ne pas penser aux maux infligés par l'homme à son semblable?

Comment ne pas penser aux migrants?

Comment ne pas penser aux espoirs déçus d'une nouvelle vie imaginée et espérée autre que celle subie?

Comment croire en l'humanité?



Le livre est noir, violent, brutal, sans lumière.

Les saisons ne sont plus que deux.

Elles sont aussi noires, violentes, brutales que les êtres qui y vivent dans un présent qui les tue.

Pluies incessantes. Gel qui fige les hommes. Neige qui étouffe êtres et lieux.

Un homme y vit, toléré, détesté, coupable, soumis, sacrifié : il en faut bien un…

Il est un écrivain qui veut et ne peut écrire, obsédé par un départ qu'il ne peut dépasser, se heurtant à la laideur qu'il ne peut transcender.



À dénombrer tout ce qui se passe dans cet endroit hors monde, on y trouve des faits, des mots qui bousculent : analyser est presqu'impossible tant le livre fascinant serpente en nous de diverses manières et ne nous lâche qu'après le dernier mot et encore…





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Les Saisons

Beaucoup de critiques ici d’un ouvrage en tous points étonnant et dérangeant.

Beaucoup de résumés du livre aussi, comme c’est trop souvent le cas et des qualificatifs comme : dantesque, burlesque, fellinien !

On se demande en quoi ce livre peut être féllinien !!

Mais peu ou pas de tentatives d’exégèse.

Pourquoi ?

L’ouvrage est-il à ce point hermétique à tout essai de compréhension ou provoque-t-il plutôt la sidération ?

Oui, je crois que c’est cela, il provoque la sidération par l’horreur, le dégoût, l’inversion et la déchéance de l’humain ramené au rang de bête dans un monde en agonie et en putréfaction.

S’il est une fable philosophique, une parabole aux accents bibliques … est-ce en cela ?

Nulle part, il n’est question de l’élévation de l’âme, de désir de rédemption, de Dieu… Même si l’on perçoit le caractère christique de Siméon, petit agneau.

N’est-il pas étrange que la bonté se révèle en tout dernier ressort ?


Seul le vieux rebouteux qui garde espoir en la science par retour et une gamine qui a fait preuve de compassion demeurent au village. Et la gamine au pied d’une croix entourée d’excréments…

Un livre déstabilisant, oui et que l’on souhaite de tout coeur ne pas être prémonitoire.
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Rosa

Il est à noter que 2 ans après l'effroyable, le monstrueusement noir Les Saisons, Pons publie ce Rosa, léger, distancié, voire même drôle. Dans les deux romans, tout de même, le cadre est un pays imaginaire et si ici on nous parle de "chronique fidèle" (ce qui est extrêmement facétieux), on comprend vite toute l'ironie sous-jacente. L'immense titre à rallonge est une référence aux romans d'apprentissage du 18eme et c'est cela qui donne le ton du livre : une sorte de Candide anti-militariste et féministe... Certes on est loin de la puissance sauvage des Saisons mais Dieu qu'il est bon de sourire un peu!
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Les Saisons

Une dinguerie ce bouquin. J'ai été soufflée. Comment ai-je pu passer au travers ? Ce goût de pourriture investissant ma bouche m'a enchanté, le vent qui écrête les cahutes édentées, les pieds qui s'enfoncent dans la bourbe fangeuse ont ravi ma curiosité en manque d'obscénité.



J'ai suivi des yeux ce Siméon, semi-gueux aux allures de loqueteux, avec le même intérêt que mon petit neveu faisant ses premiers pas, telle une grosse fayotte particulièrement zélée, car l'auteur ne nous lâche pas à un seul instant d'un cran.



Je suis bon public ; les histoires de clodos délurés qui vagabondent dans une humidité au relent de merde liquide, ça m'excite. J'ai appuyé ma tête peinarde contre mon traversin et déjà je sentais les larves de mouches encrouter le coin de mes yeux, embrochée net dans ce patelin de bouseux pour le moins fascinant.



Qu'importe l'époque de l'année, jamais le printemps n'hésite dans ce pays maudit, la désolation embrasse la vue, notre district est devenu une sombre chiennerie où les saisons se tortillent d'agonie. Au choix, c'est la pluie qui transperce jusqu'aux os, le croupion humide baptisant une culotte de maronnasse, ou bien une neige à rétracter toutes burnes crotailleuses.



À cet état de météorologie calamiteuse, ne songez pas à trouver réconfort dans ses habitants. Ici on ne reçoit pas et on ne pardonne rien. La populace, communauté tordue au raffinement de macaques qui s'épouillent, nous émerveille par son extravagance de va-nu-pieds moyenâgeux exerçant son crétinisme dans la clabauderie. Faut-il préciser que les mœurs se frottent à s'en déliter, du décadent au style impudique, un peau à peau à la lubricité sordide dans lequel nous longeons des épisodes de coïts sommaires, peu voluptueux, où matières fécales et organiques rampent originalement près des appendices sexuels.



Et tout ce petit monde se fait chier comme un rat mort. À tout heure, on s'écrase aux fenêtres en se dérouillant la nuque dans un communautarisme jaloux, on tourne en rond dans sa cabane délabrée, on bâfre ses lentilles, on se perce les points noirs en se léchant les lèvres, pas beau à voir, on picole, on se prémunit du froid avec des mulots callés sur le bide, je vous raconte pas la galère, bref, un grand ensemble, on peut le dire, qui nous fait garder les yeux grands ouverts.



J'ai respiré l'haleine de ce bouquin avec une curieuse docilité, objet fascinant, le machin m'a escorté tout entier dans une science-fiction oxydée, sorte de cauchemar à la paillardise malsaine lubrifiée au saindoux. Je recommande chaudement.
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L'oiseau bariolé

Faites donc cette expérience : capturez un oiseau, puis peignez-lui les plumes de couleurs vives, bien éloignées de ses couleurs d'origine et relâchez-le dans la nature. Naturellement il volera vers ses congénères, qui ne le reconnaissant pas comme un des leurs, s'empresseront de le tuer au plus vite. C'est un peu ce qui arriva à ce livre, qui fut très criqué, semble-t-il à la fois par les survivants de la Shoah et par les autorités politiques d'Europe de l'Est qui lancèrent des campagnes contre le livre et l'auteur. Ce livre fut même interdit.

Et j'avoue que ce livre m'a dérangé, m'a intrigué, mais qu'à aucun moment je n'ai eu envie de l'abandonner. Il est si particulier, si unique.

Un gamin, juif polonais est confié par ses parents à une famille d'accueil. Il est lui aussi cet oiseau bariolé, il n'a pas du tout le physique des autres enfants, et de ce fait est souvent rejeté. Juif, il a la peau mate et ses cheveux sont très noirs ...il est différent de cette population blonde aux yeux clairs...

Est-ce autobiographique ? Sans doute en grande partie. L'auteur s'en défend cependant dans la préface : "Je décidai que moi aussi je situerais mon ouvrage dans un domaine mythique, dans le présent fictif hors du temps, libéré des contraintes de la géographie ou de l’histoire. Mon roman s’appellerait L’oiseau bariolé." (P. 10) . Quand on considère son parcours de vie on peut trouver de nombreuses similitudes.

Mais aussi des faits surréalistes, qui, si on les prend pour argent comptant, font passer une grand partie de ceux qui l'ont accueilli pour des dégénérés, des tarés congénitaux, des monstres, écorchant vifs des lapins, arrachant les yeux de ceux qui lorgnent sur leur épouse, superstitieux, violents... En cela on peut comprendre - sans l'admettre - que les autorités de ces pays de l'est ayant basculé, après guerre dans le communisme aient décidé d'interdire cet ouvrage. Il faut certainement le lire, en partie, au second degré, comme une parabole.

En forçant le trait Jerzy Kosinski réussit à nous émouvoir et surtout à nous faire réfléchir sur la notion de témoignage. Nombreux furent ceux qui écrivirent à la fin de la guerre leur peur, les crimes qu'ils virent. Lui est allé bien au delà de ce que d'autres écrivirent, bien au delà dans certaines horreurs, bien au delà de ce que nous avions déjà lu quant aux horreurs perpétrées par les nazis. Il a jouté la méchanceté, les monstruosités faites par bêtise, faites par le naturel des populations qui l'accueillirent. En cela il est terrible.

L'auteur alterne à la fois ces narrations fantastiques, mêlant surnaturel, horreur, insolite ou monstres, et la réalité bien sombre des trains de déportés, des combats de l'armée rouge, des exécutions, du racisme. Des témoignages difficilement crédibles, presque rabelaisiens parfois, côtoyant des faits et des réactions populaires avérées.

Bref, il est bien difficile de rester indifférent face à cette lecture
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Les Saisons

Ce livre est indéfinissable, fascinant par son histoire, son phrasé, ses événements qui peuvent tour à tour vous dégoûter, vous surprendre, vous donner de l’espoir. Il ne laissera personne indifférent. Il a été publié la première fois en 1965.

Le récit se déroule dans un pays où les saisons sont rudes (après des mois de pluie, le gel peut rester présent trente à quarante mois), longues ; où la nature est difficile à maîtriser ; où la nourriture est rare et les occupations également….. Un homme, qui a beaucoup souffert, arrive dans un village au milieu de nulle part. Il veut s’installer quelque temps pour écrire. Les habitants, peu nombreux, sont soupçonneux et envoie les douaniers enquêter. Il arrive malgré tout à s’installer, dans des conditions précaires, chez une veuve qui tient ce qu’on pourrait appeler une auberge (mais elle ne ressemble en rien à un tel lieu).

Il pleut, tout le monde est hostile mais notre homme espère être avec son crayon, ses feuilles et les remplir. C’est son but et il le dit : « Je suis venu pour partager avec vous le pain des mots et le vin de la phrase ». (Oui, il y a quelques allusions à la Bible). Il essaie de surmonter chaque obstacle, d’avancer son projet mais toujours quelque chose se met en travers. L’auteur nous parle de la condition d’écrivain, des maux et des mots de ceux qui veulent transmettre, par un livre, un message, raconter une vie, des vies….

Un narrateur extérieur, parlant à la première personne et interpelant de temps à autre le lecteur, présente le quotidien de cet étranger, Siméon, qui a osé débarquer et surtout rester là alors qu’il n’est pas franchement le bienvenu. Il croit qu’on s’habitue à lui mais ce n’est pas si simple… Il fait tout pour apporter un peu de lumière, de chaleur, de printemps avec ce qu’il tente de transmettre.

La galerie de personnages est très riche, tous ont un petit côté burlesque qui s’explique par ce qu’on apprend sur eux, sur les traditions de ce coin du monde atypique, sur les relations que les gens entretiennent ou pas.

J’ai pensé à Kafka et « La métamorphose », un recueil inclassable lui aussi mais d’une force extraordinaire. Ce sont des textes qui restent dans notre mémoire, même des années plus tard. J’ai pensé à la cour des miracles et puis j’ai compris : « Les saisons » c’est incomparable.

C’est tendre, loufoque, décalé, hypnotisant. Maurice Pons a une écriture riche au vocabulaire soigné, aux tournures de phrases travaillées. La poésie est là même quand il décrit des moments plus ardus. C’est un sacré contraste d’utiliser un style qui magnifie chaque terme pour parler de la laideur (celle des autochtones, celle du paysage, celle des faits…..) J’ai été ébahi de la puissance de ce petit bouquin !

Rédiger ce texte a dû être aussi une prise de risque. Comment peut réagir un éditeur le découvrant la première fois ? Pense-t-il que l’originalité, la beauté du libellé, et tout ce qui fait l’unicité de cette rédaction, emporteront les lecteurs dans un univers qu’ils n’oublieront jamais, entre réel et imaginaire ?

C’est mon cas. Dire que j’aurais pu passer à côté de cette œuvre magistrale et ne jamais la lire ! Je ne l’oublierai pas !


Lien : https://wcassiopee.blogspot...
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L'oiseau bariolé



En 1939, un garçon de six ans est envoyé par ses parents anti-nazis dans un village reculé de Pologne où ils pensent qu'il sera en sécurité. Le temps passe, et le garçon est laissé errer dans la campagne polonaise, essayant de rester en vie, à la recherche de nourriture, d'un abri et d'un principe de justice pour s'adapter à ce qu'il voit les gens se faire les uns aux autres et à lui.

Pour les paysans blonds aux yeux bleus, le garçon basané aux yeux noirs qui parle le dialecte de la classe éduquée est soit Juif, gitan, vampire ou le diable. Ils le craignent et ils craignent ce que les Allemands leur feront s'il se trouve parmi eux. Il doit donc continuer à avancer. Ce faisant, sur une période de plusieurs années, il observe toutes les variations concevables sur le thème de l'horreur, du sadisme et de la bestiatité. Un meunier arrogant arrache les yeux d'un laboureur avec le dos d'une cuillère. Il perd sa voix dans un tas d'excréments humains, gèle presque jusqu'à mourir dans un lac couvert de glace.

Le garçon apprend le communisme et le principe de la vengeance auprès de deux gentils officiers russes et rejoint à contrecœur ses parents. Kosinski apparaît alors dans la voix narrative avec un tract sur le mal, la culpabilité des paysans, les avantages de la lutte personnelle à la campagne par opposition à l'anéantissement anonyme à la ville.

Le roman proprement dit est purement et simplement une panoplie de l'horreur, savamment travaillée et dégoûtante.

Il n'y a pas plus de parabole ni de symbolisme ici qu'il n'y en avait à Buchenwald. Jerzy est un écrivain brillant, mais que le lecteur se méfie.

C'est très dur à encaisser.
Lien : http://holophernes.over-blog..
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Les Saisons

Un étranger arrive au village. Un homme un peu simple, pas méchant et plutôt présomptueux. Il rêve de devenir écrivain.



De coucher sur papier, tous les mots qui l'ont étouffé dans le désert de sa précédente vie.



Pour ce faire, il a choisi de se réfugier là où la pluie tombe des mois complets et la glace, des années. Dans ce village, où seules poussent les lentilles que l'on mange à toutes les sauces.



Dans ce village étrange, peuplé de gens frustres avec lesquels le nouvel arrivant, Siméon, va devoir coexister...



Roman fort étrange que celui-ci, empreint d'une atmosphère sombre et malsaine. Un récit teinté d'extraordinaire, à l'exemple de ce climat détraqué.



Ce roman se lit, comme un voyage cauchemardesque, dans lequel le lecteur s'englue, parcouru malgré lui, d'éclats de rires incongrus.



Mais, si on gratte un peu cette surface, l'on retrouve une histoire sur un bouc-émissaire, sur l'incompréhension mutuelle et la xénophobie.



Siméon est à la fois, un homme que l'on plaint car victime de la suspicion immédiate des habitants du village mais il est tellement pédant que l'on ne peut s'empêcher de penser qu'il mérite une partie de son sort.



Au final, ce récit chamboule le lecteur. C'est une expérience complètement atypique et rien que pour cela, je vous invite à découvrir ce roman.



À moins que vous ne l'ayez déjà fait ?
Lien : https://allylit.wordpress.co..
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