Citations de Noëlle Châtelet (227)
De l'autre côté de la rue, d'une fenêtre semblable à la sienne, on assiste avec la même tranquillité au spectacle du monde : un autre témoin, un autre figurant, comme elle.
Céline regarde sa mère intensément. Les yeux demandent. Pas la bouche. Elle n'oserait pas, la bouche : il y a des questions qu'une fille en peut pas poser à sa propre mère.
...ma main qui te fait rire à cause des "miettes", du nom que tu donnes aux taches dont je ne t'ai pas dit encore qu'elles étaient de vieillesse. (p. 165)
se lit en 2 heures ; pudique et charmant voyage de deux êtres qui trouvent l'Amour après une vie de vicissitudes (pour Elle) et d'ennui ; elle a 70 ans, lui 80 et la vie commence ! un optimisme qui emplit de Joie !
Le rire ressemble aux larmes comme deux gouttes d'eau - sans les gouttes d'eau - quand on rit ensemble de quelque chose qui devrait faire pleurer.
Je souris, tu sais, en écrivant ces lignes. Je souris à cette part de toi qui te rend unique, pas seulement parce que tu es ma mère, mon unique mère, mais pour ton aptitude inégalable à la facétie, pour ne pas dire à la loufoquerie, qui m'ébahit, non : qui m'éblouit, car l'excentricité dont tu es capable est sans calcul, sans artifice. Elle est tout simplement naturelle. Tu es naturellement stupéfiante, et particulièrement là où on t'attend le moins.
Je savais que contre l'indignité de la fatigue tu avais le remède, et que tu allais le prendre, bientôt, très bientôt...
Voilà. Ils y sont. A ce moment gracieux des mots promesses, des mots caresses.
A soixante dix ans on ne minaude pas. On croit aux paroles et aux réponses loyales.
Marthe brûle d'un feu continu comme si le souffle de Rossini attisait en elle des braises d'adolescentes qui n'en pouvaient plus de couver.
Pour moi, le temps avait soudain changé de matière. Le temps ne se comptait plus. Il se décomptait.
Et Mathilde entre en bouderie.
Etat de grâce que la bouderie...Bulle.Boule.Balle de rancoeur.Pelote de mélancolie.Roulé-boulé de dépit.Escargot de la tristesse.On doit y rester enfermé longtemps avant que le chagrin, l'apitoiement sur soi - justifié ou non -, n'éclose en douceur, ne devienne volupté, comme si, à force de se lover dedans, la peine finissait par se dévider, se vider d'elle-même et, après avoir fait mal, si mal, ne plus faire mal du tout, et même plutôt bien.
Etat de grâce de la bouderie qui vous met à l'abri des autres, de vous-même, dans une solitude choisie que plus rien, personne, ne peut rompre.
Elle était de nuit quand elle a fait le premier pansement d'Isabelle. Impressionnée, oui. Elle l'a été ! Car elle n'était pas préparée. Les pansements créent des liens. C'est là que s'échange l'essentiel, là que les relations se tissent, pendant ces longues heures où la souffrance est à nu.
P.108
Ne penser à rien, en évitant que le rien lui-même ne devienne quelque chose, exercice mental de haute voltige où elle ne met ni spiritualité, ni mysticisme. Etat d'extrême sensualité où le corps seul est en mouvement sans le moindre mouvement, une manière de s'associer à l'écoulement du temps, d'en devenir soi-même une part vivante et docile.
Marthe a envie de café. Après vingts années de Ceylan assidu, Marthe a envie de café.
"C'est inouï ce qui est en train de se passer, maman. Incroyable ce que tu me fait faire. Le chemin... Le chemin que tu me fais parcourir..."
C'est peut-être quand on est autre qu'on est le plus soi même.....
Car Solange, précisément, ne se bat plus, pour rien ni pour personne, encore moins pour elle-même. Solange s'est libérée des armes, de toutes les armes, affranchie au moment même où elle a cessé de marcher au pas, où elle a changé de cadence, pesant chaque pression du pied sur le bitume dans un balancement doux...
Les peaux sont douces d'être usées, d'avoir frotté contre le temps, les années, inlassablement polies comme les galets sur la grève.
Elle soupire. Ce soupir là est inédit. Il n'est ni de la nostalgie , ni du soulagement, ni même de la satisfaction.
Une bouffée d'âme à l'état pur.