Citations de Pascal Bruckner (582)
Avec les mendiants le dédain est un impératif vital. Un simple coup d’œil et c’est fini ; ils prennent cela pour un encouragement.
La plus grande industrie des Indiens est la fabrication des dieux. Ils en ont quasiment le monopole. Il y a autant de messies en Inde que de variétés de fromages en France. Et puis la faim donne au plus simple balayeur la pâleur fiévreuse d’un prophète.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?
Le bureaucrate a pour politique de ne jamais regarder en face la personne qui lui tend ses papiers. Echanger un regard reviendrait à reconnaître devant soi un être humain.
Il s’arrêtait toutes les heures dans un café tant il était déshydraté. Par curiosité, il acheta un journal, cela faisait deux ans qu’il n’en ouvrait aucun. Il retrouva les mêmes noms, les mêmes visages, les mêmes conflits et idées ressassées. Le monde n’avait pas changé. Il pouvait replonger dans un coma de dix ans, rien ne bougerait.
Un étrange spectacle l’attendait. Un vaste caravansérail de marginaux se dressait sur les quais, au pied des arbres et des bosquets, autour de braseros, de feux de bois improvisés. Ils étaient là, les barjots, les foutraques, les béquillards, les culs-de-jatte, les vide-goussets, toute la lie de la capitale.
Paris, l’été, est un décor de théâtre déserté. Si un conquérant voulait s’emparer de la capitale, il lui suffirait de masser des troupes le 1er août porte d’Orléans et porte de la Chapelle et d’entrer tranquillement dans une ville morte.
Quand les médecins déshabillèrent Antonin et qu’ils l’eurent pelé tel un oignon, ôtant avec des pinces les guenilles qui le composaient, prenant soin de ne pas arracher un lambeau d’épiderme avec un maillot ou une chaussette, ils découvrirent un écorché vif à la peau constellée de crevasses, de ravines. Ses cheveux épais et longs étaient colonisés par les poux si nombreux qu’ils se gênaient les uns les autres. Il dégageait une telle odeur de putréfaction que les soignants durent endosser un masque. D’autres corpuscules avaient élu domicile dans ses parties pileuses, morpions sous les aisselles et dans les plis de l’aine, puces sur ses jambes, gale sur le torse. Le pubis avait été nettoyé sous les mandibules de ces petites bêtes qui avaient tondu les poils. Son grand corps n’était qu’une plaie grouillante de vers, de crabes miniatures : toute cette poussière vivait sur sa carcasse, créait un mouvement brownien de coléoptères, asticots et autres phénomènes à poils, pinces et crocs. Les médecins furent saisis par cette pullulation et prirent des dizaines de clichés avant d’entamer les soins.
Assez vite, les émanations putrides le découragèrent : il avait l’impression de barboter dans la fosse d’aisances des Parisiens. Affolé par ce labyrinthe, il ressortit au grand air par le pont de l’Alma, ouvert aux visiteurs, et se faufila entre deux groupes. Il fut recraché par l’intestin gigantesque de Paris comme ce qu’il était : une excrétion nauséabonde. Il était devenu un être hirsute, fétide, laissant derrière lui une odeur de cadavre.
La prison aurait pu le sauver, la remise en liberté l’acheva.
En règle générale, il est préférable de ne pas croiser les auteurs que l'on adule, de peur d'être douché.
Se cantonner aux classiques nous préserve du double fardeau de l'envie et de la déception alors qu'un contemporain, si grand soit-il, est aussi un homme ordinaire qui paye ses impôts, profère des banalités, attrape des rhumes.
Il y a quelque chose de cruel dans l'admiration car elle ne pardonne aucune défaillance.
Le trajet est rapide entre l'adulation et la destitution dès lors que l'objet élu ne répond plus à notre attente.
C'est le danger de la visite au Grand Ecrivain.
Comment l'injustice a commencé
Nixivan avait réuni ses amis à dîner et il préparait un succulent rôti. Soudain, il s'aperçut qu'il n'avait plus de sel.
Nixivan appela son fils : - va jusqu'au village et achète du sel. Mais paie le à son juste prix : ni plus cher, ni moins cher.
L'enfant s'étonna : - je comprends que l'on ne doive pas le payer plus cher, papa. Mais si je peux marchander un peu, pourquoi ne pas économiser quelque argent ?
- Dans une grande ville, c'est à conseiller? Mais dans une petite ville comme la nôtre, tout le village périrait.
Lorsaue les invités, qui avaient assisté à la conversation, voulurent savoir pourquoi on ne devait pas payer le sel moins cher, Nixivan expliqua : - celui qui vend le sel au-dessous de son prix agit sans doute ainis parce qu'il a désespérément besoin d'argent. Celui qui profite de cette situation ne respecte pas les efforts et la sueur de l'homme qui a travaillé pour produire quelque chose.
- Mais cela ne suffit pas à faire périr un village.
- De même, au commencement du monde, il y avait peu d'injustice. Puis chacun, au fil du temps, a fini par ajouter quelque chose, pensant toujours que cela n'avait pas grande importance, et voyez où nous en sommes aujourd'hui
Paulo Coelho Histroires d'enfances sol en si
"C'est la cruauté de la maladie moderne : elle tue trop tôt ceux qui n'ont pu tenir assez pour qu'arrive le médicament miracle. Les progrès de la médecine ont transformé la mort en contretemps."
"La jeunesse est sotte qui est l'âge de l'absolu et ne connaît pas l'art des nuances."
"Vient un moment où les relations avec un être sont si entremêlées qu'on ne peut distinguer l'amour du devoir."
Liberté, ton nom est écrit sur toutes ces photographies. "Helmut a ouvert la porte de territoires interdits, ce qui a permis aux autres de le suivre", raconte June. L'oeuvre de Newton est aussi une expérience de la liberté, dans ses thèmes comme dans ses formats, le photographe faisant oeuvre d'un simple polaroïd comme d'un grand format de deux mètres cinquante, du portrait d'un taureau dans un pré à celui d'une star de cinéma nue sur un bureau. "Tout ce qui était interdit, il l'a fait, résume June. C'était sa façon de contrer le système, comme il disait". La photographie de mode vise à habiller les femmes; Newton les déshabille, systématiquement.
D'abord mari de sa femme, il était devenu son fils, puis le jouet de ses enfants, avant de finir en vermine que toute la famille voulait éliminer
Frôler la mort suffit parfois à redonner goût à la vie.
Elle se vivait comme une usine à poupons,absorbait les forces de son époux dans son immense corps et les convertissait en beaux bébés dodus et tonitruants.
L'amour est de tous les sentiments le plus égoïste et par conséquent,lorsqu'il est blessé,le moins généreux. (Benjamin Constant)