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Citations de Pierre Lemaitre (3993)


- Dites-moi, sergent, vous avez quand même le contact avec l'artillerie ?

Les artilleurs étaient postés à quelques kilomètres de là. En cas d'attaque, c'était eux qu'on solliciterait pour arroser l'autre côté du fleuve afin de tenir l'ennemi à distance.

- Vous savez bien, mon capitaine, répondit Gabriel, on n'a pas le droit de communiquer avec l'artillerie par radio...

Le capitaine se massait le menton, perplexe. L'état-major se méfiait des transmissions sans fil qui pouvaient trop facilement être interceptées. Les demandes de tirs devaient se formuler exclusivement par le lancement de fusées. Or, justement, le lieutenant rencontrait là un petit problème :
- On nous a équipés de lance-fusées automoteurs tout nouveaux, mais, dans l'unité, personne ne sait s'en servir. Et il n'y a pas le mode d'emploi.

Au loin, la cime des arbres se teintait de nouveau du rougeoiement des tirs dont la pluie assourdissait les échos.

- Sans doute les troupes françaises qui harcèlent les Boches, dit le lieutenant.

Gabriel, sans bien savoir pourquoi, se souvint de la devise du général Gamelin : « Courage, énergie, confiance. »

- Sans doute..., répondit-il. Ça ne peut être que ça...
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Le général Morieux paraissait au moins deux cents ans de plus. Un militaire, vous lui retirez la guerre qui lui donnait une raison de vivre et une vitalité de jeune homme, vous obtenez un crouton hors d'âge. Physiquement, il ne restait de lui qu'un ventre surmonté de bacchantes, une masse flaccide et engourdie sommeillant les deux tiers du temps. Le gênant, c'est qu'il ronflait. Il s'effondrait dans le premier fauteuil venu avec un soupir qui ressemblait déjà à un râle, et quelques minutes plus tard sa brioche commençait à se soulever comme un Zeppelin, les moustaches frissonnaient à l'inspiration, les bajoues vibraient à l'expiration, ça pouvait durer des heures. Ce magma prodigieusement inerte avait quelque chose de paléolithique, très impressionnant, d'ailleurs personne n'osait le réveiller. Certains hésitaient même à l'approcher.
p 405
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L’activité religieuse était assez saisonnière. La plupart des fidèles revenaient à la messe lorsque l’agriculture était en difficulté, quand les prix du bovin entraient en récession ou que les usines de la région préparaient des plans de licenciement. L’église proposait une prestation, on se comportait comme des consommateurs. Même les grands évènements cycliques comme Noël, Pâques ou l’Assomption n’échappaient pas à cette règle utilitaire. C’était la manière, pour les adhérents, d’acquitter l’abonnement leur permettant, dans l’année, de recourir aux services à la demande. A ce titre, la messe de Noël remportait toujours un beau succès.
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- ... On en reparlera une autre fois, ça ne vous embête pas ?
- On non, moi, rien ne m'embête, vous savez, je suis plutôt du genre facile à vivre...
Et cette seule sentence, prononcée avec cette sincérité désarmante, fait penser à Sophie qu'il n'y a peut-être rien de plus pénible dans l'existence que les gens faciles à vivre.
- Bon, dit Sophie, on va tout reprendre à zéro, vous voulez bien ?
- Mais on est déjà à zéro !
Au fond, il n'est peut-être pas si con que ça...
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Madeleine resta un long moment à fixer la table, son verre, le journal. Ce qu'elle s'apprêtait à faire l'épuisait à l'avance.
Tout ce qu'elle avait en elle de morale et de scrupules s'y opposait et tout ce dont elle disposait de colère et de ressentiment l'y poussait.
Elle céda à la rancune. Comme toujours.
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Dans son domaine, Georges Guénot était une sorte de prototype. Il avait, pour essorer le personnel, une intuition phénoménale et un cynisme à toute épreuve. Là où il sévissait lorsque Geneviève l’avait débauché, un jour où une ouvrière s’était sectionné le doigt il avait exigé qu’elle nettoie les dégâts avant d’appeler un médecin.
(page 43)
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Si vous écrivez bien, le journalisme n’est pas fait pour vous, faites plutôt des romans.
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- La paix, c’est quand même mieux que la guerre…
- Ça dépend. Parce qu’il y a guerre et guerre. Par exemple, en France, les gens se foutent complètement de ce qui se passe ici (Indochine) parce qu’il n’y a que des militaires de carrière. Tant que les appelés du contingent ne viendront pas crever dans les rizières, pour les Français, la paix ou la guerre, ça sera la même chose, parce que ça ne change rien à ce qu’ils ont dans leur assiette.
(page 102)
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Pierre Lemaitre
Le jour où j’apprends que de plus en plus de femmes accouchent dans la rue, Bernard Arnault devient l’homme le plus riche du monde. Que fait Emmanuel Macron ? ISF, assurance chômage, retraites. [...] On ne m’y reprendra plus. Pour la dernière élection, je n’ai pas voté pour Emmanuel Macron mais contre Marine Le Pen. Il y a eu Jacques Chirac en 2002 et Emmanuel Macron en 2017. Il n’y aura pas de troisième fois. (propos au JDD)
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Elle retourna pour la première fois à Saint-François-de-Sales. Le prêtre ne s'était pas montré très à l'aise quant aux desseins du Seigneur, mais sur les questions de culpabilité, de mauvaise conscience, de faute et de plaisirs suspects, il était comme un poisson dans l'eau.
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Pierre Lemaitre
En même temps, attendre, c'est ce qu'on fait depuis la fin de la guerre. Ici, c'est un peu comme dans les tranchées finalement. On a un ennemi qu'on ne voit jamais, mais qui pèse sur nous de tout son poids. On est dépendant de lui. L'ennemi, la guerre, l'administration, l'armée, tout ça, c'est un peu pareil, des trucs auxquels personne ne comprend rien et que personne ne sait arrêter.

Au revoir là-haut.
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Elle se concentrait des heures sur des détails secondaires, sur le Titanic, elle aurait commencé à repeindre les transats.
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La rencontre imprévue qui va faire basculer votre vie, la plaque de verglas sournoise, la réponse que vous donnez sans réfléchir… Les choses définitives ne mettent pas un dixième de seconde à se produire.
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Lorsqu'il brancha sa première fiche, il tomba sur la conversation d'un deuxième classe de Vitry-le-François avec sa fiancée.
- Tu vas bien, mon chéri ? commença-t-elle.
-Tsst tsst tsst, dit Désiré. Pas de mention concernant le moral des troupes.
On sentit la jeune fille désarçonnée; elle hésita, puis:
- Au moins, il fait beau ?
- Tsst tsst tsst, dit Désiré. Rien sur les conditions météorologiques.
Un long silence s'ensuivit.
- Chérie...
le soldat attendit qu'on l'interrompe. Rien ne vint, il se lança:
- Dis-moi, pour les vendanges...
- Tsst tsst tsst. Le vin français est une donnée stratégique.
le jeune soldat passa à la colère, il n'y avait vraiment pas moyen de discuter. Il décida d'arrêter là.
- Bon, écoute, trésor...
- Tsst tsst tsst. Aucune mention concernant la Banque de France.
Silence
La jeune fille enfin se risqua:
- Bon, bah, je vais te laisser...
- Tsst tsst tsst, pas de défaitisme !
Désiré était très en forme.
(page 112-113)
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Il arrive que des hommes aux idées courtes deviennent grands lorsque les circonstances s'y prêtent.
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Elle fréquentait l'église quand elle avait besoin de secours. Dieu était un voisin un peu distant qu'on avait plaisir à croiser et à qui on ne rechignait pas de demander un petit service de temps à autre. Elle allait à la messe de Noël comme on visite une vieille tante.
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Albert, seul, pleura. Il y aurait à écrire une histoire des larmes dans la vie d'Albert. Celles-ci, désespérées, naviguaient de la tristesse à la terreur selon qu'il considérait sa vie ou son avenir. Alternèrent sueurs froides, coups de cafard, palpitations, idées noires, sensations d'étouffement et vertiges ; jamais plus, se disait-il, il ne pourrait sortir de cet appartement, mais jamais il ne pourrait y rester non plus. Les larmes redoublèrent. Fuir. Le mot tonna soudain dans son esprit. Fuir. À cause de la nuit, l'idée prit peu à peu un volume démesuré, écrasant toutes les autres perspectives. Il n'imaginait plus l'avenir ici, pas seulement dans cette pièce, mais aussi dans cette ville, dans ce pays.
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La présence de quelques soldats isolés, hagards et résignés, désarmés, l'uniforme débraillé, traînant les pieds, achevait de donner à cet ensemble une allure de naufrage et de renoncement. À l'affolement des populations jetées sur les chemins par l'offensive allemande s'ajoutait la débâcle de plus en plus patente de leur armée.
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- Le Français entretient avec son poste de TSF une relation intime, quasiment charnelle. Il a le sentiment que le speaker lui parle, ne parle qu'à lui. Rien n'est plus indiqué que la radio pour maintenir la confiance du pays.
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Après quoi, il ouvrit le carnet, un objet fatigué, l'élastique qui retenait les couvertures en carton était distendu, on aurait dit qu'il avait parcouru trois fois le tour du globe, comme le carnet de bord d'un explorateur.
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