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Citations de Scholastique Mukasonga (396)


« Cette femme aux pieds nus qui donne le titre à mon livre, c'est ma mère, Stefania. »
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La maison de Stefania, celle où elle pouvait vivre une vraie vie de femme, une vraie vie de mère de famille, c'était la maison de paille tressée comme une vannerie, l'inzu (et je lui garderai son nom kinyarwanda, car je n'ai en français que des noms de mépris pour la désigner : hutte, cahute, paillote...). Des maisons comme celle de Stefania, il n'y en a plus guère dans le Rwanda d'aujourd'hui. Elles sont désormais dans les musées, comme ces squelettes de grands animaux disparus depuis des millions d'années. Mais l'inzu, ce n'est pas dans ma mémoire cette carcasse vide, c'est une maison pleine de vie, de rires d'enfants, du bavardage insouciant des jeunes filles, du murmure chantonné des contes, du grincement de la pierre à moudre sur les grains de sorgho, du clapotis des cruches où fermente la bière et, à l'entrée, du battement rythmé du pilon dans le mortier. je voudrais tant que ce j'écris sur cette page soit le sentier qui me ramène à la maison de Stefania.
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Et ce choix de l'exil, je l'acceptais parce que j'avais le sentiment que c'était Nyabingui qui m'y conduirait, qu'elle avait tissé mon destin, destin que je ne discernais pas encore mais auquel je ne pourrais échapper et que j'acceptais comme une fatalité sereine.
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C'était un vrai souci, les pieds ! Comment conserver le pied mignon quand il faut marcher pieds nus sur la piste, et pieds nus, retourner la terre du matin au soir? Pour savoir qui vous étiez, d'où vous veniez on regardait d'abord vos orteils. J'étais jeune et cela me faisait peur.
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C'est cela le quota: vingt élèves, deux Tutsi et, à cause de cela, j'ai des amies, des vraies Rwandaises du peuple majoritaire, du peuple de la houe, qui n'ont pas eu de places en secondaire. Comme mon père le répète, il faudra bien nous débarrasser un jour de ces quotas, c'est une histoire de Belges !
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Stefania, Marie-Thérèse, Gaudenciana, Theodosia, Anasthasia, Speciosa, Leoncia, Pétronille, Priscilla et bien d'autres, c'étaient elles, les Mères bienfaisantes, les Mères bienveillantes, celles qui nourrissaient, qui protégeaient, qui conseillaient, qui consolaient, les gardiennes de la vie, celles que les tueurs ont assassinées comme pour éradiquer les sources mêmes de la vie
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Restons dignes de la confiance que nous a accordée le peuple majoritaire.
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Cosmas, mon père, je peux dire que je lui dois deux vies. D'abord, c'est mon père, mais c'est lui aussi qui m'a encouragée à aller à l'école, moi qui, petite fille, préférais trottiner accrochée au pagne de ma mère, cultiver comme elle avec ma petite houe, et veiller comme elle sur mes soeurs cadettes.
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J'allais avec les autres filles chercher de l'eau au lac Cyohoha ou, pour des occasions solennelles, à la source de Rwakibirizi dont le flot abondant et intarissable semblait jaillir par la grâce d'un improbable miracle au milieu de ce pays de sécheresse qu'est le Bugasera.
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Moi qui croyais, grâce à l'écriture, avoir pris le dessus et le contrôle de mon histoire, la souffrance m'a ressaisie soudain, aussi vive, me semble-t-il, que vingt ans plus tôt, lorsque j'avais reçu cette lettre qui me donnait la liste de trente-sept noms, ceux des membres de ma famille qui avaient été assassinés. (p. 151-152)
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Comment aurais-je pu deviner que mon trésor serait de pouvoir écrire ?
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J’avais hâte de décrocher ce diplôme qui me permettrait de trouver un emploi et d’avoir un salaire grâce auquel je pourrais enfin aider mes parents et mes frères et sœurs restés dans la misère de Gitagata, où la terre s’appauvrissait d’année en année et où le spectre d’un massacre annoncé hantait leurs jours et leurs nuits. Je le voulais de toutes mes forces, ce papier magique qui, même dans l’éloignement de l’exil, me permettrait d’être encore présente au milieu des miens, d’être garante de leur survie.
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Même s'il passe ses journées ailleurs, Dieu revient chaque nuit au Rwanda dit le proverbe. Le moins qu'on puisse dire, c'est que visiblement, dans la nuit du 6 avril 1994, Dieu n'était pas au Rwanda.
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(La rivière Rukarara)
L'échelle de couleurs vives inventées par Félix Ritter von Luschan se compose de trente-six carreaux de verre opaque auxquels est comparée la peau du sujet à un endroit le moins exposé possible au soleil.
On compte d'après l'échelle trente-six nuances de couleur de peau qu'on peut regrouper en six types :
I 1 à 5 Très clair, type celtique
II 6 à 10 clair, européen
III 11 à 15 Européen foncé
IV 16 à 21 Méditerranéen
V 21 à 28 Brun
VI 29 à 36 Noir
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Certains prétendaient – et c’étaient certainement les gens de Kivumu qui faisaient courir le bruit – que les Blancs étaient venus pour s’emparer de nos morts et les rendre malveillants, plus malveillants qu’ils ne le sont déjà, à l’égard des pauvres Rwandais vivants. On avait remarqué en effet qu’ils étaient toujours à la recherche des mourants. Quand un de leurs boys signalait que, sur une colline, quelqu’un allait mourir, qu’un bébé qui venait de naître ne survivrait pas, un père accourait aussitôt et lui versait de l’eau sur la tête, et le malade, le vieillard ou le bébé mourait peu après. Comment pouvions-nous savoir, disait ma mère, que c’était ça le baptême qui faisait monter directement au ciel ? Quand on voyait un père s’approcher d’un enclos, on disait : « Quelqu’un va mourir », et on s’enfuyait.
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"Maman, je n'étais pas là pour recouvrir ton corps et je n'ai plus que des mots - des mots d'une langue que tu ne comprenais pas - pour accomplir ce que tu avais demandé. Et je suis seule avec mes pauvres mots et mes phrases, sur la page du cahier, tissent et retissent le linceul de ton corps absent".
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Aux sources du Nil, on allait, à défaut de les trouver, inventer des êtres tout juste sortis de la Fable, une race quasi primordiale qui réenchanterait l’Afrique avilie par des activités industrielles et mercantiles. Et les Tutsi, si grands, aux traits si fins, à l’allure si imposante, étaient justement là pour tenir le rôle... Là où il n’y avait que des Rwandais, on vit des Égyptiens issus en droite ligne des pharaons, des Éthiopiens descendants de la reine de Saba, des juifs égarés des dix tribus perdues d’Israël, des chrétiens coptes dont il suffirait de rafraîchir la mémoire...
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C'était un vrai souci, les pieds ! Si, toujours selon les critères de la beauté rwandaise, on appréciait les jambes bien droites, sans le vilain galbe du mollet, les pieds eux, devaient être petits, fins, les orteils longs et déliés. Mais comment conserver le pied mignon quand il faut marcher pieds nus sur la piste, et pieds nus, retourner la terre du matin au soir? Pour savoir qui vous étiez, d'où vous veniez on regardait d'abord vos orteils. J'étais jeune et cela me faisait peur.
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..c'étaient elles les Mères bienveillantes, les Mères bienfaisantes, celles qui nourrissaient, qui protégeaient, qui consolaient, qui conseillaient, les gardiennes de la vie, celles que les tueurs ont assassinées comme pour éradiquer les sources mêmes de la vie.
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Ce n'est pas ce que raconte ma mère. Elle dit que les gorilles, autrefois, c'étaient des hommes, ils se sont enfuis dans la forêt, elle ne sait pas pourquoi, ils ont oublié d'être des hommes, à force de vivre dans la forêt ils sont devenus des géants couverts de poils mais, quand ils voient une jeune fille vierge, ils se souviennent qu'ils ont été des hommes, ils cherchent à l'enlever, mais les femelles, qui sont leurs épouses légitimes et bien entendu jalouses, les empêchent violemment.
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