AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Shirley Jackson (336)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Nous avons toujours vécu au château

Un peu à l'écart du village, il y avait un château. Dans ce château, vivaient deux soeurs, avec leur vieil oncle. Les gens du village détestaient les gens du château. Les gens du château détestaient les gens du village. Une fois par semaine, Marie-Katerine, la plus jeune des soeurs, descendait au village pour faire les courses (et aller à la bibliothèque !). Dès le début du récit, quelque chose d'étrange, de bizarre, plane dans l'atmosphère... Et les réflexions étonnantes et décalées de Marie-Katerine font se questionner le lecteur sur son âge, et/ou l'équilibre de sa santé mentale...

Raconté exclusivement (et d'une manière étrange et poétique) par Marie-Katerine ("cette petite folle de Merricat", comme l'appelle sa soeur Constance), ce récit insolite aux allures de conte ne dévoilera ses parts de mystère que lentement, et presque incidemment. La tension dramatique est constante et tient le lecteur en haleine de bout en bout. Le duo solidaire des deux soeurs fonctionne à merveille, et, oscillant entre chaleur domestique et danger intangible, amour sororal et folie, l'atmosphère gothique, mystérieuse et délétère qui plane sur la demeure est pénétrante.

Une lecture qui vous ravit et vous hante !

Commenter  J’apprécie          60
Nous avons toujours vécu au château

De quoi ça parle ?



Mary Katherine Blackwood – Merricat pour les intimes – aime sa sœur Constance, son chat et certaines plantes empoisonnées. Elle déteste se laver, les cris et le bruit en général, ainsi que les intrus qui menacent de briser l’harmonie régnant entre sa sœur et elle. Elle rêve d’habiter sur la lune ou de se transformer en loup-garou.



Toute sa famille est morte empoisonnée alors qu’elle n’était qu’une petite fille, et les deux sœurs vivent désormais cloîtrées dans la maison Blackwood – la plus grande et la plus belle du village –, complètement ostracisées. Seul leur oncle Julian demeure, trop vieux pour être autonome.



Constance a beau avoir été disculpée des meurtres de sa famille, des années plus tôt, le monde extérieur refuse de les laisser en paix. Et quand le cousin Charles s’immisce dans la maison, cherchant sécurité et confort financier, Merricat sent que sa bulle de vie est menacée. Que ne ferait-elle pas pour Constance ? Mais surtout, que ne ferait pas une sœur pour sa cadette chérie ?



Mon avis :



Voici voici… mon premier vrai coup de cœur en littérature d’horreur (et ça rime en plus) ! J’ai été éblouie par ma découverte de l’œuvre de Shirley Jackson, autrice que je ne suis pas prête de lâcher… Preuve irréfutable : à la dernière page j’ai souhaité ardemment pouvoir en tourner 100 de plus. Mais soyons méthodiques.



Les personnages sont frappants de singularité. Et, comme dans les textes suivants que j’ai lus de cette plume, on remarque que nul n’est sympathique, ou même admirable, bien au contraire. Toutefois, tout est recouvert d’un glaçage de normalité et les vices ne se dévoilent qu’à mots couverts. À côté de cela, la personnalité de Merricat est si loufoque et incongrue que tout revêt l’aspect d’un rêve ; impression d’autant plus renforcée que la jeune femme est la narratrice, et que l’on s’interroge constamment sur la vérité et l’objectivité des faits rapportés.



Ceci m’amène tout naturellement à évoquer l’atmosphère du roman : une atmosphère en or ! Même si elle est rendue inquiétante par une protagoniste principale pour le moins étrange, le lecteur est néanmoins incapable de déceler exactement ce qui cloche. Tout passe par des courants souterrains : les émotions, les névroses, les menaces. Nous avançons ainsi à tâtons et devons nous laisser guider par nos intuitions. Par ailleurs, Merricat n’étant pas le seul personnage décalé, chacun contribue, à sa façon, à nourrir l’ambiance anxiogène qui pèse sur le récit. Cela s’exprime au travers de pensées aussi simples qu’incongrues – susceptibles de jaillir dans le cerveau de tout un chacun, mais normalement passées sous silence. Ici, au contraire, elles sont étendues, agrandies et développées jusqu’à envahir tout l’espace.



Enfin, pour parfaire ce brillant récit, vient s’ajouter un dénouement grandiose qui prend le lecteur à contre-pied. C’est une résolution que je dirais « en entonnoir », c’est-à-dire que, loin de proposer un final abrupt et définitif, le récit s’éteint sans ultime grand éclat, en douceur.



En conclusion, voilà un ouvrage que je ne suis pas prête d’oublier, et qui m’a démontré que la sous-branche de « l’horreur existentielle » est vraiment celle que je préfère dans le genre de l’horreur.



https://lirelandoulerevedunemontmartroise.wordpress.com/2022/06/19/nous-avons-toujours-vecu-au-chateau-de-shirley-jackson%ef%bf%bc/
Lien : https://lirelandoulerevedune..
Commenter  J’apprécie          60
Hantise (La maison hantée)

Autrice dans ma liste de défi littéraire, je me souviens très, très, très bien de la lecture de La Maison hantée, mais n’avais pas mémorisé le nom de l’autrice. La Maison hantée est un roman d’épouvante magistrale ! Il a d’ailleurs très bien été adapté en série par Netflix : The Haunting of Hill House

Construite par un riche industriel du XIXe siècle, Hill House est à l’image de son créateur : labyrinthique, monstrueuse, ténébreuse à souhait. De plus, on la dit hantée. Fasciné par les phénomènes paranormaux, le docteur Montagu loue Hill House pour un été et y invite plusieurs personnes qu’il a choisies en raison de leurs expériences avec les événements paranormaux.

Il espère ainsi trouver des preuves scientifiques de l’existence du surnaturel. Deux convives acceptent : Eleanor Vance, une jeune femme timide qui vit en recluse pour s’occuper de sa mère handicapée et Theodora, une artiste au tempérament bohème et flamboyant. Eleanor et Theodora sont accueillies par Montague et Luke Sanderson, le jeune héritier de Hill House. C’est sous le passé morbide de la maison, plusieurs suicides ou autres morts violentes, que les quatre résidents commencent à vivre des événements étranges…

Il y a cinq personnages dans ce roman, ce dernier étant la Maison ! Parfaitement personnifiée, la bâtisse fait partie intégrante du récit et des descriptions minutieuses aux ambiances plantées par Shirley Jakson, tout devient anxiogène, oppressant voir même paranoïaque ! Le génie de l’autrice est de ne jamais, ô grand jamais dévoiler le Boss final de cette demeure. Elle laisse votre imagination s’emballer, la pousse dans ses retranchements les plus sombres et amène subtilement le tout dans une explosion terrorisante! Shirley Jackson est considérée, à juste titre, comme une figure phare du roman noir gothique. Bifrost lui consacrait un numéro entier et Stephen King dit de la maison hantée qu’il est un des meilleurs romans du XXe siècle. Et, on ne contredit pas le King…
Commenter  J’apprécie          65
Hantise (La maison hantée)

Quel malentendu que ce roman ! Si la comm' (quelque peu malhonnête) de l'éditeur le vend comme un roman d'horreur, il n'en est rien, puisque si, certes, il y a du fantastique (quoique ?), c'est surtout la violence psychologique entre les personnages plus exécrables les uns que les autres, qui fait la force terrifiante de ce roman. Pas de fantômes – ou très peu -, mais une horreur humaine, ordinaire, dérangeante, et un drame psychologique génial.
Lien : https://lemondedurevelecteur..
Commenter  J’apprécie          60
Hantise (La maison hantée)

Popularisé par la célèbre série Netflix, le roman est pourtant très différent.

Un scientifique passionné par le paranormal cherche à être reconnu pour son travail. Il investit Hill House avec 2 assistantes recrutées au pied levé et un homme représentant la famille propriétaire de la maison.

Hill House est un roman fantastique, d'horreur mais c'est surtout un livre d'ambiance. Shirley Jackson est très forte pour installer et maintenir une ambiance pesante et inquiétante tout au long du roman.

C'est aussi une sorte de roman psychologique où la maison est personnifié et s'insinue dans la tête des personnages jusqu'à les couper de la réalité.

Pour moi ça a été une excellente lecture.
Commenter  J’apprécie          60
Nous avons toujours vécu au château

Ils ne sont plus que trois, depuis que six ans auparavant, les autres Blackwood ont succombé à l'arsenic ajouté au sucre saupoudrant les mûres de leur dîner. Oncle Julian, moins gourmand que son frère, sa belle-sœur, sa femme et son neveu, en a tout de même consommé suffisamment pour rester handicapé. L'esprit de ce vieillard à la santé fragile obsédé par la transcription des souvenirs qu'il a gardé de la soirée décisive fout le camp, comme en témoignent ses marmonnements égarés. Depuis la mort de la majeure partie de la maisonnée, ses deux nièces et lui vivent quasiment reclus dans la vaste et antique demeure familiale, entourée d'un domaine où prolifère une nature luxuriante. Le soir du drame, Mary-Katherine, la plus jeune -surnommée Merricat- était consignée dans sa chambre. Quant à Constance -Connie-, l'aînée des enfants Blackwood, elle n'aime pas le sucre, ce qui lui a valu d'être accusée de l'empoisonnement de ses parents, de ses oncle et tante et de son petit frère, avant d'être acquittée.



C'est la voix de Mary-Katherine qui nous introduit dans leur quotidien comme figé dans une intemporalité post-traumatique, rigoureusement organisé autour des repas que prépare Connie, des soins prodigués à Julian, et de la méticulosité apportée à l'entretien de leur vaste demeure. Deux fois par semaine, la jeune fille affronte l'hostilité des habitants du village voisin où elle se rend pour faire quelques courses et emprunter des livres à la bibliothèque. Les Blackwood étaient déjà haïs pour leur aristocratique mépris et leur condition "supérieure", mais depuis la tragédie, ses membres survivants sont considérés comme des monstres.



La narratrice instille au récit un ton singulier et fantasque, le ponctuant de l'évocation des rituels conjuratoires qu'elle met en oeuvre pour se protéger d'un monde extérieur qui la terrorise. Sempiternellement accompagnée de son chat Jonas, elle enterre divers objets dans le jardin, en cloue d'autres sur le tronc des arbres du domaine, s'interdit certaines tâches ménagères, s'imagine bientôt partir vivre sur la lune... La routine qu'elle décrit, les relations qu'elle entretient avec sa sœur et son oncle, semblent jouées, orchestrées par des gestes et des paroles répétitifs, manquant de naturel, comme guidés par l'absolue nécessité d'instaurer une normalité à laquelle se raccrocher, mimant le bonheur. Ainsi, les filles Blackood rabâchent à l'envi -et de manière suspecte- qu'elles s'aiment, et qu'elles sont heureuses.



Mais depuis quelques jours, un sombre pressentissent s'est emparé de Mary-Katherine ; divers signes lui font soupçonner la survenance d'un changement prochain, qui va venir bousculer la quiétude de son univers... A travers le prisme de son regard acéré et véhément, dont les analyses sont sujettes à caution, les événements se parent d'une dimension inquiétante et presque surnaturelle. Il ne faut par conséquent pas compter sur Merricat pour nous livrer les secrets des Blackwood.



Shirley Jackson nous livre là un récit très habile, lourd d'une sourde tension et d'un mystère lugubre, qui s'achemine vers l'acmé d'une violence qui laisse le lecteur abasourdi.



Je recommande chaudement !
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
Commenter  J’apprécie          60
La loterie et autres contes noirs

Comme j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire, je suis souvent déçue par les recueils de nouvelles. Mais, comme vous le constatez, je m'obstine et là, j'avoue que j'ai bien fait.



"La Loterie", la nouvelle qui donne sont nom au titre de ce recueil est effectivement assez marquante, même si - à mon goût - d'autres sont encore plus succulentes. Certes, "La Loterie" a été à l'origine d'une énorme controverse aux Etats-Unis, mais d'autres sont toutes aussi marquantes tant elles insistent sur le clivage gens de la ville/ et ceux de la campagne jusqu'à ce que le pire advienne...



Le style de Shirley Jackson est terriblement efficace car très bien construit. En effet, l'histoire commence presque toujours de façon anodine. Puis, la tension monte, doucement, et d'infimes indices commencent à nous inquiéter pour nous mener à une chute où le pire est toujours suggéré, non-dit mais glaçant.

Pour Shirley Jackson, pas besoin de convoquer le surnaturel (sauf pour la nouvelle intitulée "A la maison") pour terroriser le lecteur, non...car pour elle le "Mal" se cache dans l'"Autre", ou est tapie au fond de nous-même.



A découvrir sans attendre tant ce recueil est jubilatoire de noirceur!
Commenter  J’apprécie          60
Nous avons toujours vécu au château

Ah… Nous avons toujours vécu au château… Je ressens toujours une certaine nostalgie quand je repense à ce livre qui m’a fait l’effet d’une friandise délicieuse et interdite : une véritable petite pépite, comme un repas gastronomique saupoudré d’arsenic. Yummy !



L’histoire nous est racontée par la jeune Mary Katherine Blackwood, surnommée Merrycat, qui oscille avec une apparente décontraction entre innocence et machiavélisme. Il faut dire qu’elle n’a pas une vie facile. Toute sa famille est morte empoisonnée à l’arsenic lors d’un diner de famille. Toute ? Non! Les survivants sont Marrycat (punie dans sa chambre ce soir là) et sa grande soeur Constance – considérée comme officiellement coupable – qui n’avait pas touché au dessert. L’oncle Julian aussi a survécu mais souffre de nombreuses séquelles. Les derniers survivants Blackwood vivent donc dans ce château tombant à l’abandon, dans une routine presque immuable, sous les regards suspicieux des habitants du village. Après tout, qui sait ce qu’il s’est réellement passé ce jour là?



Constance n’en parle jamais. L’oncle Julian tout le temps, qui voit dans cette tragédie familiale un réel moyen d’écrire un roman à succès et d’intéresser le voisinage.



L’histoire est piquante, cynique et merveilleusement dark. Mais au-delà des personnages qui m’ont tellement fait rire (cela nécessite d’avoir un peu d’humour noir), c’est surtout la personnalité totalement décalée (complètement flippante en fait) de Merrycat que j’ai adorée. On comprends très vite, ce n’est pas un spoiler, que c’est elle qui a tué sa famille. Délibérément. Reste la question du pourquoi. Petit à petit, le piège se referme, on prends conscience de l’étendue de sa folie et le talent de Shirley Jackson prends alors tout son sens !



En conclusion: Un huis-clos qui devient presque oppressant lorsque l’on réalise que la légèreté de la narratrice n’a d’égale que sa folie. On arrive presque à adhérer à son discours et ses lubies. Presque. Un roman terriblement parfait.
Lien : https://lepetitcrayonblog.wo..
Commenter  J’apprécie          60
Hantise (La maison hantée)

Voici une lecture qui ne restera pas dans les mémoires. J ai du mal à analyser et à comprendre ma lecture.

Déjà je me demande si j ai bien lu l’intégralité du livre tant il semble décousu. On passe du coq à l âne et c est très difficile de suivre les pensées de l’une et les évolutions de l’histoire.

Ensuite, et j en suis désolée, mais expliquez Moi où est le côté terreur, angoisse.... tout ça pour ça. A mon désespoir je n ai pas ressenti le moindre petit frisson dans cette maison hantée. Hantée par qui? Par quoi? Je me suis surtout perdue dans la tête d Eléonore et je me suis aussi demandée quelles substances avaient été consommées au moment de l'écriture. C'est très décousu, biscornu et je dois dire qu arrivée à la fin de ma lecture, je n ai pas le moindre élément de réponses à mes nombreuses questions.

Je veux bien accepter le fait que ce livre ait pu être une réussite dans son domaine à son époque, d ailleurs le film hantise m avait lui fait bien peur au moment de sa sortie mais là dans l état actuel des choses, je l ai trouvé fade.
Commenter  J’apprécie          60
Hantise (La maison hantée)

Parution aux éditions Le Masque 1979



Parution aux éditions Pocket le 12 mars 1993



Parution aux éditions Pocket le 14 octobre 1999, sous le titre « Hantise »



Parution aux éditions Rivages le 9 novembre 2016



Traduit par Fabienne Duvigneau, Dominique Mols



Construite par un riche industriel au XIXe siècle, Hill House est une monstruosité architecturale, labyrinthique et ténébreuse, qui n’est plus habitée par ses propriétaires. On la dit hantée. Fascine par les phénomènes paranormaux, le docteur Montague veut mener une enquête et sélectionne des sujets susceptibles de réagir au surnaturel. C’est ainsi qu’Eleanor arrive à Hill House avec ses compagnons. L’expérience peut commencer. Mais derrière les murs biscornus, les fantômes de la maison veillent et les cauchemars se profilent…



(Source : Rivages – Pages : 272 – ISBN : 9782743637989 – Prix : 8,20 €)

L’AVIS DE CATHIE L.



shirley jacksonShirley Jackson est née le 14 décembre 1916 à San Francisco en Californie et est morte le 8 août 1965 à North Bennington dans l’état du Vermont. Spécialiste du récit fantastique et d’horreur, son livre Maison hantée est considéré par Stephen King comme l’un des meilleurs romans fantastiques du 20 ème siècle.



Elle obtient son diplôme à l’université de Syracuse, située dans l’état de New-York, en 1940. La même année, elle épouse l’écrivain Stanley Edgar Hyman. En 1948, paraît son premier roman d’horreur The Road throught the Wall ; il sera suivi d’une série de nouvelles publiées dans un recueil intitulé La loterie et autres histoires dans lesquelles apparaissent les qualités qui feront la célébrité de Shirley Jackson : mise en situation ancrée dans un quotidien banal, presque routinier; des personnages au passé trouble et à la personnalité cachant un côté sombre ; une capacité machiavélique à entretenir le doute du lecteur concernant des événements surnaturels s’imposant peu à peu dans le quotidien. Shirley Jackson est devenue célèbre avec la publication de son roman gothique moderne Nous avons toujours vécu au château.

Le roman



La Maison hantée, The Haunting Hill en version originale publiée en 1959, a été publié une première fois en 1979 par la Librairie des Champs-Elysées, dans la collection « Le masque fantastique » ; puis en 1993 par les éditions Presses-pocket et en 1999 sous le titre Hantise par le même éditeur. Le roman connut une nouvelle traduction en 2016 par les éditions Payot et Rivages sous le titre La maison hantée.



La Maison hantée, roman très original sur le thème de l’analyse scientifique des phénomènes paranormaux, est écrit à la troisième personne, du point de vue d’Eleanor, alors qu’il serait logique que l’histoire soit racontée selon le point de vue du docteur Montague, instigateur de l’expérience. Est-ce à dire qu’Eleanor serait le personnage-clé, le catalyseur en quelque sorte des énergies qui circulent dans la maison ??



La Maison hantée est un roman à la construction complexe, utilisant parfois le ton plus léger et la symbolique du conte de fées, notamment dans le passage où Eleanor, en route pour Hill House, imagine qu’elle « se rangerait sur le bas-côté, bien qu’en réalité se soit interdit et qu’elle risque une amende, puis s’aventurerait à pied derrière le rideau des arbres et s’enfoncerait dans la campagne verdoyante. Elle marcherait peut-être jusqu’à l’épuisement, en chassant les papillons ou en suivant le ruisseau, et enfin, à la tombée du jour, elle parviendrait à la cabane d’un pauvre bûcheron qui lui offrirait l’hospitalité. » (Page 23) => Allusion à peine voilée au conte « Boucle d’or et les trois ours » ou « Le petit chaperon rouge ». Ou par exemple dans la scène où Eleanor se trouve devant le portail d’entrée de la maison fermé par une lourde chaîne, attendant que le gardien veuille bien la laisser entrer (symbolique du personnage qui veut entrer dans un endroit fermé, presque interdit, souvent repris dans les contes et récits mythologiques comme faisant partie d’un parcours initiatique, d’une épreuve à laquelle le personnage doit se soumettre s’il veut continuer sa quête : la porte des Enfers, Alice au Pays des Merveilles, etc…) :



« Elle savait, bien sûr, qu’il prenait plaisir à abuser de son autorité, comme si, en déverrouillant le portail, il perdrait la supériorité provisoire dont il se croyait investi. Et moi ? pensa-t-elle, ai-je un quelconque pouvoir sur lui. C’est moi qui suis DEHORS, après tout. » (Page 35).

L’intrigue



Le docteur Montague, anthropologue spécialisé dans les manifestations surnaturelles, loue Hill House, afin d’étudier scientifiquement sa réputation de maison hantée, « observer et vérifier les rumeurs peu engageantes qui entouraient cet endroit depuis 80 ans ». Pour mener sa mission à bien, il engage trois assistants: Eleanor Vance, Theodora et Luke Sanderson, le propre neveu de l’actuelle propriétaire du château.



Le premier soir, après le dîner, le docteur Montague raconte l’histoire de la maison : Hugues Crain, son bâtisseur, y ayant perdu ses trois épouses successives, décide de fermer la maison, la léguant à sa fille aînée qui elle-même la léguera à sa servante, une jeune fille du village. Mais la fille cadette de Crain, refusant de céder ce qu’elle considérait comme son patrimoine, intenta un procès qu’elle perdit. Bien loin de renoncer, et soutenue par les gens du village, elle mena une habile campagne de haine contre la propriétaire légitime la conduisant au suicide. Après la mort de la jeune fille, la maison revint à ses cousins, les Sanderson, parents de l’actuelle propriétaire qui n’a jamais vécu dans la maison à la réputation sulfureuse, laquelle accepta de la louer au docteur Montague pour mener ses expériences.



Les trois assistants, décidés à ne pas se laisser influencer par ce récit troublant, continuèrent à vaquer à leurs occupations en conservant leur sang-froid autant que possible, vues les circonstances. Pourtant, peu à peu, leurs nerfs sont mis à rude épreuve et le doute s’installe dans leurs esprits. Les bruits étranges et les sensations de froid intense sont-ils réels ou le fruit de leur imagination ? Haunting Hill est-elle réellement hantée. L’arrivée de madame Montague, medium réputée et collaboratrice de son mari, et de l’ami du couple Alfred, censée analyser les phénomènes, bien loin d’apaiser les tensions, amplifie les phénomènes étranges qui semblent tous dirigés vers la jeune Eleanor. Hill House est-elle vraiment hantée ou tous les étranges événements qui se manifestent sont-ils issus de l’imagination de la jeune femme ?

Les personnages



John Montague : anthropologue spécialisé dans l’étude scientifique des manifestations surnaturelles.

Eleanor Vance : 32 ans, jeune femme timide, craintive; infirmière autodidacte, s’est occupée pendant onze ans de sa mère invalide, qui vient de décéder, la laissant seule avec pour toute famille une sœur mariée et mère d’une fille de cinq ans ; en raison de son existence entièrement dévouée à sa mère, n’a pas d’amis ni de vie sociale; se trouvait sur la liste du docteur Montague comme assistante potentielle car, à l’âge de douze ans, alors que son père était mort le mois précédent, une pluie de pierres s’était abattue sur leur maison, brisant les fenêtres et tambourinant follement sur le toit. Le phénomène avait duré trois jours par intermittence obligeant Eleanor et sa sœur à se réfugier chez des voisins ; après leur départ, le phénomène avait cessé et n’avait plus jamais recommencé. Pour la première fois de sa vie, voyage seule pour un long trajet: voyage initiatique ?? Assurément un personnage à part, qui ne ressent pas les choses comme les autres.

Theodora : femme décidée, sûre d’elle, entreprenante et courageuse, l’exact contraire d’Eleanor ; son univers se compose de plaisirs et de couleurs douces. Elle partage son appartement avec une amie. Elle se trouve sur la liste du docteur Montague parce qu’elle a réussi, au cours d’une expérience, à deviner 18 cartes sur les 20 qui lui furent présentées.

Luke Sanderson : neveu de la propriétaire de Hill House; menteur, voleur ; on ne sait pas précisément pour quelle raison il participe à l’expérience du docteur Montague sinon qu’il appartient à la famille de la propriétaire.

Monsieur Dudley: gardien de Hill House, personnage très rébarbatif avec un visage aux trait tordus.

Madame Dudley : femme du gardien, aussi revêche que son mari ; figure maussade et méchante, elle est le reflet de la méchanceté qui se lit sur les traits du concierge.

Madame Montague : épouse du docteur Montague; aucune description ; on sait seulement qu’elle est medium et qu’elle l’assiste parfois dans ses expériences.

Arthur Parker : professeur, ami du couple ; aide madame Montague dans ses propres expériences de medium.



Les lieux



Les premières pages du roman décrivant le voyage qu’entreprend Eleanor afin de rejoindre l’équipe du docteur Montague paraissent tout à fait anodines, comme racontant une histoire ordinaire. Tout semble d’une déconcertante banalité jusqu’au moment où la jeune femme arrive dans le village d’Hillsdale, dernière étape avant Hill House.



Malgré les recommandations du docteur Montague de ne pas s’y arrêter, Eleanor, qui a envie d’une pause après son long voyage et qui veut se démontrer qu’elle est capable à présent de se comporter en personne autonome, décide de faire une petite halte pour prendre un café. « Le village, petit et informe, entassait ses maisons sales autour de rues tortueuses. On apercevait le croisement à l’autre bout de la rue principale, avec la station-service et l’église. Il n’y avait qu’un seul endroit où boire un café, et c’était un établissement fort peu attrayant. » (Page 29) => Le décor jusque-là plaisant et agréable, devient pesant, comme si une menace impalpable sourdait des murs du village, impression renforcée par l’attitude étrange de la serveuse et de l’homme installé au bar qui adresse à Eleanor un avertissement à peine déguisé :



« Ici, les gens partent. Ce n’est pas un endroit où on vient. » (Page 32).



Cette impression se précise lorsque Eleanor se retrouve face à la maison. De son architecture particulière émane un fort sentiment d’étrangeté, comme si l’ensemble des pierres, des tourelles, des fenêtres qui la composent était capable de s’animer et de manifester déplaisir et contrariété. Cette sensation émane-t-elle de sa décoration très victorienne :



« Quelle curieuse architecture, se dit-elle. A l’époque, on construisait partout es tours et des tourelles, des contreforts garnis de bois finement sculpté, parfois même des flèches et des gargouilles. Jamais rien qui demeurât sans ornement. » (Page 39)…



Ou de sa conception défiant les lois de l’architecture :



« Aucun œil humain n’est capable d’isoler l’élément précis qui, dans la composition malheureuse des lignes et des espaces, donne une allure diabolique à une maison. Il y avait là cependant un je-ne-sais-quoi -une juxtaposition insensée, un angle mal conçu, une rencontre hasardeuse entre ciel et toiture- par lequel Hill House respirait le désespoir. Vision d’autant plus terrible que la façade semblait en éveil, avec ses fenêtres sombres évoquant les yeux d’un vigile, surmontés de temps à autre par le sourcil inquiétant d’une corniche. » (Page 41).



Quelques pages plus loin, lorsque Eleanor pénètre dans sa chambre, on s’attende légitimement à trouver un décor aussi sombre et terrifiant que la façade. Mais il n’en est rien; certes, l’aménagement de la chambre est un peu vieillot, mais tout à fait anodin : « Les deux fenêtres, qui donnaient sur le toit de la galerie et la pelouse, étaient pourvues de rideaux de damas bleu. Sur le lit, un édredon bleu et un couvre-pied bleu. Aux murs, au-dessus des lambris sombres qui s’élevaient à hauteur d’épaules, un papier peint bleu, orné de minuscules fleurs bleues délicatement assemblées en couronnes et en guirlandes. » (Page 47) => C’est ce savant mélange de banalité et d’étrangeté qui confère au roman son côté déroutant, qui instille le doute dans l’esprit du lecteur : cette maison est-elle vraiment hantée ? N’est-ce pas moi qui m’imagine des choses qui n’existent pas, qui me laisse influencer car finalement rien ne justifie ce trouble, ce malaise que je ressens de manière diffuse.

L’ambiance



Tout le génie de l’auteur consiste à instiller malaise et doute aux moments les plus anodins, quand on ne s’y attend pas, par exemple quand le docteur Montague et ses assistants prennent un verre dans le salon et devisent tranquillement : « Elle (Eleanor) sentait le mince pied de son verre entre ses doigts, le dossier du fauteuil trop droit contre son dos, et elle avait conscience de légers souffles d’air dans la pièce, que l’on ne percevait qu’à d’infimes frémissements de glands ou de perles. » (Page 77) Ces souffles d’air sont-ils dus à des courants d’air tout à fait légitimes dans une vieille demeure ou sont-ils le fait de manifestations surnaturelles ?



Sans cesse, les personnages, tout comme le lecteur, oscillent entre une sourde angoisse qui liquéfie leurs entrailles et leur esprit rationnel qui reprend le dessus: « La maison! elle surveille vos moindres gestes! Puis il se reprit: Mais, bien sûr, je me laisse emporter par mon imagination. » (Page 95).

Mon avis



Voilà un roman fantastique qui ravira les plus exigeants, car les nombreuses années qui sont passées depuis sa première publication ne lui ont pas fait prendre une seule ride. Shirley Jackson maîtrise à coup sûr son sujet : nul besoin d’effets spéciaux spectaculaires pour susciter une sensation de malaise et de doute dans l’esprit du lecteur. Pourtant, La Maison hantée utilise tous les éléments classiques du genre : le voyage initiatique ; les avertissements des villageois ; le gardien patibulaire ; la gouvernante glaciale ; la grande maison à l’architecture peu banale ; les sombres sous-bois. Mais un récit qui pourrait se contenter d’être banal devient, grâce à la plume talentueuse de l’auteur, une histoire fort dérangeante dont la lecture ne laisse pas indemne.



La frontière entre rationalité et surnaturel s’avère ici bien floue. Qui un jour n’a pas cru apercevoir une ombre blafarde flotter au fond d’un couloir obscur ? Qui n’a jamais confondu les mugissements du vent dans les arbres un soir de tempête avec des gémissements humains venus d’on ne sait où ? Et qui n’a jamais sursauté dans son fauteuil en entendant le parquet grincer alors qu’il se croyait seul ? Car tout est là !!! Jouer avec les nerfs sensibles du lecteur et l’amener à se demander si La Maison hantée l’est vraiment….
Lien : https://polar.zonelivre.fr/s..
Commenter  J’apprécie          60
Hantise (La maison hantée)

Quel livre étrange, vraiment étrange, étrange au point qu'il peut en insupporter plus d'un et leur donner envie de refermer l'ouvrage.

Mais il vaut bien la peine d'être lu.



Jackson était une conteuse magistrale, utilisant une approche minimaliste et une narration laconique, presque journalistique. Elle crée dans les pages de Hantise une atmosphère et un sentiment d’attente et de mystère qui saisissent le lecteur lentement et complètement et durent jusqu’à la fin.



Et contrairement aux autres histoires de fantômes qui se débattent contre une fin, le conte hanté de Jackson se termine brillamment avec le même mystère et la même tension psychologique que le déroulé retenu tout au long du récit. Elle laisse le lecteur sans fausse conclusion.



Une très bonne histoire racontée par un très bon écrivain.
Commenter  J’apprécie          60
Hantise (La maison hantée)

Passer après Rebecca était forcément une pente savonneuse. Maison hantée n’a pas été à la hauteur ; peut-être est-ce moi qui ne goûte plus ce genre de lecture mais je n’ai pas du tout accroché, sans être toutefois capable de mettre des mots sur ce qui m’a déplu.



Je n’ai pas réussi à m’attacher aux personnages, qui m’ont semblé superficiels et pas vraiment dotés de caractères intéressants.



Le récit en soi ne m’a pas passionnée non plus, les phénomènes ayant lieu dans Hill House ne m’ont pas du tout fait frémir d’angoisse.
Commenter  J’apprécie          63
Hantise (La maison hantée)

Quel plaisir de me replonger dans la collection "Pocket Terreur" que j'affectionnais tant plus jeune ! Il se dégage de ce roman une atmosphère oppressante à souhait, même si rien n'y est véritablement effrayant.

Le malaise saisit à partir du moment où Eléonore atteint l'énorme et menaçante grille de Hill House, et ne nous quitte plus par la suite. Littéralement personnifiée, la maison dégage une impression maléfique presque physique sans que l'on soit capable de définir précisément la provenance de ce sentiment: "Qui a-t-il ici ? Qu'est-ce qui fait tellement peur aux gens ?". Certes il y a ces portes qui se ferment toutes seules, certainement à cause des "distorsions majeures de la maison" défiant les lois de l'architecture. Il y a ces courants d'air d'un froid intense, à l'entrée de la nursery et dans la tour menant à la bibliothèque - où Eléonore est incapable de pénétrer. Mais les authentiques manifestations surnaturelles sont longues à venir ("Tout semble dans l'expectative") et un peu décevantes. Malgré tout l'ambiance est prenante : pas de fantômes dans ce lieu soi-disant hanté, "en fait le mal est dans la maison elle-même", c'est elle qui "prend de l'emprise sur vous".



Si Hill House ne se manifeste pas tout de suite, c'est qu'elle "attend que nous nous sentions en sécurité". L'héroïne y est d'ailleurs plutôt à l'aise. Elle a consacré les onze dernières années à soigner sa mère malade (et désormais décédée) et elle rêve de pouvoir enfin s'occuper d'elle-même, trouver une maison, se faire plaisir. Ce séjour comble le besoin de mettre un peu d'animation dans sa vie, voire de se libérer (notamment de l'emprise de sa sœur) en prenant ses propres décisions. Elle trouve en la personne de Théodora - son exact opposé question personnalité - une amie à la fois complice et stimulante. Théodora n'a pas peur de dire ce qu'elle pense ("elle est rosse", même, parfois) et c'est une femme indépendante. Sorte d'alter ego en négatif, elle contrebalance le caractère trop idéaliste d'Eléonore qui a tendance à "se nourrir d'espoir". Toutes deux entretiennent une relation étrange, d'une part parce qu'elles passent d'un extrême à l'autre, tour à tour proches puis agressives. D'autre part parce que dans leurs échanges, pensées et paroles se mêlent comme si elles étaient télépathes. Cette confusion contribue largement à entretenir le trouble généré par l'atmosphère du roman.



J'ai cru un moment que le projet du Dr Montague était une vaste mise en scène, à cause de certains personnages comme Mme Dudley, la cuisinière qui répète les mêmes phrases en boucle (ce qui est à la fois drôle et stressant), et l'horripilante (et ridicule) Mme Montague qui débarque en fin de semaine avec sa "planchette" (de oui-ja) et son ami asservi, Arthur. Mais non, si nous sommes bel et bien hors du monde et hors du temps, l'emprise des lieux est réelle. Fascinée par les histoires sur le passé de Hill House, dotée d'un caractère impressionnable du fait de son propre vécu, Eléonore est une proie idéale pour cette maison qui veut prendre possession d'elle. Le personnage évolue considérablement au fil des chapitres, on sent qu'elle essaie de garder le contrôle ("cela me dégoûte mais cela ne m'effraie pas") mais cela ne l'empêchera pas de sombrer dans la folie : "La peur est l'abandon de la logique, la renonciation volontaire aux schémas de pensée raisonnable"... Au bout du compte Hill House aura fini, imperceptiblement, chapitre après chapitre, par nous capter comme elle "a enchaîné ses occupants" !
Lien : https://www.takalirsa.fr/la-..
Commenter  J’apprécie          60
Hantise (La maison hantée)

Après Nous avons toujours vécu au château, paru en 2012, les éditions Rivages continuent avec La maison hantée la réédition des chefs-d’œuvre horrifiques de Shirley Jackson. Et le moins que l’on puisse dire est que cela vaut le coup, au moins pour ceux qui comme moi, sont complètement passés à côté des éditions précédentes.

La maison du titre, c’est Hill House, impressionnant demeure bâtie par un riche industriel au XIXè siècle et que personne, depuis la mort des héritières du premier propriétaire, ne semble pouvoir habiter. Une maison tellement effrayante que les habitants du village le plus proche ont renoncé à s’aventurer à ne serait-ce que quelques kilomètres de cette espèce de manoir biscornu. C’est là que le docteur Montague, universitaire travaillant sur les phénomènes paranormaux, a décidé de convier pour les besoins d’une enquête des personnes qu’il juge particulièrement réceptives aux phénomènes surnaturels. Il y a Luke, héritier de la famille actuellement propriétaire de la maison, la fantasque Theodora et surtout la réservée Eleanor.

Enfermés dans la propriété, nos quatre protagonistes vont donc se confronter à Hill House et à ce qui semble l’habiter. Des portes qui se ferment toutes seules, des particularités architecturales qui mettent les sens à l’épreuve, des bruits, des courants d’air froid, une gouvernante inquiétante, et de façon générale l’aspect terriblement menaçant de la maison sont les ingrédients dont use Shirley Jackson. Rien de particulièrement original, a priori. Sauf que, pour lier le tout, elle jette là-dedans Eleanor. Eleanor et ses angoisses. Eleanor et sa difficulté à s’insérer dans un groupe. Eleanor et son besoin d’être aimée. Eleanor et sa fascination ambigüe à l’égard de Theodora.

C’est ainsi, par petites et subtiles touches, sans effets inutiles et par la grâce d’une écriture aussi précise que vénéneuse que Shirley Jackson instille à son roman une impressionnante sensation de malaise. De la confrontation entre les personnages, de leurs propres confrontations à la maison mais aussi de la manière dont ils finissent par se confronter à eux-mêmes naît une angoisse diffuse dans laquelle s’englue le lecteur, pris dans l’admirable toile d’araignée que tisse Shirley Jackson.

Autant dire que les amateurs d’épouvante et de tension psychologique gagneront à se pencher sur ce séduisant roman.


Lien : http://www.encoredunoir.com/..
Commenter  J’apprécie          60
La loterie

Des nouvelles inégales, dans lesquelles les figures féminines sont omniprésentes, au sein d'histoires au climat très étrange, fortement axé sur la psychologie.

Il me semble que le recueil perd de sa force par son aspect vieillot: la société décrite ici est essentiellement celle de l'Amérique des années 40 et cela me paraît se reporter sur l'écriture, créant une distance avec le lecteur.

Toutefois, les angoisses des personnages sont très bien transcrites ainsi que des atmosphères troubles et troublantes, souvent dérangeantes sans que l'on sache réellement ce qui fonctionne de travers, comment l'auteur distille ces ambiances malsaines.

Je recommanderai davantage "Maison hantée" ou "Nous avons toujours habité le château", deux romans d'une force considérable.
Commenter  J’apprécie          60
Le Cadran solaire

The Sundial

Traduction : Dominique Haas



Paru un an avant "Maison Hantée", "Le Cadran Solaire" risque de perturber le lecteur avide d'horreur pure. A moins qu'il ne songe à une histoire de hantise imaginée par Ionesco.



"Le Cadran solaire" reprend un thème cher à Jackson et qu'elle exploitera encore, par exemple, dans "Nous avons toujours habité le château", son dernier roman. Il s'agit de la famille, une famille dont les membres sont soit désagréables, soit un peu (ou complètement) excentiques, parfois les deux, et qui, par la vision paranoïaque qu'ils ont de l'extérieur, finissent par basculer dans la folie et par vivre en autarcie.



C'est ce qui va arriver peu à peu à la famille Halloran, retour des obsèques de son chef, Lionel, fils d'Orianna et de Richard. Selon son épouse, Maryjane, ce serait sa propre mère, Orianna, qui aurait poussé le malheureux dans l'escalier afin d'hériter de la maison et de la fortune. Pourtant, ainsi qu'elle le rappelle à sa petite fille, Fancy, en bonne logique, c'est à elles seules que la maison doit revenir. Et le lecteur sent d'ores et déjà que Mrs Halloran Senior se place au-dessus des lois.



Comme Hill House dans "Maison Hantée", la maison Halloran a été construite à la fin du XIXème siècle par un premier Mr Halloran, soucieux d'y amener sa jeune épouse. Et, comme dans "Maison Hantée", la jeune femme y est morte très vite. L'arrière-grand-père Halloran s'est donc remarié et, de ce second mariage, il a eu Richard, actuellement cloué dans un fauteuil roulant par la maladie.



Depuis de longues années, les Halloran vivent entre eux. Frances, la fille du premier mariage, est devenue, au fil des ans, "tante Fanny", bien qu'elle n'ait, quand début l'histoire, que quarante-huit ans. Vieille fille refoulée et un peu folle, elle redoute de devoir quitter la maison, maintenant qu'Orianna, sa belle-soeur, détient tous les pouvoirs.



Et elle n'a pas tort d'avoir peur car Mrs Halloran annonce sa décision d'habiter désormais la maison, seul à seule avec son mari.



Sous le choc, Tante Fanny se réfugie dans le vaste parc, dans le labyrinthe édifié autour du cadran solaire, et est assaillie par une vision : celle de son père défunt qui lui annonce, ni plus ni moins, que la fin du monde est proche et que seuls les Halloran seront sauvés pourvu qu'ils prennent la peine de se regrouper tous dans la maison et de s'y barricader ...



A partir de là, la folie s'installe crescendo, faisant alterner scènes de malaise (la poupée piquée d'épingles, la fuite avortée de Julia ...) et scènes satiriques (Tante Fanny rameutant des espèces de témoins de Jéhovah persuadés eux aussi de la fin de l'univers, les plaisanteries d'Essex, etc, etc ...)



Quant à la fin ... Eh ! bien, elle soulève beaucoup de questions, ce qui est souvent le cas dans les nouvelles et les romans de Jackson.



Menés tambour battant, les dialogues recèlent de véritables morceaux d'anthologie, dignes des meilleurs humoristes anglo-saxons. Moins noire - en apparence tout au moins - que celle de "Maison Hantée" ou de "La Loterie", l'intrigue évoque surtout, pour les connaisseurs, "Les Gens de l'Eté", qu'écrivit également Jackson, mais en moins glauque et en plus acerbe, en plus ironique. Un roman curieux, déroutant, qui tient plus de la pathologie mentale que de l'horreur classique et qui est superbement construit. A réserver peut-être aux inconditionnels de la romancière. ;o)
Commenter  J’apprécie          60
La loterie et autres contes noirs

C'est en lisant Anatomie du crime de Stephen King que La loterie, la première nouvelle du recueil, est abordée. Ni une ni deux, je l'ai lue dans la foulée et puis toutes les autres. Je ne les ai pas toutes aimées mais quelques- unes sont d'une efficacité redoutable ! La loterie, la possibilité du mal, Paranoïa , Quelle idée ou encore les vacanciers. Ne vous attendez pas à des gerbes de sang, de la tripe ou des cris de bête égorgée mais plutôt à une ambiance qui se refroidit lentement, à une pression presque insoutenable... Le syle de Shirley Jackson est simple mais efficace, avec un vrai goût de revenez-y. Pour ma part, je la recommande à 100%, c'est une belle découverte. Merci Master King!
Commenter  J’apprécie          50
Nous avons toujours vécu au château

Malheureusement je pense être passée complètement à côté du livre. En attendais-je trop ? C'est fort possible. Mais le style, l'intrigue, tout m'a vraiment ennuyée et j'ai eu du mal à avancer dans ma lecture. J'avais beaucoup de difficulté à trouver de l'intérêt aux personnages, à leur histoire, à l'environnement. Pourtant tout était là, sous mes yeux, prêt à s'offrir et à former un très bon livre. C'est certainement un très bon livre, mais pas pour moi.
Commenter  J’apprécie          50
Nous avons toujours vécu au château

Roman oscillant entre le roman policier et le roman gothique, Nous avons toujours vécu au château nous entraîne dans un huis clos particulier. Nous suivons ici la vie en quasi autarcie de trois personnes de la famille Blackwood, Mary Katherine, la narratrice, Constance, sa sœur aînée et Julian leur oncle. Ces trois personnages sont les survivants d'un drame arrivé six ans plus tôt, l'empoisonnement par arsenic de toute la famille. Les rapports avec les différents villageois sont durs, étant donné qu'ils sont tous convaincus de la culpabilité de Constance. Ces trois personnages vivent alors plus ou moins en harmonie à l’intérieur de leur château ainsi que dans leur domaine. Malheureusement, la venue d'un certain cousin Charles va venir ébranler l’équilibre déjà instable des personnages de ce roman.



J'ai beaucoup aimé ce roman ou se mêlait plusieurs codes de la littérature gothique et policière. Le château, les actes de protection de Mary Katherine, ses rêves farfelus et les « malédictions » qu'elle met en place, ainsi que la recherche du coupable de l'empoisonnement et les raisons de l'apparition et la venue du cousin Charles. Tout dans ce roman transpire l'horreur, que ce soit dans l'intimité du château, ou encore dans le village et dans les réflexions des villageois. À lire en une soirée, près d'un feu, c'était un très belle expérience de lecture !
Lien : https://www.instagram.com/p/..
Commenter  J’apprécie          50
Hantise (La maison hantée)

Classique du roman gothique, La maison Hantée a été une lecture assez particulière.



En effet, ayant adoré la série Netflix, The Haunting of Hill House, j’ai été assez désappointée de me rendre compte au final que la série n’avait rien à voir avec le roman.



Si la première partie est intéressante puisque nous découvrons les trois personnages qui vont résider dans la maison sous l’invitation de l’énigmatique docteur Montague, nous apprenons aussi l’histoire tourmentée de Hill House. Ce domaine lugubre, austère, à la construction biscornue et à l’atmosphère inquiétante, sera le personnage central du récit.



Cependant arrivée à la moitié j’attendais toujours impatiemment que les choses sérieuses commencent et que la maison se réveille.



À part une scène (dirais-je même : une phrase) flippante, l’ensemble est très lent, l’action quasi inexistante, de même que la tension alors quand il est noté en quatrième de couverture que ce roman est un des plus terrifiants jamais écrits, j’ai le sentiment de ne pas avoir lu le même livre 🫣.



Oui le personnage d’Eléanor nous interroge mais honnêtement plus j’avançais et moins je comprenais certains dialogues sans queue ni tête (j’ai supposé que c’était un moyen de « perdre » le lecteur dans les méandres de l’esprit d’Eléanor mais ça ne m’a pas convaincu).



Si j’ai apprécié la fin j’ai sincèrement regretté l’absence de réponses.



𝐄𝐧 𝐁𝐫𝐞𝐟 :



Un roman noir psychologique bien plus qu’une histoire de maison hantée, avec des personnages si peu creusés (en dehors d’Eléanor), une ambiance certes mystérieuse mais trop peu de surnaturels pour m’accrocher à l’histoire. 270 pages qui m’ont paru le double.
Lien : https://www.instagram.com/p/..
Commenter  J’apprécie          50




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Shirley Jackson (1694)Voir plus


{* *}