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EAN : 9782743623982
240 pages
Payot et Rivages (19/09/2012)
3.81/5   471 notes
Résumé :
"Je m'appelle Mary Katherine Blackwood. J'ai dix-huit ans, et je vis avec ma sœur, Constance. J'ai souvent pensé qu'avec un peu de chance, j'aurais pu naître loup-garou, car à ma main droite comme à la gauche, l'index est aussi long que le majeur, mais j'ai dû me contenter de ce que j'avais. Je n'aime pas me laver, je n'aime pas les chiens, et je n'aime pas le bruit. J'aime bien ma sœur Constance, et Richard Plantagenêt, et l'amanite phalloïde, le champignon qu'on a... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (125) Voir plus Ajouter une critique
3,81

sur 471 notes
Ce livre fait partie de ceux que je nommerais « d'ambiance ». J'avais cru comprendre que le roman était classé dans le fantastique et pourtant pendant une bonne partie du livre, rien d'inhabituel ne transparaît. Une famille qui semble ostracisée dans un village sans qu'on comprenne bien pourquoi… le quotidien vu par les yeux d'une jeune fille sans âge défini qui part faire les courses dans son village et semble subir les regards oppressants des autres, les moqueries ironiques… Tout le long de ce récit au premier abord anodin se distille pourtant un climat inquiétant, où tout semble bien plus compliqué qu'il n'y paraît. le château du titre est une forteresse où se réfugie une famille qu'on apprend petit à petit décimée par un drame familial. C'est la confrontation avec d'autres, des habitants amicaux en visite, un cousin qui recrée du lien qui nous fait découvrir petit à petit le passé que les principaux protagonistes cherchent à oublier.

Pendant une bonne partie du récit on cherche à se convaincre que cette atmosphère d'étrangeté n'est qu'illusion, que rien de surnaturel n'existe mais uniquement les impressions des uns et des autres. L'auteur excelle dans l'art de glisser quelques éléments incongrus au milieu d'un récit banal, comme des apparitions fugaces d'esprits frappeurs dans une maison au coeur de la nuit. On se regarde, on vérifie que l'autre lecteur a bien entendu la même chose que nous (oui ce livre permet l'échange de regards avec le reste de la communauté de lecteurs, quand je vous dis que c'est du fantastique). Et puis le texte continue, comme si de rien n'était… Mais nous ne pouvons pas faire comme si nous n'avions rien entendu… Nous sommes même tentés de venir relire, mais retenus par la peur qu'une malédiction s'abatte sur nous malgré tous les objets protecteurs enterrés autour de la maison par la jeune Mary Kate Blackwood. L'utilisation d'un jeune narrateur inquiétant n'est pas la moindre arme de cette auteure habile.

J'ai aussi apprécié les différents degrés d'analyse du récit, les conflits au sein de la famille, les conflits sociétaux entre vieille noblesse et nouveaux villageois de classe inférieure. Il y a même une partie non négligeable de polar puisqu'on cherche à démêler ce qui s'est réellement passé dans ce château un certain soir. Une enquête complexe puisque les éléments nous sont donnés au compte goutte, avec un « détective » brouillon en la personne de l'oncle Julian, dont la mémoire semble bien gravement atteinte par l'âge et les événements survenus ce fameux soir. le résultat est un court roman dérangeant, qu'on a du mal à vraiment apprécier mais sans doute était-ce le but de l'auteure, distiller le malaise, l'inconfort, jusque dans un final en suspens qui pourrait servir d'explication à l'ensemble des légendes urbaines de maisons maudites qui existent dans presque tous les villages du monde.
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Affectueusement surnommée « cette petite folle de Merricat » par son aînée Constance, la narratrice Mary Katherine a dix-huit ans, même si, à la lecture de son seul récit, alors qu'elle se complaît à se cacher dans les cabanes qu'elle construit, à enterrer des objets dans le jardin et à jouer avec son chat en rêvant de se réfugier sur la lune, là où personne ne lui imposerait de compagnie indésirable, on la prendrait volontiers pour une enfant. Avec sa soeur bientôt trentenaire et son vieil oncle impotent Julian, elle est l'un des trois derniers occupants de l'imposante maison Blackwood.


Cachée au plus profond de son vaste parc à l'abandon, en surplomb du village où Merricat est la seule à se rendre, avec la plus extrême répugnance, pour les courses hebdomadaires, la demeure semble en vérité se replier sur ses habitants, comme pour les protéger d'un monde extérieur qui ne serait que menace et hostilité. C'est d'abord au travers des sous-entendus perfides des villageois et des moqueries de leurs enfants, puis bientôt par la bouche de ce vieil original d'oncle Julian, aussi obsédé par ce qui s'est passé qu'incrédule d'y avoir survécu, que l'on réalise que les trois Blackwood se remettent à peine d'une énigmatique tragédie, qui, six ans plus tôt, a coûté la vie aux autres membres de la famille. Tous ont péri, mystérieusement empoisonnés. Tous, sauf Julian – très diminué depuis -, et les deux soeurs, dont la rumeur continue sans répit d'incriminer l'aînée.


Une impression d'étrangeté plane sur le récit mené par la déconcertante Merricat. Pour conjurer ce qu'elle perçoit de malfaisance chez les villageois qui la harcèlent, la jeune fille s'invente mille rituels protecteurs et bascule dans des images mentales emplies de haine noire lorsqu'ils sont sans effet. Chez elle, toujours flanquée de son chat, elle ne se départit de ses comportements sauvages et fantasques que pour se perdre en adoration devant la douce Constance. Les deux soeurs vivent dans un troublant état fusionnel, l'une mi-elfe mi-sorcière, l'autre véritable fée du logis permettant au trio de poursuivre son existence comme si de rien n'était, le dos tourné à la réalité. Et, pendant que dans la tête de la plus âgée, le temps semble s'être pétrifié dans une maison figée à l'heure du drame, comme si maintenir chaque objet à sa place pouvait effacer la mort de leurs propriétaires, les velléités protectrices de la cadette vont bientôt prendre une tournure inattendue lorsque surgira un cousin, visiblement tout sauf désintéressé.


Intrigué par un drame passé qu'il lui faut plus ou moins deviner au travers du seul prisme de personnages à la psyché de plus en plus manifestement dérangée, baigné dans une atmosphère d'étrangeté ambiguë laissant planer l'inquiétude, le lecteur se retrouve insensiblement entraîné dans une plongée obsédante au coeur de la névrose et de la paranoïa. Un classique adapté au cinéma à redécouvrir, pour son mystère, mais surtout pour son tableau troublant, notamment parce que vu de l'intérieur, de la maladie mentale.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Nous avons toujours vécu au château est un roman que j'ai découvert par hasard sur l'étal d'un bouquiniste. Puis plus tard il restait là durant plusieurs mois sur une de ses fameuses piles de livres. J'ai été happé dès les premières pages. Voici en effet une lecture prenante et addictive.
Nous sommes aux abords d'un village de la Nouvelle-Angleterre, aux États-Unis. Cette maison que tout le monde appelle le château est plutôt une grande demeure.
La narratrice s'appelle Mary Katherine Blackwood, sa soeur l'appelle Merricat. Elle a dix-huit ans, et désormais depuis quelques temps elle vit dans cette grande demeure avec sa soeur, Constance, plus âgée qu'elle et son oncle Julian qui commence à perdre la tête. Tous les autres membres de la famille sont décédés. On saura bientôt les circonstances dans lesquelles ils sont morts.
C'est Mary qui va faire les courses en descendant au village, les gens d'en bas ne l'aiment pas, n'aiment pas ceux qui vivent au château. Constance ne sort jamais, elle est retirée, protégée par sa soeur, son oncle, comme si elle était fragile, encore un peu fragile. Un secret étrange pèse sur cette relation familiale.
Quelque chose de mystérieux s'est passé ici il y a quelques temps. Tout semble aujourd'hui à peu près remis dans l'ordre des choses, lorsque de manière imprévue, un cousin débarque au château et alors...
Ici la tension monte graduellement, elle devient par moment étouffante. Roman rustique, au charme gothique comme je l'ai lu ici ? Oui, sans doute, roman atypique épris d'une magie profonde, qui nous amène là où on ne s'attend pas du tout. le fameux château devient peu à peu un personnage à part entière du roman.
Oui, il y a aussi une forme de suspense, puisqu'on ne sait pas comment toute cette histoire va finir.
Mais derrière l'intrigue proche de celle d'un thriller psychologique, j'y ai vu aussi une satire de l'opinion publique, de la foule qui gronde, qui bruit en silence, prête à se déchaîner avec de la violence, une violence irrationnelle, imbécile...
Ce roman insolite m'a fait voyager entre l'innocence abrupte et le mal absolu.
Shirley Jackson, l'auteure de ce roman, m'était parfaitement inconnu jusqu'à ce que je découvre qu'elle était aussi l'auteure de Hantise : La Maison hantée. Encore une histoire de maison, comme si c'était leurs fautes... Un jour, il faudra nous interroger, est-ce que nous prenons suffisamment soin des lieux qui nous habitent ?
La fin du roman m'a fait penser à un autre récit qui m'avait séduit, autre roman de la sororité, Dans la forêt.
Les mots de Shirley Jackson ressemblent à une forme d'incantation et je me suis pris à imaginer qu'ils venaient bercer plus tard encore les gestes et les songes de Mary et Constance, lorsque la foule déchaînée s'était retirée dans les chaumières alentour.
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Un petit livre pour hanter mes nuits en cet hiver qui vient de commencer. Encore un livre sur une maison hantee? Ou sur ses habitants, que hante un passe horrible? La maison Blackwood. Les riches Blackwood ont toujours regarde de haut les autres habitants de leur village, mais le livre s'ouvre quand des Blackwood il ne reste plus que deux jeunes soeurs et un vieil oncle handicape et dement. le reste de la famille est mort, tous empoisonnes a l'arsenic.


Les deux soeurs vivent enfermees a la maison. Il n'y a que la plus jeune, Merricat, qui en sorte pour faire des courses, sous les quolibets et les regards haineux de tout le village. La plus agee, Constance, qui a ete accusee de l'empoisonnement et acquittee, n'en sort jamais. Elle soigne son potager et prepare les repas. C'est la fee du logis. A elles deux elles maintiennent la maison exactement en l'etat ou elle etait avant le drame, sans rien y bouger, et Merricat s'adonne a toutes sortes de rituels magiques, senses les proteger de l'exterieur malfaisant. Mais quand arrive un cousin rapace, tout va chambouler.


C'est Merricat qui raconte, et des le debut elle transmet au lecteur la terreur qui est la sienne chaque fois qu'elle descend au village. Mais aussi ses efforts pour se proteger, elle et sa soeur, de la mechancete se ses habitants, tous traduits en des pratiques proches de la sorcellerie. Je l'ai sentie un peu derangee. Folie douce? Psychose maniaco-depressive? En tous cas elle a eveille en moi une grande pitie.
Mais assez vite j'ai fini par comprendre qu'elle n'est pas tres fiable. Il y a en elle quelque chose de pervers. Ce n'est pas une enfant, elle a 18 ans. Elle est trop sauvage pour son age et elle-meme atteste: “J'ai souvent pense qu'avec un peu de chance, j'aurais pu naitre loup-garou”. Elle vit enfermee, mais volontairement, elle n'est pas une autre Anna Frank. Serait-ce elle qui en fait enferme sa grande soeur et son vieil oncle? Et pourquoi?


C'est a l'evidence un conte de terreur. Avec une question qui plane dans la plus grande partie du livre: qui a empoisonne les parents Blackwood? Qui est responsable de leur mort? Mais d'autres questions se rajoutent, qui incitent a d'autres pistes de lecture qu'un simple suspense. Tout d'abord la mechancete de la foule qui s'acharne, en en prenant un plaisir malsain, sur des femmes sans defense. La foule qui fait la chasse aux sorcieres, comme d'autres foules des siecles auparavant. Puis vient la question du pourquoi ces femmes se confinent, se cloitrent. Ne seraient-elles pas agoraphobes? Ayant peur des espaces ouverts? Mais elles tournent dans les jardins et autres espaces de leur propriete. Plutot demophobes alors, et ce serait la foule, le contact avec d'autres gens qui les oppresse? Il parait que ces phobies touchent plus les adolescents et les jeunes que les plus ages, et plus les femmes que les hommes. Quand on sait que l'auteure, Shirley Jackson, s'est enfermee chez elle les trois ou quatre dernieres annees de sa vie, ces phobies deviennent une piste de comprehension du texte qu'on ne peut delaisser.


Mais ce livre reste surtout pour moi un conte de terreur psychologique, a double tranchant: la terreur qu'inspire a deux jeunes femmes le monde exterieur et la terreur qu'elles-memes inspirent autour d'elles. Chaque cote combat cette terreur differemment. La foule avec une agressivite mechante, qui devient violence effrenee. La jeune soeur avec des rituels empreints de sorcellerie censes la proteger et en meme temps detruire le village avec ses habitants. Elle n'a pour eux que des pensees de mort funeste. N'est-elle vraiment qu'une petite sinistre sorciere?

Un conte terrifiant, comme les terrifiants contes classiques de mon enfance. Avec les ingredients classiques: un chateau, une princesse enfermee, une deuxieme princesse qui n'est peut-etre qu'une reine jalouse ou meme, qui sait, un dragon. Et je n'ai pas eu droit a un prince charmant, tout au plus a un antipathique brigueur d'heritage.

Et comment tout cela finit? Bizarre, bizarre.. Je n'en dirai pas plus.


P.S. Apres le Granny Webster de Caroline Blackwood j'ai j'enchaine avec un livre sur une certaine famille Blackwood. Coincidence? Brrr...
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Dieu, que ce roman est triste. Il est aussi triste qu'il est beau. Et il est vraiment superbe. « Nous avons toujours vécu au château » m'a totalement bouleversée, plongée dans une profonde mélancolie tout en m'enchantant par sa beauté et sa subtilité.

Comme il est difficile de parler d'un livre qui touche au plus profond de son âme. Cette lecture m'a accablée tout autant qu'elle m'a ensorcelée. Ce n'était sans doute pas le bon moment pour lire un roman aussi triste vu la période compliquée que je traverse également, on ne peut pas dire que cette lecture m'a remontée le moral, au contraire, mais je ne regrette pas du tout ma lecture. « Nous avons toujours vécu au château » est un très grand roman. Il ne se passe pas grand-chose, le fil narratif est très ténu, et pourtant j'ai été captivée. Jackson instaure une ambiance envoutante et inquiétante à la lisière du fantastique autour de laquelle elle tisse une intrigue subtile qui monte en un délicat crescendo jusqu'à un dénouement saisissant. L'auteure donne vie à des personnages inoubliables. Merricat et Constance sont caractérisées avec une finesse remarquable, tout comme le lien qui les unit.

« Nous avons toujours vécu au château » est la première oeuvre de Shirley Jackson que je lis bien que cela fasse bien longtemps que je veux la découvrir. Cette rencontre littéraire a été au-delà de mes attentes. Rarement un livre m'avait touchée à ce point. Evidemment, je poursuivrai ma découverte de l'auteure même si je laisserai sans doute passer un peu de temps pour éviter de trop faire la comparaison avec ce bijou d'émotion.
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critiques presse (1)
Telerama
24 octobre 2012
[Une] lecture obsédante. Du grand art.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (42) Voir plus Ajouter une citation
Chez nous, on déplaçait rarement les choses ; l'agitation, le remue-ménage, cela n'a jamais eu tellement cours dans la famille Blackwood. On manipulait les petits objets de passage, les livres et les fleurs et les cuillers, mais sous nos pieds, il y avait toujours cette fondation robuste des possessions durables. On remettait toujours les choses à leur place. On époussetait, on balayait sous les tables et les lits et les tapis et les lampes et derrière les tableaux, mais on les laissait à l'endroit où elles se trouvaient ; sur la coiffeuse de ma mère, le nécessaire de toilette en écaille n'a jamais bougé, ne serait-ce que de quelques millimètres. Notre maison a toujours été habitée par des Blackwood qui veillaient à ce que leurs affaires restent en ordre ; dès qu'une nouvelle épouse Blackwood emménageait, on lui trouvait un endroit pour ses effets personnels, et notre maison s'est donc édifiée grâce à plusieurs strates d'objets appartenant à des Blackwood, qui l'ont lestée et lui ont permis de résister vaillamment au monde extérieur.
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Avant de venir à table, j'avais bien vérifié ce que j'avais l'intention de dire. "L'amanite phalloïde", commençai-je en m'adressant à lui, "contient trois poisons différents. D'abord, il y a l'amanitine, le plus lent des trois mais aussi le plus puissant. Ensuite, la phalloïdine, à effet immédiat, et enfin la phalline, qui dissout les globules rouges, même si c'est le moins vénéneux. Les premiers symptômes n'apparaissent qu'entre sept et douze heures après l'ingestion, dans certains cas pas avant vingt-quatre heures, voire quarante. Les symptômes commencent par de violentes douleurs stomacales, des sueurs froides, des vomissements...
- Ecoute", fit Charles en reposant le morceau de poulet, "tu arrêtes ça tout de suite, tu m'entends ?"
Constance gloussait. "Oh, Merricat", fit-elle, un rire étouffé entrecoupant ses paroles, "quelle petite bécasse tu fais. Je lui ai montré, dit-elle à Charles, qu'il y avait des champignons près du ruisseau et dans les prés, et je lui ai appris à reconnaître ceux qui sont mortels. Oh, Merricat !
- La mort survient entre cinq et dix jours après l'ingestion, dis-je.
- "Je ne trouve pas ça drôle", fit Charles.
"Petite folle de Merricat", dit Constance.
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Depuis le perron de la bibliothèque, je pouvais traverser tout de suite la rue et suivre le trottoir d’en face jusqu'à l'épicerie, mais cela m'obligeait à passer devant le bazar et les hommes assis dehors de part et d'autre de la porte. Dans ce village, les hommes restaient jeunes et c'étaient eux qui se chargeaient de colporter les ragots, tandis que les femmes vieillissaient, chaque jour plus grisonnantes, plus lasses et plus méchantes, et attendaient en silence que leurs homes se lèvent de leurs chaises et rentrent à la maison. En quittant la bibliothèque, je pouvais aussi rester sur le même trottoir et remonter la rue jusqu'à hauteur de l'épicerie et traverser là-bas ; c'était préférable, bien que cela me fît passer devant la poste et la maison Rochester avec ses tas de tôles rouillées, ses épaves de voitures, ses bidons d’essence vides, ses vieux matelas, ses tuyaux de plomb et ses baignoires que les membres de la famille Harler rapportaient chez eux et - je n'en doute pas une minute - qu'ils adoraient.
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Près du ruisseau, je trouvai un nid de bébés serpents et je les tuai tous ; je déteste les serpents et Constance ne m'avait jamais demandé de les aimer. Je retournais vers la maison lorsque je découvris un très mauvais présage, l'un des pires. Dans la pinède, le livre que j'avais cloué à un tronc d'arbre était tombé. Je supposai que la rouille avait dû ronger le clou ; et le livre - c'était un petit registre de notre père, où il consignait les noms des gens qui lui devaient de l'argent, et de ceux dont il attendait, selon lui, des services en retour -, ce livre, donc, avait à présent perdu son pouvoir de protection. Je l'avais enveloppé très soigneusement d'un solide papier d'emballage avant de le clouer à l'arbre, mais le clou avait rouillé et le registre était tombé. Je me dis que je ferais mieux de le détruire, au cas où il serait devenu activement maléfique, et d'apporter un autre objet à fixer au tronc du pin, une écharpe de notre mère, peut-être, ou un de ses gants. En réalité, c'était déjà trop tard, même si je ne le savais pas alors : il était déjà en route pour venir chez nous.
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Qu'il y ait ou non d'autres clients dans la boutique, cela n'avait jamais d'importance. J'étais toujours servie aussitôt ; quel que soit l'endroit où ils se trouvaient, M. Elbert ou son épouse, une femme cupide au teint pâle, accouraient à chaque fois pour me fournir ce que je désirais. Parfois, si leur fils aîné profitait des congés scolaires pour les aider au magasin, ils se hâtaient pour s'assurer que ce ne soit pas lui qui me serve, et un jour, quand une petite fille - qui n'était pas du village, bien sûr - vint tout près de moi dans l'épicerie, Mme Elbert la tira en arrière avec une telle brusquerie que la petite poussa un cri, puis il y eut une longue minute pendant laquelle tout le monde attendit la suite des événements, avant que Mme Elbert ne respire profondément et me demande : "Autre chose ?" Je me tenais toujours parfaitement raide et droite comme un "i" lorsque des enfants s'approchaient de moi, car ils me faisaient peur.
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