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Critiques de Tim O`Brien (71)
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Les choses qu'ils emportaient

C'est une oeuvre puissante et certains passages prennent au tripes. Les épisodes poignants se suivent dans une chronologie déstructurée. On navigue dans le temps, jusqu'à des souvenirs d'enfance, le retour au pays et les étapes d'écriture du livre. Au final, on ignore ce que le soldat O'Brien avait dans son paquetage mais une chose est certaine : il en est revenu avec un matériau précieux, des histoires captivantes et des sentiments forts, qu'il a su exploiter intelligemment.

L'article complet sur mon blog.
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Les choses qu'ils emportaient

Selon moi, un des plus beaux recueils de nouvelles sur la guerre!

L'auteur est un vétéran; il sait de quoi il parle lorsqu'il évoque les blessures indélébiles de la guerre, l'absurdité du conflit, de la mort de ses hommes si jeunes loin de chez eux. Il montre que la guerre n'a rien de beau, ni de glorieux, elle est inhumaine même si les soldats sont campés avec justesse et humanité, elle est insensée.

Dans les nouvelles qui composent ce recueil, Tim O'Brien réussit à dépeindre l'horreur de la guerre à travers des pages très poétiques. J'ai beaucoup aimé la langue de Tim O'Brien, ce décalage entre un style parfois lyrique et une réalité très dure et très cruelle.

Il arrive également à faire sourire par des anecdotes qui révèlent qu'au coeur même des heures sombres, l'humour permet de survivre et de ne pas sombrer dans la folie.

Paradoxalement par ces écrits, cet auteur américain évoque le caractère indicible de la guerre; il faut l'avoir vécue pour pouvoir savoir ce que c'est (c'est la raison pour laquelle, les vétérans se retrouvent isolés au milieu des leurs à leur retour et incapables de partager leur expérience du combat) et aucun mot, ni récit ne saurait retranscrire ce que chacun des combattants a intimement vécu.

MAGNIFIQUE!

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Les choses qu'ils emportaient



Tim O'Brien a fait la guerre du Vietnam. Écrire ce qu'il y a vécu avec les hommes de son unité s'est imposé à lui comme une évidence.

"Les choses qu'ils emportaient" est le titre du premier des récits que O'Brien a réunis dans cette œuvre. Il fait mieux que raconter, il nous fait sentir le Vietnam, en un condensé d'émotions, d'anecdotes, de souvenirs, d'images, d'odeurs, de sons, comme une empreinte des fantômes du passé. Ainsi se dégage de cet ensemble une ambiance incroyable, grâce à des personnages intenses et une écriture sensible. Ce n'est pas le Vietnam des combats, des héros qu' O'Brien raconte. Il s'intéresse aussi bien à l'avant qu'à l'après-guerre, à la terreur et à l'amitié que partagent ces jeunes gars dans cette guerre absurde. Il raconte leurs désirs, leurs peurs, leur courage ou leur lâcheté, leurs blessures et leur mort, trop souvent.J'ai été frappée par la violence des sentiments et des combats, que O'Brien restitué dans des images et des situations d'une grande puissance, mais aussi par la marque indélébile que laisse sur chacun des rescapés le souvenir de cette guerre, et enfin par l'importance accordée à la littérature pour rendre compte de la vérité des êtres plus que de leur réalité. Tim O'Brien signe un roman sublime et fort que je ne peux que vous recommander!
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Au lac des bois

"Peut-être est-ce là le but de ce livre.Me rappeler. Me rendre la vie évanouie."

Tim O'Brien a fait le Vietnam à vingt-deux ans. Le souvenir du massacre de My Lai le hante. L'auteur l'a-t-il vécu ? On n'en sait rien. En tout cas, John, le personnage principal de cette lente descente vers le néant y était. Par un tour de passe-passe dont il est coutumier, John essaie d'effacer le passé. Mais la guerre a laissé des séquelles que Kathy semble ignorer tellement elle est amoureuse. Son mari se lance en politique sur la base de fragiles idéaux forgés sur la culpabilité. Les premières victoires échouent sur un gros échec, moment de vérité pour le couple, questionnement sur le sens de la vie.

L'auteur excelle à nous glisser dans les méandres des faux semblants, des impostures mineures et majeures, des blessures de l'enfance. Son écriture dense, narratif et descriptif entremêlés, nous rend proche une Amérique lisse en surface, si tourmentée dans ses tréfonds. Le style renvoie à Wallace Stegner ( En lieu sûr), lui aussi appliqué à saisir les fissures d'une probité de façade. Le livre déposé, un léger cafard vous prend, vite dissipé, car ici ce n'est pas comme là-bas.
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À propos de courage

À l'âge de vingt-deux ans, Tim O' Brien reçoit sa feuille d'enrôlement et part pour le Vietnam. 
Mais alors, qu'est-ce qu'un jeune homme envoyé malgré lui en enfer peut bien choisir d'emporter ? Et qu'en est-il de ses compagnons de patrouille ?




” Les choses qu'ils emportaient étaient déterminées jusqu'à un certain point par la superstition. Le lieutenant Cross emportait son galet porte-bonheur. Dave Jensen emportait une patte de lapin...(...) Ils emportaient du papier à lettre de l'USO, des crayons et des stylos, ils emportaient du Sterno, des épingles de nourrice, des fusées éclairantes, des bobines de fil électrique...“ 




À travers ses souvenirs, et de toutes les anecdotes vécues ou rêvées, entre fiction et réalité, l'auteur nous livre les histoires de ces jeunes hommes enrôlés malgré eux dans une guerre abominable qui fera d'eux des hommes meurtris à jamais



.

(...) il faudrait que j'oublie tout ça. Mais le problème des souvenirs, c'est que l'on ne peut pas les oublier. On prend son inspiration du passé et du présent. La circulation des souvenirs alimente une rotative dans votre tête, où ils tournent en rond pendant un certain temps, puis l'imagination se bientôt à couler et les souvenirs se confondent et repartent dans un millier de directions différentes. En tant qu'écrivain, tout ce qu'on peut faire, c'est choisir une direction et se laisser porter en formulant les choses comme elles viennent à nous. Voilà ce qu'est la vraie obsession. Toutes ces histoires. " 





Revisitant ce qui a été, imaginant ce qui aurait pu être Tim O' Brien récrée une expérience unique et réinvente la littérature consacrée au Vietnam. 


Tous ces fragments de vies, si courts parfois, couchés sur le papier par un vétéran qui survécu au pire cauchemar que l'on puisse imaginer entre guerre et plaie.



.

” Je veux que vous ressentiez ce que j'ai ressenti. Je veux que vous sachiez pourquoi la vérité des récits est parfois plus vraie que la vérité des événements. “ 




Ce que j'en dis :


Comme beaucoup d'entre vous, c'est au travers de certains films inoubliables comme Platoon, ou encore, Good morning Vietnam que j'ai découvert les horreurs de cette guerre. 

En lisant ce récit découpé sous forme de nouvelles, on découvre des histoires authentiques, poignantes et même parfois insupportables tellement inimaginables. 




L'auteur nous livre ses souvenirs, ce qu'il a vécu au cœur de cette jungle du Vietnam, ouverte sur les portes de l'enfer. 
Dans un style très évocateur, sa plume singulière pose un regard sans concessions sur cette guerre qu'il a malheureusement connue.




Un livre essentiel qui figure déjà aux programmes des lycées et des universités aux États-Unis.



N'hésitez surtout pas à le lire, en hommage à tous ces vétérans courageux morts pour leur patrie, et à ceux qui en se revenus avec un douloureux fardeau de traumatismes. 


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Au lac des bois

Certes, on peut tout supposer... et c'est frustrant. On peut quand même se faire sa petite idée, y'a des indices (et des longueurs aussi, que l'on peut survoler en hélico. )
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Au lac des bois

Oui,catégorie O'Brien j'ai préféré Dan ou Flann.Résumons.Au bord du Lac des Bois, en lisière des forêts sauvages du nord du Minnesota, John et Kathy Wade tentent de recoller les pièces de leur vie et de leurs sentiments, mis à mal après l'échec cuisant de John aux élections sénatoriales.Un jour, Kathy disparaît. Leur canot n'est plus là - s'est-elle noyée ou bien perdue ? A moins qu'elle ne se soit enfuie, pour renaître à une nouvelle existence ? Les recherches s'amplifient, les hypothèses les plus troublantes aussi. Pour découvrir la vérité, il faudra enquêter sur le passé de Wade.Ce passé,comme tout passé littéraire sinon il n'y a pas de littérature,cache une faille,un gouffre,le Vietnam et plus précisément la tristement célèbre tragédie de My Lai.John Wade était de la compagnie Charlie.Lui,passionné de prestidigitation, s'est-il ainsi employé à effacer toute trace de sa présence et de sa participation à ce massacre?



Le roman Au Lac des Bois est construit selon le principe des hypothèse et des faits avérés.Certains chapitres reprennent des éléments techniques ainsi que des témoignages de voisins,d'anciens du Vietnam.On y lit aussi quelques citations concernant la magie et même de rares notes d'écrivains,Edith Wharton ou Cervantes.Je n'ai pas été conquis,trouvant le mélange parfois laborieux, et m'apprêtai à rédiger un article somme toute défavorable.J'ai finalement un peu amendé ma sévérité pour les raisons suivantes.



Parfois quelques lignes,voire deux ou trois pages suffisent à faire d'un livre somme toute décevant un bon souvenir littéraire.A la fin un chapitre nommé La nature de l'Angle décrit l'extrémité Nord-Ouest du Minnesota.C'est là,peut-être, que Kathy Wade s'est perdue.On ne saura pas mais en quelques paragraphes Tim O'Brien nous dépeint cettre extrémité jadis colonisée par d'autres hommes du Nord,Finlandais et Suédois.Cet angle est la partie la plus septentrionale des 48 états centraux des U.S.A. et c'est prodigieusement ciselé, quelques animaux,chouette,cerf,faucon,une église en rondin abandonnée depuis des lustres,une autoroute fantôme.C'est une extrême Amérique et j'aime toutes les extrêmes Amériques.



Enfin,presque subrepticement,Tim O'Brien glisse un mot sur deux auteurs presque fantômes,les deux grands "disparus" du continent,déjà cités sur ce blog,Ambrose Bierce et B.Traven.Un petit bout de chemin avec ces immenses,et Tim O'Brien fait mieux que sauver son roman,somme tout très acceptable.

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Juillet, juillet

une réunion d'anciens élèves. On mélange le passé et le présent, on secoue le tout et ça fait une vie!
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Les choses qu'ils emportaient

Une œuvre. Pour moi elle est parfaite car elle ne peut être comparée qu'à elle-même. Quand il l'a écrite, elle était essentielle à l'expression de l'auteur, qui écrivait pour survivre à ce moment là; sûrement.

Si vous cherchez à comprendre certains traumatismes, des autres, de vous-même. Ou les vivre par procuration parce que vous éprouvez un sentiment de reconnaissance. Ca parle de traumatismes de guerre et de résilience, mais sous forme littéraire et non clinique. C'est très fort. Je vais le relire tout de suite d'ailleurs, pour m'immerger encore plus, mais il est vrai qu'étant en psychanalyse en ce moment j'ai besoin de partager et comprendre plus que jamais.
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Si je meurs au combat

[Lu en février 2012]



Si je meurs au combat raconte la guerre du Vietnam telle que l'a vécue Tim O'Brien, de ses classes jusqu'à son arrivée sur les lieux du conflit, entre 1968 et 1970. Paru seulement 3 ans après ce retour, en 1973, le roman a été plutôt inattendu, alors que le conflit était encore bien frais dans la mémoire des américains (les dernière troupes se sont retirées en 1972).



Ce que j'ai le plus apprécié dans ce récit, c'est la façon dont Tim O'Brien raconte ou décrit chaque instant de cette guerre, avec précision et sans prendre de gants, pour être au plus près de son expérience traumatisante et mieux la faire comprendre. Il décrit par exemple, et d'une manière qui peut paraître assez froide, les différents types de mines qui existent, et ce qu'elles coûtent quand on marche dessus. Il décrit également les différents lieux dans lesquels sa compagnie (la compagnie Alpha) devait se rendre pour diverses opérations, en insistant sur l'aspect hostile, car souvent inconnu et bourré de pièges, de ces lieux (lieux qui plus est en pleine nuit quand toute utilisation de lumière est synonyme de mort certaine). De ce fait, même s'il raconte avant tout son histoire, il raconte aussi, par ce regard très précis et parfois détaché, l'histoire de tous ces soldats qui ont été envoyés de force au Vietnam, pour une guerre dont ils ne comprenaient pas le sens (il a d'ailleurs lui-même longuement songé à déserter avant de faire ses classes, allant même jusqu'à préparer ses affaires pour partir au Canada).

Un extrait sur les types de mines, comme développé plus haut :

"Ce qu'on redoutait le plus, c'était le Bouncing Betty, l'une des mines les plus courantes. La Bouncing Betty surgit de son petit nid enfoncé dans la terre, et quand elle arrive au plus haut, elle explose - efficace et mortel. Quand le type a du bol et que la mine est là depuis pas mal de temps, qu'elle a été exposée à la pluie, il pourra peut-être voir ses trois dents sortir de l'argile. Les dents servent de détonateur. S'il marche dessus, le soldat malchanceux entendra une explosion sourde - il s'agit de la charge initiale qui envoie la mine à un mètre dans les airs. Le type fait encore un pas, commence celui d'après, et puis il a tout l'arrière en sang et ça y'est, il est mort. On appelle ça "le bon vieux pas et demi".



Malgré tous ces instants de désespoir dus au fait de voir des camarades mourir au combat et d'avoir des difficultés à survivre, Tim O'Brien revient également sur des instants de bonheur, de répit, qui l'ont sauvés de la folie, risque pour chaque soldat face à des conditions inhumaines : les rencontres marquantes qu'il a pu faire pendant ses classes, ayant notamment pour conséquence la tenue d'une correspondance avec un de ses camarades. C'est justement cette correspondance et cette expérience de la guerre qui vont le mener ensuite à l'écriture quand il rentrera aux Etats-Unis.

Un autre extrait qui montre justement un des moments d'accalmie de la compagnie Alpha :

" Le premier mois au sein de la compagnie Alpha a été une période assez particulière. C'était surtout des vacances. On se baladait sur les plages, à l'extérieur de Chu Lai, on faisait des patrouilles de garde et très peu d'embuscades nocturnes. Ce dont rêvaient tous les soldats. Il n'y avait pas de Viet-congs, pas de mines, il y avait du soleil, l'eau où l'on se baignait était bien chaude, on se faisait approvisionner deux fois par jour en lait et en bières. On formait une sorte de cirque ambulant. Toute une file de gosses et de nanas du coin nous suivait d'un banc de sable à l'autre, et tout ce beau monde essayait de nous refourguer du Coca, des photos de cul, nettoyait nos armes, et tout ça en échange d'une boîte de ration C. Pendant la journée, on jouait au foot. Il y avait deux ou trois amoureux qui traînaient sous leur poncho avec des Vietnamiennes. "



Ce qui est également intéressant dans ce récit, c'est qu'à aucun moment, Tim O'Brien ne prend véritablement parti pour ou contre cette guerre en particulier : il la décrit, tout simplement, en tant que soldat qui l'a vécue. La conclusion de son récit reste cependant sans appel, autant pour la guerre du Vietnam que pour toute autre guerre : c'est une action inhumaine, qui n'a aucun sens, et jamais réellement de véritable "camp" meilleur qu'un autre. C'est ce que montre le récit qu'il fait de son passage à Pinkville (My Lai), zone particulièrement dangereuse, dans lequel a eu lieu le massacre tristement célèbre de civils vietnamiens, en mars 1968, un mois avant l'arrivée de sa compagnie.



Un récit vraiment poignant, dont on a du mal à se détacher (je l'ai lu en un ou deux jours) et que je conseille fortement. L'écriture est à la fois passionnée, nous présentant un jeune homme en devenir, qui va se forger grâce (ou à cause) de cette guerre, et documentaire, en ce qu'elle décrit le plus minutieusement et froidement possible cette même guerre.



Pendant ma lecture, j'ai pensé immédiatement à Full Metal Jacket, film réalisé par Stanley Kubrick et sorti en 1987. En effet, là aussi nous assistons à la préparation éprouvante des futurs marines avant de partir au Vietnam, puis aux combats proprement dits, ainsi qu'aux répercussions psychologiques qu'a pu induire cette guerre sur toute une génération de jeunes américains qui n'y étaient que rarement partis de leur plein gré.
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Au lac des bois

Grâce à un impur hasard, j'ai commencé la lecture de Au lac des bois comme je terminais de regarder sur Arte les 9 volets de la plus passionnante, complète et pédagogique fresque documentaire jamais réalisée sur la guerre du Vietnam, due à Kenn Burns et Lynn Novick, dans laquelle Tim O'Brien intervient pour témoigner sur des images d'archives où on le voit, lui et tous ses frères d'armes au combat.





Dans le roman, John Wade, après son retour du bourbier, un homme en ruines ayant perdu le contact avec une partie déterminante de lui-même, absent, ni là ni ailleurs, s'engage en politique après avoir achevé ses études d'avocat. Il est élu sénateur du Minnesota pour ne pas ressembler à de nombreux vétérans clochardisés qui dorment sous les ponts, méprisés par leurs compatriotes, oubliés du pouvoir, gommés de l'Histoire. Mais lors de sa réélection, il est balayé par l'opinion publique sous le choc de la révélation du massacre de My Lay perpétré par la Compagnie Charlie, le 16 mars 1968, au cours duquel entre 200 à 500 civils selon les sources, vieillards, femmes, enfants, bébés, ont été égorgés, sodomisés, violés, éventrés, énucléés, scalpés, abattus comme les chiens, veaux, vaches, poulets de la pauvre communauté... Or John Wade/Tim O'Brien, dans la vie comme dans le roman était là, témoin des exactions. Voilà sa réputation politique flinguée, sa carrière foutue. Avec sa femme Kathy, avec qui il a cru pouvoir construire un bonheur post-traumatique, il se réfugie au bord du Lac des Bois. Mais un matin, Kathy disparaît, le bateau n'est plus amarré au ponton...





Il s'agit d'un roman d'une puissance exceptionnelle, dans lequel la part de fiction rend la réalité de la guerre plus grave, horrible, lui donne une netteté saillante, vivante. En alternance, John Wade parle de son enfance, il voulait être magicien, prestidigitateur ; il évoque sa vie sentimentale ; il incruste des citations d'écrivains ; des extraits authentiques de dépositions faites en cour martiale, qui après des bruits d'enquête, des blagues inquiètes et des rires forcés n'a retenu comme seul coupable du massacre, que William Calley, condamné à trois ans d'assignation à résidence.





Qu'est-il arrivé à Kathy ? Que s'est-il passé ? Qui le saura jamais ? En tout cas, comme prévient l'auteur, si l'on veut connaître la vérité, il faut lire un autre roman. Ici, plusieurs hypothèses sont émises par un homme en pleine confusion mentale et délitement moral, une âme perdue, brouillée avec la réalité du monde. Il porte des fardeaux, se mure dans le silence, cache une histoire démoniaque aux autres et à lui-même, escamote, verrouille et truque sa vie. Il cherche l'oubli ou trahit le présent à chaque bouffée d'air tirée de la bulle d'un passé pourri. N'est-il plus qu'un esprit serpentant à travers le dernier mécanisme d'une dernière illusion magistrale pour s'auto-persuader que cela n'a pas existé, comme un magicien fin manipulateur sait tromper son public. Et si la vérité était inaccessible ? Et si tous les secrets ne menaient qu'à l'obscurité, et si au-delà de l'obscurité, il n'y avait que des peut-être ? L'épilogue est d'une beauté à couper le souffle.
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Les choses qu'ils emportaient

Tim O'Brien, soldat en Asie, rêve, pour échapper à l'horreur de la guerre.

Vingt ans plus tard, à l'image de la plupart des vétérans, les souvenirs du Vietnam, toujours présents, lourds, encombrants, perturbent encore sa vie familiale et professionnelle. Ecrire devient alors une nécessité à la finalité triple : amoindrir voire exorciser les regrets, remords, culpabilités; rendre hommage à ses compagnons vivants et disparus; témoigner face au monde.



Quelles choses les soldats emportent-ils avec eux ? En une vingtaine de pages, le premier chapitre consacré à cette liste exhaustive ---barda de trente kilos de matériel obligatoire, de kits de survie, de fétiches et fétichismes personnels--- donne le ton et ouvre la porte des souvenirs.

L'humour noir ou blagueur selon les circonstances, s'entremêle aux descriptions poétiques des lieux, à l'horreur du carnage, aux récits parfois crus jusqu'à l'insoutenable, à la gaîté réelle ou forcée, au découragement comme au courage, à la vérité vraie et celle ressentie ou imaginée, à la perception immédiate que la mémoire enjolivera ou déformera …

Rêve ou réalité ? On ne sait plus exactement; mais le rêve permet de s'évader, de juguler cette réalité par trop inhumaine; et se trouve en l'occurrence être l'unique pilier de soutien, la seule échappatoire permettant de fuir l'enfer.

Le Trick or Treat du Halloween américain ! Littéralement : un bonbon ou un sort, qui peut aussi se traduire par la bourse ou la vie.

En fait … Eux ou Nous !



Lorsque l'on découvre que l'auteur applique cette pratique du rêve depuis son enfance, on peut logiquement se poser la question : est-ce cette faculté, cette habitude, qui lui a permis de survivre moralement au Vietnam ?

Et si le récit est dur, percutant, poignant, jamais, ni dans le passé ni dans le présent, il n'est glauque, trouble, voyeuriste.



Ce livre m'a ramenée des années en arrière, près de mon grand-père qui a fait la guerre 14-18, de la Crête aux Vosges et à l'Aisne, via la Serbie. Il n'en parlait jamais, n'en racontait que les anecdotes gaies.

Mais nous avons toutes les lettres que pendant quatre ans, il a envoyé à notre future grand-mère; y sont exactement similaires : le ton, le non-dit, le courage modeste, l'obéissance obligatoire aux ordres, les critiques camouflées, la lassitude sous-jacente, l'horreur dissimulée et parfois avouée, le rêve en tant que palliatif, et malgré tout, ou à cause de, la faim, plus exactement la rage de vivre.

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Au lac des bois



Au lac des bois.

Tim O’Brien (traduction Rémy Lambrechts)



Au lac des bois dans le Minnesota il fait bon se baigner, prendre un apéritif sur la terrasse, boire un café en lisant le journal.

Au lac des bois il fait bon vivre.

Surtout après l’échec cuisant de John Wade aux élections sénatoriales…

C’est dans ce paisible endroit qu’il compte reprendre des forces avec sa femme.

En profiter pour se redécouvrir, redevenir amoureux l’un de l’autre.

Mais un drame survient qui leur ôtera toutes possibilités : au petit matin Kathy à disparu ainsi que le bateau dans la grange.

Pendant des mois les autorités, la famille et John vont chercher Kathy encore et encore ne trouvant aucun indice.

Que s’est-il donc passé au lac des bois ?

Le sauront nous jamais ?



Un roman très étrange qui oscille en permanence entre la vie réelle au lac et les souvenirs d’enfance et surtout de guerre du Vietnam de Wade.

Je reconnais bien dans ce roman les « obsessions » de Tim O’Brien découvertes dans « Ce qu’ils emportaient ».

John Wade s’est enfermé à double tour dans ses souvenirs les plus horribles et il a jeté la clé.

Le style est particulier car on trouve des articles de journaux, des témoignages de personnes qui l’ont connu enfant puis des camarades de l’époque du Vietnam.

Petit à petit j’ai compris que je ne comprendrais pas tout de ce roman.

Beaucoup d’hypothèses et au final c’est à nous de choisir celle qui nous convient le mieux.



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Si je meurs au combat

Je n'ose même pas imaginer l'horreur que cela doit représenter que de décrire et traduire avec des mots les atrocités vues et vécues au cours d'une guerre. Quelle qu'elle soit.

Quand ici Tim O'Brien nous décrit avec précision les effets dévastateurs de tous les types de mines disponibles ou bien les pièges imaginés par chacun pour mieux affliger l'adversaire de blessures (physiques et morales) irrémédiables. Les images de corps meurtris et mutilés se gravent de manière permanente dans l'esprit des témoins, compagnons d'armes et d'infortune envoyés au champs de bataille.

La guerre s'insinue partout. Prend d'assaut toutes les failles et faiblesses de ceux qui la vive. Elle ne rend à la vie que les fantômes des hommes qu'elle a prit.

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Au lac des bois

Au lac des bois, Tim O'Brien, Gallmeister, 2019, roman

traduction de l'américain par Rémy Lambrechts







Tim O'Brien est né en 1946, à Austin, dans le Minnesota. Il a fait la guerre au Vietnam, trois ans durant.



Au lac des bois, quand tout s'effondre, emmène au cœur du mystère. De toute façon, la vérité est inaccessible, dit Freud.

Ce livre est rudement bien construit.

C'est l'histoire d'un Sorcier. Sorcier est le surnom d'un homme qui enfant, parce qu'il voulait être aimé, et de son père particulièrement, trouve l'oubli, lui le solitaire, le frustré, le honteux des remarques paternelles sur son poids, « jelly Jim », dans une cave où il s'exerce à des tours de magie.

Son père se pend, qui avait des problèmes d'alcool et que rien ne satisfaisait jamais. Pour que son père- mort-soit fier de lui, Sorcier, alias John Wade, s'enrôle dans les combattants au Vietnam. Perdu, comme déjà petit il l'était, il commet deux meurtres dont il ne se remet pas. A son retour du Vietnam, il s'inscrit en politique, parce que la politique, c'est aussi des tours de passe-passe. Mais c'est encore le moyen de venir sincèrement en aide aux gens, et de racheter un peu ses tueries de soldat. Ce qu'il a fait au Vietnam, le massacre atroce d'un village de vieillards, de femmes, d'enfants et de bébés, ressort, et le scandale éclate dans les journaux. Il est défait complètement aux élections qui lui ouvraient le Sénat fédéral. Avec sa femme, il s'éloigne dans le Nord, à la frontière du Canada, là où les habitations sont rares, où les bois et les eaux prennent toute la place et ressemblent aux miroirs dans lesquels John Wade effaçait tout. Sa femme disparaît, lui aussi quelque temps après. Où ? Comment ?

La construction donc. On est en 83, après l'échec cuisant, comme un point de non-retour, aux élections, dans un petit cottage au pied du lac. Le couple forme des projets d'avenir heureux. Elle, est tout pour lui, et de son côté, elle ne peut quitter son mari, amour, fidélité, protection ? L'homme présente des signes de folie, la femme, de dépression, mais ils sont résolus à être heureux. Ils le méritent. L'intérêt de John pour la magie le pousse à croire ou à faire semblant de croire à un bonheur possible. Des flash-back, des retours en arrière, expliquent la situation du couple, l'enfance de John, sa guerre du Vietnam, ses rapports avec son père ; pour elle, son comportement au boulot, son aventure avec le dentiste.

Les flash-back sont récurrents, et à chaque fois qu'ils reviennent, un élément est ajouté, un autre éclairage est donné. Le lecteur a droit à un puissant suspense, et il arrive un moment où il croit deviner ce qui a pu arriver, mais ce ne peut être qu'une hypothèse.

Au même titre que les hypothèses qui sont proposées. Le narrateur est extérieur, et le focus est placé sur le personnage principal. Si bien que ce qui a trait au personnage féminin rend perplexe. Qui parle véritablement quand il est question de sa promenade en bateau ?

Des éléments sont ajoutés à l'enquête : on entend des voix multiples, des voix aimantes ou accusatrices, des avis de psychiatres, on lit des consignations de procès pour crimes de guerre, on a des paroles d'écrivains, des notes en bas de page de l'auteur lui-même.

En outre, il y a cette image qui parcourt tout le roman, celle de deux serpents qui par amour s'avalent l'un l'autre. Que se serait-il passé s'ils s'étaient avalés totalement ?

Le lecteur participe à une véritable enquête. Que cachait ce couple ? S'aimait-il ? La disparition de la femme était-elle préméditée ? L'intérêt de la lecture s'étend au-delà du couple. Qu'en est-il de l'amour ? Du besoin d'être aimé ? Peut-on vivre avec un secret ? Et quel secret ? Peut-on vivre encore une fois que le secret a été divulgué ? Et à l'être le plus cher qui soit ? Qu'est-ce que la guerre fait des hommes ? Qu'est-ce que le manque d'amour fait d'eux ? Peut-on se racheter après avoir commis des actes que la raison ne peut expliquer ? Est-on condamné à être un mort-vivant ?

L'auteur s'interroge sur les atrocités perpétrées au Vietnam par les Américains ; sur ce que sont devenus les vétérans de cette guerre une fois revenus au pays, sur l'ingratitude de l'Etat à leur égard : certains en effet deviennent des clochards et vivent sous les ponts. L'auteur s'interroge aussi sur les massacres des Indiens.

La lecture de ce livre est passionnante. L'auteur écrit pour se donner à lui-même des réponses sans doute. De réponse, il n'y en a pas. A moins qu'elles ne se trouvent au fond du fond du lac, ou dans la tête de qui sait d'avance et donc ne sait pas, ou dans le cœur d'une personne aimante et dont l'objectif est de profiter de la vie qu'on a.





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Les choses qu'ils emportaient



Les choses qu?ils emportaient

Tim O?BRIEN



Tim O?Brien avait 22 ans lors de la guerre du Vietnam.

Et de jeune étudiant américain il est passé à soldat dans une guerre qu?il ne cautionnait pas.



Il y a senti la putréfaction des corps en décomposition et l?humidité des tranchées ds les rizières.

Il y a entendu les déflagrations des tirs, les cris de douleur de ses camarades blessés.

Il y a vu les habitants fuir et leurs corps tomber.

Il a goûté aux rations de l?armée et à la boue.



Et il a partagé une partie de sa vie avec ces camarades d?infortune et leurs mystérieux paquetages.

Les choses qu?ils emportaient...



Tim O?Brien a écrit ce livre 20 ans plus tard en y racontant ses souvenirs réels et fantasmés.

Un livre intime sur les blessures physiques et psychologiques de ces jeunes hommes partis au front...
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Les choses qu'ils emportaient

Tim O’Brien raconte, vingt ans après l’avoir vécue, sa Guerre du Vietnam. Il raconte la vie dans la jungle, les soldats, les amitiés, les rivalités, la folie. Les choses qu’ils emportaient c’était tout leur barda bien sûr, des dizaines de kilos à se coltiner mais aussi leurs pensées, leurs réactions diverses face à la mort et à l’horreur. On ne ressort pas indemne d’une guerre comme celle-là. Rat Kiley préfèra se tirer une balle dans le pied plutôt que de continuer à entendre des voix, Ted Levander prit une balle dans la tête parce qu’il planait trop.. De retour au pays, Norman Bowker passe ses journées à parcourir a ville natale au volant de sa voiture, Tim O’Brien ne cesse de revenir au Vietnam dans ces écrits… Après la guerre, c’est le risque du vide.

Tim O’Brien a vécu tout ça et il le fait vivre au lecteur dans toute sa vérité même quand il se met dans la peau d’un de ses camarades de combat. Un classique du roman de guerre sans fard ni esbroufe.
Lien : http://puchkinalit.tumblr.com/
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À propos de courage

Un livre qu'il est difficile de refermer quand on l'a commençe. Une écriture pleine d'intelligence et vibrante d'authenticité. Avec Kent Anderson, cet auteur me semble incontournable pour qui s'interesse à la guerre du Viêt Nam.
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Les choses qu'ils emportaient

Ce roman témoigne de l'enfer que fut la guerre du Viet Nam. Sa lecture devrait inciter à ne plus jamais faire une guerre, tant la destruction des humains par d'autres humains est atroce. Il me semble qu'il faut rapprocher ce roman de "Sympathy for the devil" de HANSON. On y voit les mêmes traumatismes, les mêmes atrocités commises par des soldats de 20 ans qui deviennent des monstres. Ils détruisent et sont eux-mêmes détruits physiquement et psychologiquement. Une guerre injuste et injustifiable. "L'innocence perdue" de N. SHEEHAN raconte quasiment scientifiquement cette guerre. Dans "ce qu'ils emportaient", le lecteur est avec les soldats au coeur des massacres et de la souffrance qui est en eux et qu'ils répandent.
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Les choses qu'ils emportaient

J'ai eu envie de lire ce livre après un reportage sur ARTE je crois. J'ai été touché par la finesse du témoignage de l'auteur. Il sait assurément de quoi il parle, puisqu'il l'a vécu. J'aime son ton direct et ses descriptions crues, comme la guerre sans doute. Pour moi c'est un peu l'écho du livre de Maurice Genevoix "ceux de 14".

Heureusement que les guerres laissent des survivants qui savent témoigner avec autant de sens littéraire !
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