Durant un peu plus d’une année, au fil des mois, Mathilde, octogénaire en Ehpad, nous raconte son passé et son présent. Ou plutôt, nous lisons son carnet de vie. C’est tendre, drôle, émouvant.
Nous n’entendons pas toujours de jolies choses à propos du personnel en Ehpad, mais ce roman nous offre une vision positive à travers une aide-soignante dévouée et professionnelle, mais pas seulement. Les mots de Mathilde nous donnent souvent le sourire quand elle décrit ses voisins de chambre. Il n’y a ni pathos ni tristesse. Il y a ceux qui perdent un peu la tête mais qui mettent l’ambiance, il y a les petits tracas sexuels, il y a des rires.
Et il y a la famille aussi. La fille de Mathilde est d’ailleurs « à ne pas piquer des hannetons ». Du genre à tout vouloir contrôler, à bousculer, à parler fort. Elle contraint sa mère à se replonger dans son passé aussi, elle fait travailler sa mémoire. Alors Mathilde raconte ce qu’elle a vécu en temps de guerre durant son enfance. Il y a quelques souvenirs heureux, mais beaucoup de questionnements et de souffrance, et tout cela, elle le garde tout au fond d’elle-même.
Il y a de l’amour aussi quand elle écrit au sujet de sa sœur et de son mari.
Les évocations sont toujours tendres et sincères. On ressent une belle empathie à lire les souvenirs et les pensées de Mathilde.
« Lorsqu’on demande à Chantal si elle a été mariée, elle s’exclame : « Ah ça alors, certainement pas ! Je suis une femme libre, moi, Madame. » « Pas de mari, pas d’enfants ! » Si on lui montre le portrait de son mari dans la chambre, elle répond : « Connais pas ! » Elle est certaine que c’est « la cliente » d’avant, « une sans-gêne », qui a oublié d’enlever la photo de « son coco ». « Un mocheton en plus. »
L’écriture est ultra fluide et les chapitres – qui correspondent aux dates d’écriture dans le carnet de l’octogénaire – sont très courts, c’est donc un roman qui se lit vite et bien.
« Le soir, dans mon lit, je ferme les yeux et je redeviens une enfant de six ans. Alors que je suis à l’hiver de ma vie, que le froid gagne mes os, que ma peau s’affine un peu plus chaque jour, que mes joues se creusent, que mes dents jouent à saute-mouton, mon âme, elle, continue à danser. Au creux de la nuit, rien ne semble la faire renoncer. »
En quelques mots, ce roman est touchant et truffé de notes d’humour. C’est un véritable plaisir de plonger dans cet univers que nous connaissons souvent mal. L’auteure nous offre un regard positif sur les Ehpad qui éloigne les a priori que l’on pourrait avoir concernant ces lieux de fin de vie. À déguster pour passer un doux moment.
Un grand merci à Babelio pour cette lecture dans le cadre d’une Masse Critique privilégiée. Merci également aux Éditions Buchet/Chastel.
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