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Citations de Valérie Zenatti (413)


Il me fait entrer dans son 4x4 avec de grands gestes, soufflant et rugissant. Mets ton sac dans le coffre, je veux pas qu'il salisse la banquette arrière, je viens d'acheter la voiture. Non mais t'es une psychopathe ou une gauchiste pour faire du stop ici ? Tu veux avoir la mort de nos chers soldats sur la conscience ? Allô, tu vis où ? Parce que l'espérance de vie, seule sur cette route, elle est à peu près de cinq minutes, les plus sauvages t'auraient massacrée sur place, les plus intelligents t'auraient enlevée et emmenée à Naplouse ou Ramallah pour t'échanger contre dix mille terroristes, et là qui serait venu te chercher, hein, dis-moi ?
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Ofek glisse son passeport dans une machine à l'usage des citoyens israéliens et disparaît de ma vue alors que je fais la queue devant une guérite réservée aux voyageurs étrangers. Une douanière joufflue me réclame la raison de ma visite en même temps que mon passeport. Je suis ennuyée de ne pouvoir dire simplement, Je suis là grâce à une vidéo que je regarde depuis deux ans, sur laquelle Leonard Cohen donne la plus grande leçon de vie qui soit. Il y parle de l’accord entre les êtres et le temps. De la nécessité absolue que cet accord soit juste. Il y parle aussi de l’amour, devant lequel même Dieu s’incline et qui ne le laisse pas en paix tant qu’il n’advient pas. Je veux être là où ces paroles ont été prononcées, j'aimerais moi aussi trouver le bon accord.
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Le soir, je me collais au dos de Julien pour que son corps parfaitement enchâssé dans le mien fasse barrage à mes pensées mais elles étaient plus agiles et déterminées que sa peau tiède, [….]. J'essayais de régler mon souffle sur celui de Julien […]. Je me relevais une heure plus tard, me déplaçant dans l'appartement tel un chat, habituant ma vue au clair-obscur, mon ouïe aux vibrations les plus fines, mes mains au mur du couloir, attentive à ne pas réveiller Lola […].
Une nuit, je renonçais à lutter contre l’insomnie, et m’y coulai en prenant une longue respiration qui ouvrit un bal secret. p.24
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Je me suis remise de la mort de Léonard Cohen et de l'angoisse politique distillée par l'élection de Donald Trump comme je m'étais remise du 11 septembre et de l'appel de ma mère, Manhattan, tu connais Manhattan, c'est pas là où tu habitais ? C'est la guerre, ils détruisent tout, ils attaquent l'Amérique. Remise du 21 avril et de l'excitation effrayée de 19h58, ce n'était pas possible, nous n'allions pas voir s'afficher le visage de Le Pen qualifié pour le second tour, que faire de ces deux minutes où l'on devinait l'évidence en refusant d'y croire ? Remise des 7 et 9 janvier ou des hommes de trente-deux et trente-quatre ans avaient pu surgir au milieu d'une salle de rédaction, dans un magasin casher et décider qui vivrait hanté par le carnage qui mourait sous les balles. Remise du 13 novembre et du bandeau rouge au bas de l'écran où rien ne semblait pouvoir arrêter la progression du nombre de victimes, à croire que ceux qui avaient choisi de sortir ce soir-là dans l'Est parisien allaient y passer jusqu'au dernier. Remise du 14 juillet et de la vidéo visionnée sur Internet en tremblant avant qu'elle soit effacée, un travelling sur les trottoirs de la promenade des Anglais imbibés de sang, jonchés de corps gémissants ou morts sous des couvertures de survie dorées, et une voix hors-champ qui disait, Regardez, regardez, c'est pas possible.
Mais si cela avait été possible et c'était donc réel. p.14
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La douleur viendra plus tard, dans l'ambulance qui traversera Jérusalem pour me conduire à l'hôpital, et une fille aux longs cheveux blonds tiendra ma main en promettant, Ça va aller, ça va aller, et la lumière néonesque des urgences m'aveuglera mais je ne fermerai pas les yeux, j'entendrai autour de moi de l'hébreu, de l'arabe, de l'espagnol, du russe et de l'ukrainien et me dirai je suis à Babel, Babel est un hôpital.
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Elle écosse des haricots avec sa mère. Des haricots coco. Quel drôle de nom, pense-t-elle. Et elle chantonne. Des petits pois poipois, des haricots verts ververts.
La mère est grande. Si grande qu'elle n'a pas besoin de se mettre sur la pointe des pieds, ni de lever les bras pour atteindre les casseroles accrochées au mur. Il y en a cinq, alignées de la plus petite à la plus grande, de gauche à droite, mais elle peut aussi les regarder de droite à gauche. Elle aime contempler les casseroles brillantes et rondes. Lorsque l'une d'elles manque à son crochet, elle se sent envahie par un mélange de tristesse et de contrariété. Elle propose alors d’aider son père à laver la vaisselle. Un trou d'impatience se niche dans son ventre qui s'apaise lorsque le saut de taille entre les ustensiles est de nouveau régulier.
Elle tire le fil qui court le long de la cosse puis exerce une légère pression vers les côtés des deux pouces. Elle sent sous ses doigts les graines lisses, prêtes à bondir avant de tomber dans le saladier, comme une petite grêle. Il lui semble chaque fois qu'elle va découvrir une surprise, quelque chose d'inattendu, de magique peut être. Elle s'attendrit quand, tout au bout de la cosse béante, obscène presque, elle trouve un minuscule haricot, un bébé haricot qu'elle croque vite, avec la crainte inexplicable d'être vue Le grain éclate sous ses dents ,un léger goût sucré , un peu âpre et frais se colle à son palais. Elle fronce les sourcils lorsqu'une graine noire et rabougrie surgit soudain d'une cosse apparemment saine. La pourriture existe. Dissimulée, noire et gluante. p.11
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L'école demeure un monde opaque pour eux, indéchiffrable, ils savent uniquement que les professeurs ont de l'instruction et que cela leur offre une forme de suprématie, ils s'expriment vite avec des mots incompréhensibles et portent sur leur visage le masque des gens sûrs d'eux, ils peuvent se permettre de sourire, de rester calme, le pouvoir est de leur côté, la maîtresse de Fanny a ainsi décidé que la petite redoublerait parce qu'il y avait des taches de gras sur un livre prêté par l'école.
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[A propos de l’Histoire]
Au lieu de faire une frise chronologique de gauche à droite, bien horizontale, c’est plutôt sur une boule à facettes qu’on devrait inscrire les évènements, ce serait une forme plus juste, n’oubliez jamais que l’Histoire brille et s’éteint dans nos vies de manière anarchique.
P.106.
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Je sais reconnaître ceux qui se placent systématiquement au-dessus des autres, parce que l’égalité les effraie, ils ne vivent que dans la mesure de la supériorité et de l’infériorité.
P.131.
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Les souvenirs, c’est dans la tête. Le reste n’est que de l’encombrement.
P.337.
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Il fallait que je prenne garde à ne plus passer à côté des choses importantes, celle qui exhaussent la vie vers la joie pure, mais c’est une entreprise titanesque d’être attentif à tout, lorsque l’on slalome entre les jours, entre contraintes, assurance et oubli, […]
P.16.
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...un livre qui ne me quitte plus et que je garde en moi, car certains livres ,comme certains êtres, sont si intimes qu'il faut conserver précieusement leur nom à l'intérieur de soi...

P123
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J'avance jusqu'aux plaques de verre incrustées dans le sol, environ deux mètres me séparent des pierres que je fixe sous mes pieds. Ici marchèrent peut-être Vespasien, Titus, Agrippa, Josèphe et Bérénice, ici Bérénice fit peut-être l'amour avec Titus pendant que Jérusalem tombait.
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C'est peut-être l'attachement à l'idée d'une grandeur éternelle qui distille le poison de la guerre. Nous sommes minuscules, vulnérables et mortels, c'est notre condition immuable. Personne n'est au-dessus de nous pour nous protéger. C'est à partir de là qu'il faut penser, pas à partir de la puissance et du pouvoir.
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Ofek me présente en riant comme sa voisine d'avion venue de France pour chercher la paix [à Jerusalem] dans l'épicentre du réacteur.
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Je voulais que chaque traduction soit une découverte...ce n'etait qu'une fois la traversée du livre achevée que je percevais la résonance entre ce livre-là et ce que je vivais.
Chaque livre m'a accompagnée dans l'amour, la rupture, le ravissement, la plongée dans les eaux boueuses et claires de l'enfance. Chaque livre m'a dit quelque chose de moi, à un moment précis de mon existence, chaque livre a été la pointe de roche que je pouvais saisir pour me relever ou monter plus haut.

p39
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Depuis des années je traverse le temps avec mes élèves et le fait miroiter pour eux, je leur dis, Au lieu de faire une frise chronologique de gauche à droite bien horizontale, c'est plutôt sur une boule à facettes qu'on devrait inscrire les événements, ce serait une forme plus juste, n'oubliez jamais que l'Histoire brille et s'éteint dans nos vies de manière anarchique.
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II était là avec sa guitare, son sourire timide, t'imagines pas comme il était timide. II nous a dit, Je sais pas me battre, je ne peux pas faire grand-chose pour vous, mais si vous avez envie d'entendre quelques pauvres chansons, je suis là, et tu parles qu'on avait envie. Il a commencé à chanter Suzanne, comme ça, avec un soldat qui lui tendait un micro relié à un petit haut-parleur, sa voix et sa guitare, pas de scène, pas d'accompagnement. Tu es dans le désert, tes potes sont morts ou blessés, et toi tu entends cette voix qui d'habitude sort de ton tourne-disque, et il y a ce type devant toi qui baisse les yeux la plupart du temps, qui n'arrive pas à soutenir nos regards, qui a l'air de dire , je suis juste un type avec une guitare, ne me regardez pas comme ça, mais sa voix, Mathilde, sa voix qui sortait de lui, là pour nous, ça valait bien la désertion de Dieu.
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(...) mais c'est un sandwich soigneusement emballé qu'il porte à sa bouche après avoir baissé son masque et formulé une prière express où il remercie Dieu de faire sortir le pain de la terre et d'avoir tout créé par la parole. Des effluves d'œuf dur me transpercent avant d'atteindre ma voisine qui s'asperge de parfum le poignet droit dans lequel elle enfouit son nez en cherchant des yeux un soutien complice de mon côté. Je suís une parfaite inconnue, mais à cet instant je suis la seule personne au monde capable de la comprendre, ...
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Agis d'abord, tu comprendras ensuite.
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