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Citations de Wallace Stegner (292)


-Charity, glissa Comfort, tu raisonnes comme un tambour.
p.118
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Les années passèrent : nuits d'été étouffantes, humides et chaudes, sans un souffle de vent, durant lesquelles les trois adultes, couchés dans trois chambres différentes, fenêtres grandes ouvertes, entendaient les pleurs irrités de l'enfant dans les ténèbres oppressantes ; journées interminables où les vêtements collaient aux corps humides de transpiration, où les feuilles de chêne se fanaient sous la chaleur, où la seule pièce passablement confortable de la maison était le petit salon ; la lente maturation de septembre, les champs blonds, la ferme bruissant de l'activité de tous les saisonniers, et, de la fenêtre du grenier à foin, l'extraordinaire flamboiement des berges de la rivière ; en octobre les premières chutes de feuilles encore hésitantes ; et entre deux tâches, cet intense regret qui jamais ne mourrait, qui resterait caché sous forme de silence, de dureté, de répression des sentiments, jusqu'à ce qu'il devînt une habitude, de sorte que tous les trois oubliaient parfois pendant des jours les raisons du silence vigilant et de la désolation qui régnaient dans leur maison. (p.70)
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C'est une bien piètre mémoire que celle qui ne regarde qu'en arrière.
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Auprès d'une telle rivière, il est impossible de croire que l'on sera un jour pris par l'âge et la fatigue. Chacun des sens fête le torrent. Goûtez le, sentez sa fraîcheur sur les dents : c'est la pureté absolue. Observez son courant effréné, le constant renouveau de sa force; il est éphémère et éternel.
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Je n’avais jamais eu d’endroit où je me sentisse vraiment chez moi, j’avais passé ma vie en déplacements, même quand j’arrivais à me convaincre que je m’étais enfin posé. Le chien errant domestiqué. Appelez-moi Ulysse, mais ayez soin d’ajouter : Pénélope m’a embrassé. N’ayant ni feu ni lieu, je me faisais de la stabilité l’idée que peut en avoir un chat de gouttière.
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- Joe, dit-elle en posant sa main fraîche sur le dos de la mienne, ne soyez pas triste. [...] Il est juste que la mort existe, c'est tout aussi naturel que le fait de venir au monde. Nous faisons tous partie d'un grand fonds commun de la vie, nous sommes débiteurs de l'espace que nous occupons et des substances chimiques qui nous constituent. Dès lors que l'on admet qu'il ne s'agit pas d'une abstraction, mais bien de quelque chose dont on est redevable à titre personnel, cela ne devrait plus être un drame. [...]
C'est quand même compliqué, vous ne trouvez pas d'être un humain ? reprit-elle. Les animaux semblent renoncer à la vie de si bonne grâce. Même quand c'est violent, cela n'en paraît pas moins naturel. Ils atteignent l'âge adulte, ils se reproduisent, beaucoup des jeunes meurent, mais quelques-uns survivent, de sorte que le phylum est préservé et que les aînés peuvent mourir, comme le saumon épuisé par son périple ou le vieux caribou assailli par les le loups, et c'est bien, c'est ce à quoi ils s'attendent et c'est ce qu'exige la nature.
[...]
Je crois que la conscience fait de nous des individus, et que, parce que nous sommes des individus, nous avons perdu cette faculté d'accepter notre sort.
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Je crois que la conscience fait de nous des individus, et que, parce que nous sommes des individus, nous avons perdu cette faculté d’accepter notre sort.
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Je me la représente avec netteté. Vue d'ici, elle paraît terriblement peu adaptée. Elle était toujours très soucieuse de sa mise.[...]Et elle vivait à une époque où les femmes s'enveloppaient de yards de satin, de serge, de taffetas, de bombasin, que sais-je encore, avec tournures, jabots plissés et manches gigot, le tout soutenu par une armature de baleines. Une femme d'aujourd'hui résidant sur un site minier, fût-elle mariée à l'ingénieur en chef, passe sa vie en jeans et sweat-shirt. Grand-mère ne faisait pas la plus petite concession aux endroits qu'elle habitait. J'ai une photographie d'elle montant à cheval dans ce qui a tout l'air d'un costume de cour, et une autre prise au bord de la Boise dans les années 1880, un canot de construction locale à ses pieds, une tente à l'arrière-plan et son troisième bébé sur l'épaule. Et qu'y porte-t-elle? Une robe longue, de singalette ou quelque chose d'approchant, à col montant, taille pincée, triple empiècements et manches bouffantes. Plus un chapeau de paille.
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Ici, même le temps qu’il fait est un agent de cette monotonie. Les matins s’enchaînent une, deux, trois semaines durant sans que varient la température, la lumière, les couleurs , l’humidité, ou, si variations il y a, elles s’opèrent par d’infimes gradations prévisibles et parfaitement négligeables. Jamais une tempête, un orage, un coup de vent ; jamais, à cette époque de l’année, le moindre cumulus. Guère de signes indiquant que l’été fait place à l’automne, si ce n’est le vert intense des madias, qui, aussi avant en saison et comme en se riant de la sécheresse, apposent leurs taches crues sur les versants recuits par le soleil. Le parfum de cette herbe s’impose en même temps que sa couleur ; il recouvre bientôt tout le coin, se laisse porter par les petits courants d’air, vous entête, imprègne chaussures et pantalons, le chat qui a musardé, les placards où l’on a rangé chaussures et pantalons, les mains qui ont caressé le chat.
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La voiture entre en roue libre dans le garage, s'arrête en douceur. Nous nous regardons.
- Fatigué? me demande Ruth dans un murmure.
Son minois de raton laveur apprivoisé luit à la faible lumière du tableau de bord. Ses yeux paraissent chercher les miens avec un soupçon d'anxiété. Je remarque que des plis de fatigue se dessinent autour de sa bouche et de ses yeux, et je déborde de gratitude pour ces quarante années durant lesquelles elle s'est interposée entre moi et moi-même. Je me penche pour lui donner un baiser, puis me laisse aller contre mon dossier et lui réponds:
- Je ne sais pas trop. Je ne sais si je suis fatigué, ou triste, ou désorienté. Ou peut-être tout simplement irrité de ce que, dans une vie, il ne nous soit pas donné suffisamment de temps pour débrouiller quoi que ce soit.
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Si l'on craquelait l'émail de sa sophistication, on découvrait une petite fille aux anges en train de jouer à Vivre.
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Henry était pondéré, inof­fensif, réti­cent même à annoncer sans ambages qu’il venait pour la voir elle et non son père, au point qu’il s’était montré capable de passer une demi-​douzaine de soirées au salon à converser avec Nels Norgaard sans adresser plus de dix mots à Elsa. Il était posé, inca­pable d’un mot dur envers quiconque, gentil, si digne de confiance mais si dépourvu de charme. Comme il était dommage, songea-​t-​elle une fois en soupi­rant, que Bo, avec son aisance inso­lente, son intel­li­gence, son physique puis­sant et délié, ne possédât pas un peu du calme rassu­rant d’Henry. Mais à peine commençait-​elle à se laisser aller à cette idée qu’elle se repre­nait : non, se disait-​elle avec une pointe de fierté, jamais Bo ne pour­rait ressem­bler à Henry. Il n’avait rien d’un animal de compa­gnie, il n’était pas appri­voisé, il ne suppor­tait pas les entraves, en dépit de ses efforts aussi intenses que fréquents.
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Il engagea la décapotable sur le chemin, et Margaret se laissa aller contre son dossier pour regarder le ciel se déverser sur elle en une enveloppante cascade de bleu, parcourue de branches d'arbres et de petits nuages en choux à la crème. [...] C'était si exquis que cette journée fut telle qu'elle l'était, qu'elle en frissonna avec une sensation presque insupportable de vie et de bien être.
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Qu'arrive-t-il donc à la jeune chair pour qu'elle s'altère de la sorte ? J'ai pincé la peau du dos de ma main : elle est restée dressée comme un boudin de mastic et ne s'est résorbée qu'avec lenteur. Déperdition d'élastine. Mais qu'est-ce donc que cette élastine ?
Et pourquoi la perdons-nous ? Quel est cet arrêt ou ce ralentissement de notre chimie, cette petite usine qui dépose son bilan ou se met en grève sur le tas ?
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Laissant Wizard paître l'herbe du fossé, nous nous sommes assis sur un mur de pierres sèches. Odeurs lourdes de pousse et d'humus, où se mêle l'acidité tout automnale de végétaux en décomposition. Rumeur assoupie de mouches et de bourdons. De bruns criquets bondissent à nos pieds. Un chemin ombreux s'ouvre dans les bois sur notre gauche, qui ressemble plus à une trouée naturelle qu'à un passage frayé par l'homme et se referme au bout d'une trentaine de pas. Un muret le longe qui disparaît bientôt au milieu des prunelliers, frênes et peupliers. d'entre ses pierres disjointes sortent des arbres gros comme la cuisse. Tout au bout, là où il est mangé par les feuillages, une poche de soleil où palpite ce qui pourrait être un feu follet : plus probablement un nuage de moucherons.
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L'histoire humaine est, dans sa totalité, sociale et non pas individuelle. Nous avons peu à peu appris à convertir l'énergie vitale en organisation sociale. En dehors de cette société que tous ces jeunes mettent plus bas que terre, l'individu n'existe pas; il ne possède pas de langage, de rôle, d'arts, d'idées, et j'en passe, qu'il ne tienne du groupe social. L'individu est un animal inculte. C'est à la société qu'il doit jusqu'au cheminement de sa révolte.
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Son enfance avait été une maladie qui n'avait pas produit d'anticorps. Il suffisait d'omettre un instant de lui appliquer humour ou ironie pour qu'elle s'enflamme aussitôt comme une sinusite chronique.
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Il y avait quelque part, pour peu qu’on sût les trouver, un endroit où l’argent se gagnait comme on puise de l’eau au puits, une bonne grosse montagne en sucre où la la vie était facile, libre, pleine d’aventure et d’action, où l’on pouvait tout avoir pour rien.
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Il paraît qu'il y a plus de gens vivant actuellement sur la terre il n'en vécut dans tout le cours de l'histoire humaine. J'ai peine à le croire. [...] Vivant pour quoi ? avais-je envie de demander [...]. Et occupés à quoi ? Là-dessus, j'avais mon idée. Nous nous agitons parce que nous nous agitons, nous bâtissons parce que nous bâtissons, nous nous reproduisons parce que nos reins nous l'intiment, et ensuite nous reportons sur nos enfants, qui ont les leurs et ne veulent pas des nôtres, les espérances que nous ne pouvons plus evoquer à notre sujet sans faire la grimace.
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Jetant un œil sous le capot, j'ai vu qu'il ne s'agissait pas d'un douze cylindres en ligne, comme je me l'étais toujours figuré, mais d'un V-16. Ce moulin aurait tracté une pompe à incendie. À chaque temps un flux d'essence gros comme le doigt devait gicler dans le carburateur. Elle haletait à notre adresse avec le chuchotement whisky-et-emphysème d'une douairière d'Edith Wharton. "Dollar-dollar-dollar-dollar-dollar", faisait-elle.
p366
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