Citations de Walter Benjamin (500)
Une bonne traduction porte en elle la nostalgie de la langue absente.
« Chaque é́poque rêve de la suivante »
Nous ne lisons pas pour augmenter nos expériences, mais pour nous augmenter nous-mêmes
Les citations dans mon travail sont comme des brigands sur la route, qui surgissent tout armés et dépouillent le flâneur de sa conviction.
Nous ne lisons pas pour augmenter nos expériences, mais pour nous augmenter nous-mêmes
Chaque livre possède deux poids différents : d'une part, un poids physique et, d'autre part, un poids subjectif qui se rapporte au contenu du livre, voire à son importance. Combien de fois nous retrouvons-nous, en quittant un lieu, devant ces décisions difficiles : quels livres aimerions-nous ou pourrions-nous emporter ? (p. 7)
Quand un être très proche de nous meurt, il y a, dans les changements des prochains mois, quelque chose qui, croyons-nous remarquer […], ne peut se déployer qu’en son absence. Nous finissons par le saluer dans une langue qu’il ne comprend déjà plus.
L'humanité est devenue assez étrangère à elle-même pour réussir à vivre sa propre destruction comme une jouissance esthétique de premier ordre.
Nous ne lisons pas pour augmenter nos expériences mais pour nous augmenter nous-mêmes.
Il fait beau. Quand on va assez loin en promenade dans la matinée ou dans l’après-midi, on arrive à un endroit où, pendant un moment, on est malgré tout encore content de vivre.
Le meurtre du criminel peut être moral - jamais la légitimation de ce meurtre.
Le premier indice d’un processus qui aboutit à la chute de la narration est le développement du roman au début des Temps modernes. Ce qui distingue le roman de la narration (et du genre épique au sens restreint), c’est ce fait qu'il dépend essentiellement du livre. Le roman ne peut se propager qu’à partir du moment où l’imprimerie est inventée. La tradition orale – héritage du genre épique – est autrement constituée que ce qui fait le fond du roman. Ce qui oppose le roman à toute autre forme de prose et avant tout à la narration, c'est qu'il ne procède pas de la tradition orale et ne saurait la rejoindre.
Ce que le narrateur raconte, il le tient de l'expérience, de la sienne propre ou d'une expérience communiquée. Et à son tour il en fait l'expérience de ceux qui écoutent son histoire. Le romancier, par contre, s'est confiné dans son isolement. Le roman s'est élaboré dans les profondeurs de l'individu solitaire, qui n'est plus capable de se prononcer de façon pertinente sur ce qui lui tient le plus à cœur, qui est lui-même privé de conseil et ne saurait en donner.
Le roman révèle la situation d’un homme qui ne reçoit ni ne donne aucun conseil. Écrire un roman, c'est faire ressortir par tous les moyens ce qu'il y a d'incommensurable dans la vie. Dans l'abondance même de la vie et par la représentation de cette abondance, le roman révèle la profonde aboulie du vivant. La première grande œuvre du genre, Don Quichotte, nous montre d'emblée comment la grandeur d’âme, l'audace, la serviabilité de l'homme le plus noble sont entièrement dénuées de bon conseil et ne contiennent pas la moindre étincelle de sagesse.
Le narrateur - V
" Son érudition était grande , mais il n'était pas un spécialiste ; Son travail portait sur des textes et leur interprétation , mais il n'était pas philologue ; Il était très attiré , non par la religion , mais par la théologie et le modèle théologique d'interprétation par lequel le texte lui-même est sacré , mais il n'était pas théologien et ne s'intéressait pas particulièrement à la bible ; Il était un écrivain-né, mais sa plus grande ambition était de produire une œuvre consistant entièrement en citations ; Il fut le premier allemand à traduire Proust , mais il n'était pas traducteur ; Il recensa des livres , mais il n'était pas un critique littéraire ; Sans être poète ni philosophe , il pensait poétiquement . "
Hannah Arendt
Pauvres, voilà bien ce que nous sommes devenus. Pièce par pièce, nous avons dispersé l’héritage de l’humanité, nous avons dû laisser ce trésor au mont de piété, souvent pour un centième de sa valeur, en échange de la piécette de l’ « actuel ».
L’humanité « est suffisamment aliénée à elle-même pour être capable de vivre sa propre destruction comme une jouissance esthétique de tout premier ordre. »
A la plus parfaite reproduction il manque toujours quelque chose : l’ici et le maintenant de l’œuvre d’art, — l’unicité de sa présence au lieu où elle se trouve.
C'est cette existence unique pourtant, et elle seule, qui, aussi longtemps qu'elle dure, subit le travail de l'histoire.
Qu’est-ce qui fait finalement la publicité à ce point supérieure à la critique ? Non pas ce que disent les lettres en néon rouge, mais la flaque de feu qui les reflète sur l’asphalte.
Le récit, tel qu’il a longtemps prospéré dans le monde de l’artisanat – rural, maritime puis citadin-, est lui-même une forme pour ainsi dire artisanale de la communication. Il ne vise point à transmettre le pur « en soi » de la chose, comme une information ou un rapport. Il plonge la chose dans la vie même du conteur et de cette vie ensuite la retire. Le conteur imprime sa marque au récit, comme le potier laisse sur la coupe d’argile l’empreinte de ses mains.
L'homme à jeun parle encore du rêve comme s'il parlait dans son sommeil.
(...) Dans ma lettre du 3 novembre 1937, je vous ai entretenu d'un livre, " Le Merinos", de Henri Calet.Je vous fait communiquer " Fièvre des Polders" que le même auteur vient, après une pause de trois ans, de publier. La qualité assez remarquable de ce roman fait comprendre que Calet ne peut pas se conformer au rythme de production habituel aux romanciers, à savoir un ou deux volumes par an.
( p.145)