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Citations de Yann Queffélec (605)


"À treize ans, bientôt quatorze, elle en paraissait dix-huit avec ce corps déjà mûr, cette bouche sanguine, ces yeux bleus en amande, et ces longs cheveux vermeils comme un feu sur les épaules." (p. 13)
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Le bonheur, dis donc, quelle connerie d'en parler. Le bonheur, c'est de la fermer quand on est heureux, motus.
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Nous habitions Paris, trou puant, Ben. Des corps humains gisaient sur les trottoirs, morts ou vifs. Nous ressentions pour eux la même sympathie que pour des excréments canins. Nous nous changions en prédateurs. Je m'explique : nous avons atteint notre seuil critique en tant que bons citoyens, et plutôt que d'entrer en divergance nous partons, nous allons au vert, nous naturaliser. Outre les yeux, contemple cet océan végétal à perte de vue, respire un peu cet Eden. De l'herbe et du vent.

- C'est la clime qu'on respire. Et personnellement j'aime mieux fumer l'herbe que la brouter, on est d'ailleurs quelques uns...

- ...à saigner nos parents, à leur vider les poches, à les désespérer. Et vous en crevez, les gars, vous donnez la becquée aux milliardaires, vous allaitez goulûment les aigrefins de la haute finance et en retour ils vous font la loi, la morale, ils vous accusent de saboter leur petit business mondialisé. La moitié du temps vous la passez chez le psy, l'autre moitié dans les commissariats. A quinze ans c'est cuit, emballé, il n'y a plus qu'à vendre vos corps bousillés aux fast-foods pour qu'ils en fassent du bio, du big-mac labelisé pur boeuf de plein air, deux pour le prix d'un, traçabilité garantie, je continue ?
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Ludo compta qu'il était au Centre Saint-Paul depuis dix mois. près d'un an. sa mère n'était jamis venue le voir, il n'était jamais sorti, Tatav ne l'aimait pas, Micho agitait les promesses d'un retour aux Buissonnets dont on le payait avec du vent. Alors il fut envahi physiquement par la nostalgie : il revécut les odeurs du soir au grenier, les nuits d'affût contre la porte maternelle, les après-midi à la mer, les petits déjeuners, les avanies, bons et mauvais souvenirs arrivant égaux et dorés jusqu'à lui, et le ressentiment qu'il éprouvait rejaillit sur les enfants.
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Que faire ?... J'entrouve la bouche et laisse larmes et salive mêlées couler entre mes dents, je déglutis son chagrin. C'est elle qui m'embrasse, m'enlace, pas moi. C'est elle qui me donne la menue becquée d'un baiser brûlant. Je suis un irréprochable petit mari embrassé malgré lui pendant qu'il dort. À peine si je me repousse insensiblement vers Claire pour inviter Sibylle à venir au lit. Laisser faire ce n'est pas agir, ce n'est pas brusquer, violer, attenter. Laisser un baiser suivre son cours est une bonne action. Imaginez combien de temps peut durer un baiser quand il entre dans votre bouche et se sent chez lui.
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En défaisant ma valise j'ai retrouvé le soutien-gorge de Sibylle au fond, rangé entre mes deux boxers gris. Je l'avais oublié, celui-là. C'était la meilleure cachette que j'aie trouvée le soir du tournoi. Je l'ai déplié, respiré une dernière fois.
Pour mon malheur, mes yeux sont tombés sur deux étiquettes blanches superposées, cousues près des agrafes. L'une portait la marque Princesse Tam Tam, l'autre les instructions de lavage et sous la dernière, écrit proprement au stylo-bille bleu, on lisait le numéro 06 69 96 69 96 dont vous conviendrez qu'il est enfantin à mémoriser pour un homme doué d'érection.
Et vous conviendrez que j'étais tombé sur une sacrée louloute, une manipulatrice de douze ans. Elle m'avait espionné dans les vestiaires. Elle avait laissé son soutif accroché sur la patère à mon intention. Elle avait fait exprès de m'en exhiber la plénitude en renouant son lacet. C'était elle, probablement, qui s'était proposée pour jouer en double. Mal à l'aise, j'ai fourré le soutif dans ma veste avec l'impression d'empocher les mues d'un serpent mort et je suis parti découvrir la ville.
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Ce soir-là, Nicole rentra vers minuit. Ludo était couché depuis peu. Pareil à ces condamnés ignorant l'échéance du verdict ou ces vieillards lassés d'attendre la mort, il reprenait plaisir à vivre et s'interdisait de penser au futur. Il entendit la Floride arriver de loin, piler à grand bruit, la portière claquer, le crochet du portail racler sur le gravier, puis le moteur s'emballer et la tôle grincer contre les montants de granit : Nicole une fois de plus avait trop bu - sa voiture était une gimbarde. Il s'enfouit dans les draps quand elle se mit à crier son nom du rez-de-chaussée, ne cessant de brailler tout en montant l'escalier.
"Ludo !"
Elle était là, sur le seuil, la respiration sifflante, se découpant dans la lumière du corridor.
"Ludo !... je voudrais que tu disparaisses."
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On lui montait ses repas une fois par jour en fin d'après-midi. Des bouillons au tapioca, des topinambours, et les mulets que Monsieur Blanchard pêchait sur le port, au pied d'une estacade où les commères vidaient leurs seaux. Jamais de pain, même rassis. Nicole avait refusé son lait ; le boulanger refusait son pain.
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Depuis sept ans qu'il vivait au bord de la mer, Ludovic ne l'avait jamais vue. Il l'entendait. Mais au grenier la lucarne donnait sur la cour, sur le fournil, et là-bas sur des pins monotones que les brouillards matinaux calfreutraient. Rugissement, murmure, le bruit se poursuivait jour et nuit, si fort par mauvais temps que même les ronflements du boulanger s'effaçaient. L'enfant serait bien allé voir ; mais la porte était fermée à clé.
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Parfois, bipés un soir en train de câliner maman, rentrés chez eux à l'aube, ayant pris entre-temps des hélicoptères furtifs, changé de fuseau horaire, sauté en parachute, essuyé des tirs et traité des cibles bien comme il faut, ils se retrouvaient bâillant et poussant le caddie familial au supermarché, hésitant devant les prix, reniflant les melons en promotion, farfouillant parmi les steaks surgelés, écoutant maman piapiater sur la cherté des choses ou les priant de se montrer plus attentifs, de se comporter en maris normaux.
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“Et après ? Après, t’as la gamme infinie des hasards malencontreux. On n’est plus en démocratie, cocotte, chez nous. C’est fini, Sarko, les petits arrangements…[…] je vois mal comment tu pourrais échapper au intérêts supérieurs de l’Etat…Moi non plus d’ailleurs..On aura chacun son tiroir à l’institut médico-légal. On sera tout bleu, tout froid, vachement glamour.”

- “Vous viendriez parler à l’antenne
- Ce pays est assez morose, inutile de l’accabler davantage. Ajouter le beurre à l’argent du beurre…En fait, on ne sait plus trop si le devoir est d’informer ou de cacher les faits.”

“Le même parcours du combattant. Quand on leur demandait comment, la guerre finie, ils avaient pu souhaiter intégrer le GIGN, puis le corps des Chats Maigres, ils répondaient honnêtement que, oui, la guerre leur manquait. Ils n’étaient ni des brutes, ni des fous sanguinaires, ni des excités, ils étaient doux comme des chats angoras, mais la guerre leur manquait. Ils haïssaient la guerre, la violence, la rage des hommes entre eux, l’imbécillité des frappes ou du corps à corps, l’arrogance du métal aveugle déchirant des familles ou ce qu’il en restait, la peur éprouvée en croisant le regard d’un forcené guère plus fautif que vous, celui d’un vrai tueur. Ils ne pouvaient plus s’en passer. ”

“Les femmes savent tout, mais elles veulent des mots. Tant que les phrases n’ont pas franchies nos lèvres, elles n’existent pas.”
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