Oui, dans la même veine (en studio), j'avais vu assez jeune
Amphitryon 38 de Giraudoux, avec Jean Piat je crois. Alors, on est d'accord, c'est moins bien qu'au théâtre, moins bien évidemment qu'au cinéma, mais c'était accessible à tous et c'est une des mes premières pièces vues jouées. C'est un peu comme voir des reproductions de tableaux : tu n'as pas accès à l'oeuvre directement, mais ça reste un bon moyen de l'approcher au mieux, faute de pouvoir la voir dans son contexte.
Ce qui est terrible, c'est qu'il existe un peu partout des tarifs accessibles pour les étudiants, les enfants, les chômeurs, des tarifs dernière minute aussi, mais que la plupart des gens ne sont même pas au courant, et que bien souvent ils ne sont pas intéressés, parce que le théâtre, l'opéra, ça leur paraît hors de portée, ennuyeux, trop intello. Alors qu'au théâtre, il y a de tout, pour tout le monde ! Et comme ils s'enferment dans une espèce de bulle qu'on calfeutre, en plus, bien soigneusement autour d'eux (des fois qu'ils se mettraient à être curieux et donc, je suppose, dérangeants), ils vont continuer à rater plein de choses. Et c'est pas près de s’arranger.
Je connais mieux le monde des musées que celui du théâtre, mais combien de chômeurs profitent de la gratuité du Louvre (que tout le monde ou presque a envie de visiter au moins une fois dans sa vie) ? Non seulement, la majorité de ceux qui habitent en Île-de-France ne savent pas qu'ils peuvent y entrer gratuitement, mais en plus, ceux qui n'habitent pas Paris devront payer le voyage, voire le logement. On en revient au raisonnement de
Bruidelo : si tu dois payer le voyage (et le logement), c'est plus du tout accessible. J'ai fait beaucoup d'allers-retours Dijon-Paris pour aller voir des expos et visiter des musées et des galeries. Ça suppose 30€ minimum le trajet premier prix non-remboursable, et dans les 60€ le trajet remboursable, plus les frais de métro, plus éventuellement les entrées parfois un peu chères même avec un tarif réduit. Je me préparais une boîte bento et une bouteille d'eau, mais bon, c'est chiant à trimbaler, tout comme toutes les affaires que tu dois transporter (appareil-photo, pull au cas où il ferait trop froid, etc.), et faut être hyper motivée et hyper passionné, parce que si tu veux en avoir pour ton argent, tu as intérêt à faire à peu près trois musées / expos dans la journée, ce qui est crevant (et t'es bien moins attentif en fin de journée).
Pour en revenir au théâtre, les diffusions en cinéma devraient donc être bien moins chères, et les retransmissions à la télévision étaient un véritable atout (bon, certes, on avait pas mal de vaudevilles bas-de-gamme dans la programmation, mais pas seulement; loin de là). D'autant que la taille des écrans télé a nettement augmenté, et que c'est devenu plus sympa à regarder dans son salon que dans les années 80. Je pense aussi que les programmations théâtrales dans certaines villes pourraient être revues à la hausse : je ne suis pas très emballée par ce qu'on nous propose à Dijon, que ce soit du côté de notre scène nationale ou du côté de notre grande asso culturelle. Du Bégaudeau à profusion par-ci, des petites troupes proposant souvent des mises en scène assez peu intéressantes par-là : on doit pouvoir faire mieux.
Et comme tu le dis,
5Arabella, pour avoir accès au théâtre, mais aussi à tout le reste en matière de culture, il est nécessaire de posséder un capital financier ET un capital culturel. Ce n'est pas le cas de la majorité de la population, et tout est fait pour que ça empire.
(Allons bon, voilà à l’instant que les lycéens de mon quartier ont décidé de jouer aux Gilets jaunes. Après m'être fait frappée et insultée samedi par ces gentils manifestants ouverts d'esprit et totalement pacifistes, j'en ai plus que ma claque...)