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Expert nature writing

Cet insigne distingue les lecteurs qui aiment marcher dans les pas de Henry David Thoreau ou de Jim Harrison afin de retrouver dans leurs lectures la solitude des grands espaces.
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L'enfant rivière

Je me suis perdu sur les bords de la rivière des Outaouais, dans un monde où la nature a repris peu à peu ses droits, ne cesse de clamer sa puissance.

L'enfant rivière, le titre de ce livre m'a immédiatement fait penser à celui d'un vieux roman qui sommeillait dans mes souvenirs d'écolier, l'enfant et la rivière, d'Henri Bosco.

Ici c'est une sorte de dystopie à laquelle nous invite Isabelle Amonou, nous sommes en 2030, c'est presque demain et l'autrice nous laisse entrevoir ce qui semble nous attendre. La proximité de ce futur rend le sujet particulièrement prenant et inquiétant.

Les premières lignes sont saisissantes d'effroi dès l'incipit : nous assistons à une scène de chasse où le gibier n'est autre qu'un enfant... L'enfant est capturé vivant, puis remis aux autorités, on ne sait pas ce qu'il adviendra de lui... Cette violence à fleur de peau en dit long sur l'état dans lequel l'humanité est parvenue.

Les pages suivantes nous amènent au Québec. Il s'appelle Nathan, cet enfant qui va disparaître subitement au bord de la rivière des Outaouais en mai 2024, il a suffi quelques moment d'inattention de ces parents, les recherches sont infructueuses, la rivière n'a pas rendu l'enfant. de cet événement tragique, le couple formé par les parents, - deux êtres qui s'aimaient cependant d'un amour fou, Zoé et Thomas, ne survivra pas, s'éclatera, chacun prenant une trajectoire opposée après le deuil pour porter chacun à sa manière le chacun qui a suivi...

Pourtant la mère de l'enfant, Zoé, est persuadée que l'enfant vit encore, quelque part, là-bas, dans les lointains... Ce sont ses racines amérindiennes qui le lui disent. Zoé descend du peuple des Algonquins...

Six ans se sont passés et voici que nous entrons dans le récit avec cette histoire étonnante qui ressemble presque à ce qu'on commence à vivre dans ce futur totalement probable qui nourrit cette histoire.

Dans ce monde futur, les réalités des changements climatiques qui ont commencé à porter leurs effets en profondeur, ont désormais complètement changé la donne sur le plan humanitaire et créé une influence dans les flux d'immigration. La violence est omniprésente. Des migrants ne cessent d'affluer vers le Canada, poussés par le réchauffement climatique et la chute des États-Unis.

À l'occasion des funérailles du père de Thomas, celui-ci revient sur un lieu qui a scellé à la fois un amour et un drame.

C'est alors qu'il découvre que Zoé n'a jamais cessé de renoncer à la disparition de Nathan.

Il découvre également un autre pan de la vie de Zoé, son passé...

Mais là-bas tout près du rivage de la rivière des Outaouais, veille une communauté d'enfants perdus aussi fragiles que déterminés et dangereux.

Ce roman est à la confluence des frontières qui séparent plusieurs territoires immenses qui ne sont pas seulement géographiques.

C'est un texte étrange, où les thèmes multiples et emmêlés peuvent surprendre, dérouter le lecteur, d'autant plus que les personnages principaux me sont apparus peu attachants. Je n'ai pas ressenti de réelle empathie à leur égard. Quant aux enfants perdus, n'en parlons pas...

Cependant l'autrice, à travers une écriture qui se tient avec brio, nous guide dans les méandres d'une histoire prenante qui ne cesse de nous poser des questions existentielles, celles auxquelles il nous faudra bien nous atteler sans tarder.

La première de couverture est incroyablement belle et je tiens à souligner que ce roman est édité dans la toute récente maison d'éditions Dalva, - quel beau nom n'est-ce pas, qui met à l'honneur des autrices contemporaines. À travers leurs textes, elles disent leur vie de femme, leur relation à la nature ou à notre société. Elles écrivent pour changer le monde, pour le comprendre, pour nous faire rêver.

En cela, le livre d'Isabelle Amonou, - d'origine morlaisienne je tiens à le souligner, a toute sa place dans leur catalogue.



[ Livre lu dans le cadre de la sélection du prix Cezam 2024 ]

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Le Coeur de l'hiver

Oh my god, je vais devoir dire du mal - un peu- de ce nouvel opus mettant en scène mon héros, j'ai nommé Walt Longmire. Je l'avais quitté sur une scène affreuse, concluant Western Star, je le retrouve donc au Mexique, en train de tenir le premier rôle d'une série B moins, à la sauce Tarentino ! Mais que s'est-il passé dans la tête de Craig Johnson ? Je me sens trahie, comme je l'ai été après la difficile lecture de Sur la dalle de Fred Vargas, que je place au-dessus de tout... en temps normal. Nous y re-voilà... Walt part en guerre, quasiment seul, contre un cartel mexicain des plus sanguinaires. Walt, fatigué, blessé, assoiffé, dégomme d'affreux bandidos, à l'aide d'un aveugle, d'une danseuse de flamenco, d'une nounou, et d'un docteur-chasseur-de-jaguars. L'intrigue est difficilement crédible et peu de personnages sortent du lot, à part le coureur indien (il en faut bien un puisque Henry Standing Bear est resté dans le comté) et l'agent spécial mexicain. Pour le reste, on retrouve tous les stéréotypes habituels qui sont la marque de fabrique de Craig Johnson. L'insupportable Vic n'est guère présente, c'est donc un bon point mais je dois avouer que les personnages féminins de la saga de Longmire ont le don de m'agacer, à commencer par sa fille. Elles sont toutes, peu ou prou, bâties sur le même modèle. Autre motif de crispation, la bonté de Walt qui hésite toujours à dégommer la plus immonde crapule et ce faisant, est responsable de la mort de ses bons et loyaux amis. Ce comportement contradictoire (hey, on parle d'un cartel, pas d'une bande de délinquants en culottes courtes !) parait peu vraisemblable pour ne pas dire crétin. Et puisqu'on est au Mexique, au moment de la fête des morts, figurez-vous qu'il faut beaucoup insister pour tuer les méchants. On a beau leur lancer des grenades, tirer dessus à plusieurs reprises, ben non, ils sont toujours aussi nombreux et certains ont même plusieurs vies !! J'ai pensé à Tarentino pour la violence, mais aussi à Rambo dans une certaine mesure, et aux western spaghetti... pas le meilleur des mélanges. Il a fallu que je je souvienne avec force que la saga Walt Longmire était une des plus belles découvertes littéraires à mes yeux pour que je parvienne à terminer ce roman. Craig Johnson m'avait habituée à plus de finesse, et de solidité. Je vais donc tâcher d'oublier cette parenthèse mexicaine, en espérant que cette faute de goût n'est qu'une faiblesse passagère. Caramba !
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Le Bois Duncton

Un roman de fantasy, il me fallait un roman de fantasy. Quelle drôle d'idée ! J'en avais lu pas mal à l'époque où mes garçons ados les dévoraient. J'en avais aimé certains, d'autres moins. Je fuyais trop de violence, trop de combats, j'aimais la création d'un monde, de tout un univers avec ses règles, ses traditions, ses héros dotés de certains pouvoirs magiques (mais pas trop sinon c'est trop facile), les quêtes menés par ceux-ci , à la recherche de talismans, ou pour sonner le glas d'un pouvoir trop malfaisant.



Pour m'y replonger, quoi de plus simple que d'aller consulter la bibliothèque d'un de mes amis, spécialiste de la question. Il s'agit bien sûr d'Éric, @CasusBelli. Et quelle ne fut pas ma surprise d'y trouver un livre déjà dans ma PAL, ajouté il y a quelques mois après avoir farfallé avec beaucoup de plaisir. Ce sera donc l'occasion après avoir tremblé, ri, vécu avec les lapins de Watership Down, de découvrir les taupes de le bois Duncton. Et de m'y retrouver en bonne compagnie. Merci entres autres à Onee, Dom et Sandrine qui m'avaient fait ajouter ce livre à l'époque.



Il y a des points communs entre ces deux livres. Et puis des différences, Celui-ci se rapproche en effet beaucoup plus de mes souvenirs de lectures de Fantasy, en y reprenant tout ce qui me plaisait sans rien de ce qui me rebutait.

L'histoire qui nous est racontée grâce au livre du scribe Boswell est celle de Brin de Fougère et de Rébecca, deux taupes du Bois Duncton, qui vont être confrontées à de nombreuses aventures, vont quelquefois se perdre pour mieux se retrouver, vont affronter de multiples dangers er réaliser de grandes choses. Et Boswell, cette petite taupe handicapée, si grande par la sagesse, si constante dans l'amitié qu'elle leur porta, sera là pour écrire le livre de leur vie et raconter leur quête.



L'auteur a créé tout un monde avec ses différents réseaux, ses traditions, ses mystères, ses sages et érudits, ses cantiques sacrés et ses cérémonies, ses brutes et ses tyrans, ses perfides et ses candides. Ce monde va être confronté à beaucoup de désolation, entre règne de tyran sanguinaire, sécheresse, incendie, peste. Et il va falloir beaucoup de courage aux héros de cette histoire, de courage et de sagesse, d'humilité aussi, de foi en un pouvoir plus grand qu'eux tous, même si ce pouvoir incarné par des pierres, laisse les pires horreurs se produire. Ce monde est celui de taupes, et les caractéristiques de celui-ci sont bien celles imposées par ces animaux : nécessité de trouver des vers de terre pour se nourrir, vie dans des terriers creusés au sein de tunnels formant des réseaux complexes. Mais ce monde ressemble aussi furieusement à celui des humains, par les sentiments et les motivations qui guident les différents personnages. Et, le désir de savoir la prochaine péripétie m'a entrainée à tourner les pages les unes après les autres, me sentant finalement assez proches de ces animaux.



Et ce qui a considérablement contribué à mon plaisir de lecture, c'est la poésie dégagée par ce texte, la beauté de l'écriture. Les descriptions de la faune et de la flore de cette campagne britannique sont somptueuses, et c'est dans cette richesse que ce roman se rapproche le plus de Watership Down. Les manifestations de la nature, bienveillantes comme la douceur d'une brise dans les feuilles d'un hêtre, ou terrifiantes comme le blizzard ou l'ouragan, destructrices comme la sécheresse ou l'incendie, se mêlent étroitement à la vie des taupes, éveillant chez elles de multiples sentiments merveilleusement bien décrits par l'auteur.



Un livre d'une richesse incroyable tant par les aventures racontées, que par les sentiments décrits, par la célébration de l'érudition et la dénonciation de la tyrannie. Et ceci dans une écriture de toute beauté. Merci encore à ceux qui m'ont convaincue de le lire.

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Big Jane

Lumières sur la nuit : des étoiles brillant dans le ciel nu, des néons signalant au loin le prochain bar, le phare de l’Indian moteur vrombissant et soulevant la poussière du désert. Le blouson de cuir, et accrochée à mon ventre de buveur de bière, la belle Big Jane et ses longues jambes caramélisées qui chevauchent admirablement mon engin.



Sur la route de Kerouac, mais en version gros cube, dévalant l’asphalte d’Est en Ouest, du Nord au Sud, traversant les états vides, seuls sur leur moto, Billy et Big Jane. Comme deux copains, ils s’arrêtent boire des bières, et Billy à défaut d’être reconnu, sort de temps en temps sa guitare et son cahier à chansons où ils griffonnent quelques mélodies d’amour et de tristesse. Si vous sillonnez les honky-tonks du coin, nul doute que son nom sera reconnu de quelques piliers de comptoirs… Deux âmes libres et fragiles.



Sur la route de Cimino, au milieu de nulle part, tu t’arrêtes au Vernon White Steak House, gigantesques T-bone steaks au menu, arrosés de sauce Jack Daniel’s et de quelques pintes d’une bière qui à défaut d’être puissantes restent rafraîchissantes. Et peut-être qu’au bout de quatre pintes, le doute va s’installer en toi. Tu vas te demander ce que tu as fait de ta vie, ce que ta vie a fait de toi. Tu en concluras rapidement : rien. Donc il ne te reste que deux options : continuer à foncer sur ton Indian en fermant les yeux, ou t’engager chez les Marines pour la guerre de Corée…
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L'appel sauvage (ou) L'appel de la forêt

C'est assez récemment que j'ai fait connaissance avec Jack London, grâce à son merveilleux « Croc-Blanc ». Il était inévitable que je revienne vers lui, tout comme je suis sûre et certaine aujourd'hui que je n'en ai pas encore terminé avec lui. Quand on sait que Jack London détestait écrire, qu'il le faisait parce qu'il fallait bien gagner sa vie, on ne peut que se demander ce que ses récits auraient été s'il les avait écrits avec plus de passion. Le monsieur n'aimait pas ça, toujours attiré par de multiples aventures et contrées à découvrir, mais il faut bien lui reconnaître qu'il le faisait extrêmement bien malgré tout.



Et pour nous pondre « L'appel de la forêt », c'est de son voyage en Alaska parmi les chercheurs d'or qu'il s'est inspiré. Et en un sens, je trouve qu'il fait aussi pas mal écho avec « Croc-Blanc ». Mais là où l'on assiste à la transformation d'un chien-loup à l'état sauvage vers la domestication, c'est tout l'inverse qui se produit pour Buck, notre héros de « L'appel de la forêt ».



Buck avait une vie paisible auprès du juge Miller, avant qu'il ne soit trahi et vendu par le jardinier de la demeure familiale. Dressé et battu en conséquence, Buck n'a d'autres choix que d'apprendre vite. Et alors qu'il découvre le Grand Nord et son climat hostile, en tant que chien de traîneau, se réveille en lui, au fil des jours et des nuits glaciales, son instinct primitif. Résonne en lui, de plus en plus fort, ce qu'il nomme l'Appel, ce son qu'il reconnaît sans savoir ce qu'il est vraiment...



Bien que le processus soit inversé au niveau de l'intrigue, les thèmes sont les mêmes que dans « Croc-Blanc » : nature sauvage dominante, climat hostile, loi du plus fort, cruauté des hommes. Buck découvre la dureté de la vie et ce que les hommes et ses congénères sont capables de méchancetés. Mais pas uniquement, heureusement. Il sera également très aimé de son dernier maître, et apprendra de ce fait la signification des mots amour, respect et fidélité.



Le récit est court et se lit donc relativement vite. Il n'en est pas moins captivant et émouvant. Je me suis tout de suite attachée à Buck et j'ai pris plaisir à le suivre dans ses (més)aventures et sa lutte pour la vie, dans sa transformation en un animal primitif. L'atmosphère et le climat sont palpables tout du long. J'ai eu froid, j'ai senti la fatigue et l'épuisement après des journées interminables, j'ai senti les coups de bâton et de fouets, et j'ai également perçu ce lien indéfectible entre Buck et Thornton, tout comme j'ai entendu cet Appel qui gronde au plus profond de chacun...



« L'appel de la forêt » est aussi beau que « Croc-Blanc », sans l'effet de surprise puisqu'ici je me doutais dans quoi je mettais les pieds, et avec un petit je-ne-sais-quoi qui m'a un poil dérangée (venant sans doute du fait que Buck est prédestiné dès le début à la vie sauvage, portant en lui les gènes de ses ancêtres préhistoriques). L'histoire de Buck n'en est pas moins belle et dure, écrite d'une plume délicate, sachant aussi bien dépeindre l'ambiance et le milieu abrupts que les ressentis et comportements instinctifs.



Une belle lecture, que je n'hésiterai pas à relire dans quelques années.

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Désolations

Je retrouve cet auteur avec plaisir, sa plume rude et sombre encore une fois en Alaska.



Déjà le climat n'est pas des plus facile mais ici la tension s'installe entre Irene et Gary, les rancoeurs, les difficultés dans le couple, tout remonte à la surface au fil des pages. Je crois que parfois j'oubliais presque de respirer en lisant tellement je ressentais la tension ambiante. Les personnages secondaires ne sont pas épargnés non plus.

Un contraste frappant avec la beauté des paysages et de la nature préservée de l'Alaska.



Ce livre est noir du début à la fin, ce n'est pas un coup de coeur car la fin m'a laissé sur ma faim justement.
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Le Coeur de l'hiver

Craig Johnson, dont les romans se situent le plus souvent dans les grands espaces de l'Ouest américain, avec une intrigue policière fortement imprégnée de nature writing, est capable de restituer cette ambiance dans le désert mexicain avec toujours le même sens des descriptions et des dialogues.



Ce livre peut se voir comme une suite de Western Star à la fin duquel la fille du héros Walt Longmire était enlevée par un cartel de drogue mexicain. Il peut néanmoins être lu aisément séparément et suscitera l'envie du lecteur d'aller prendre, avec retard, le train de l'Ouest.



Ici, l'ambiance n'est plus aux immensités enneigées mais au désert brûlant du Mexique avec ses canyons, ses rivières puissantes, ses cactus et des mules qui jouent un rôle important dans cette aventure.



Walt Longmire part donc, au péril de sa vie et de celles de ceux qui l'accompagnent, se jeter dans la gueule du loup, le tyrannique chef de cartel qui a enlevé sa fille. S'ensuivent de nombreux épisodes dramatiques, les morts violentes sont enchaînées avec impossibilité de les compter, aussi bien dans le camp des "bons" que dans celui des "méchants" comme disent les enfants d'un orphelinat que Walt va délivrer finalement malgré lui.



Les dialogues ont toujours la saveur habituelle des textes de Craig Johnson, même aux instants précédant la mort ou le flirt inconscient avec elle. Ces dialogues très denses rendent facile et rapide la lecture d'un roman où la confusion apparaît régulièrement sans toutefois perdre le lecteur peu exigent sur la vraisemblance des situations.



A noter une scène finale reproduisant une corrida où les deux protagonistes sont humains, Walt jouant le rôle du taureau, subissant de terribles banderilles, voyant venir une mort inéluctable qui ne saurait survenir si l'on veut conserver le héros pour de futures aventures.



Personnellement, j'aime le style de Craig, ses évocations des sierras, des jeux de lumière du soleil, tant au lever qu'au coucher, ses constructions de paysages et, toujours, cette ambiance nature qui domine dans ses livres.



Le coeur de l'hiver est un roman très âpre, violent, une sorte de western policier succulent.
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Le Royaume du Nord, tome 1 : Harricana

Après Les Colonnes du ciel, grande oeuvre jurassienne de Bernard Clavel, celui-ci ouvre une nouvelle saga, canadienne cette fois, Le Royaume du Nord, avec ce premier tome qui campe des personnages toujours attachants dont les aventures entraînent le lecteur avec plaisir, et, en toile de fond la nature immense et souvent hostile des grands espaces canadiens.



Harricana voit une famille française venir démarrer une nouvelle vie aux abords du fleuve dont le nom donne son titre au livre, ceci vers la fin du dix-neuvième siècle. Dès les premières pages, la lutte des hommes contre la nature donne l'ambiance avec des désillusions, mais aussi des espérances. Clavel a l'art de doser dans ses livres ces différents temps qui font de la vie de ces conquérants de belles aventures humaines.



Il décrit, sans doute avec quelques clichés, la nature sauvage, gigantesque, les animaux qui la peuplent, les souffrances des hivers, les espoirs printaniers et, tout au long, la vie, celles d'hommes et femmes simples que l'auteur présente aussi avec sincérité et simplicité.



C'est un belle oeuvre pour ouvrir une série qui sera tout aussi prenante que celle qui débutait en France, en une autre saison, celle des loups.
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La dernière harde

Maurice Genevoix a déjà obtenu le prix Goncourt avec Raboliot, en 1925, lorsqu'il publie, en 1938, La dernière harde, magnifique histoire d'un grand cerf et d'un piqueux portant fort bien son patronyme, La Futaie.



Raboliot, c'était le braconnier, La Futaie, lui agit en toute légalité dans ce duel avec le grand cerf, ce cerf qu'il observe, par lequel il est lui-même observé, jusqu'au moment où la chasse devra le conduire à l'hallali.



Mais, au-delà du cerf et de la chasse, c'est encore la nature que Maurice Genevoix célèbre, particulièrement avec la forêt, l'enveloppant tout entière de son écriture parfaite, poétique, douloureuse et amoureuse, celle des très grands écrivains, ceux que l'on ne peut hélas plus rencontrer aujourd'hui. Genevoix décrit tous les mystères de la forêt avec ses laissées, ses odeurs et ses sons, et on apprécie si on aime la nature si bien sanctifiée par un auteur qui la connaît par coeur.



Ce roman peut être mis en parallèle avec La grande meute de Paul Vialar, texte tombé dans l'oubli aujourd'hui, il y a tellement de points communs dans ces deux oeuvres. Vialar n'avait probablement pas le sens poétique de Genevoix mais il partageait avec ses lecteurs la même passion de la vénerie, les mêmes émotions lorsque les chiens s'apprêtent pour la curée.



La dernière harde emporte avec ce magnifique cerf tout l'art d'un immense auteur, l'homme aux trente mille jours qu'il a vécus intensément et transmis à travers toute son oeuvre.
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Jours à Leontica

Quelle belle idée qu'a eu le narrateur de suivre le Felice dans ses promenades quotidiennes et de nous raconter la nature, le quotidien des habitants du village qui s'aident, s'entraident s'aiment.

C'est beau, c'est reposant, les descriptions sont d'une grande précision et nous permettent de visualiser sentir et même ressentir comme lorsqu'il dit qu'il tend la langue pour recevoir les flocons de neige.

Ce ne sont pas des descriptions ennuyeuses qui peuvent lasser par leur longueur, non , ce sont des moments de vie, des paysages et c'est tout simplement magique.

Le Felice est un personnage taiseux mais généreux, proche de la nature et qui accueille et accepte le narrateur avec chaleur même si rien n'est dit et que le lien entre eux n'est pas démonstratif. Mais il n'est pas besoin de dire pour ressentir. J'aurais moi aussi aimé suivre le Felice et me fondre dans ce village, loin des préoccupations actuelles et du rythme effréné qui nous est imposé.

Dans ce roman, il faut se laisser porter par les sens , ne pas chercher, ne pas être à l'affût d'événements, de scoop, mais bien avancer au rythme des pas du Felice, et écouter, regarder lentement sans se précipiter.

La plume de Fabio Andina m'a enchantée. Le vocabulaire est riche, quelques mots italiens, un peu de patois, quelques expressions locales viennent renforcer le sentiment de dépaysement.

Merci à Fabio Andina pour cette petite parenthèse reposante, émouvante et pleine de sensibilité.



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Encabanée

Une jeune femme a décidé de tout quitter pour se réfugier dans les bois, dans une cabane sans électricité ni eau courante. Elle fuit la ville et les artifices du monde moderne pour retrouver l’authenticité de la vie.



Mais la dure réalité de l’hiver n’est pas si romantique : avoir froid, fondre la neige pour avoir de l’eau, couper son bois pour chauffer et avoir encore froid.



Et même la lecture et l’écriture deviennent difficiles dans le halo des chandelles qu’il faut ménager.



Et l’isolement devient solitude…



Un roman de nature sauvage, avec des réflexions féministes sur la société de consommation et ce qu’elle impose aux femmes.

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La dent du serpent

C’est le 9eme volume que je lis des aventures de Walt Longmire et je ne m’en lasse pas. D’ailleurs les suivants attendent sagement leur tour dans ma bibliothèque « PAL ». Je prends mon temps pour les déguster.



Nous retrouvons ici Walt, son meilleur ami Henri Ours debout, surnommé la nation Cheyenne et ses adjoints .

Ce qui me plait vraiment dans ces histoires c’est la complicité des uns avec les autres, cette solidarité et une entente qui encore une fois ici sauvera des vies.



D’une simple recherche de famille pour un ado égaré, on passe à un trafic de haut vol

impliquant plusieurs gars sans scrupule.

Et entre les deux humour, engueulades et prises de risques inconsidérées sont de la partie comme dans chaque opus.

Cette fois beaucoup d’émotions se dégagent de quelques passages vu les situations dramatiques où vont se trouver certains protagonistes.

Il y a toujours quelque chose d’étrange qui s’insinue entre les pages et ici nous aurons affaire à un homme qui prétend avoir deux cent et quelques années, dernier bras armés du prophète mormon John Smith, fondateur de l’église des saints des derniers jours… Bref, encore de quoi cogiter avec Walt qui aura là encore pas mal à faire pour que l’ordre règne dans le comté d’Absaroka dans le wyoming.



Pas un instant je me suis ennuyée, tant sont prenantes les affaires criminelles que doit régler le shérif Longmire. Bien sûr il faut aimer les grands espaces, les lieux désertiques, les petites villes et les esprits bruts de décoffrage pour apprécier l’histoire.Et moi j’adore .
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À la lisière du monde

Alors que la Grande Guerre fait rage en Europe, Matthew Callwood, jeune policier de la Couronne, prend ses fonctions dans un village perdu du Grand Nord canadien. Très vite, il s'aperçoit que ses prédécesseurs se sont laissés aller. Faut dire qu'il n'y a pas grand chose à faire là-bas, si ce n'est "contrarier" les trafiquants d'alcool et les prostituées. Mais comme on s'y ennuie ferme, avaler un petit verre de whisky ou rendre un petit service à une fille publique de temps en temps n'est franchement pas du luxe, alors on ferme les yeux. Matthew, lui, a bien l'intention de remettre de l'ordre dans tout ça. Il est même décidé à traquer Moïse Corneau, alors en cavale, accusé du meurtre de sa femme et de son fils, et dont la rumeur dit qu'il se cacherait quelque part dans la forêt boréale...



Je suis sortie de cette lecture légèrement frigorifiée. Quelle idée aussi que de traquer un meurtrier en plein hiver, et dans le Grand Nord qui plus est ! D'autant qu'il était en cavale depuis plusieurs années et que ça aurait très bien pu attendre le printemps... Mais bon, au moins, j'ai fait connaissance avec cette nature et ce climat hostiles, aux nombreux lacs, sur lesquels j'ai beaucoup pagayé. Je suis d'ailleurs épuisée d'avoir autant ramé, par procuration, bien installée dans mon canapé (en vrai, faut pas rêver, même pas j'y aurais sorti mon petit orteil). Enfin, tout ça pour dire que les paysages et l'ambiance glaciale sont si bien dépeints qu'ils font partie intégrante de l'histoire.



Et quand je dis ambiance glaciale, c'est à prendre dans les deux sens du terme. À cause du climat déjà. Mais aussi par rapport aux changements qu'impose Matthew, qui ne sont pas pour plaire à tout le monde, à commencer par son collègue, Harvey, ayant pour habitude de ne jamais se lever avant 10h parce que ses soirées sont consacrées à la bouteille et à Fran, qui offre ses services charnels moyennant quelques dollars. Matthew bouscule un peu trop ce petit monde et ne se fait pas très bien voir. On sent comme de la tension dans l'air...



Il est jeune aussi, 24 ans, et il est encore plein d'ambition et de détermination. Et non pas qu'il va déchanter, enfin si quand même un peu, mais il va petit à petit ouvrir les yeux, au point de compter les jours qui lui restent à tirer dans ce coin complètement paumé et pas des plus accueillants et à espérer être appelé rapidement sur le front en Europe. En attendant, pour s'occuper, il fait la chasse au meurtrier, qui s'avère beaucoup plus malin qu'il le pensait. J'ai apprécié ce personnage, intègre et un poil téméraire, que l'on voit évoluer petit à petit. Tout comme j'ai apprécié les autres également, d'autant que certains nous réservent quelques surprises à la fin. Matthew et Corneau se livrent à une sorte de duel tout au long de la lecture, et leurs rapports ambigus nous gardent facilement éveillés.



J'ai eu un peu de mal à me faire au style de l'auteur, quelque peu saccadé à cause des phrases courtes, et surtout au temps présent employé (pas très cohérent vu que ça se déroule dans le temps passé). Mais j'ai fini par prendre le pli et je me suis habituée à ce ton abrupt, à l'image de la nature hostile dans laquelle se forgent des tempéraments tout aussi hostiles.



J'aime ces romans dans lesquels la nature est presque un personnage à part entière et toujours plus forte que les véritables protagonistes, où chacun d'eux avance dans sa propre histoire tout en devant continuellement composer avec d'elle. Ça dégage en général une atmosphère particulière, qui donne davantage de corps à l'intrigue, comme c'est le cas ici.



Donc pour résumer : un bon nature-writing, pour lequel j'aurais aimé apprécier un peu plus la plume de l'auteur, mais dont les paysages sont à couper le souffle, les personnages et relations ambigus, et l'intrigue appétente.

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À la lisière du monde

Un coup de cœur qui n’a pas eu la mise en lumière qu’il mérite, c’est la coruscation due à l’outrance de publication. J’espère que ce modeste billet réparera ne serait-ce qu’un tant soit peu cette injustice.



Foutu empêcheur de tourner en rond. Même dans le grand Nord Canadien, y’a pas moyen d’être tranquilles.



On aurait pu rester peinard, la blague à tabac est pleine, les rivières ont de la truite et y’a suffisamment d’orignaux dans les parages pour friser l’overdose de barbecue. Les autochtones sont bien trop imbibés et dociles pour être une menace notoire. La frontière entre gentils et méchant s’estompe facilement après quelques coups de gnôle, distillée illégalement là ou ça nous arrange de ne pas regarder, alors quoi ? Pourquoi aller se mouiller les mocassins et risquer de finir sous les griffes d’un plantigrade alors qu’on peut se la couler douce sous les draps de l’unique fille de joie du coin, aux frais du gouvernement ?

Ok la nature c’est bien beau, mais c’est vaste. Pourquoi partir se geler la couenne à la recherche d’un gus qu’aurait rayé de la carte sa femme et son gosse alors qu’on peut se complaire dans l’oisiveté ?



Il a fallu que la chancellerie envoie un jeune bleu zélé dans les parages. Damn it.



Matthew Callwood, notre fringuant et téméraire jeune poulet, tout juste sorti de l’académie déboule dans le game et va secouer un peu tout ce tas de vieilles carnes encroutées. Le début de carrière part sur les chapeaux de roues et avec une petite renommée y’aurait peut-être moyen de se trouver une petite place au front, pour être aux premières loges de la 1ere guerre mondiale.



Le nature writing est un genre éminemment évocateur. C’est un exercice très délicat lorsque c’est l’unique but descriptif du roman car il peut rendre rapidement bancal un récit manquant d’une trame sérieuse ou consistante. Il peut toutefois se révéler comme un catalyseur efficace pour soutenir un récit bien pensé. C’est le cas ici. Et on a en plus l’immense plaisir de le lire dans notre langue française. On a donc un écrit pur jus, n’étant aucunement délayé par une traduction qui malgré toute l’attention qui y est portée, peut parfois diluer un peu l’intensité cherchée par l’auteur.



Malgré une intrigue assez conventionnelle, tout fonctionne. Les questionnements, l’évolution de certitudes que l’on croyait encrées depuis toujours. Le souffle romanesque, porté sans accalmie dans une atmosphère immersive par un style envoutant, ce roman réussit à trouver cette petite étincelle qui a manqué à Ravages de Ian Manook, plus bankable, pour en faire un incontournable. ils partagent pourtant bien des similitudes dont des décors et scripts analogues.



Habile potion tirant à part égale du nature writing que du roman policier ou d’aventure, ce petit chef d’œuvre croustillant à la sauce sirop d’érable vous engourdira les doigts à force de pagaie sur des lacs glacés, vous enivrera de sève d’épinette noire, vous gèlera jusqu’à la moelle épinière avec ses températures négatives et finira par réchauffer votre âme de par son humanisme tenace.



Superbe découverte grâce à Masse critique même si je n'ai pas été sélectionné pour ce bouquin, je l'ai adoré et déjà offert deux fois.

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Darwyne

C'est toujours difficile de lire un roman noir où l'enfance maltraitée est l'héroïne malgré elle. Pourtant, malgré ces scènes dures de souffrances infligées au corps et à l'âme d'un petit de dix ans, ce texte révèle une puissance narrative très forte, avec l'émergence petit à petit de deux personnalités, l'enfant, Darwyne, et Mathurine qui instruit les dossiers au service de protection de l'enfance. La troisième personnalité si l'on peut dire est la forêt amazonienne où l'enfant marche avec aisance, connaît les oiseaux, les plantes, les animaux, alors que dès qu'il revient vers la civilisation il n'est plus qu'un pauvre albatros baudelairien.



Mais Darwyne est capable de discerner autour de lui le bien du mal, le danger permanent, pouvant venir, croit-il, des services sociaux, ou, plus dangereux des amants de la mère, voire d'elle-même. Nouant confiance avec Mathurine, il révèle une richesse qui conquiert celle-ci, en mal d'enfant, allant de FIV en FIV sans succès.



L'intérêt de ce roman est à la fois la prise de conscience par l'enfant qu'il peut être aimé pour lui-même, que la mère en qui il avait toute confiance, ne mérite pas une once de l'amour filial qu'il lui voue jusqu'au jour où ses yeux s'ouvrent.



La nature est l'alliée de l'enfant qui vit dans un bidonville accroché sur des pentes incertaines que les pluies diluviennes vont finir par emporter. Elle est son alliée pour la destruction méthodique des beaux-pères qui l'ont tous martyrisé et pour une vengeance terrible envers la mère.



Il ya tout un cheminement que vont faire Mathurine et Darwyne qui leur ouvre à chacun des portes insoupçonnées et la fin du roman, ouverte, laisse chaque lecteur envisager leur avenir selon sa sensibilité.



Ce roman porte beaucoup de beauté grâce à la nature, beaucoup de noirceur du fait du mal commis par hommes et femmes, il est aussi dur que les sentes impénétrables de la forêt qui peuvent se refermer mortellement sur ceux qui s'y aventurent, involontairement ou non, sauf sur Darwyne qui la connaît par coeur, qui en diffuse l'âme dans le coeur de Mathurine et c'est là que me semble émerger toute la beauté de ce texte difficile.
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