Voyageurs
Région du Lac Supérieur
[Incipit de la première version publiée du poème ‘Lac Supérieur’].
III
Par toute cette terre de granite
le signe de la croix
Beauté : impuretés dans la pierre
IV
Nous touchons ici, polis,
le rubis de corindon
le lapis-lazuli
né des changements du grès
la cornaline sardoine
d’Uruguay
à l’éclat rouge-brun-abricot
et l’agate sable de silice
du proche rivage
De nom grec, d’antiquité exodique
surgie dans le Nord-Ouest
de l’Amérique
je t’ai eue à l’esprit
entre les orteils,
agate
…
/ textes traduits par Martin Richet
Voyageurs
Région du Lac Supérieur
[Incipit de la première version publiée du poème ‘Lac Supérieur’].
I
Dans la moindre partie du moindre être vivant
est une matière qui a un jour été pierre
devenue terreau
Dans le sang les minéraux
de la pierre
II
Fer l’élément de terre commun
aux pierres et aux cargos
Sault Sainte Marie
la pause d’antan des voyageurs,
bosho (bon jour) chanté
par les hommes des garnisons
Aujourd’hui écluses, grands bateaux
noir-charbon et rouge-minerai-de-fer
coiffés d’un si blanc château
Les eaux coopérant
internationalement
Les mouettes jouant double jeu
…
/ textes traduits par Martin Richet
Voyageurs
Région du Lac Supérieur
[Incipit de la première version publiée du poème ‘Lac Supérieur’].
V
Que les Anglais ensoleillent
le son de Radisson
et fassent confiture de groseille
de Groseilliers
(GrosaYÉ)
rivière, chutes, tout un pays
gooseberry
« un labyrinthe de plaisirs »
ce nouveau monde des lacs –
Radisson
Cheveux longs, long fusil,
pas d’ongles –
arrachés par les Mohawks
lorsqu’ils l’attachèrent à un poteau
pour le tuer lentement
Il y a quarante ans maintenant
aux environs de Rainy Lake
les balbuzards pêchaient
et les aigles piquaient
pour leur prendre leurs proies
lorsque Radisson
retrouva à Knife Lake
Chippewas, Hurons,
Ottawas, Sioux pour leurs peaux de castor
ce lac (Route 65) pris le nom
du cadeau qu’il leur fit
le premier couteau en acier
qu’ils eussent jamais vu
VI
Les longs canoës
« Écorce de bouleau
et Cèdre blanc
pour les membrures.»
(…)
/ textes traduits par Martin Richet
Avec Dara Barnat, Norman Finkelstein, Stephen Fredman, Andrea Inglese, Jena Osman, Ariel Reznikoff, Sarug Sarano, Carlos Soto Roman, Mark Scroggins & Frank Smith
Rencontre animée par Xavier Kalck, Fiona McMahon & Naomi Toth
J'aime cette promenade secrète
dans le brouillard ;
ni vu ni entendu,
au milieu des buissons
couverts de gouttes ;
le sentier solide et invisible
à cinq ou six mètres —
et seul l'étroit présent est vivant.
Charles Reznikoff, Going To and Fro and Walking Up and Down, Futuro Press, 1941 – Inscriptions: 1944-1956, 1959.
Charles Reznikoff (1894-1976), poète américain considéré comme l'une des figures du mouvement « objectiviste », avec George Oppen, Lorine Niedecker, Carl Rakosi et Louis Zukofsky, est resté largement inconnu de son vivant, mais son héritage est revendiqué aujourd'hui par nombre de poètes dans la poésie expérimentale contemporaine. Pour la Maison de la Poésie, nous nous réunissons autant pour lire Reznikoff que pour faire entendre les résonances que son oeuvre continue à produire aussi bien dans l'aire anglophone que francophone et hispanophone.
En savoir plus – colloque international, « Charles Reznikoff : Inscriptions (1894-1976) », Université Paris Nanterre,du 1er au 3 juin 2023.
« Nos rencontres ont été si brèves
qu'il vaudrait mieux les appeler séparations,
et de toutes nos paroles
je me souviens surtout des “au revoir” »
La Jérusalem d'or, Charles Reznikoff
À lire – Charles Reznikoff, Inscriptions, précédé de Ça et là, trad. de l'anglais (États-Unis) par Thierry Gillyboeuf, éd. Nous, 2018.
Publications en anglais : Going To and Fro and Walking Up and Down, 1941 – Inscriptions : 1944-1956, 1959.
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