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André Beucler (Traducteur)Jacques Catteau (Préfacier, etc.)
EAN : 9782715231931
528 pages
Le Mercure de France (24/03/2011)
4.14/5   7 notes
Résumé :
En 1867, Anna Grigorievna Snitkine (1846-1918) devient l'épouse de Dostoïevski alors qu'elle n'a que vingt ans.
Lui en a vingt-cinq de plus. Il l'avait engagée comme sténographe quelques mois auparavant pour achever dans la précipitation l'écriture des "Joueurs". Depuis la jolie rencontre amoureuse qui bouleversa le cours de son existence, jusqu'à la mort de Dostoïevski, Anna Grigorievna revient dans ses "Mémoires" sur leurs quatorze années de vie commune. Le... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Je garde ces mémoires de la seconde épouse de Dostoïevski, Maria Dmitrievna Dostoïevskaïa, pour plus tard, préférant les oeuvres à la vie des hommes, toujours trop simplement... humains.

Et cela uniquement par peur d'être saisie de l'énorme l'écoeurement ressenti antérieurement à la lecture de la biographie de Flaubert par Winock (Flaubert qu'on ne peut comparer à Dostoïevski, bien sûr, mais enfin...)

J'interrompis donc Winock au milieu afin que l'ombre de l'homme Flaubert ne vienne pas se pencher sur son oeuvre et me la gâter définitivement : non que je le condamne moralement , ce serait commettre un énorme anachronisme, et je n'en ai humainement pas le droit : qu'attendre en matière d'harmonie entre les sexes et de prophylaxie d'un siècle où la plupart des bourgeois passaient une partie significative de leur temps au bordel, sans se soucier des maladies vénériennes qu'ils transmettaient allègrement à leurs épouses (ce que ne fit pas Flaubert, et pour cause) avant de mourir dans leur lit, alors que les prostituées en fin de parcours terminaient leur vie dans l'affreuse prison de Saint-Lazare et que leurs femmes vivaient en apnée dans des corsets inexorablement serrés déviant leur colonne vertébrale, châsses empêtrées de la tête aux pieds voulant imiter les fleurs...

J'ai trop de respect envers le génie créatif de Dostoïevki pour faire connaissance de près avec l'homme. Je referme donc prudemment les mémoires de sa deuxième épouse, Maria Dmitrievna Dostoïevskaïa, que je reprendrai peut-être... un jour...

Dostoïevski fut lui aussi un débauché longtemps tracassé de surcroit par le démon du jeu.

Très jaloux, il a, selon Alexander Kislov (site Russia Beyond) imposé à sa très jeune seconde épouse (vingt-cinq ans d'écart) des règles très strictes:

-ne porter que des vêtements simples et neutres (pas de robes moulantes) ;
-ne pas sourire aux hommes ;
- ne pas rire en présence d'hommes ;
- ne pas mettre de rouge à lèvres, ne pas se maquiller les yeux.
Des perquisitions en quête d'amants et de « preuves » avaient lieu régulièrement et spontanément dans la maison. Une crise de paranoïa déraisonnable pouvait l'emporter au beau milieu de la nuit.
« Ma gaieté et ma bonne humeur" écrit Maria Dmitrievna Dostoïevskaïa, "sont restées avec moi, mais ne se manifestaient que dans le cadre familial. […] Mes amies m'ont assuré que j'avais terriblement vieilli pendant ces quatre années et m'ont reproché de ne pas avoir prêté attention à mon apparence »
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Même s'il est certain que l'oeuvre de ce génial écrivain ne pouvait pas être celle d'un puceau, la prudence souffle de ne pas approcher de trop près ses idoles.
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Je ne voudrais pas qu'on me prenne pour une puritaine basse de plafond, récemment sortie du Couvent des Oiseaux. C'est bien parce que je ne le suis pas que j'ai du mal à supporter la puanteur hypocrite qui se dégage du 19 ème siècle et la profonde corruption de ses moeurs. La pornographie est le revers de toute médaille frappée à l'effigie du puritanisme...

... mais les hommes ne peuvent pas grand chose contre un mal systémique qui ronge une époque et leur propre chair ainsi que leur santé mentale...

Pour ce qui est de Dostoïevski, sorte de mastodonte à l'universalité surhumaine, presqu'effrayante, sans doute la fréquentation des enfers, alliée à une prédisposition à la vie spirituelle, a-t-elle permis en lui, et hors de lui au moyen de l'écriture, le surgissement de cette oeuvre abyssale d'où émerge un puissant et envoûtant mysticisme ?

Quant à Maria Dmitrievna Dostoïevskaïa, elle fut tantôt une très malheureuse, tantôt une très heureuse épouse. Il n'en demeure pas moins que cet homme hors du commun fut l'amour de sa vie, et que son destin ne fut ni fade, ni médiocre, et il n'y a rien à redire à cela.
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Il n'est pas si fréquent d'avoir, pour éclairer la vie d'un écrivain, le témoignage de son épouse, certains de leurs écrits sont parfois des actes vengeurs et enlèvent ainsi une part de crédibilité.
Les mémoires d'Anna G Dostoïevskaïa ne sont pas du tout dans ce registre. D'un bout à l'autre on y sent la vérité, la sincérité et le souci d'une honnêteté totale.

En 1866 Anna Grigorievna se voit proposer un moyen de gagner sa vie, M Olkhine son professeur de sténographie la propose pour aider un écrivain en difficulté qui doit rendre un livre dans un délai extrêmement court sous peine de voir tous ses droits sur ses livres précédents lui échapper. Elle accepte immédiatement car " Depuis mon enfance, le nom de Dostoïevski, romancier préféré de mon père, m'était familier " et elle a lu récemment Crime et châtiment
Pour Fédor Dostoïevski c'est un ange tombé du ciel ! Il va pouvoir écrire le roman attendu dans les délais ce sera Roulettenbourg qui plus tard prendra le titre du Joueur et en même temps avancé la dictée de l'Idiot.
La première rencontre montre un Dostoïevski qui " était de taille moyenne. et se tenait très droit. Ses cheveux châtain clair et même légèrement roux étaient fortement pommadés et soigneusement lissés."
Pendant ce travail en commun Dostoïevski va petit à petit se confier à Anna, parler de sa passion pour le jeu, des dettes énormes qu'il a contracté, et surtout de son épilepsie. Il faudra vingt six jours pour terminer le roman, et un mois pour que l'écrivain demande Anna Grigorievna en mariage.
Elle va pour 14 ans attachée sa vie à celle de l'écrivain. Elle sera pour lui une compagne dévouée, prête à passer plusieurs années à l'étranger pour permettre à son mari d'échapper aux usuriers. Elle est un soutien constant pendant les années d'écriture des chefs-d'oeuvre : les Démons, les Frère Karamzov, elle partage avec lui les jours sombres où il s'est remis à jouer, les jours fastes où il est invité à la cour par le Grand-duc Constantin et la grande-duchesse Alexandra. Elle le suit lorsque Dostoïevski fait des lectures publiques de ses oeuvres malgré sa fatigue et malgré les crises d'épilepsie. Elle s'efface lorsqu'il est pressenti pour faire le discours en l'honneur de l'inauguration d'un monument à Pouchkine.
Elle conduira son époux à sa dernière demeure au cimetière de Tikhvinsk dans la Laure Saint-Alexandre Nevski grâce à l'intercession du Grand-duc Constantin, entourée d'une foule nombreuse qui rendait hommage à l'écrivain du petit peuple
Si vous aimez Dostoïevski ce livre vous plaira, il n'est en rien une analyse de l'oeuvre, mais il est le témoignage de la vie quotidienne d'un écrivain. Anna Grigorievna n'est pas écrivain, son livre ne vaut pas par le style. Il est attachant par la vivacité, la sincérité que l'on entend derrière les mots. On y découvre un homme pressuré par son entourage familial et qui ne sait rien leur refuser, un père de famille qui vénère ses enfants et qui s'occupe d'eux " c'est aussi un tendre père de famille pour lequel tout ce qui se passe dans la maison a une grande signification "
On y voit vivre une famille russe au quotidien, les réceptions, les relations amicales, les difficultés, la résidence d'été, les voyages.
Elle ne cache rien Anna Grigorievna la jalousie maladive de son mari, les contraintes du travail du grand écrivain qui comme Balzarc, comme Dumas, court après l'argent
C'est le manque d'ambition d'Anna qui rend le livre si simple et si touchant. Jusqu'à la fin de sa vie après la mort de Dostoïevski, elle travaillera sans relâche pour défendre et éditer l'oeuvre de son mari. Elle ne parle de lui qu'avec admiration et amour " Il était bon, généreux, charitable, juste, désintéressé, délicat, compatissant "
Elle sait nous le rendre vivant, proche et si l'on été admirateur de l'oeuvre on éprouve de la sympathie pour l'homme après avoir lu son récit.

Si vous voulez une biographie de Dostoïevski centrée sur son oeuvre c'est le livre de Joseph Franck qu'il faut livre aux éditions Actes Sud.
Lien : http://asautsetagambades.hau..
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Cette biographie de Dostoïevski a été écrite par sa dernière femme et il me semble que l'on sent assez bien à travers tout le livre tout l'amour qu'elle lui portait... On apprend aussi beaucoup de choses sur son quotidien, (ses problème d'argent, de santé, ses difficultés d'écriture, etc.) et je suis sortie de ma lecture avec une estime encore plus grande pour lui.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
En route pour Genève, nous avons fait une halte d'une journée à Bâle. Nous voulions voir au musée local un tableau dont mon mari avait entendu parler. Ce tableau est l'œuvre de Hans Holbein, il représente un Christ ayant subi des souffrances inhumaines, qu'on a descendu de la croix et dont le corps est offert à la décomposition. Son visage boursouflé est couvert de plaies sanglantes et son apparence est horrible. Ce tableau a produit sur Fiodor une impression écrasante, et il s'est arrêté devant, comme frappé par la foudre. Quant à moi, je n'avais pas la force de le regarder :il me faisait trop mal, surtout que ma santé n'était pas très bonne. Je suis allée voir les autres salles. Quand je suis revenue quinze minutes ou vingt minutes plus tard, Fiodor était toujours planté devant le tableau, comme enchaîné. Son visage bouleversé présentait cette expression d'épouvante que j'avais observée dans les premières minutes d'une crise d'épilepsie. J'ai pris doucement mon mari par le bras, je l'ai emmené dans une autre salle et fait asseoir sur un banc, Heureusement, elle n'eut pas lieu : Fiodor se calma peu à peu et, au moment de sortir du musée, il insista pour retourner voir le tableau qui l'avait tant impressionné.
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Il fallait de l’argent pour vivre, pour payer les dettes ; pour cette raison, malgré la maladie, et quelquefois le lendemain d’une crise, il était nécessaire de travailler, de se hâter, sans même revoir le texte écrit, pourvu que celui-ci pût être remis le jour fixé et rapporter le plus vite possible l’argent qu’on en attendait.
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c’est aussi un tendre père de famille pour lequel tout ce qui se passe dans la maison a une grande signification
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