Voici une série qui s'annonçait prometteuse avec cet univers londonien steampunk et ce duo d'enquêteurs de choc au service de sa majesté Victoria, nommée Victrix ici. Si cette saga présente des qualités indéniables, elle est pourtant loin de m'avoir séduite, et je le regrette vraiment. On retrouve avec plaisir la plume riche et très palpable de
Lilith Saintcrow, ainsi que sa faculté à construire des mondes extrêmement détaillés et visuellement captivants, mais malheureusement tout le reste est passé en second, voire même en troisième plan à cause d'une narration qui manque de pédagogie, laissant le lecteur dans le flou concernant l'enquête.
Le plus gros problème dans ce tome réside dans le fait que l'auteure fait avancer son enquête sans qu'on comprenne ce qui peut l'amener dans une direction ou une autre, on a même du mal à identifier les intervenants impliqués dans cette affaire. À vouloir donner de l'envergure à ses enquêteurs qu'elle a voulu doter d'un véritable instinct de déduction,
Lilith Saintcrow maintient un faux suspense qui nous fatigue plus qu'autre chose, rendant la lecture laborieuse par moments. Je me suis surprise un bon nombre de fois à revenir en arrière pour regarder où était susceptible d'apparaître une réflexion que j'aurais éventuellement ratée. C'était pénible de se faire pousser par l'auteure vers le dénouement, avec une brutalité contrariante, surtout qu'on ne peut même pas l'apprécier à sa juste valeur, en dehors de l'aspect visuel et de l'action qui y a cours, car on a seulement approximativement compris qu'un gros conflit se tramait contre l'Empire.
Outre cela, si je trouve l'univers juste génial et bien ficelé avec ses castes de surnaturels et cette magie dense au possible, malgré la qualité incontestée des descriptions qui nous plongeaient bien dans l'ambiance, une certaine surenchère dans le détail aurait pu être évitée pour épurer le récit de ses lourdeurs.
Ensuite, l'autre problème majeur qui apparaît concerne les deux personnages principaux, Emma Bannon, une sorcière puissante, Prima de son état, et Archibald Clare, un mentah censé rendre hommage à Sherlock Holmes. On s'attend à ce qu'ils fassent équipe, mais en fait, ils enquêtent séparément tout du long (alternance de points de vue), et on déplore que la série ne s'appelle pas finalement Emma Bannon car elle est clairement mise en avant pendant les trois quarts du texte. Si on ne peut pas dire que son personnage manque d'intérêt, grâce notamment à sa puissance, je l'ai malheureusement trouvée très froide et assez imbue d'elle-même. Quant à Archibald, il passe son temps à penser « très intéressant », mais on a souvent du mal à appréhender ce qui le stimule autant. À noter que les deux individus évoluent pas mal sur la fin, et qu'on se dit qu'une amitié solide, contaminant d'ailleurs d'autres de leurs alliés durant cette quête, se dessine.
La lueur d'espoir que j'ai entrevue dans ce tome, en dehors de l'univers dans lequel je me suis immergée avec délectation, c'est la relation entre Emma et Mikal, son bouclier qui la protège et l'aide à s'ancrer malgré sa magie. Toute en pudeur, reposant sur la présence marquée de cet homme que la jeune femme a du mal à cerner du fait des circonstances de leur rencontre, cette relation nous titille agréablement. Pour ceux qui ont lu Danny Valentine, Mikal ne sera pas sans vous rappeler un certain tierce Japhrimel. Un mal ou un bien, je ne suis pas arrivée à trancher, mais Mikal est le personnage qui m'a le plus plu, tout comme les protagonistes secondaires qui viennent épauler nos enquêteurs en cours d'investigation ; je pense notamment à l'inventeur allemand fan de saucisses, ou encore au tueur italien très complexe.
Un univers magiquement très agréable, un contexte londonien qui fleure bon le thé et les convenances, une écriture vive et dense, dommage que l'enquête ne soit pas bien (a)menée et que les personnages ne soient pas plus attachants. Je jetterai tout de même un oeil sur la suite, car vraiment, je me répète, le cadre est grandiose.
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