En répétition

Cette pièce ne s'attaque pas seulement à Shakespeare, à Macbeth ou à sa difficulté d'exécution. Derrière cette recherche d'acteurs, se dissimule le fléau de notre société : l'égocentrisme. L'égocentrisme est le défaut qui fait tout basculer. Celui qui engendre la peur. Lorsque l'on ramène tout à soi, on s'éloigne de l'autre, on s'éloigne d'une perception différente de la nôtre. On perd en connaissances, on perd en partage, et surtout, on perd en empathie. C'est de là que découle la peur. Renfermé sur soi, on ne perçoit la vie que de son propre perchoir. À partir de là, bienvenue à toutes les déviances sociologiques possibles ; j'ai nommé : le racisme, l'homophobie, le sexisme, la misogynie etc.

Tous ces jeunes acteurs venus pour auditionner et jouer des personnages, savent-ils au moins qui ils sont ? Savent-ils de quoi ils sont véritablement capables pour s'imprégner de Lady Macbeth ? Un assassin de cette envergure ?

Samuel Gallet m'épate une nouvelle fois, après m'avoir captivée et conquise avec Mon visage d'insomnie. Ses personnages sont plus vrais que nature. On parvient avec une telle aisance à se représenter les rôles, les scènes, avec une grande précision. Samuel Gallet fait vivre ses protagonistes. On croirait qu'il habite chacun d'eux. J'ai toujours la sensation de lire une histoire vraie.

Il oppose à merveille l'ancienneté de la pièce de Shakespeare avec ses décors et ses costumes que l'on imagine sans peine, aux problèmes sociétaux qui empuantissent notre quotidien. le mansplaining en est un excellent exemple. La remarque sur la différence entre le sexe et le genre que le personnage incriminé ne comprend même pas, m'a particulièrement interpellée.

Le livre qui pose la question de la violence et du meurtre me fait penser que le personnage d'Armand donne clairement des envies de meurtre. Il provoque ces sentiments primaires déclenchés par la médiocrité de sa personne, par sa bêtise qui s'enfonce dans un marasme de préjugés imbéciles.

Joël quant à lui, est tout simplement terrifiant. Les premiers adjectifs qui me sont venus à l'esprit pour le caractériser ? Sociopathe et psychopathe ! Les deux pour le prix d'un messieurs-dames !

Cette merveille de pièce de théâtre dénonce subtilement et violemment tout ce qui fait de nous une espèce animale inférieure. Notre propension à la jalousie, le désir du pouvoir sur autrui, la vengeance, la cruauté ; mais il est également question de catastrophes véritables. La guerre pour commencer. N'est-ce pas l'un des exemples les plus manifestes de notre folie furieuse ? Sans parler du réchauffement climatique, de la destruction de notre planète, du massacre de milliers d'espèces sans défense.

Ne devrions-nous pas tous souffrir d'insomnie au lieu de dormir sur nos deux oreilles ? Mourir de honte du seul fait d'appartenir à l'espèce humaine, tant nos agissements sont odieux ?

Cette oeuvre est un chef-d'oeuvre de réalisme ! J'aurais voulu avoir le talent et l'intelligence pour écrire un texte si beau, si percutant, si pertinent, si progressiste, tellement empreint de sagesse.

Retrouver écrits noir sur blanc mes valeurs, mes convictions les plus profondes , cela crée comme un lien avec l'auteur.
Je ne suis pas prête d'oublier Éva, Armand, Anouck, Léonore, Guillaume, Inès, Boris, Youssef, Cécile, Joël et Dylan.