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Blaise Briod (Traducteur)
EAN : 9782234011625
221 pages
Stock (30/11/-1)
4.23/5   15 notes
Résumé :
Jürgen Doskocil, le passeur, manœuvre son bac entre les deux rives du fleuve. Les gens des villages ne l’aiment guère et se moquent de sa carrure d’ours… quand ils sont hors de sa portée, car ils ont peur de sa force bien qu’il soit le plus doux des hommes. Ils n’ont pas compris que sous son mutisme de bête sauvage se cache un cœur tendre. Ce qu’il rumine en passant l’eau ou en relevant ses filets est l’image d’un bonheur simple – un champ de blé fertile, un cheval,... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Ernst Wiechert a le don d'émouvoir son lecteur, de le déchirer, déchirement devant la beauté de la nature, la chaleur que la terre peut communiquer aux hommes mais aussi la douleur de la condition humaine, le malheur qui frappe. Il nous fait communier avec le bruissement de la nature pleine de mille froissements furtifs. Il nous parle de la terre qui prend et donne, accueille les morts, nourrit les vivants qui l'écorchent pour semer et récolter, qui peut aussi être cruelle, détruire, se déchaîner mais sans atteindre la cruauté des hommes entre eux.

Le récit débute par l'agonie de la femme de Jürgen Doskocil, pécheur et passeur sur le bac qui relie le village vert et le village noir des marais. Sous des dehors rudes et bourrus , c'est un homme doux et sensible qui voit au-delà de l'apparence, est attentif aux êtres et aux choses, qui parle avec les morts. Vivant à l'écart, habitué à lutter contre les éléments naturels, il est démuni devant la cruauté de ses semblables. Les enfants du village vert, de la rive, se moquent de lui comme ils le font de Heini le bossu avec lequel il est ami.

«Le couple de pinsons de l'été dernier est revenu, les voici à ses pieds, qui attendent les miettes de sa main. Une consolation de renouer avec eux.... Et de nouveau il ira prendre de jeunes animaux dans la forêt, il contemplera leurs yeux humides et caressera leur pelage frissonnant. Les animaux valent mieux que les enfants. Ils sont sans moquerie et ne peuvent aller raconter des choses derrière votre dos.

Un soir Mathias, le tailleur du village noir, amène à Jürgen pour qu'il les accompagne chez leur cousin, un petit fermier Grotjohann accompagné de sa fille Marthe, récemment devenus mormons, convertis par Mac Lean, prédicateur itinérant de «l'église des mille jours». Jürgen va les héberger pour la nuit car il est trop tard.
Marthe va demander à rester chez lui comme servante et la vie du passeur va être transformée. La chaleur de la vie revient.

«Tout en elle était limpidité, et lorsqu'elle mit sa main au-dessus des yeux, tant l'eau miroitait dans le soleil, ce mouvement fut libre et beau, détaché sans bavures sur le paysage démesuré. Elle éleva la chaîne pour immobiliser la barque, et ce geste encore disait l'intimité confiante avec les choses, une aisance qui, dans l'espace réservé à l'ordre humain, se mouvait partout avec la même familiarité.»

Mac Lean, l'odieux pasteur mormon, et tous ceux du village vert vont venir troubler la joie d'être de Jürgen et Marthe, les salir et tenter de détruire leur paisible union. La haine sera exacerbée par une période d'inondation suivie de sécheresse qui entraîne une pénurie.
Mais ils sauront résister, lutter contre le mal, rester confiants dans la force de vie qui réside en eux ...

«Il est là toujours immobile, tandis que la mince vapeur s'élève du sol fraîchement retourné, et s'épaissit et l'enveloppe. Et pour finir, il est pareil à un arbre qui boit silencieusement l'humidité des nuits.»
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La lecture d'un roman d ' Ernst Wiechert, pour moi, signifie un moment de plénitude , de calme et de sérénité, hier dimanche , sous un temps gris et sale ce fut mon rayon de soleil et je l'ai savouré ce petit roman.
Ce roman commence par une mort, et finit par la vie .
La femme du passeur Jürgen Doskocil meurt en lui faisant sur son lit de mort d'âpres reproches.
Reproches qui le suivront car il voit, sens et converse avec les morts, jusqu'au jour où par un pur hasard, Marthe et son père s' étant perdu dans la forêt, s' arrêtent dans sa maison pour demander leur chemin et se reposer.Marthe n'en repartira pas et se fera embaucher comme servante par Jürgen qui la respectera longtemps avant d'en faire sa femme......
Une écriture d'un tel lyrisme et humanisme qu 'après la lecture de ce petit roman on en ressort apaisé, réconcilié avec la vie.C'est un roman d'amour et de passion, de haine et de destruction, de création et de vie.Un auteur que j ' emporterais sur une île déserte. Un gros coup de coeur comme le reste de son oeuvre , hélas trop méconnue, et je le regrette.♡♡♡♡♡
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Elle sentit son sang se glacer, rapide et gelé. Elle sentit au plus profond de ses entrailles, le souffle froid
d'une couche de glace, là où le miracle de l'enfantement se préparait en silence.Elle ferma les yeux, mais l'image se forma, plus précise et impitoyable encore: elle voyait comment son sang se figeait et comment, sous les paupières closes de l'enfant, une membrane grise et froide se tendait sur les prunelles.《 Ne prie pas - elle parlait sans voix, le front sur le montant du lit -prie pour que je sois aveugle,pour que je meure, mais pas pas pour cela.
--Obéis.
--Non.
--Eh bien, je prierai, matin et soir, et une fois chaque nuit, et....》
Le poing fermé, elle frappa, du milieu de son engourdissement, sans voir où elle frappait. Puis, elle se leva d'un bond, et avant qu'il eût pu la saisir par ses vêtements, elle était déjà vers la porte.《 Nous allons prier tous les deux, dit elle, le matin et le soir et plusieurs fois par nuit.Mais toi, c'est le diable que tu prieras, et moi je prierai Dieu, pour qu'il étrangle ton diable.》
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Il était étendu, immobile, et la regardait.Elle attendait toujours qu'il abaissât les paupières, mais elles ne bougeaient pas, comme gelées. Et bien qu' elle sentît que ses racines étaient là-bas, dans la maison du passeur et qu'à travers la neige elles arrivaient jusqu'à elle, sans que personne les eût coupées, une paralysie la gagnait peu à peu, venant de ce regard sans paupières , fixe
《 Tu voulais te confesser? Demanda-t-il, d'une voix monocorde comme on parle dans le sommeil.
-J'ai dit que nous allions nous marier et que.....que je suis à lui....Il n'y a pas autre chose à confesser.
-Mais comment cela est - il arrivé? Quand? Combien de fois?
- Cela ne regarde personne》, Répéta -t-elle.
Le jour baissait et tout ce qui restait de lumière semblait se ramasser dans le visage blanc où se détachait la cicatrice rouge......
.......《 tu voudrais peut-être sortir de la communauté?
-Non
-Nous en avons eu une , de l'autre côté, qui en est sortie.Elle s' était refusée au prêtre avant le mariage....comme toi, et alors elle s' est retirée. Son premier enfant était aveugle.Le deuxième mangeait ses excréments et se traînait à quatre pattes. Il y a d'autres exemples, bien d'autres.Les hommes ont voulu en savoir plus que dieu, mais dieu en savait davantage....-Cela ne vient pas de Dieu, dit elle dans un murmure, blême jusqu'au lèvres
-Alors cela vient de ma prière》 Dit-il d'une voix aussi basse.
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La voix de la mourante est basse , mais si âpre, que la flamme de la chandelle posée près du lit et dont le suif coule, oscille sans arrêt. Le souffle, avec effort déjà, pousse cette voix, mais il ne s' éteindra pas avant qu'elle ait tout dit.Les mains se posent l'une à côté de l ' autre sur le couvre -lit aux dessins bleus.Elles ont déjà la couleur de l'autre monde.Elles ne changent pas de place, seuls les doigts, un à un , s' élèvent encore et s' abaissent avec un crissement léger sur la couverture bleue, de ce mouvement qu'on fait quand on additionne des dettes.
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Quand il eut attaché le sac à sa ceinture et plongé la main dans la fraîcheur du grain, il fut un instant sur le point de s'agenouiller ainsi qu'avait fait la jeune fille, mais il se sentit couvert de honte comme à l'idée d'un mensonge, et ses pensées furtivement, descendirent vers les âmes souterraines et implorèrent leur secours pour la jeune semence.
Alors il commença, allant et venant, lançant le grain dans la terre noircie. Des vols de grues passaient au-dessus du champ, et la haute futaie grondait sous la force du vent. Mais il ne levait point les yeux. Devant ses mains, il voyait, lointain, étrangement transfiguré, le visage de la jeune fille, et à chaque pas, il sentait pénétrer plus profondément dans son coeur une racine obscure, qui en brisait la force et l'emplissait d'une saveur amère.
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Mais tout cela est muet, remue, mais se tait. Tout serait plus simple et plus facile, s'ils hurlaient, si l'on entendait monter des jurons et s'abattre des imprécations. Mais ils restent muets, et leur haine est dangereuse comme la haine des muets qui ne se soulage pas dans les cris mais seulement dans le sang.
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