Le Péché capiteux

On voit qu’il est impétueux à en juger par la façon dont il est sorti de la chambre à coucher au pas de charge. Peut-être la fille aurait-elle dû se garer en le voyant arriver, mais peut-être ne l’a-t-elle pas vu ? Il va percuter la fille qui pousse un nouveau cri perçant tandis qu’elle se propulse dans le living-room, rencontre le parquet avec un vilain bruit, roule et roule environ quatre fois sur elle-même avant de s’arrêter net. Son derrière, je le constate avec plaisir, est une œuvre d’art et devrait répandre la joie à jamais, avec ses deux joues rondes et haut perchées, pareilles à des oreillers et immédiatement pelotables. La laide réalité s’impose l’instant d’après tandis que le buffle blessé fonce droit sur moi.

L’espace d’un instant je suis tenté de dire : « Tu veux baiser, chérie ? » et d’observer sa réaction. Mais aussitôt je pense que ce ne serait pas correct parce que nous les flics, on a de la classe et on est réputés pour notre esprit subtil.

La fille baisse les yeux sur son corps et pousse un faible cri plaintif une seconde avant d’appliquer fermement ses deux mains sur son triangle. L’espace d’un instant, elle paraît plus à l’aise, mais alors elle se rend compte que ses seins sont toujours pleinement exposés. Elle place soigneusement un bras à l’horizontale en travers de ses seins, couvrant ses tétons, puis fait demi-tour et retourne vers la chambre à coucher, plus ou moins à la façon d’un crabe.

C’était plus une question psychologique que financière. Elle a horreur de se sentir seule. Je lui ai offert de m’installer chez elle mais elle m’a répondu qu’elle ne pouvait supporter l’idée de vivre avec un homme, dit-il avec un sourire amer. Pour ce qui est de baiser c’est parfait, mais elle pense que le reste serait vraiment assommant. Comme la cuisine et les petites corvées.

Les autres fois elle était avec le même gars. C’était un grand modèle. Pas loin de cent kilos, j’imagine, et grand avec ça. Cheveux noirs très fournis et une de ces moustaches de brigand. Le genre de gars à qui on adresse des excuses quand il vous bouscule au passage. Tiré à quatre épingles aussi.