Qui a déjà lu certains de ses livres retrouvera avec délectation, dans celui-ci, la belle écriture de
Françoise Moreau. Belle, élégante, savoureuse et délicate dans l'ironie légère, un brin nostalgique ici, qui se plaît à retrouver des mots et des expressions surannés (de ce temps où les oculistes n'étaient pas encore des ophtalmologues, ni Notre-Dame-des-Landes une ZAD, mais une coopérative laitière) en réveillant une mémoire nantaise teintée de douce mélancolie. Une écriture particulièrement attentive aux détails et aux êtres, singulièrement aux "petites gens". Fine observatrice à laquelle rien n'échappe,
Françoise Moreau, au travers de ces six histoires réinventées, fait remonter à la mémoire des noms de lieux ou de marques presque oubliés, emblèmes de l'histoire de son pays nantais : Drouin, Decré, Dames de France, Cassegrain, Chantiers Dubigeon ou pont transbordeur.
Encore remarquables par la précision et la justesse du vocabulaire, la langue et le ton de
Françoise Moreau pourront commencer de s'apprécier, pour ceux qui ne la connaîtraient pas encore, dans ce petit paragraphe clairement narquois :
« C'est ce qu'a répondu Marie-Reine. Je vais consulter à Nantes. Parce qu'il y a mille façons de faire avouer à une femme qu'on a vue prendre le car des voyageurs ce qu'elle est allée voir en ville. On tourne autour et on l'agace de questions insignifiantes et félonnes comme dards de guêpes. On peut aller jusqu'à proposer de garder les enfants. Je vois que tu vas à Nantes souvent, n'hésite pas ! L'offre de service vaut droit à confidences, c'est tout naturel, c'est le moins pour un dépôt aussi sacré qu'une paire de bambins dans leurs couches. »
On soulignera enfin le soin exemplaire porté à la présentation, à la typographie et à la fabrication de ce livre par l'éditeur nantais L'Oeil ébloui.
(Chronique parue sur le site Mobilis)
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