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Julien Deleuze (Traducteur)
EAN : 9782743600181
190 pages
Payot et Rivages (31/01/1996)
3/5   3 notes
Résumé :
C'est un roman mystérieux qui se passe à Vienne dans les années 1770. Les intrigues à la cour de l'impératrice d'Autriche, la musique de Mozart, le froissement des robes en soie, la guerre, Benjamin Franklin, le Siècle des lumières, Frédéric II de Prusse. C'est surtout l'histoire (vraie) d'une jeune fille aveugle et musicienne, que son père confie à Franz-Anton Mesmer, médecin célèbre pour ses découvertes scientifiques dans la guérison des maladies de l'esprit. La p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
The Strange Case of Mademoiselle P.
Traduction : Julien Deleuze

Il s'agit d'un roman basé sur une histoire tout à fait véridique, celle de la compositrice et cantatrice Maria-Theresia von Paradis dont le magnétiseur Franz-Anton Mesmer parvint un temps à stabiliser la maladie qui la rendait aveugle, voire à inverser le phénomène. Maria-Theresia était devenue aveugle à l'âge de deux ans. Elle était la fille de Josef Anton von Paradis, Secrétaire impérial au Commerce et Conseiller à la Cour de l'Impératrice Marie-Thérèse d'Autriche - mère du future empereur Josef II et de Marie-Antoinette, reine de France. L'impératrice s'intéressait beaucoup à la santé de l'enfant mais, contrairement à la rumeur, elle ne fut pas sa marraine. Elle lui faisait payer cependant très régulièrement une sorte de pension d'invalidité qui, bien sûr, aurait disparu si la jeune fille avait recouvré la vue. Son père fit donc des pieds et des mains pour faire cesser le traitement qu'il avait lui-même sollicité de la part de Mesmer et sans le soutien du magnétiseur, les progrès accomplis par la jeune fille ne tinrent pas.

C'est cette crise et son dénouement que Brian O'Doherty nous retrace ici, dans un récit à trois voix au style soutenu et élégant. La première voix est celle de Mesmer, la seconde celle de Mademoiselle P. et la dernière, celle de son père, le Secrétaire impérial.

Le livre achevé, vous avez deux possibilités : ou bien vous jugez l'ensemble boîteux et vous vous demandez où diable l'auteur voulait en venir ; ou bien vous penchez pour un roman "ouvert" : l'auteur veut faire participer son lecteur et le laisser trouver ses propres réponses aux questions soulevées. le flou est laissé sur les sentiments éventuels - charnels et autres - que Mesmer et Mademoiselle P. auraient été susceptibles d'éprouver, à croire que ce ne sont là que fausses rumeurs. Mais comme O'Doherty nous envoie des signaux souvent contradictoires, on peut s'étonner en parallèle de la façon dont Mme Mesmer - personnage que l'on distingue çà et là mais qui ne dit pas un seul mot - dévisage son époux.

De même, l'effet de basculement brutal entre l'enthousiasme premier du père, désireux de voir guérir son enfant, et son violent rejet de Mesmer à partir du moment où celui-ci parvient à ses fins, ne peut s'expliquer complètement, en tous cas dans le contexte que nous donne O'Doherty, par la seule peur de l'intrigant qui redoute de voir se tarir la bourse impériale. Peut-être suis-je obsédée mais il y a une pointe de père incestueux là-dedans, si ce n'est physiquement, en tous cas intellectuellement et affectivement - tandis que la mère, de son côté, est dépeinte comme ce que l'on nommerait de nos jours une mère castratrice, dévoreuse, abonnée au chantage affectif et capable de maltraiter physiquement sa fille si celle-ci s'oppose à elle.

La voix de l'héroïne est la plus claire, la plus émerveillée, la plus douce et aussi la plus triste. Peu à peu, elle se résigne à son destin, qui lui permettra tout de même de composer et de chanter mais qui ne lui rendra pas la vue perdue. On notera que c'est vraisemblablement pour elle que Mozart, entrevu ici en silhouette - une silhouette d'ailleurs honnie par le Conseiller impérial qui, en cela, obéit au diktat de la Cour autrichienne - composa son dix-huitième concerto pour piano, K456 en si bémol majeur. Pour l'anecdote, ajoutons que Salieri compta parmi les professeurs de chant de Mademoiselle P.

En résumé, "L'Etrange Cas de Mademoiselle P." laisse perplexe, avec une impression d'inachevé. le lecteur qui aime les lignes bien tranchées et les conclusions nettes ne s'y retrouvera pas, sans compter qu'il risque de s'ennuyer. Les autres ... Ils peuvent essayer mais ce n'est pas un livre qui, à mon sens, donne envie d'en lire d'autres du même auteur. Et ça, c'est tout de même un peu malheureux. ;o)
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
[...] ... Chaque fois que j'entends le nom de ce maudit homme [= Mesmer], un nom que j'ai fait circuler parmi les cours d'Europe, je suis prêt à m'étrangler de rage. En conséquence de ses trucages et de ses absurdités, j'ai compromis ma position à la Cour, j'ai failli perdre la faveur de Sa Gracieuse Majesté et ma fille m'est devenue étrangère. Les gens désoeuvrés de la Cour se sont mis à parler dans mon dos, et ces chambellans, assistants, secrétaires et maîtres de cérémonie, qui m'avaient toujours traité avec le respect dû à un Secrétaire auprès de Leurs Majestés, ont commencé à mettre à l'épreuve la faveur dont je jouissais, faisant circuler mon nom en y attachant seulement l'idée d'un amoindrissement de mon statut, comme c'est le cas même lorsque rien ne pèse sur celui-ci mais qu'il est devenu sujet de commérages.

Et tout cela alors que j'avais à réfléchir à de sérieux problèmes, concernant leurs deux Majestés. L'impératrice subissait à cette époque l'une de ses attaques d'essoufflement, haletant quand elle était couchée et suffoquant quand elle se déplaçait, ce qui était dû en partie à sa tendance à l'embonpoint. Le docteur Stoerk se montrait sans cesse au palais. Elle se refusait à abandonner cette idée de légiférer sur la moralité publique, ce qui, étant donné la conduite de plusieurs membres de la Cour, provoquait beaucoup de rires parmi ces beaux esprits qui appelaient son groupe la "commission de chasteté." Elle se querellait toujours avec son fils, l'empereur, à propos de la partition de la Pologne, regrettant de l'avoir approuvée, et elle envoyait une tempête de lettres à sa fille qui était à Paris. Elle avait toujours la Prusse en tête, d'autant plus qu'il y avait danger là-bas. Mes chagrins domestiques semblaient banals, comparés à tout cela. Mais, même au milieu de tous ces soucis, l'impératrice se tournait vers moi pour me demander comment se portait ma fille et me dire combien elle souhaitait l'entendre jouer à nouveau. Comment pouvais-je lui dire que l'enfant était incapable de jouer une note à cause des manigances de cet homme ? [Depuis qu'elle a retrouvé la vue, Mademosielle P. semble avoir perdu le toucher qu'elle avait au clavecin : il s'agit en fait d'un défaut de coordination entre les deux mains.] ... [...]
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[...] ... Je dis à la mère ce que j'avais dit la veille au père. Si le corps était mort, l'esprit ne pouvait plus fonctionner ; mais si le corps vivait, l'esprit tombait parfois en pâmoison, dans les ténèbres. Il était parfois possible de pousser un cri dans ces ténèbres et d'en guetter l'écho. Eveiller l'esprit, l'encourager à revenir occuper le corps, était un procédé lent et hasardeux. A cette fin, j'examinerais les yeux de la jeune fille ; si le corps de ceux-ci étaient mort, il n'y aurait rien à faire. Mais si les organes étaient sans défaut, les ténèbres pourraient en être levées.

Hier, le père m'avait écouté sans m'entendre comme, à la vérité, la mère aujourd'hui. Ils voulaient un réconfort, pas des explications. A leur sens, je m'exprimais en magicien, ou en sorcier. J'en espérais plus du père, qui était un homme instruit, même si j'ignorais en quoi consistaient ses devoirs à la Cour. J'ai toujours pensé qu'il est à l'avantage du médecin si le patient - et dans le cas de jeunes patients, leur famille - comprend la nature du traitement, quoique je dusse me rappeler à moi-même que certains sont incapables d'une telle compréhension. Lorsque je leur parle de "magnétisme animal", il leur arrive de penser que je parle de chiens ou de chats. Si je pouvais agir à mon gré - ce qui, bien sûr, ne sera jamais le cas - je ferais lire à chaque étudiant Des fonctions essentielles et particulières des substance végétales et animales de Wolff. C'est écrit en bel et bon allemand et chacun peut en tirer parti. Derrière lui, se tient le grand Descartes, dont la raison est un phare vers lequel se tournent tous les êtres vivants. Peut-être est-ce de là que provient mon insistance sur l'éducation du patient. Il n'est point de mystère qui doive échapper à la précision de la pensée ou à la lumière de la raison. ... [...]
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