L'ombre de l'ornithorynque

Roman monstre, roman monde, L'ombre de l'ornithorynque impressionne par son ambition narrative. Dans cette fiction ample, Stéphane Dovert s'est donné pour mission de redéployer les architectures du monde selon une approche qui n'a rien d'européocentré. Et ça fait du bien à lire.

J'ai vécu cette lecture comme un voyage d'initiation vers une autre façon d'imaginer le monde, tournée vers l'Asie. Vraisemblablement proche de la vision hindouiste avec un dieu maître du cosmos assisté de divinités qui sont autant de facettes de ce Dieu suprême sur le déclin, incapable dans ce roman d'achever la Création lorsque l'homme apparaît sur Terre. L'humain ou la « Projection » est créé avec des caractères « potentiellement capables de développer des comportements aberrants » que l'on constatera tout au long de la fresque historique que l'auteur déploie sous nos yeux.
Stéphane Dovet convoque Siddhartha, Ibn Battûta, Oppenheimer...des figures tutélaires, des aventuriers, des scientifiques qui ont perturbé l'Empreinte des dieux, que ce soit dans sa dimension visible ou invisible, dans sa dimension infiniment petit ou dans le démesurément grand.
A partir du moment où l'humain prend conscience de son individualité et de sa liberté, il n'aura de cesse de manifester une volonté prométhéenne d'emprise sur le cycle du vivant, sur la nature. L'auteur a une manière stupéfiante de mettre en évidence ce qui anime l'humain quelle que soit l'époque même si cela le conduit à sa perte.

Mais est-ce réellement la faute de l'humain lorsque les divinités, amenées à sonder la nature de l'élément qui perturbe leur Empreinte, manifestent leurs tempéraments et les conflits qui les traversent ?
Ou peut-on considérer que le Dieu créateur s'éloignant de son Empreinte, se désintéresse du sort de sa création pour lui permettre de trouver une cohérence propre, s'adapter à sa condition imprévisible de mortel, quitte à la laisser exprimer sa liberté dévastatrice, ou l'illusion de liberté chère à Spinoza ?

C'est un véritable édifice littéraire que donne à lire Stéphane Dovert, passionnant par son approche philosophique et culturelle dans les tiroirs de la science-fiction. Il a une force étonnante même s'il faut parfois de la persévérance lorsque la narration bousculée laisse le texte en suspens pour prendre ailleurs possession du récit. Il peut même désorienter pour qui n'est pas familier avec les conceptions qui envisagent une autre façon d'habiter le monde où l'humain n'est qu'un élément parmi d'autres, un microcosme faisant partie d'un grand tout d'un macrocosme.
Mais au final ces pages qui renferment toute la complexité du monde sont d'une puissance captivante.

Ma chronique sera brève car je n'ai pas réussi à vraiment terminer ce roman, je l'ai lu en diagonale car je ne parvenais pas à mémoriser les noms des divinités. Si j'ai bien compris, les divinités : Salai Saudarh, Abengan et leur soeur Pattenloé ont décidé de s'incarner, de prendre forme humaine, pour tenter de comprendre le processus de la Création et pour cela ils vont apparaître sous forme de dinosaures, de moines bouddhistes, ou encore de Cathares etc…

Le but est de comprendre comment l'être humain s'incarne, et pourquoi, et par voie de conséquence les imperfections des espèces et comment elles se transmettent d'une entité à une autre, tout en revisitant la préhistoire, l'Histoire, et les contrées de l'Europe à l'Asie.

Ce roman, en fait, a tout pour me plaire, mais tout va trop vite, et en ce moment ma lenteur d'idéation était un obstacle. Je le mets précieusement de côté, pour le reprendre tranquillement car le thème et l'écriture de Stéphane Dovert m'ont plu, mais voilà, un mois c'est trop court.

Je me réserve la possibilité de reprendre cette chronique quand j'aurai tout assimilé car ce livre est impressionnant …

Un grand merci à Babelio et aux éditions Arkuiris (Nom inspiré du portugais, signifiant « Arc en ciel » que je ne connaissais pas, mais dont le catalogue est intéressant et tentant !) qui m'ont permis de découvrir ce roman et son auteur.

Je préfère de pas mettre de note car elle ne reflèterait pas la teneur et la qualité du roman.

Lien : https://leslivresdeve.wordpr..

J'ai eu du mal. L'écriture est impeccable, très riche, très fouillée. C'est pour suivre le récit que j'ai eu des difficultés.
Trois dieux, Salai Saudarh, Abengan et Pattenloé, visitent le monde et le temps pour connaître la création. Pour se faire, ils s'incarnent dans des êtres vivants. Ainsi, ils seront dinosaures, moines bouddhistes, cathares, esclaves africains… Cette quête les mènera jusque dans notre futur, au XXIIe siècle.
C'est avec ce récit bondissant que j'ai eu du mal. À chaque changement de contexte, le lecteur doit un peu jouer aux devinettes pour comprendre où et quand il se trouve, et ce qui se passe. Et ce n'est pas facile, car il y a toute sorte de concepts bizarres, de phrases bien construites, mais parfois compliquées à force de tournures et de mots rares.
"De nouveaux Éventails avaient été choisis, riches de Projections plus harmonieuses et sans doute mieux en mesure d'assurer le succès nécessaire à la survie de l'Astre-Père et de son Pergola."
Je serais donc en peine de résumer l'histoire, parce que je suis loin d'avoir tout compris. Je pense qu'une oeuvre d'une telle ampleur demande un certain état d'esprit, qui n'était pas du tout le mien au moment où je l'ai lu. J'y reviendrai peut-être plus tard, car je suis sûr que ce bouquin en vaut le coup.