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EAN : 9782369148562
416 pages
Libretto (05/10/2023)
4.67/5   3 notes
Résumé :
Depuis 1980, ces textes savamment sélectionnés et regroupés ici par Charles Minguet, n’avaient pas été réédités. Ils sont extraits de la relation historique du Voyage aux régions équinoxiales du Nouveau Continent (1814 à 1831), de l'Essai politique sur le royaume de la Nouvelle-Espagne (1808 et 1811), de l'Essai politique sur l'île de Cuba (1826), de Tableaux de la Nature (1808) et des Vues des Cordillères (1810 à 1813).


En 1799, à l’âge de tr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
« Voyage, voyage, plus loin que la nuit et le jour »…

Quand survient le « désir, laisse » ton coeur s'enflammer et embarque vers des horizons lointains !
Lointain, dans l'espace et le temps, il y a plus de deux siècles, mais trois après les premiers découvreurs de l'Amérique.
Alors, Humboldt, il n'a rien découvert ? Non, il a exploré, toute la différence entre aventure et exploration, il fut l'un des savanturiers de son époque.

Pour situer le personnage, il est né la même année que Napoléon Bonaparte et Chateaubriand, en 1769 pour être précis. A l'âge de trente ans, il trouve un Bonpland, qui deviendra son ami, il s'appelle Aimé. Avec cet autre explorateur, botaniste de surcroît, enfin non, de la Rochelle, un port, endroit prédestiné pour être happé par le large, il embarque pour un voyage dans l'Amérique équinoxiale. Bon choix que ce Bonpland, qui avait déjà fait le tour du monde avec Bougainville. le baron prussien est plutôt spécialisé en géologie, le duo va donc faire merveille et permettre d'augmenter les connaissances naturalistes.

« L'Amérique, l'Amérique, si c'est un rêve je le saurai »…
Verra-t-il la « Yellow River » ? Il y a or dans Orénoque...

« Nulle part ailleurs la Nature ne l'appelle plus vivement à s'élever à des idées générales sur la cause des phénomènes et sur leur enchaînement mutuel. (…) Heureux le voyageur qui peut se flatter d'avoir profité de sa position, et d'avoir ajouté quelques vérités nouvelles à la masse de celles que nous avons acquises ».

Humboldt a beaucoup observé, mesuré et noté dans son « journal », s'intéressant pratiquement à tout : au relief, au climat, à la flore, à la faune, au mouvement des étoiles, au tellurisme, à la production agricole, à l'économie, à la démographie, aux différentes ethnies, etc.
Aidé de Bonpland, il a collecté des végétaux, des minéraux, des animaux et même des ossements humains.

Comme il sied à un récit de voyage, la narration de « Voyages dans l'Amérique équinoxiale » est globalement linéaire. Cependant, Humboldt y procède à de fréquents allers-retours, à des digressions, passant brusquement d'un thème à un autre, se répétant parfois, tellement les sujets qu'il traite sont riches et variés : preuve de son inépuisable curiosité intellectuelle, de l'acuité de son sens de l'observation et de sa volonté de partager son savoir encyclopédique.

Arrivé au Vénézuela, ce qui le frappa en premier lieu, c'est l'esclavage encore présent dans ces contrées. Il étudia donc l'espèce humaine locale, ou plutôt celle arrivée d'Afrique pour « alléger » le travail des négriers. La description qu'il fait de cette rencontre, faite d'étonnement et de compassion illustre l'intérêt qu'il porta à toutes les manifestations de la vie sur la Terre.

« C'était la nuit d'un dimanche, et les esclaves dansaient au son bruyant et monotone de la guitare. Les peuples d'Afrique, de race noire, ont dans leur caractère un fond inépuisable de mouvement et de gaieté. Après avoir été livré à des travaux pénibles pendant la semaine, l'esclave, les jours de fête, préfère encore la musique et la danse à un sommeil prolongé. Gardons-nous de blâmer ce mélange d'insouciance et de légèreté, qui adoucit les maux d'une vie pleine de privations et de douleurs ».

Par contre, il revient sur les prétentions des « hommes de couleur » en affirmant que :
« Dans les missions, tout homme de couleur, qui n'est pas franchement noir comme un Africain ou cuivré comme un Indien, se dit espagnol ; il appartient à la catégorie des gens de raison, à la race dotée de raison, et cette raison, il faut en convenir, parfois arrogante et paresseuse, persuade les Blancs et ceux qui croient l'être, que labourer la terre est travail d'esclaves et d'indigènes néophytes ».

On perçoit sans mal dans de tels propos la trace des préjugés européens à l'encontre des dits « hommes de couleur », singulièrement des sang-mêlé, à qui il est reproché de ne pas savoir rester à leur place, de se proclamer égaux aux Blancs et de mépriser les Indiens.

Pour exprimer l'idée qu'ils vont nus, Humboldt dit avec humour, à deux reprises :

« Leur unique « vêtement » est la peinture vermeille dont ils enduisent leur corps, ajoutant qu'on peut distinguer deux sortes de peinture, selon que les individus soient plus ou moins puissants ».

Il est frappant de constater que Humboldt n'élabore aucune théorie scientifique sur la relation qu'entretiennent les Indiens avec la nature, se contentant de relater ce qu'il a observé ou entendu dire à ce propos.
Humboldt dit encore avoir vu quatre Indiens du Río Negro manger de grosses fourmis appelées bachacos dont l'abdomen, comme le lui a expliqué un missionnaire, contient une graisse très nourrissante.
Une autre coutume qui interpelle le savant est la consommation de terre glaise par les Indiens Otomacos de la mission d'Uruana. Humboldt écrit :

« Les Otomacos mangent de la terre, c'est-à-dire, en avalent pendant plusieurs mois, tous les jours, une quantité considérable, pour combattre la faim, et sans que cela n'affecte leur santé ».

Après les Indiens, le paysage. En vue du fleuve majestueux, Humboldt montre toute l'étendue de son talent d'écrivain et d'observateur. Une minutie des détails, l'immensité des lieux et un enchantement à lire ses phrases. le chapitre en question s'appelle « Le superbe Orénoque », titre utilisé par Jules Verne dans l'une de ses aventures.

« Une immense plaine d'eau s'étendait devant nous, comme un lac, à perte de vue. Des vagues blanchissantes se soulevaient à plusieurs pieds de hauteur par le conflit de la brise et du courant. L'air ne retentissait plus des cris perçants des hérons, des flamants et des spatules qui se portent en longues files de l'une à l'autre rive. Nos yeux cherchaient en vain de ces oiseaux nageurs dont les ruses industrieuses varient dans chaque tribu. La nature entière paraissait moins animée. A peine reconnaissions-nous dans le creux des vagues quelques grands crocodiles fendant obliquement, à l'aide de leurs longues queues, la surface des eaux agitées. L'horizon était bordé par une ceinture de forêts ; mais nulle part ces forêts ne se prolongeaient jusqu'au lit du fleuve. de vastes plages, constamment brûlées par les ardeurs du soleil, désertes et arides comme les plages de la mer, ressemblaient de loin, par l'effet du mirage, à des mares d'eaux dormantes. Loin de fixer les limites du fleuve, ces rives sablonneuses les rendaient incertaines. Elles les rapprochaient ou les éloignaient tour à tour, selon le jeu variable des rayons infléchis ».

Un autre domaine où excelle le narrateur est celui d'historien, de transmetteur d'événements qu'il apprit de la bouche de missionnaires à propos de la cruauté des réactions humaines lors de rencontres de tribus inconnues, donc forcément ennemies. Un rocher marque l'endroit où une indienne fut séparée de ses enfants. La fuite, les poursuites, les sévices infligés et la mort solitaire qui suivirent ont profondément marqué Humboldt qui écrit :

« Si, dans ces lieux solitaires, l'homme laisse à peine après lui quelques traces de son existence, il est doublement humiliant pour un Européen de voir se perpétuer, par le nom d'un rocher, par un de ces monuments impérissables de la nature, le souvenir de la dégradation morale de notre espèce, celui du contraste entre la vertu du sauvage et la barbarie de l'homme civilisé » !

Des mois plus tard, alors qu'ils avaient atteint la Colombie, un spectacle saisissant et répugnant donna à Humboldt l'occasion de « caractériser le degré de la civilisation et les moeurs du bas peuple ». Alors qu'ils assistaient à la procession de Pâques, voici ce qu'il advint le soir.

« Au coucher du soleil, on voyait dans les rues principales des mannequins de Juifs, vêtus à la française, le corps rempli de paille et de fusées, suspendus à des cordes à la manière de nos réverbères. La populace attendait, pendant plusieurs heures, le moment où « le feu serait mis à los judios. On se plaignait que les Juifs, à cause de la grande humidité de l'air, brûlaient moins bien qu'à l'ordinaire. Ces « saintes récréations » (c'est la dénomination qu'on donne à ce spectacle barbare) ne sont pas faites pour adoucir les moeurs ».

Mais revenons aux découvertes scientifiques. Dans l'Amérique tropicale, le savanturier ne visite aucun lieu sans noter sur ses carnets l'évolution de la température, la pression et l'électricité de l'air, la température d'ébullition de l'eau, les mélanges gazeux atmosphériques, le champ magnétique, le bleu du ciel, les espèces de plantes et d'animaux et leurs associations, ainsi que les roches.
Tout en s'émerveillant des paysages, il se comporte comme un physicien qui aurait sorti ses instruments du laboratoire.
Comment ne pas évoquer la découverte du courant marin qui porte son nom.
Alors qu'il venait d'arriver sur les côtes péruviennes, il poursuivit ses observations sur la température de la mer.

« J'ai compris que le froid saisissant que l'on ressent, sous les tropiques, a son origine dans la moindre chaleur de l'eau et dans le fait que la garua (moment où le soleil est voilé par une couche de nuages) atténue les rayons du soleil ».

Ce courant marin de surface, prenant naissance dans l'Antarctique, est froid, environ sept à huit degrés inférieur à la température de la mer à la même latitude. Ses eaux sont très poissonneuses. Mais le récent phénomène El Nino apporte un courant chaud qui diminue le plancton et augmente les précipitations à cet endroit.

Cette expédition équinoxiale n'a cessé d'être analysée, tant elle est dense et ambitieuse. Avec la crise écologique actuelle, elle a gardé toute son actualité. Son heure pourrait être à nouveau venue. Humboldt n'a-t-il pas, à partir de ses observations du lac Valencia au Venezuela en 1800, pesté contre les dégâts causés par les plantations coloniales ? Il y déplorait la stérilisation des sols liée à une déforestation brutale, la disparition de la végétation liée à un usage intensif de l'eau.
Il y voyait ce qu'on appelle aujourd'hui une boucle de rétroaction négative, avec la forêt tropicale jouant un rôle central dans le cycle de l'eau et le réchauffement global provoqué par la perturbation de ce qu'on appellera au XXe siècle le cycle géochimique du carbone.
N'est-ce pas là formuler, de manière limpide, le rôle des activités humaines dans le changement climatique qui a ouvert une nouvelle ère dans le temps géologique qu'on appelle l'anthropocène ?
Le récit de l'explorateur est riche et dense, à l'image de son voyage qui dura quatre ans. Il y aurait de quoi expliquer bien d'autres découvertes qu'il fit avec son compagnon.
La réédition de toutes ces notes prises tel un journal de bord sont à découvrir au plus vite. C'est une mine d'informations toutes aussi passionnantes que variées. Il manque juste une carte générale précisant le trajet effectué par les deux hommes.

« Voyage, voyage, éternellement »...

Merci à Babelio et aux Editions Libretto pour l'envoi de ce petit livre dans le cadre de la masse critique.




























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Quelle bonne idée ont eu les éditions Libretto de rééditer les récits de voyage d'Alexandre de Humboldt qu'il fit en Amérique de 1799 à 1804 ! Bien sûr, cette oeuvre monumentale écrite en français - 30 volumes ! - n'a pas été reprise en intégralité mais Charles Minguet (un grand spécialiste de Humboldt auquel il consacra sa thèse en 1969 puis plusieurs livres) a choisi et extrait des passages de 5 des 30 volumes qui relatent cette expédition scientifique pour nous livrer un récit de ce voyage fluide et parfaitement lisible malgré les coupes nécessaires.

Comme l'explique Charles Minguet dans la biographie passionnante du savant naturaliste, Alexandre de Humboldt n'a pu réaliser ses projets de voyages qu'à la mort de sa mère, quand il hérita de sa fortune considérable. Sollicité par Bougainville, il faillit partir avec lui pour une expédition en Amérique du Sud qui finalement fût annulée. Qu'à cela ne tienne, Humboldt s'est largement rattrapé par la suite...
En 1799, il réussit à convaincre le roi espagnol Charles V d'autoriser une expédition scientifique aux Amériques pour découvrir "l'interaction des forces de la nature et les influences qu'exerce l'environnement géographique sur la vie végétale et animale".
Il organise minutieusement cette expédition avec son ami Aimé Bonpland, chirurgien et naturaliste. Avec dans leurs malles de très nombreux instruments scientifiques, à la pointe de la modernité en cette fin de XVIIIème siècle, tous deux débarquent le 16/07/1799 à Cumaná en Nouvelle-Grenade, c'est à-dire dans l'actuel Vénézuela (la Nouvelle-Grenade était le nom donné à la région regroupant les actuels états de Colombie, Panama, Vénézuela et Equateur lors de la conquête espagnole).

A la recherche des sources de l'Orénoque, les deux savants remontent le fleuve et certains de ses affluents sur 2250 kilomètres dans des conditions de voyage extraordinairement difficiles, sur une pirogue minuscule n'autorisant aucun mouvement sous peine de la faire chavirer. Ils naviguent exposés au feu du soleil et aux piqûres de moustiques, dans un environnement hostile où pullulent les crocodiles, les serpents et les "tigres" (en réalité des jaguars). Dans certaines régions tropicales, l'air est parfois si saturé d'humidité qu'Aimé Bonpland y perdra plusieurs plantes qu'il avait recueillies.

Génie universel, Humboldt maîtrise de nombreuses sciences et s'intéresse à toutes ! Inlassablement, Bonpland et lui herborisent, collectent insectes et minéraux, analysent les sols, mesurent les températures de l'eau et de l'air, effectuent des relevés topographiques et barométriques, multiplient les expériences qu'il s'agisse de celles menées sur les gymnotes électriques ou sur le curare, observent une éclipse de soleil...

Mais il sait aussi se faire historien et anthropologue. Il revient sur les explorations menées dans cette région par ses prédécesseurs au 18ème siècle (notamment le père José Gummilla et Charles Marie de la Condamine pour les plus grands contributeurs à l'histoire naturelle du Vénézuela) et corrige leurs erreurs, rectifiant la hauteur d'une cascade, d'une montagne, resituant correctement la source de l'Orénoque et prouvant que les deux grands fleuves Amazone et Orénoque sont reliés par le canal du Cassiquiare, rétablissant la vérité sur les effets délétères du curare etc.
Il s'intéresse aussi aux tribus indiennes qu'il rencontre et décrit minutieusement leurs coutumes telles que leurs peintures corporelles ou la chasse aux guacharos, oiseaux nocturnes tués pour leur graisse ensuite transformée en huile. Il retrace l'histoire des missions installés au sud de l'Orénoque, non pas par des moines mais par des militaires.

A 30 ans, Humboldt a la chance d'avoir une excellente constitution et une résistance à toute épreuve. Très endurant, il résiste aux fièvres qui sont fréquentes dans ces régions équatoriales quand son ami Bonpland est, lui, terrassé par la maladie.

Après leur voyage au Vénézuela, les deux hommes rejoignent le Pérou et explorent les Andes, leurs sommets et volcans durant de nombreux mois. Toujours en très bonne santé, Humboldt entreprend plusieurs ascensions dont celle du Chimborazo, atteignant pour la première fois l'altitude record de de 5878 mètres même s'il devra renoncer à atteindre le sommet en raison du mal des montagnes. le savant s'émerveille devant la chaussée des Incas et nous rappelle les circonstances dramatiques de la mort du dernier empereur des Incas, Atahualpa, mis à mort sur l'ordre de Francisco Pizarro. Et c'est au bord du Pacifique, en décembre 1802 que ses mesures de températures et barométriques lui confirmeront sa découverte d'un courant marin froid d'origine polaire, "allant du sud au nord et nord-ouest", le fameux courant de Humboldt.

Toujours accompagné de Bonpland, il se rend ensuite au Mexique où il reste un an, admirant la beauté imposante et majestueuse de Mexico et les jardins flottants qui environnent la capitale.
Dans l'avant-dernière partie choisie par Charles Minguet, Humboldt se livre à une véritable leçon de géographie et de géologie basée sur les résultats de ses mesures barométriques des hauts plateaux du Mexique qu'il compare à ceux des Andes. Avec une grande intelligence géoéconomique, il réalise une analyse comparative du potentiel de chaque région, avançant à juste titre que "de grandes vues géologiques deviennent susceptibles d'intéresser l'homme d'Etat lorsqu'il cherche à évaluer les forces et la richesse territoriale des nations".

A travers les écrits de Humboldt, on devine un homme profondément humaniste, horrifié par le traitement infligé aux esclaves qu'il découvre à son arrivée en Nouvelle-Grenade, affligé aussi par la profession des cargueros, ces bêtes de somme humaines qui choisissent comme métier de porter pendant 8 à 9 heures par jour des hommes aisés dans des chaises accrochées sur leur dos pour leur faire franchir des montagnes.

4 ou 5 cartes de la main du savant accompagnent heureusement cette lecture, et elles m'ont bien aidée à suivre la remontée de l'Orénoque ainsi que les nombreuses digressions de voyage menées par Humboldt et Bonpland sur tous les fleuves affluents ou confluents. Elles ne sont pourtant pas très faciles à lire avec des dates inscrites en tout petit et j'aurais apprécié d'avoir une carte moderne et plus lisible de l'expédition totale.

J'ai pris mon temps pour savourer cette lecture et j'ai regretté qu'elle se termine un peu abruptement. Car tout, absolument tout, est passionnant dans cette longue relation des 5 années de voyage du savant et de son ami Bonpland. Mésestimé de son temps, tant par les Français qui lui reprochaient d'être trop allemand que par les Allemands qui regrettaient qu'il soit si francophile, oublié ensuite, il était temps de remettre en lumière ce grand homme et le fabuleux héritage scientifique qu'il nous laissa et qui est encore exploité de nos jours ! Gageons que cette réédition y contribuera en gagnant le coeur de quelques lecteurs éblouis comme moi par celui que l'on surnomma le deuxième découvreur de l'Amérique !

Voilà, je termine ce long billet en remerciant Babelio et les éditions Libretto pour l'envoi de ce magnifique récit d'exploration.
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Excellente initiative des Editions Libretto que cette réédition d'Alexander von Humbolt, auteur que j'étais curieuse de lire depuis longtemps. Il s'agit seulement d'une sélection extraite de l'immense oeuvre du naturaliste allemand, mais l'aperçu est de qualité et sa lecture des plus intéressantes. J'ai apprécié ce "voyage" sur l'Orénoque et les remarquables descriptions qu'en fait le savant: érudites mais rendues passionnantes par une prose sobre et fluide. Un récit de voyage où tous les aspects de l'exploration sont analysés. Cela me donne envie de poursuivre la découverte. Ouvrage reçu dans le cadre de la Masse Critique
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Dans une pirogue si encombrée et qui n'avait pas trois pieds de large, il ne restait d'autre place, pour les plantes sèches, les malles, un sextant, la boussole d'inclinaison et les instruments météorologiques, que le dessous du treillis de branches sur lequel nous étions forcément étendus la majeure partie de la journée. Pour retirer le moindre objet d'une malle, ou pour se servir d'un instrument, il fallait aborder au rivage et débarquer. A ces incommodités se joignaient et le tourment des mosquitos qui s'accumulent sous un toit si bas et la chaleur que rayonnent les feuilles de palmiers dont la surface supérieure est continuellement exposée aux ardeurs du soleil. Nous tentions à chaque instant, et toujours sans succès, d'améliorer notre position. Tandis que l'un de nous se cachait sous un drap pour se garantir des insectes, l'autre insistait pour qu'on allumât du bois vert sous le toldo, afin de chasser les moustiques par la fumée. La douleur des yeux et l'accroissement d'une chaleur déjà si étouffante rendaient les deux moyens également impraticables. Avec quelque gaieté de caractère, avec des rapports de bienveillance mutuelle, avec un vif intérêt pour la nature majestueuse de ces grandes vallées de rivières, les voyageurs supportent facilement des maux qui deviennent habituels. Je ne suis entré dans ces détails minutieux que pour peindre la manière de naviguer sur l'Orénoque et pour prouver que, malgré notre bonne volonté, nous n'avons pu, M. Bonpland et moi, pendant cette partie du voyage, multiplier nos observations autant que l'aurait exigé l'intérêt des objets qui nous entouraient.
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En sortant du Rio Apure, nous nous trouvâmes dans un pays d'un aspect tout différent. Une immense plaine d'eau s'étendaient devant nous, comme un lac, à perte de vue. Des vagues blanchissantes se soulevaient à plusieurs pieds de hauteur par le conflit de la brise et du courant. L'air ne retentissait plus des cris perçants des hérons, des flamants et des spatules qui se portent ne longues files de l'une à l'autre rive. Nos yeux cherchaient en vain de ces oiseaux nageurs dont les ruses industrieuses varient dans chaque tribu. La nature entière paraissait moins animée. A peine reconnaissions-nous dans le creux des vagues quelques grands crocodiles fendant obliquement, à l'aide de leurs longues queues, la surface des eaux agitées. L'horizon était bordé par une ceinture de forêts ; mais nulle part ces forêts ne se prolongeaient jusqu'au lit du fleuve. De vastes plages, constamment brûlées par les ardeurs du soleil, désertes et arides comme les plages de la mer, ressemblaient de loin, par l'effet du mirage, à des mares d'eaux dormantes. Loin de fixer les limites du fleuve, ces rives sablonneuses les rendaient incertaines. Elles les rapprochaient ou les éloignaient tour à tour, selon le jeu variable des rayons infléchis.
A ces traits épars du paysage, à ce caractère de solitude et de grandeur, on reconnaît le cours de l'Orénoque, un des fleuves les plus majestueux du Nouveau Monde.
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Ainsi meurent et disparaissent les races humaines ! Ainsi s'efface le bruit qui se faisait autour de leur nom ! Mais si toutes les fleurs de l'esprit se flétrissent, si le temps emporte dans ses orages les œuvres du génie créateur, toujours du sein de la terre jaillit une vie nouvelle. La nature féconde développe sans cesse ses rejetons ; elle ne s'inquiète pas de savoir si l'homme, race implacable, ne détruira pas le fruit avant sa maturité.
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En effet, lorsque, chargé d'instruments de physique et d'astronomie, on a terminé des voyages de quelques milliers de lieues à travers les continents, on est tenté de dire, à la fin de sa carrière : heureux ceux qui voyagent sans instruments qui se brisent, sans herbiers exposés à se mouiller, sans collections d'animaux qui se dégradent ; heureux ceux qui parcourent le monde pour le voir de leurs yeux, tâcher de le comprendre, recueillir les douces émotions que fait naître l'aspect de la nature, dont les jouissances, plus simples, sont aussi plus calmes et moins sujettes à être troublées.
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Il y a là un point d'où l'on découvre un horizon merveilleux. L'œil embrasse une surface écumante qui a près de deux lieues d'étendue. Du milieu des flots s'élèvent des rochers noirs comme le fer et semblables à des tours en ruine. Chaque île, chaque pierre est ornée d'arbres qui poussent des rameaux vigoureux ; un nuage épais flotte constamment au-dessus du miroir des eaux, et, à travers cette vapeur d'écume, s'élancent les hautes cimes des palmiers Mauritia. Lorsque, le soir, les rayons ardents du soleil viennent à se briser dans le nuage humide, ces effets de lumières produisent un spectacle magique. Des arcs colorés s'évanouissent et reparaissent tour à tour ; leurs images vaporeuses flottent au gré des airs.
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Vidéo de Alexandre de Humboldt
Anthropologue de réputation mondiale, médaillé d'or du CNRS, lauréat du prix international Alexander von Humboldt en sciences sociales et du prix de l'Académie française, Maurice Godelier est l'auteur, entre autres classiques, de "La Production des Grands Hommes", des "Métamorphoses de la parenté", et de l'ouvrage "Au fondement des sociétés humaines".
Au cours de cette rencontre, Maurice Godelier nous parle de son nouvel ouvrage, "Quand l'Occident s'empare du monde". Mettant à profit une vie de recherches sur le fonctionnement des sociétés, il propose une relecture de la naissance et de l'essor du monde moderne, et un bilan sans concession sur le rôle et la place de l'Occident. Il nous dit également quelques mots des Baruyas, tribu de Papouasie-Nouvelle Guinée au sein de laquelle il a vécu pendant 7 ans en cumulé entre 1966 et 1988, et dont il a suivi des rituels d'initiation.
Pour retrouver son livre, c'est ici : https://www.librairiedialogues.fr/livre/21978412-quand-l-occident-s-empare-du-monde-xve-xxie--maurice-godelier--cnrs-editions
Et pour nous suivre, c'est là : INSTA : https://www.instagram.com/librairie.dialogues FACEBOOK : https://www.facebook.com/librairie.dialogues/?locale=fr_FR TWITTER : https://twitter.com/Dialogues
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