Le poète en mélancolie, pleure de ne plus être enfant (N Beauchemin)
Dès les premiers mots, il y a eu l'étreinte et l'oeil humide des émotions indéfinissables, ce livre a la grâce de la mélancolie et la magie des dessins de
Sempé.
La grande maison, portail blanc ouvert, vous invite à vous joindre à sa famille au sens le plus large.
Nous sommes enveloppés du brouhaha des jeux des enfants sur la plage, des bruits de ballon des adolescents, des conversations des adultes et en filigrane les pensées de ceux qui restent allongés sur leur serviette à observer l'agitation ambiante.
La grande maison abrite la vie de plusieurs générations.
« Août était le mois qui ressemblait le plus à la vie. »
Le dimanche, la volée des cloches de l'église, signe le rassemblement soit par conviction, soit par fidélité ou tout simplement par respect. Mais à ce moment-là, c'est aussi constater les changements de société.
La météo imprime le rythme des journées, des activités et forme le cocon qui rend cette période hors du monde.
Le narrateur, après quelques années de distance, reconstitue ce petit monde avant qu'il ne disparaisse.
Les aïeux et leurs tenues intemporelles donnent ce parfum d'un monde immuable et la jeunesse prend conscience de la vie qui passe, de la solitude, d'un monde qui disparait, un été d'éveil.
Les absents sont très présents.
C'est ici que la liberté, l'apprentissage de la vie se forge, la transmission s'effectue à bas bruit, l'appartenance se révèle.
« Si notre pays est celui où l'on a le plus de souvenirs, alors j'étais d'ici. Alors j'étais de cette terre entre dunes, champs et bruyères, de cette presqu'île lovée entre deux bras de mer. »
L'écriture subtile de
Pierre Adrian nous invite à saisir l'insignifiant et à happer l'essentiel dans une même envolée, pour cela son vocabulaire tisse avec agilité tous les liens délicatement et infiniment, et les imprime en nous.
Finalement ce livre a pour héros le temps qui passe de façon inexorable et qui nous dit l'importance d'être présent, pas seulement aux sensations, aux émotions et aux pensées du moment mais au fil de la vie, à tout ce qui constitue la matière de ce que nous sommes.
La fin de cet été en est la démonstration, l'auteur avait semé des indices tout en finesse.
Pierre Adrian est dans la cour des grands depuis Des Âmes simples, un talent qui éclate, le Prix
Jean-René Huguenin sera son habit de lumière.
Que reviennent ceux qui sont loin gravera son empreinte dans le granit de la littérature.
©Chantal Lafon
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