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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
La dictature militaire a sévi dans la quasi-totalité des pays sud-américains durant la seconde moitié du XXe siècle.
Coopérèrent à un terrorisme d'Etat à grande échelle : Banzer Suárez en Bolivie, Bordaberry en Uruguay, Pinochet au Chili, Stroessner au Paraguay, Videla en Argentine (liste non exhaustive).
Une entente secrète entre ces tyrans visant à éliminer les opposants, appelée opération Condor, a maintenu pendant des décennies l'Amérique du Sud toute entière sous un régime de terreur.
La principale puissance nord-américaine, préoccupée à déplacer ses pièces sur l'échiquier de la Guerre Froide, s'est longtemps accommodée de ces régimes sanguinaires qui abhorraient les idéaux communistes.

D'amour et d'ombre”, publié par Isabel Allende en 1984, se déroule dans l'un de ces pays où l'arbitraire fait loi. Laissant à dessein planer le doute sur l'identité du pays où se déroule le roman, l'auteure chilienne met en lumière le drame de tout un continent.
Comment ne pas penser à ces femmes, le visage encadré par l'emblématique foulard blanc portant l'inscription "apparition en vie des disparus", qui chaque jeudi défilaient dans le centre de Buenos Aires, les portraits de leurs proches suspendus autour du cou ? Ces Mères de la place de Mai ont eu l'audace, en 1977, de se mobiliser devant la Casa Rosada, le Palais présidentiel occupé alors par les militaires, au plus fort de la répression. Elles sont devenues aux yeux du monde le symbole de la résistance à l'oppression des peuples.
Dans tous ces pays, des femmes et des hommes ont refusé le joug de la dictature, souvent au péril de leur vie. La journaliste Irène Alcántara de Beltrán et le photographe Francisco Leal, les personnages principaux “D'amour et d'ombre”, sont dans le sillage de ces êtres d'exception.

Alors qu'ils recherchent une adolescente enlevée en pleine nuit par des militaires, Irène et Francisco découvrent un charnier humain dans une mine désaffectée. Ils réalisent immédiatement qu'ils ont entre les mains la preuve des atrocités de la junte au pouvoir et que leur vie à tous les deux est à un tournant.
Ces jeunes gens ne sont pas issus du même milieu social mais partagent une même conception de la liberté et de la justice. Conscients des risques encourus, ils choisissent néanmoins de divulguer les horribles clichés par le truchement d'une sommité ecclésiastique de confiance.
La passion fusionnelle qui au fil des chapitres grandit entre la belle Irène et le dévoué Francisco triomphera-t-elle d'une adversité sans cesse à leurs trousses ?

L'écriture d'Isabel Allende est toute en fluidité et la noirceur de l'intrigue est quelque peu atténuée par les touches d'humour glissées ici et là.
Les antécédents familiaux d'Irène et de Francisco, longuement décrits, permettent au lecteur de cerner au plus près les traits de caractère de la bourgeoise rebelle et du prolétaire psychologue.
De nombreux personnages secondaires gravitent autour des deux héros et apportent de la densité à leur histoire, émouvante de bout en bout.

D'amour et d'ombre” est le témoignage poignant d'une chilienne marquée dans sa jeunesse par l'histoire bien sombre de son pays, période aussi noire que les lunettes de ce sinistre général paradant au milieu de ses troupes.
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Première rencontre avec Isabel Allende dans le cadre du challenge solidaire. Rencontre mitigée, j'ai aimé la trame historique dressée par l'auteure, le Chili et son régime militaire en toile de fond, la question du sort des exilés devant fuir un régime politique, la société divisée entre ceux opprimés et de plus en plus pauvre et les autres, privilégiés qui profitent des avantages du régime en place.
Isabel Allende a longuement enquêté sur certains faits qu'elle reprend dans son livre. Disparitions de proches, assassinats, charniers, exil, terrible quotidien dans combien de pays encore aujourd'hui.
J'ai moins accroché sur le côté romantique entre l'intrépide journaliste et le beau photographe même si cela adoucit un peu l'ensemble du roman.
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Les premiers chapitres font penser aux sagas de Gabriel Garcia Marquez, avec cet univers complètement à part peuplé de personnages forts mais un peu mystiques, d'envoûtements, de croyances fortement ancrées et de relations familiales compliquées.

Isabel Allende nous livre une oeuvre d'une belle puissance romanesque, plus retorse qu'elle n'en a l'air. Elle déconstruit le passé et l'héritage familial des personnages pour mettre de l'ordre dans les enjeux du présent, elle suit et exploite le fil de son intrigue. Les descriptions sonnent juste, la narration surprend, les sentiments sont parfois imprévisibles.

Comme dans la Maison aux esprits, les années de dictature, de répression et de terreur en Amérique du Sud l'ont profondément marquée et ici elle a intentionnellement négligé de nommer le pays où se passe son récit car cela aurait pu avoir lieu n'importe où dans ce continent marqué à fer et à sang par les disparitions de milliers de personnes englouties par la violence d'un régime où les hauts gradés corrompus règnaient impunis.

Les points de vue savamment mêlés varient au cours du récit et la plume merveilleuse d'Isabel Allende redonne espoir et fait revivre, le temps d'un roman, le souvenir de tous ceux qui ont péri dans l'enfer des dictatures militaires.

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La quatrième de couverture dit ceci :
«Un roman solaire : Irène, fille d'une grande bourgeoise excentrique et déchue qui a transformé sa résidence en hospice de vieillards, noue avec Francisco, fils d'émigrants rescapés de la guerre civile espagnole, une relation d'amitié complice que l'épreuve transmue peu à peu en un amour indissoluble.
«Un roman des ténèbres : journaliste, Irène se trouve incidemment à l'origine de la révélation d'un des massacres politiques dont abondent les annales des dictatures d'Amérique du Sud. La répression se tourne alors contre elle, contre Francisco, manque plusieurs fois de les faire disparaitre et les condamne finalement à l'exil, nouveaux émigrants d'une nouvelle guerre civile...
«Passant sans cesse de l'ombre à la lumière et de l'amour à la terreur, ce second roman d'Isabel Allende fait vivre des dizaines de personnages pathétiques ou burlesques, de la jeune paysanne épileptique et faiseuse de miracles au général fantoche qui régit le pays depuis le bunker, du prêtre-ouvrier des bidonvilles à l'inventeur de la machine à cueillir des noix de coco, du clown à la retraite à l'officier tortionnaire, du vieil anarchiste impénitent au coiffeur pour dames homosexuel et résistant(...)»
Bien dit. Quelques remarques. Fantoche désigne une personne sans consistance ni volonté, qui est souvent l'instrument des autres, et qui ne mérite pas d'être prise au sérieux. le rédacteur du texte ci-dessous emporté par son lyrisme dérape quelque peu. Pinochet -car même s'il n'est pas nommé, il ne peut s'agir que de lui comme il s'agit du Chili- n'est certes pas présenté comme un personnage sympathique et n'apparaît que très peu. Lorsqu'il est mis en scène, c'est pour donner des ordres que l'on ne discute et qui ont la force de leur efficacité.
Face à la dictature toute puissante, I. Allende place comme seule force pouvant s'y opposer l'Église et particulièrement le Cardinal à qui Pinochet n'a pas l'air de vouloir vraiment se frotter (je vais me renseigner pour savoir s'il s'agit d'un personnage historique).
J'aimerais aussi mentionner un personnage particulièrement intéressant dont il n'a pas été fait mention dans la quatrième de couverture. S'il n'intervient que peu souvent, il plane sur tout le récit dans la mesure où il est le fiancé de Irène qu'il connaît depuis son enfance, à qui il est promis depuis cette époque et avec qui Irène vit une relation amoureuse avant de se rendre compte de son amour pour Francisco -prise de conscience de son amour jumelée à une prise de conscience politique. le capitaine Gustavo Morante apparaît d'abord comme un militaire brillant, sûr de lui, beau et bronzé, viril et tout. On peut croire qu'il est l'antithèse de Francisco (il le surnomme d'ailleurs le Fiancé de la Mort). Personnage simple et carré, l'auteur ne s'attarde guère sur lui. On le croit disparu après qu'Irène lui ait signifié qu'elle en aimait un autre et qu'elle ne l'épouserait donc pas. Il réagit sans furie pourtant le monde s'écroule autour de lui. Au moment où Irène git sur son lit d'hôpital criblée de balles, il réapparaît et voyant ainsi la femme de sa vie et les causes qui l'ont amenée là, se révolte. Ce qui est intéressant c'est qu'il ne vire pas sa cuti, mais qu'il se rend compte que sa vision de l'armée n'est pas la vision de tous ses membres. On entre alors dans ses pensées :

"Ces crimes ne pouvaient rester impunis, parce qu'alors toute la société foutrait le camp, et ça n'aurait eu aucun sens de prendre les armes pour déboulonner le gouvernement précédent en l'accusant d'illégitimité, si eux-mêmes se mêlaient d'exercer le pouvoir hors de toute loi et toute morale. Les responsables de ces irrégularités sont une poignée d'officiers qui doivent être châtiés, mais la pureté de notre Institution est intacte, Irène, il y a dans nos rangs beaucoup d'hommes comme moi, prêts à se battre pour la vérité (...)" pp. 338 & 339 (dans l'édition Fayard)
et cela continue du même tonneau. Il décide alors de renverser le gouvernement et évidemment se fait éliminer. Ce qui fait dire à Francisco : «S'il se trouve dans les rangs de l'Armée des hommes comme lui, (...), alors tout espoir n'est pas perdu.» Ce personnage permet de nuancer la vision certes juste, mais effroyable de l'armée représente par le lieutenant Ramirez, crapule parmi les salopards.
Dans l'ensemble, le roman, s'il est très bon, bourré d'humour, mais aussi de macabres, est moins «fou» que "La maison aux esprits". L'histoire est beaucoup plus ramassée dans le temps et l'unité en est plus grande, mais on y perd la richesse de l'éclatement du premier.
À propos de amour et ombre, bon, d'accord avec ce qui est dit plus haut, mais pas convaincu. Je noterais simplement cette phrase qui me semble éclairer le roman : «La peur est encore plus forte que l'amour et la haine» dit Irène, effrayée au poste de frontière lors de son exil avec Francisco.
Bref, il est évident que je m'en taperais bien un petit troisième. Peut-être pas tout de suite, mais...
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veritable saga sur plusieurs epoques, un foisonnement de personnages, excellent
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A travers les destinés d'Irène et de Francesco, de leur famille, de leurs amis, de leur proches, Isabelle Allende donne voix au chapitre à tous ceux qui subirent le joug de la junte militaire au Chili.

Irène, jeune journaliste et fille de la bonne bourgeoisie chilienne a longtemps vécu dans l'ignorance de ce qui se passait dans son pays. Francesco, issu d'un milieu modeste d'immigrés espagnols ayant fuit le Caudillo, est un jeune homme dont l'expérience des abus quotidiens du régime a éveillé en lui la soif paternelle de vérité et de justice. Ces études de psychologie ne lui offrant guère de débouché, il est devenu photographe. Leur enquête mutuelle sur la disparition d'une jeune fille déséquilibrée les menant à la découverte d'un charnier, les dangers qu'ils vont courir et les persécutions qu'ils vont endurer va peu à peu les rapprocher; ce qui n'était que relation professionnelle, va vite se transformer en amitié, puis en amour.

L'auteure décrit la vie sous la dictature de Pinochet comme une illusion forcée pour la bourgeoisie et les classes dirigeantes et une réalité clandestine pour la partie déshéritée de la population. Le régime procède par des arrestations arbitraires, des assassinat d'opposants; les disparitions inexpliquées se multiplient, les morgues, ne pouvant plus faire face à l'influx ininterrompu de cadavres rendus impossible à identifier, défigurés qu'ils sont par la torture, sont débordées, et pour ceux qui sont suspectés d'avoir eu des activités syndicales, c'est la mort sociale par l'inactivité forcée, la mise au ban de la société par l'apposition de leur nom sur la liste des proscrits; les bidonvilles sont masqués à la vue de la population. Parallèlement la bourgeoisie vit dans une bulle, complètement à l'écart, dans des quartiers ultra sécurisés, abreuvée par les propos lénifiant d'une presse à la solde du pouvoir et des programmes télévisuels déconnectés de la réalité de leur pays.

Le père de l'auteure, diplomate, est le cousin du président Salvador Allende qui fut renversé par la junte militaire toujours au pouvoir lorsqu'elle écrivit le présent livre. D'amour et d'ombre est un roman militant, un témoignage de l'horreur de la dictature, important à ce titre. Néanmoins, j'en ai trouvé la prose quelconque, avec de trop nombreuses formules convenues; on sent que l'auteure demeure une femme de la haute bourgeoisie qui s'apitoie sur le malheur du bon peuple. Le livre aurait gagné en charge dramatique et émotionnelle s'il ne s'achevait pas sur une note de relatif espoir.
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Très beau livre, dont la lecture demande le courage de rouvrir des plaies que l'on voudrait avoir oubliées.
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Des histoires (d'amour) croisées et passés au temps de la dictature (l'ombre). Riche pour savoir un peu de l'histoire de Chile ;) . L'écriture est fluide et rends l'oeuvre facile à lire.
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Nous faisons la connaissance d'Irene Beltran, une jeune fille des beaux quartiers de Santiago du Chili du temps de la dictature de Pinochet. Sa mère est une snob finie et entichée de la dictature des militaires comme beaucoup de gens de son milieu. Irene est journaliste dans une revue féminine. Elle fait équipe avec Francisco Leal, un fils d'émigrés républicains espagnols ayant fui - ô ironie - la dictature franquiste, un psychologue devenu photographe pour gagner sa vie. Irene est une jeune femme joyeuse, insouciante, belle (évidemment), bonne de surcroît, mais hélas pour Francisco, fiancée à un beau capitaine. Un beau jour, ils partent faire un reportage sur une jeune paysanne pauvre en proie à des phénomènes surnaturels quotidiens qui ameutent tout le voisinage. Manque de bol, les militaires se sont invités à la fête ce jour-là. Et c'est ainsi que, sans l'avoir prévu, Irene et Francisco s'engagent sur un sentier dangereux : une enquête sur les "disparus" de la dictature...
C'est donc une histoire qui navigue entre eros et thanatos, deux ingrédients certes pas nouveaux dans le genre romanesque, mais qui trouve ici une nouvelle inscription dans le contexte du Chili placé sous la férule de "el General" Pinochet : en gros, la puissance de l'amour d'Irene et Francisco les sauvent des horreurs de la dictature militaire. de façon générale, Allende trousse des personnages bien sympathiques, nouant des liens familiaux et amicaux sympathiques, et dont les "good vibrations" s'opposent aux forces du mal. L'histoire d'amour Irene-Francisco est sa grande réussite, leur aura de couple mythique m'ayant fait penser au couple Eléa/Païkan dans La nuit des temps de Barjavel (un autre hit de mes années d'adolescence). Mais les personnages secondaires sont aussi séduisants, pittoresques et attachants, que ce soit la nounou d'Irene ou le père de Francisco, vieil anar' au coeur tendre et au logos enflammé. Plusieurs flash-backs permettent d'ailleurs d'en savoir plus sur chacun d'eux. L'ensemble est enlevé, bien rythmé, dramatique à souhait, avec ce qu'il faut de rebondissements. La cécité de certaines classes sociales élevées face aux réalités du régime est dénoncée. Les gentils gagnent en partie, grâce à l'aide de l'Eglise catholique, seule force sociale restée à peu près indemne face au pouvoir.
Une histoire pleine de bons sentiments peut-être, mais qui fonctionne bien et permet d'en savoir un peu plus sur l'histoire récente du Chili.
Lien : https://ellettres.wordpress...
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excellent roman d'Isabel Allende, à l'écriture foisonnante, exhubérante, pleine de vie, mais aussi plus que teintée de droits de l'homme, de politique... j'aime beaucoup !
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