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EAN : 9791096562350
130 pages
Rn (16/11/2021)
4.75/5   4 notes
Résumé :
Carl Gustav Jung a élaboré une théorie du développement psychique dans laquelle la spiritualité joue un rôle décisif. Bien plus que l’inventeur de la psychanalyse, Sigmund Freud, il se consacrera aux rêves, aux visions et aux fantasmes de nature mythique, mais aussi aux phénomènes dits parapsychiques tels que la télépathie ou les coïncidences signifiantes.
À la même époque, en France, René Guénon travaille à synthétiser les principes d’une connaissance tradit... >Voir plus
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Ce remarquable essai fait le procès de la dimension spirituelle dans l'oeuvre de Jung, un mysticisme qui contredit la revendication scientifique du fondateur de la psychologie analytique. Elle implique de multiples glissements sémantiques pour suggérer « que la véritable place de l'Esprit se trouve dans la psyché de l'homme, en tant que l'Esprit serait cet inconnu qui porte le nom d'inconscient, plus précisément en tant que Soi » (je cite ici l'auteure). de fait, Jung prend appui sur ses concepts personnels d'anima, de Soi ou d'inconscient collectif pour intégrer les matériaux hétéroclites du symbolisme, de l'allégorie, de l'alchimie, du Mystère et des mystiques, au risque de « diviniser l'inconscient » et de faire de la psychologie analytique « une prothèse divinatoire pour résoudre les insuffisances individuelles de chacun ». Un chapitre fascinant à cet égard est celui de « L'âme initiatrice » où Arcé fait une lecture attentive et sévère du Livre Rouge — le Liber Novus, écrit et illustré de la main de Jung — où ce dernier déploie, dans l'imagination active, un dialogue avec son âme.

Arcé reproche à Jung sa déviance dans l'emprunt à la Tradition et s'appuie dans cette démarche sur l'oeuvre de René Guénon, un contemporain de Jung que je découvre ici. J'ai lu à cette occasion la monographie longue et désordonnée (47 pages en PDF) de Wikipédia sur ce penseur de la métaphysique, laquelle souligne la puissance de ses idées et leur rémanence dans le référentiel contemporain. de fait, « Jung et l'occulte » traite autant de Guénon et de la Tradition primordiale que de Jung et de la psychologie analytique, ce qui en redouble l'intérêt. Trop novice pour avoir une opinion personnelle, je formule ici quelques questions. Peut-on postuler une Tradition primordiale ? Expert des traditions gréco-latines et judéo-chrétiennes, Guénon a été initié à l'indouisme et au soufisme ; cela lui suffit-il pour postuler un tronc commun à ces traditions, comme à celles du bouddhisme, des animismes, de l'Avesta, ou des mythes celtes et scandinaves ? Il affirme que les religions sont l'avers public, « exotérique » des religions, qui ont une face cachée « ésotérique », celle de l'unité perdue, principe dont Jung dérive les fantasmes d'une « harmonie complète avec le cosmos » ou « d'un trésor dont l'ignorance seule susciterait le symptôme névrotique ». Peut-on séparer les religions (exotériques) de leur histoire, de leurs rites, des attributs et révélations de leurs divinités ? Une face cachée (ésotérique) de la tradition judéo-chrétienne n'est-elle pas abolie dans l'évangile, révélation publique, ouverte au monde ? Et pourquoi postuler, avec Jung et Guénon, une « déperdition des savoirs » ? L'auteure et les lecteurs voudront bien pardonner ces questions naïves ou hors sujet, qui témoignent de l'attrait de ce livre.
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J'ai mis du temps avant de m'intéresser à René Guénon mais après avoir lu Jung et l'occulte, le dernier essai de Alexandra Arcé, je me suis senti obligé d'aller le consulter, directement dans le texte.

Qu'est-ce qui m'a tenu si longtemps à distance de René Guénon que pourtant je connaissais, au moins de nom ? ... Ce ne sont pas ses idées puisqu'elles ne m'ont pas posé de problème lorsque je les ai découvertes. Et puis... j'ai compris ! Avant de lire Guénon, c'est en fait la nébuleuse des guénoniens qui m'en avait inconsciemment tenu à l'écart, ainsi que leurs tentatives de récupérations récurrentes d'une oeuvre pour partie inclassable puisqu'elle se situe, pour paraphraser Guénon au sujet de la périphérie et du centre... partout et nulle part. Toute sa vie durant, René Guénon s'est employé à revaloriser le Symbolisme et la Tradition, tout à la fois universels et partiels dans leurs manifestations, d'une culture à l'autre... partout et nulle part, donc.

Parmi les guénoniens qui m'ont particulièrement tenu à distance de René Guénon, je compte ceux qui cherchent à lui faire dire ce qu'il n'a jamais dit et, pour être clair, à utiliser son exemple pour redorer l'image de l'islam. Sauf que René Guénon était soufi et que, quoi qu'on en dise, les soufis qui se considèrent musulmans mais qui ne représentent qu'une minorité d'entre eux sont considérés comme des hérétiques par le restant. Bref, l'aspect le plus intéressant de la pensée islamique est dénigré par la majorité du monde musulman, mais ça n'empêche pas certains de vouloir récupérer le soufi Guénon, à toutes fins idéologiques et à toutes arrière-pensées utiles. A cela, il faut ajouter que René Guénon fut d'abord attiré par le Védantisme mais qu'il ne put être initié en raison de la loi des castes qui, ironie du sort, est une transposition dans l'organisation sociale de la Tradition.

Laissons-donc de côté les récupérateurs de tous bords et intéressons-nous à ce que René Guénon a vraiment à dire, notamment sur les travaux de Jung. Force est de constater que les critiques de Guénon visent juste. Oui, c'est vrai que Jung induit une erreur catégorielle en ne distinguant pas explicitement l'infraconscient du supraconscient et que cette erreur implicite, si elle permet à Jung de se faire une place au soleil dans les milieux académiques de l'époque, fait courir le risque de travestir la véritable Tradition en empruntant ses ornements.

Par ailleurs, la notion d'individuation développée par Jung a fait son chemin et vient aujourd'hui épouser l'air du temps, acquis à l'individualisme et à l'idéal d'épanouissement personnel. Je pense que Jung serait le premier à émettre des réserves sur cette appropriation bien qu'en son absence, l'oeuvre qu'il a produit ait effectivement rendu possible un tel rapprochement.

Il existe un peu le même problème dans le monde du Yoga : beaucoup de pratiquants y voient un exercice de bien-être sans être conscients du côté pas très cool mais plutôt exigeant de sa philosophie, qui engage dans une démarche initiatrice et même spirituelle. Mais comme de tout cela, nos contemporains ne veulent pas en entendre trop parler, on évite de s'y attarder, on laisse le ou la prof tenir ses propos perchés en attendant que ça lui passe parce que... "on n'est pas venu pour ça, nous, on est là pour le boost, à fond la forme !" C'est toujours mieux que rien, me direz-vous... oui dans un sens, mais non dans le sens de René Guénon car cela maintient le pratiquant dans une douce illusion et ignorance des réels enjeux du Yoga. Attitude parfaitement rédhibitoire pour René Guénon puisqu'elle nous détourne de la Vérité.

Voilà pour ces réflexions, qui bien sûr ne me seraient jamais venues sans la lecture de cet essai passionnant, qui va au-delà d'une mise en perspective du point de vue de René Guénon sur la psychanalyse. L'auteure nous livre en effet, en guise de conclusion, un point de vue personnel sur l'héritage jungien, avec lequel je suis tombé d'accord. Vous voulez savoir lequel ? Eh bien lisez l'essai, bande de cocos, et on en reparle !
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Avant de développer les idées qui donneraient forme à la psychanalyse, Freud s'est intéressé à l'hypnose qu'il a étudiée à Paris auprès de Jean-Martin Charcot, connu pour ses démonstrations publiques spectaculaires au cours desquelles il se livrait, devant un parterre d'assistants, à la mise en scène de la guérison de ses patients hystériques. Il s'agissait en quelque sorte d'un exorcisme athée. Freud lui-même essaya de recourir à l'hypnose pour traiter ses premiers patients mais il abandonna rapidement la méthode à cause de son inefficacité. La psychanalyse ne commença peut-être véritablement à prendre forme qu'à partir du moment où Freud, s'attachant moins que Charcot au phénomène hypnotique manifeste en lui-même, s'intéressa à ses enjeux latents et à la puissance performative de la parole adressée par le médecin au sujet défini comme malade. Les patients de Charcot répondaient-ils à ses suggestions hypnotiques parce qu'elles intervenaient de façon mécanique sur leur système physiologique, à la manière d'un interrupteur, ou parce qu'elles faisaient intervenir des enjeux plus fins concernant la nature de leur relation au "maître", voire d'eux-mêmes à eux-mêmes par le biais du maître ?
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Qu'est-ce que le paranormal, sinon l'espoir d'un arrière-monde au sein duquel les âmes seraient reliées dans la coÏncidence de leurs désirs réciproques, tout obstacle évanoui ? Le paranormal ne nourrit-il pas le rêve d'une conscience rendue transparente par la maîtrise de ses fonctions ? Freud se méfie des explications du paranormal, soit qu'elles nourrissent directement l'orgueil en proposant le développement de capacités supposées supérieures de la conscience, soit qu'elles l'entretiennent indirectement en présentant comme désirable l'idée d'un arrière-monde au sein duquel l'autre se réduirait au moi, toute différenciation étant abolie par une maîtrise totale des fonctions psychologiques-par la pleine transparence de l'un à l'autre. L'hypothèse de l'inconscient permet au contraire de déjouer ces pièges en ramenant l'illusion de maîtrise à l'ignorance.
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L'intérêt de la psychanalyse pour l'inconscient cultiverait donc le penchant de l'homme à se prendre d'affection pour les tendances inférieures de sa condition. L'inconscient pourrait n'être qu'une ruse du temps parmi tant d'autres, que servent aveuglément quelques psychanalystes et psychologues sans qu'ils ne réalisent jamais que leurs hypothèses entrouvrent des failles qui favoriseront le retour des forces infraspirituelles dans la dimension de l'homme.
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Paracelse, au sujet duquel Jung a consacré une partie de ses réflexions, nous servira de référence puisqu'il a traité de l'imagination en référence aux principes traditionnels, distinguant l'imaginatio vera (l'imagination vraie) de sa contrefaçon, la phantasey (fantaisie). Paracelse indique que si les images de l'imaginatio vera trouvent leur fondement dans la nature, c'est-à-dire dans les principes traditionnels que sont la loi de correspondance entre le microcosme et le macrocosme et le principe de simulatnéité des états de manifestation de l'Etre, les images de la phantasey trahissent au contraire une dérégulation de ces principes. La prise en compte du point de vue métaphysique est donc essentielle pour juger de la véracité ou non des images issues de l'imagination active - ce à quoi Jung se dérobe.
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Contrairement à la psychanalyse, la psychologie analytique juge d'une part que les pensées de la conscience sont transparentes à elles-mêmes, et d'autre part que l'impensable peut réussir à se présentifier à la conscience sous la forme de représentations impersonnelles désignées comme symboles. Autrement dit, le symbole constituerait le signe impersonnel qu'un contenu encore impensable est mûr pour se transformer en élément de la pensée. La signification du symbole, si elle n'est pas complètement annihilée dans l'usage que lui réserve la psychologie analytique, est cependant subordonnée et soumise à l'ordre d'interprétation des besoins humains, et c'est à cet usage spécifique du symbole, dans le cadre du renversement des valeurs - l'homme déterminant la signification du symbole, comme nous le verrons ultérieurement - que Guénon témoigne de sa plus fervente opposition à la doctrine analytique.
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