Roman présenté comme épistolaire, ce qui me semble abusif puisqu'il n'y a qu'une seule lettre de 350 pages et une réponse de 4.
Entre sa première publication et les suivantes, il semble qu'il y ait eu des remaniements. Dès
le lys dans la vallée fini,
Balzac en entreprend un autre qui aura pour titre final
le contrat de mariage. L'un racontant des événements enchâssés dans l'autre récit. Ils s'influencent l'un, l'autre. de la même façon sa place dans le classement de la Comédie humaine variera.
Un jeune noble frustré d'amour depuis son plus jeune âge s'éprend d'une dame croisée à un bal. Par un concours de circonstances heureux, il vient passer plusieurs mois tout près du château de ladite dame. On l'introduit dans la place et il s'installe en voisin assidu. L'amour se développe dans les deux coeurs. Et pendant environ 300 pages,
Balzac nous entretient des moindres mouvements de ces deux coeurs. Et de la vie somme toute assez monotone de cette femme mariée et mère de deux enfants maladies, qui ne sort presque jamais de son domaine. de toutes ces peines pour vivre en bonne intelligence avec un mari difficile à aimer, s'occuper de tout, en particulier du domaine qu'elle réforme, en lui laissant croire qu'il dirige et sans jamais lui faire une remarque acide. de celle à peine plus exaltante du jeune homme Félix, qui obtient tout de même un emploi auprès du roi (l'histoire a lieu sous la Restauration) mais revient dès qu'il le peut auprès de sa bien-aimée. Cela pourrait être ennuyeux. Et bien non. C'est admirable. Par la description des sentiments, par le style, par le vocabulaire riche et parfois désuet.
Curieusement je n'ai pas trouvé ce texte complètement dépassé alors même que les séparations de couple sont communes.
Pourquoi veut-elle rester fidèle en tout point à ce mari si peu aimable ? Je dis en tout point parce qu'elle cache aussi à ses enfants, à sa domesticité, à ses parents l'égoïsme immense et la fatuité de ce personnage si peu doué et le mal qu'il lui fait en se disant mal aimé, lui si aveugle aux sentiments des autres. Pour ne pas faire de tort à ses enfants, par vertu chrétienne, ou simplement par fidélité à la parole donnée ? Félix, bien que n'obtenant pas de satisfactions sensuelles autres que lui tenir parfois la main continue à l'aimer sans parvenir toutefois à soupçonner tout ce qui se passe en elle.
En revanche on peut s'interroger sur le besoin qu'il a de raconter plus tard à sa nouvelle maitresse son amour platonique pour celle qu'il nomme
le lys dans la vallée. Est-il naïf à ce point ?
C'est aussi une satire sociale, il y a de façon évidente un reproche fait à l'aristocratie pour laquelle seules comptent les faveurs. Ainsi à l'annonce de la maladie d'Henriette, son père préfèrera, à l'encontre de Félix, rester auprès du roi que se rendre à son chevet.
Lorsqu'il publie
le lys dans la vallée,
Balzac vient de décider du retour des personnages. Félix est le frère de Charles de Vandenesse, apparu dans la femme de 30 ans. Et l'on retrouvera Félix dans non seulement
le contrat de mariage, mais aussi
Une fille d'Ève.
Vaut-il la peine d'être lu ? Je pense qu'il peut rebuter les lecteurs avides d'actions. Pour ma part avant de l'avoir tout à fait fini j'ai sorti de son étagère
Eugénie Grandet (je n'ai pas les titres cités ci-dessus) afin de l'avoir sous la main, et je le commence à l'instant.
Critique faite dans le cadre du challenge ABC 2014 - 2015