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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Je suis encore sous le choc en refermant Les Enfants du mal, sous le choc des dernières pages en même temps terribles et pleines d'espoir et d'amour.
Dès le début, Laure Barachin qui en est à son quatrième roman, m'a fait vivre le quotidien des enfants adoptés, placés, car abandonnés par leurs parents ou bien encore enlevés à leurs géniteurs devenus dangereux. Difficile pour eux d'être pleinement heureux car les questions qu'ils se posent ne trouvent pas de réponses.
Ici, Capucine raconte son histoire qui débute au Foyer des Lilas où elle partage sa chambre avec Lucie (5 ans) qui était violée par son père. Elle ne parle pas, ne va pas à l'école mais Capucine tente de lui apporter un peu de réconfort.
Au Foyer ou dans une famille d'accueil, Capucine (10 ans) côtoie Chris, un peu plus âgé, et Samuel (6 ans), enfant de parents juifs qui se sont suicidés après avoir échappé à la Shoah. Capucine a un père adoptif qui peut enfin la recueillir mais elle est obsédée par la réalité de ses origines qu'elle ignore et veut absolument connaître.
Le thème des Enfants du mal est bien posé car ces gosses héritent malgré eux d'un lourd passé que certains adultes n'ont de cesse de leur rappeler. Les années passent, les événements heureux ou malheureux se succèdent mais les révélations et les explications arrivent petit à petit. Laure Barachin maîtrise parfaitement son sujet et mène son roman jusqu'à la révélation choc qui transcende les dernières pages.
Nous sommes dans les années d'après-guerre car Capucine est née en 1944 et fut abandonnée, tout bébé, sur les marches d'une église. Adolescente rebelle, elle retrouve Chris avec qui elle se sent profondément liée depuis les années vécues au Foyer ou en famille d'accueil. Lui aussi a été repris par un beau-père alors qu'il sait que sa mère avait tenté de l'empoisonner alors qu'il était enfant.
Après Marseille, ces jeunes gens se retrouvent à Paris où ils font tous les deux des études de médecine, retrouvent Moshé Vigotski, père adoptif de Samuel qui, hélas, est devenu accro à la drogue. À partir de là, Laure Barachin entre dans une deuxième phase du roman qui monte énormément en intensité.
C'est palpitant, poignant surtout et il est tellement important de lire ce qu'elle écrit, ce qu'elle fait dire à ses personnages, malgré leurs doutes, leurs faiblesses et leurs colères. L'éclairage porté sur les anciens responsables nazis qui ont réussi à se faire oublier après la guerre est très instructif.
Au travers de ce que vivent Capucine et Chris, l'autrice fait passer un formidable message d'amour en faveur de tous les enfants, quels qu'ils soient. le drame vécu par Capucine combat les préjugés, la fatalité, l'atavisme.
Je me souviens que certaines institutions religieuses, au moment d'inscrire un pensionnaire, se renseignaient sur la famille, les antécédents, le passé des parents, voire des grands-parents. À juste titre, Laure Barachin dédie son livre à tous ces enfants « persuadés d'être irrécupérables parce qu'ils sont des enfants du mal : d'assassins, de violeurs, de pédophiles et de tout ce que le monde peut contenir d'horreurs et de laideurs. »
Ce livre se termine par un grand message d'espoir et d'amour et j'en conseille vraiment la lecture.

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Les Enfants du mal, peut se lire comme un roman d'aventures mais il est bien plus que cela. C'est un ouvrage qui amène à se poser de nombreuses questions sur le poids de l'hérédité, de l'éducation, du hasard des rencontres, sur l'objectivité de nos choix et c'est également un grand livre sur l'amitié, sur l'amour mais aussi sur la haine. Y est traité aussi et avant tout le thème de la quête des origines pour les enfants abandonnés, sans oublier et c'est le comble, ce sentiment de culpabilité que peuvent ressentir certains.
Laure Barachin aborde avec beaucoup de justesse, de tact, d'émotion et même de poésie des sujets cruciaux. Sous forme de fiction elle analyse les impacts et les différentes manières utilisées par « les enfants du mal », ces enfants de pédophiles, d'assassins, de criminels nazis, pour tenter chacun selon sa propre sensibilité et son propre environnement familial ou amical à faire face à ce terrible poids qui pèse sur leurs épaules et surtout dans leur tête.
Capucine est la narratrice et elle offre ce roman, écrit à partir de son journal d'enfant, à sa fille Aurore à qui elle dédie en exergue l'un des poèmes des Contemplations de Victor Hugo : « il fait froid », lui demandant de lui donner le sens et la valeur qu'elle voudra.
Au foyer des lilas, Capucine, cette enfant de 9 ans abandonnée à sa naissance partage sa chambre avec Lucie, 5 ans, qui ne parle pas, ne pleure pas, ne rit pas, à qui le père a imposé des choses qu'il aurait dû réserver à sa femme. Elles seront accueillies par la même famille d'accueil, les Legrand chez qui elles feront connaissance de deux garçons Chris, 14 ans que sa mère a voulu empoisonner et Samuel, 6 ans, petit garçon juif, rieur, nés de parents miraculés qui n'ont pu supporter ce cadeau empoisonné. Bien qu'issus d'horizons très différents, une solide amitié les liera et les aidera pour un temps, dans leur solitude respective, à oublier le manque ou l'absence de leurs parents. Que deviendront-ils ensuite au fil du temps ? Comment se construire lorsqu'on ne connaît pas ses origines et comment les intégrer lorsqu‘elles sont trop perturbantes ? Comment feront-ils face aux défis qui les attendent et à une réalité parfois différente de celle qu'ils pensaient ?
C'est un récit poignant que nous livre Laure Barachin, où l'amitié se révèle extrêmement importante pour ces enfants en manque de repères familiaux mais pourtant parfois insuffisante à réparer certains traumatismes. le point d'orgue étant cette découverte capitale mais ô combien noire et traumatisante pour Capucine, juste au moment où elle pensait, après maintes difficultés, avoir trouvé l'amour et la sérénité ! La vérité sur ses origines apporte-t-elle toujours le bonheur ?
J'ai beaucoup apprécié ce petit roman qui se lit d'une traite. Il nous permet une fois encore de réfléchir à ce vieux débat entre l'inné et l'acquis, notamment à propos du mal.
J'ai été sensible aux différents extraits de poèmes mis en exergue de certains chapitres et toujours en parfaite adéquation avec ceux-ci comme ces vers tirés des Métamorphoses d'Ovide ou encore ceux extraits des Femmes damnées de Baudelaire. de courts passages des Hauts de Hurle-Vents ou du Lys dans la vallée sont aussi présents et rehaussent encore l'écriture de l'auteure.
Ne reste plus qu'à attendre la sortie du deuxième tome de ce diptyque « le Mirage de la justice » !

Une très belle découverte pour laquelle je remercie sincèrement Laure Barachin, une écrivaine qui mérite une audience beaucoup plus large !

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Durant la fin de la guerre et après 1945 des milliers d'enfants ont été laissés-pour-compte qu'ils soient issus de viols ou de relations franco-allemandes durant l'occupation. Devenus adultes ils sont nombreux à partir en quête de leurs origines. C'est sur les traces de ce passé, de leur histoire douloureuse que Laure Barachin nous emmène.
On recense pas moins de 55000 enfants recueillis par l'Assistance Publique de Paris entre 1940 et 1944. Un chiffre qui fait froid dans le dos.

Dans son roman Laure Barachin donne la parole à ces enfants, les laissés-pour-compte, pupilles de la Nation, orphelins de guerre, qui en grandissant, comme Capucine le personnage principal du récit, doivent vivre avec la blessure profonde de ne pas savoir qui ils sont ni d'où ils viennent. C'est son histoire mais aussi celle de tous les autres, les anonymes, que Capucine a voulu transmettre à sa fille. Cette histoire et ses espoirs qu'elle a couchés sur les pages de son cahier, jour après jour, sous la forme d'une longue lettre adressée à Aurore qu'elle commence à rédiger en 1953 alors qu'elle est une petite fille de 9 ans, placée temporairement au foyer des Lilas après avoir été retirée à son père adoptif.

De ses premières années Capucine ne sait rien si ce n'est qu'elle a été abandonnée alors qu'elle n'était qu'un bébé devant le parvis de l'église d'Isigny-les-eaux. Pas de photos, pas de souvenirs, une page blanche sur laquelle seul subsiste un sentiment d'abandon et d'indifférence qu'elle tente de compenser en donnant de l'amour, beaucoup d'amour à Lucie, petite puce de 5 ans qui est devenue muette suite à un choc post-traumatique, déplorable conséquence des sévices monstrueux que lui ont infligés ses parents. Toutes les deux sont placées en famille d'accueil chez les Legrand, elles y rejoignent Christopher et Samuel avec lesquels elles vont former la fratrie, la famille qui leur manque tant.

Un récit divisé en trois parties dans lequel l'autrice a pris soin d'insérer citations et poèmes de grands écrivains tels que Victor Hugo (qui démarre magistralement la préface avec "Il fait froid"), Honoré de Balzac, Fiodor Dostoïevski, Emily Brontë et d'autres encore suivent pour faire écho à l'histoire. Dans la deuxième partie qui se déroule au début des années 70 à Paris nous retrouvons une Capucine plus apaisée et plus mature qui vient de décrocher brillamment son doctorat en pédiatrie et qui semble bien décidée à lever le voile sur le mystère qui entoure ses origines, quitte à déterrer les secrets effroyables qui sont enfouis depuis mai 1943 dans l'imposant manoir anglais où vivent la vieille Elizabeth de Chesterfield et sa fille aliénée, Rose-Mary. Mais ne vaut-il pas mieux parfois laisser les secrets bien gardés tant la vérité peut être inconcevable ?

Un roman fort et sensible, dont la narration va crescendo jusqu'au dénouement final, qui nous parle de l'héritage familial, celui que l'on ne choisit pas, les liens du sang. Quand on a que le poids du silence en héritage encore faut-il être capable de vivre avec. Un roman qui pose question quant au bien-fondé des protocoles d'éloignements abusifs entre l'enfant et le parent (adoptif ou non) et qui évoque également la difficulté de placement en famille d'accueil ou à l'adoption des enfants souffrant de handicaps comme la petite Lucie dont l'histoire terrible m'a énormément touchée car la différence fait peur et encore aujourd'hui en 2021 il est difficile de faire adopter un enfant différent et ces enfants en payent malheureusement le lourd tribut puisqu'ils se sentent doublement abandonnés et n'ont pour horizon que celui d'être ballottés de famille d'accueil en famille d'accueil et aussitôt qu'il y a un tant soit peu d'amour, on le leur reprend en les déplaçant pour ne pas qu'ils s'attachent.

Les enfants du mal, les enfants de personne, les laissés-pour-compte, les non désirés, les mal aimés, les rejetés, les abandonnés : Capucine, Christopher, Samuel, Lucie, ils n'ont pas ou si peu connu la guerre et pourtant ils portent malgré eux le lourd fardeau de la Shoah sur leurs frêles épaules. Les enfants du mal, les déportés, les massacrés, les torturés, les assassinés : Émilie, Maria, Schlomo, Jacob, décédés dans les camps à Auschwitz ou en chemin. Ces enfants d'Israël qui n'auront pas eu la chance de connaître la terre promise de leurs ancêtres, la terre de celui qui fut leur père, leur frère, Moshé Vigotska, qui lui devra finir ses jours avec le pire des traumatismes, celui d'avoir survécu aux siens. Son histoire m'a aussi bouleversée.

"Vous auriez sûrement préféré ne pas venir au monde mais vous avez tort car chaque vie est nécessaire. Tout être humain est libre de choisir entre le bien et le mal, vous y compris, loin des déterminations de l'hérédité. Vous êtes vous et non un mélange des caractéristiques de votre père et de votre mère. Votre existence sera ce que vous en ferez, vous serez ce que vous voudrez être". (p 206)

Un très très beau roman que je vous invite à lire pour ne pas oublier...
Merci infiniment Laure pour ta confiance.

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Laure Barachin était une autrice inconnue pour moi, jusqu'à ce qu'elle me propose de lire son livre
« Les enfants du mal ». Je la remercie infiniment.

Cette lecture bouleversante m'a laissé silencieuse pendant plusieurs jours avant que je ne puisse écrire un mot.

Mes neurones se sont toujours triturées autour des mots abandon, abandonner : Don, Donner…

Qu'est ce qu'un enfant peut donner, recevoir, comment va-t-il se construire face à l'inconnu de ses origines ?

C'est le thème douloureux des enfants du mal.

En 1944, Capucine dès sa naissance est délaissée par ses parents. Adulte, elle écrit le récit de sa vie pour sa petite fille Aurore afin qu'elle comprenne…

Le foyer les Lilas accueille notamment Capucine 10 ans, Chris un peu plus âgé, Samuel 6 ans, et la petite Lucie 5 ans. Tous ont été trouvés en danger. Qui sont leurs parents ?

Ils éprouvent un mal être lié à leur solitude, à leur mémoire traumatique face à des adultes peu enclins à l'affection.

Une amitié indéfectible va naître entre ces enfants, c'est un socle pour avancer malgré les difficultés, la cruauté de leur passé qu'il garde ou découvre au fur et à mesure de leur vie.

La filiation, la quête identitaire, la recherche de ses géniteurs est au centre de leurs préoccupations et vont ponctuer leur vie et l'impacter. Il y aura des joies et des frayeurs, des moments heureux, dramatiques.

Quel va être le destin de ces enfants ?

Laure Barachin nous entraîne dans un tourbillon d'émotions…

Une écriture déchirante, crédible, belle, malgré la gravité du sujet. L'auteur sait nous tenir en haleine et il n'est pas question d'abandonner et de laisser le destin se sceller sans avoir tout compris de leur histoire.

De part mon métier, j'ai rencontré des enfants nés sous secret , dont certains parents heureusement, revenaient sur leur décision. D'autres à l'âge adulte, recherchaient des éléments de leur histoire. Je me souviens d'un enfant adopté qui a été abandonné, d'un jumeau qui recherchait son autre resté avec ses parents…
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Ce cinquième ouvrage de notre amie Melpomene125 sur Babelio est aussi son oeuvre la plus ambitieuse. Son roman des valeurs humaines fondamentales, tel l'amour, la bonté, la foi et la justice a dû représenter un défi considérable, même pour une jeune dame qui a déjà prouvé quatre fois qu'elle sait approfondir la complexité des relations humaines. Et disons-le tout de suite : ce défi, elle l'a gagné haut la main.

Au fur et à mesure de la lecture de son dernier-né, "Les Enfants du mal", on se rend compte que cet ouvrage est le fruit d'un long processus de lecture et de réflexion par l'auteure sur notre sort dans ce monde hélas souvent impitoyable et cruel.

Laure Barachin a eu l'idée originale d'aborder ces valeurs à partir de l'environnement et l'expérience d'une gamine, née en 1944, et que nous pouvons suivre, pas à pas, de sa prime enfance, en passant par l'adolescence à l'âge adulte. Ce procédé a permis à l'auteure de cerner nos valeurs sous des angles différents, qui dans son récit se développement et progressent, par des hauts et des bas, vers une vue harmonieuse d'ensemble.

Des hauts et des bas parce qu'il ne s'agit pas d'un ouvrage de philosophie ou de psychologie abstraite, mais d'un récit de plusieurs personnages et leurs interactions dans le temps.

Ces personnages gravitent autour de la figure centrale, au beau nom de Capucine, dont les origines sont obscures, et qui provoque des sentiments soit de sympathie, soit d'hostilité.
Puis, il y a Cristopher ou Chris, son amour ; la petite Lucie, qu'elle essaie de sauver et Samuel, un Juif dont l'existence connaît une trajectoire également tragique.

Ces 4 personnes se sont connues comme gosses au "Foyer des Lilas", un institut pour enfants abandonnés. Il m'est cependant interdit de dire quoi que ce soit de leur évolution sans trahir le récit superbement conçu par l'auteure, qui de surprise en surprise nous tient en haleine du début jusqu'à la fin.

Le style et la langue de Laure Barachin, diplômée de Lettres modernes, sont comme toujours particulièrement soigné et agréable à lire.

Que notre Laure ait reçu le premier exemplaire de son roman de l'imprimeur silésien (de Wroclaw en Pologne) pour son anniversaire (le 4 janvier) est peut-être une anecdote amusante, mais j'estime qu'il est grand temps qu'un éditeur français établi s'occupe de l'oeuvre de notre amie.
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Lorsque Laure Barachin m'a invité à lire son dernier livre, Les enfants du mal, elle ne soupçonnait peut-être pas à quel point ce récit éveillerait en moi des émotions fortes. Je la remercie infiniment.
Les enfants du mal ont du mal à tendre leurs ailes, à bout de bras...
Les enfants du mal portent des blessures qui ne leur appartiennent pas.
Les enfants du mal trébuchent sous le poids de leur fardeau, parfois se relèvent comme ils peuvent. Ce fardeau est empli de secrets, une vraie boîte à Pandore. L'ouvrir ? Pas l'ouvrir ? Parfois elle s'ouvre toute seule...
Les enfants du mal ont des yeux qui questionnent le ciel sans réponses...
Quel est ce mystère qui hante l'esprit de Capucine ? C'est la narratrice de l'histoire, elle a neuf ans lorsque nous faisons sa connaissance. Placée dans un foyer puis dans une famille d'accueil, elle croise la route d'autres enfants comme elle ou presque : Lucie, Samuel et Chris. Ils sont quatre. Quatre enfants peu à peu animés d'une amitié qui les soude presque comme une rage animale, une peur sourde... Cette sororité entre Capucine et Lucie nous touchera au coeur et au ventre. Capucine a neuf ans en 1953... Oui, la soustraction nous plonge vite fait aux portes de l'horreur, la barbarie à visage humain... Tout cela semble derrière elle, il faut avancer maintenant vers la vie qui l'attend...
Les voix de Capucine, Lucie, Chris, Samuel nous invitent comme dans une farandole à courir sur les pages. Ils se sont connus sur ce fil tendu, ténu qu'est la vie. L'écriture de Laure Barachin est fluide, elle les porte, les secoue, les bouscule, eux funambules infatigables, corps ployés par des vents parfois contraires, traversant les bruits d'une existence que nous découvrons en même temps qu'eux.
Les personnages sont beaux, touchants, portent en eux ce petit supplément d'âme qui nous transporte, emporte, transperce, au travers de ce récit.
Être la fille de personne, être née de parents inconnus, est-ce plus dur à supporter que de connaître la vérité ?
Les bruits de la guerre continuent-ils de se prolonger pour retentir en eux comme un bruit assourdissant, longtemps après ?
L'histoire monte en intensité comme une partition musicale jouée crescendo. Au début c'était un quatuor, d'autres instruments s'invitent plus tard, fantômes du passé, voix dissonantes, fausses notes. Y a-t-il un chef d'orchestre ? À force, on arrive forcément à en douter...
Les chapitres se succèdent. Nous passons d'un versant à l'autre.
Les enfants du mal s'égarent parfois dans des chemins qu'ils ne soupçonnaient pas.
Les enfants du mal ont du mal parfois à se relever des coups qu'ils ont subis.
Mai qui sont ces enfants du mal ? Pourquoi ce mal qui les hante ? D'où vient-il ?
Laure Barachin offre ici un récit magnifique qui donne à penser, à respirer, à aimer.
Les enfants du mal ont du mal à jeter ce fardeau contre un buisson de ronces, à l'abandonner dans le fond d'un talus, à hisser leurs bras par-dessus le bastingage d'un promontoire trop haut pour leurs rêves. C'est juste en se retournant un instant plus tard, pour regarder le paysage qui s'éloigne derrière eux, que certains d'entre eux s'aperçoivent que leurs bras si maladroits étaient peut-être des ailes, des ailes d'albatros....
C'est un roman qui convoque le bonheur, l'amour, la compassion, tout cela qui nous plie vers un texte qui m'a touché.
Les souffrances de leurs parents sont devenues les leurs.
Les enfants du mal sont des enfants assoiffés d'amour.
Des enfants qui s'accrochent à la vie, presque au bord de la folie.
Parfois les blessures qu'on croyait cicatrisées se rouvrent.
À quoi peut-il bien tenir, ce sentiment d'être un enfant du mal ?
C'est un récit où le sol peut brusquement se dérober sous nos doigts.
Quel modèle, quel héritage ont-ils pour qu'ils puissent à leur tour tenter de devenir des parents aimants, ne pas reproduire ce qu'ils ont vécu enfants... ?
Parfois l'écriture peut réparer. Ouvrir un cahier blanc, poser des mots. C'est ce que fit Capucine devenue adulte à l'attention de sa fille Aurore...
La filiation, l'hérédité, la quête d'identité, la transmission, sont les thèmes porteurs qui forment l'ossature de ce texte. Les mots de Laure Barachin les enrobe d'un ton sensible, juste, empli de pudeur.
Capucine est née en 1944... Comme ma soeur ainée...
Ma soeur apprit avec brutalité à l'âge de onze ans le secret qui tenait lieu de sa naissance... Elle apprit ainsi que son père n'était pas celui qu'elle croyait, avait été fusillé quelques jours avant sa naissance par la Gestapo. Qu'est-ce qu'une enfant de onze ans peut comprendre à tout cela, à s'imaginer ? Comment dire et comprendre l'indicible ? Comment le porter avec les épaules fragiles d'une enfant de onze ans... Ce fut dévastateur...
Autre hasard de la vie, mes deux enfants sont des enfants adoptés, avec des récits parfois sidérants qui ont jalonné leurs chemins. Mais là c'est une histoire trop longue à vous raconter, trop intime aussi...

Aussi ce roman de Laure Barachin me touche particulièrement.

"Ça n'est pas ta faute
C'est ton héritage
Et ce sera pire encore
Quand tu auras mon âge
Ça n'est pas ta faute
C'est ta chair, ton sang
Il va falloir faire avec
Ou, plutôt sans
Mon enfant"
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Par coïncidence à l'heure où sort un livre au parfum de scandale et à l'allure de règlement de compte que tout le monde s'arrache, Laure Barachin vient d'autoéditer sa nouvelle saga : « Les enfants du mal ». Même thèmes : l'inceste et la peur du qu'en dira-t-on mais malheureusement ces enfants sont seuls car à l'assistance publique. Capucine écrit un journal à sa fille afin qu'elle comprenne l'histoire de ses parents et la sienne.
C'est mon troisième roman de cette auteure et j'aime beaucoup les histoires et les réflexions qu'elle nous apporte mais dans celui-ci, elle nous implique dès le départ avec cette phrase de Capucine : « Mais vous devez vous demander comment une petite fille de neuf ans peut en savoir autant ? Je le sais, c'est tout, même si ça ne se dit pas. Officiellement, Lucie est parmi nous parce que ses parents ne sont pas aptes à s'occuper d'elle. Vous pensez bien qu'on ne raconte pas de telles choses aux enfants. Il vaut mieux mentir pour les protéger, la vérité n'est pas toujours bonne à entendre. C'est en tout cas ce que croit le directeur du foyer. » Paroles qui nous interpellent, nous prennent à témoin, nous mettent mal à l'aise, du moins c'est mon ressenti.
Exit les petites filles vêtues de blanc ( pureté, innocence) qui semblent si bien s'amuser sur la page de couverture. Dans ce roman, les enfants ne sont pas rois mais enfants du mal. Mot qui me hérisse car en fait ce sont des victimes du malheur, de la guerre, de l'ignorance et le regard, le mépris que certains affichent à leur égard aggrave une situation dont ils souffrent énormément car comment devenir quelqu'un de bien quand on est un enfant du mal ? Comment ne pas se sentir coupable quand les adultes ne disent mots ? Et ne se sentent-ils pas coupable en n'aidant pas ces enfants car qui ne dit mot acquiesce.
Laure Barachin nous fait découvrir les départs difficiles dans la vie de Capucine, Lucie, Chris et Samuel enfants de l'assistance dans l'après-guerre, ballottés d'un foyer à l'autre, des histoires qui nous donnent froid dans le dos pour certains. Si tous ne réagissent pas de la même façon, leur vie ne sera pas facile car les difficultés, les coups du sort ne les épargneront pas mais l'amour sera la seule échappatoire.
Une histoire menée tambour battant dont on ne ressort pas indemne que je conseille à tous. Avec en bonus de belles poésies de Victor Hugo et un excellent choix de citations. Merci Laure pour cette première partie tout à la fois éprouvante et émouvante.
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Coup de coeur !
Capucine est une enfant abandonnée, élevée en foyer. Au sortir de la guerre mondiale, d'autres enfants de ce foyer sont aussi des martyrs. Chris, Capucine, Lucie et Sammy, qui connaissent des souffrances similaires et atroces, se regroupent, forment une sorte de fraterie, et décident de s'entre aider dans les épreuves de l'enfance qui ne manquent pas.
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Laure Barachin, l'auteure, colle tellement à cette réalité, dans son style simple, élégant, très clair, mais tellement émouvant qu'au bout de cent pages, n'y tenant plus, je lui ai demandé si elle ( notre babamie Melpomene ) n'était pas Capucine ?
-- Mais non, Denis, c'est une fiction ! une fiction !
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Après, le livre vire au cauchemar, il devient une sorte de thriller très prenant ; les rebondissements et la résilence sont présents, pas pour tous, malheureusement, l'analyse sensible des personnages, de la petite Lucie, de Samuel et des autres m'a marqué.
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Le livre soulève plusieurs problèmes : l'incompétence des services sociaux, la sensation de culpabilité des enfants, et, je le dis, car j'ai vécu une expérience psychiatrique, l'incompétence des pchychiatres, mais aussi le problème de la recherche des criminels nazis planqués, et aussi la grave question de l'inné et de l'acquis.
Le problème de la justice insuffisante est gravement évoqué, et je suis d'accord avec la réponse de Moshé, personnage que j'aime beaucoup.

Félicitations, Laure, et encore merci :)
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Quelle souffrance certains enfants ont à supporter ! Comment font-ils pour survivre et s'en sortir ?
Capucine, la narratrice, est abandonnée à sa naissance en 1944. Elle est déposée devant la mairie.
Placée au foyer des Lilas, elle partage sa chambre avec une petite Lucie devenue muette parce qu'elle a été violée par ses parents. Capucine s'attache à cette petite fille et lui donne tout l'amour dont elle a besoin.
Elles sont ensuite placées dans une famille, les Legrand, des gens généreux qui accueillent également deux garçons, Chris (Christopher) un peu plus âgé il a 14 ans que sa mère a essayé d'empoisonner avec de la mort-aux-rats, il a une chance inouïe de s'en être sorti ; et enfin Samuel, petit garçon juif de six ans dont les parents se sont suicidés. Chris s'est attaché à Samuel qu'il considère comme son petit frère. Les quatre enfants s'entendent bien et se considèrent comme une fratrie.
Capucine a eu des parents adoptifs, sa mère est morte et son père ayant trouvé du travail, il vient la chercher et accueille également Lucie.
Le beau-père de Chris, lui aussi, le récupère.
Mais que devient Samuel, va-t-il aussi trouver une famille ?
On croit qu'ils ont enfin trouvé la quiétude et retrouvé peu à peu une vie normale, mais que nenni ! le destin en a décidé autrement.
Ils vont tous avoir encore et encore, des moments horribles à vivre.
Ce court roman, très bien écrit, prend aux tripes. L'auteure sait exprimer avec beaucoup de pudeur et les mots qu'il faut, le ressenti de chacun d'entre eux.
Que d'émotions, de colère, d'empathie (et d'antipathie) j'ai ressenti tout au long de ma lecture. C'est très difficile de penser que des enfants puissent vivre des moments aussi terribles ! J'ai beaucoup aimé ce livre.
J'espère de tout mon coeur que cette histoire n'est que pure fiction et qu'il ne s'agit pas d'une biographie.
Je remercie l'auteure de m'avoir envoyé ce livre c'est un cadeau que j'ai beaucoup apprécié.
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C'est un très joli roman que Laure Barachin a écrit avec beaucoup de grands sentiments et d'une belle sensibilité.
Laure y traite d'un sujet grave, celui des enfants abandonnés, des enfants trouvés, des enfants oubliés par des parents indignes, des enfants que l'on a retirés à leurs parents bourreaux.
Ou des enfants, comme Lucie et sa terrible histoire, où les parents leurs ont fait subir des ignominies.


Laure m'a replongé dans mes souvenirs d'enfance. Dans mon village où j'ai connu plusieurs familles d'accueil. Des couples qui par besoin d'argent hébergeaient ces enfants, souvent perturbés de « l'Assistance Public ». Et qui parfois ne donnaient pas toute l'attention et l'amour qu'il était nécessaire pour le bien être de ces petites filles et petites garçons déjà bien abandonnés.ées et esseulé.ées avec leur passé aux mauvais souvenirs.

Des enfants qui, comme Capucine, lorsqu'ils grandiront se poseront des questions. Qui, par manque de repère, auront de grosses difficultés à se construire et d'espérer un bel avenir.
Et j'ai connu des copines et copains d'enfance qui, comme Capucine, ont malgré tout réussi leur vie.
Et certaines n'ont pas eu le soutien et l'amour indéfectible d'un Chris.


Laure a décrit avec tact aussi une Capucine très complexe qui se croit « un enfant du mal », et qui pense avoir hérité d'un cruel passé familial.
Ce poids des traumatismes et des non-dits vécus de nos ancêtres, que chacune et chacun porte de génération en génération.
Ce sujet me parle, car pour moi ce n'est pas un hasard si pendant plus de vingt-cinq ans, j'ai fait des recherches généalogiques, que j'ai découvert quelques secrets, quelques faits volontairement oubliés, quelques chagrins ou quelques hontes enfouies.
Toutes ces révélations qui permettent parfois aujourd'hui, pour les plus attentifs, de « casser certaines chaines ».
Mais là, nous rentrons dans le monde de la psycho généalogie.


Autres sujets que Laure a traité avec délicatesse, c'est le traitement infâme et immonde qui fut infligé aux Juifs. Mais chacune et chacun a lu au moins un des nombreux témoignages sur cette dernière guerre mondiale, qui a apporté son lot de déshumanité et de souffrance.
Et pour aller dans le sens de Laure, je me suis souvenu d'une phrase que j'ai lue et dont je ne me rappelle plus si c'est dans le témoignage de Primo Levi ou Elie Wiesel qui disait :
« Nous ne prions plus, même Dieu avait quitté les lieux. »


Félicitations Laure !
Il n'y a que le tout dernier chapitre auquel je n'ai pas adhéré. Il m'a paru un peu rocambolesque.


Avant de lire votre bon roman, qui aurait pu être une vraie histoire, je m'étais interdit de lire tous commentaires sur votre livre sur Babelio. J'avais peur qu'une lectrice ou un lecteur ne révèle trop de choses.
Mais arrivé au milieu du récit, j'ai eu une grosse intuition et je n'arrive toujours pas à me l'expliquer. C'est fou parfois !
Lorsque Samuel réapparait et surtout lorsque Moshé Vigostska raconte la vie des parents du garçon, j'ai su tout de suite su la fin du roman.

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