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Fin des années 60, une époque pas si reculée, la preuve j'étais déjà de ce monde, même si je n'étais pas une de ces femmes à qui s'adresse l'émission conduite par Ménie Grégoire, sur RTL, l'heure des femmes. Une émission où Ménie va surtout les écouter, et puis les conseiller, leur délivrer quelques clés, aborder des sujets tabous à la radio d'alors, la sexualité, la contraception, le plaisir féminin, la violence contre les femmes, ...
Et elle sera vilipendée, attaquée pour cela.

Adèle Bréau est sa petite-fille. Elle nous raconte sous forme romancée la vie de sa grand-mère, une femme du monde, de la bourgeoisie, dont le mari était un grand fonctionnaire, proche du gouvernement, qui aurait pu se contente de sa vie de riche oisive, qui va s'engager à corps et coeur perdus dans cette émission, soutenue par l'abondant courrier et les nombreux coups de téléphones de ces femmes à qui elle ouvre des horizons nouveaux.

J'ai été surprise de découvrir à nouveau le contexte de ces années, et de mesurer l'ignorance dans laquelle étaient maintenues la plupart des femmes d'alors, le peu de droits qu'elles avaient, leur vie passée à travailler, les enfants qui s'enchainaient sans être désirés même s'ils étaient aimés. J'ai déjà lu des romans sur cette époque, décrivant la condition féminine, mais j'ai tendance à oublier et je me réjouis à chaque fois de voir comme la société, même si elle n'est pas parfaite a progressé sur ce sujet.

J'ai beaucoup aimé dans ce roman les personnages de l'époque, surtout ceux qui gravitent autour de Ménie, celles devrais-je dire qui écoutent religieusement presque son émission. Des extraits de lettres, tous authentiques, parsèment le livre et en renforcent l'attrait. J'ai été moins convaincue par le personnage actuel, que l'autrice a mis en scène pour découvrir et raconter Ménie. Elle a voulu lui faire vivre une situation difficile, encore malheureusement très actuelle hélas, mais que j'ai trouvée ici trop survolée, un peu trop " à la mode".

Et mon intérêt a légèrement décru sur la fin du roman. Il aurait pu, à mon avis être un peu plus court. J'ai ressenti parfois sur le dernier quart un sentiment de "redites" .

Cela reste néanmoins une plongée intéressante dans la société de l'époque et la vie de cette femme, dont j'ignorais tout, même si je connaissais son nom et le titre de son émission.
J'aurais adoré partager cette lecture avec Maman.

J'ai complété cette lecture en écoutant la version audio. J'ai beaucoup apprécié l'émotion et l'empathie dégagées par les deux voix, qui se répondent, l'une pour les extraits actuels, l'une pour l'époque de Ménie. L'écoute m'a permis de ressentir plus intensément certains des sentiments éprouvés à la lecture. C'est la première fois que j'abordais un livre de ces deux manières différentes, et cela ne m'a pas semblé redondant.

Merci à NetGalley et aux éditions J.C. Lattès et Audible pour ce double partage #Lheuredesfemmes #NetGalleyFrance
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Loin de Cholet, loin d'une existence morne, Menie s'épanouit pleinement à Paris. Trois grandes filles, dont la plus jeune atteint l'âge de ne plus avoir besoin d'elle si souvent, un mari, Roger, haut fonctionnaire, qui l'aime toujours autant plus de 20 ans après leur rencontre, des amis, des réceptions, des avant-premières et un métier de journaliste dans un quotidien pour femmes. Puis, après avoir publié une série sur les femmes dans Esprit, on la nomme conférencière pour l'Alliance française tant cette série a fait grand bruit et tant les lettres de femmes ont afflué. C'est alors que Philippe, l'une de ses connaissances, presque un ami, qui vient de prendre les rênes de la plus grande radio de France, lui propose de l'intégrer à leur émission de fin de matinée...
Loin de là, à Saumur, Mireille, à peine 30 ans, est déjà mère de 6 enfants et peine à s'occuper de ses deux derniers, seulement séparés de 10 mois. Sa jeune soeur, Suzanne, elle, travaille comme bonne à Paris, dans une famille bourgeoise...
Cinquante ans plus tard, Esther a trouvé refuge à Bréhat depuis bientôt 3 mois, voulant fuir son quotidien et Pietro dont elle s'est séparée. Katell, avec qui elle a fait ses études et qui travaille pour un gros groupe d'édition, l'informe d'une mission de collecte d'info pour leur collection « Femmes d'influence » qui pourrait l'intéresser. Son sujet : Menie Grégoire...

15h, c'est l'heure des femmes. La maison est propre, les enfants sont à l'école ou font la sieste, aussi des millions d'entre elles vont prêter une attention toute particulière à ce qui se dit dans le poste de radio. Si elle en aura choqué, dérangé, bousculé certains, Menie Grégoire en aura, sans nul doute, porté, encouragé, écouté, conseillé certaines, toujours à l'écoute et sans tabou, des drames parfois se jouant en silence, des ignorances. Qui serait l'une des plus à même pour nous raconter un pan de la vie de Menie Grégoire, celle que l'on appelait La dame de coeur, que sa petite-fille, Adèle Bréau ? À travers ce roman, cette dernière relate sa vie de mère et d'épouse mais surtout son métier de journaliste et d'animatrice radio, de 1967 à 1982, répondant aux questions concernant le couple, la famille, la santé et la sexualité (sujet qui deviendra l'essence même de son émission). Elle s'attarde également sur l'histoire de deux soeurs, Mireille et Suzanne, toutes deux à une époque charnière de leur vie, et d'Esther, une jeune femme contemporaine qui va se replonger dans la vie de Menie. Elle dépeint ainsi le portrait d'une société en pleine mutation, où les femmes osent s'affirmer, questionne sur la condition féminine, la sororité, la place des femmes et les bouleversements sociétaux.
Un roman captivant, instructif et touchant...

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Elle s'appelait Marie , mais depuis l'enfance se faisait appeler Menie sans doute pour se démarquer de sa mère qui lui avait donné son prénom.
Elle approchait des cinquante ans, évoluait dans le milieu de la très haute bourgeoisie parisienne (son mari murmurait à l'oreille de Pompidou...). Ses trois filles étaient grandes. Elle organisait des diners fabuleux et décontractés où se mélangeait le tout Paris. Elle écrivait des "petits papiers" pour la presse féminine, elle avait un certain succés , elle savait écouter les femmes.
En 1967 , le nouveau directeur de RTL lui proposa une émission où elle ferait ce qu'elle savait faire de mieux : faire parler les femmes de leurs soucis, de leurs problèmes. Et la France découvrit la misère des femmes... Femmes épuisées par les grossesses, sexualité, avortement, femmes battues, violées par leurs conjoints, etc, etc...
Et la France écouta, et la France avança, et si certains s'offusquèrent devant tant d'impudeur, devant tant de vulgarité, Menie n'en avait cure. elle était investie d'une mission : faire avancer la cause des femmes , et rien , ni sa famille, ni les rétrogrades ne la décourageraient.
Certains hommes apprirent, d'autres voulaient que cela reste comme cela. Mais les femmes avaient découvert que d'autres souffraient, que d'autres vivaient les mêmes choses. Elle s'appelait Menie Grégoire, et son émission connut un immense succés.

Aujourd'hui dans ce roman , oh combien bien nommé... Adéle Bréau , sa petite fille, lui rend hommage, la faisant revivre et donnant la parole également à trois autres femmes :
- Mireille, une femme qui n'en peut plus de faire attention, attention aux dépenses, un mari à l'usine, un seul salaire et une tripotée d'enfants. Mireille qui a tellement mal au sein à force d'allaiter ses deux derniers. Mireille qui n'en peut plus de "passer à la casserole" et qui aimerait bien dire à son mari, qu'elle en a marre de tomber enceinte. Un jour Mireille tombe sur l'émission de Menie. -
- Suzanne, la soeur de Mireille, ( montée à Paris pour être bonne à tout faire ), qui elle aussi, rencontrera Menie, mais d'une autre façon...
- Et puis, Esther qui en 2021, n'est pas vraiment ce qu'on pourrait appeller " une femme libérée, délivrée"... Un projet professionnel lui fera connaitre cette Menie qui murmurait à l'oreille des femmes...
Trois femmes à qui Menie va énormément apporter, au point de changer leurs vies.

Et puis, une autrice , Adéle Bréau , qui entremêle ces destins pour mieux nous raconter l'histoire des femmes et cette période des années 60 - 70 où elles purent enfin décider de leurs vies. On mesure aujourd'hui le chemin parcouru. Rien n'a été facile, tout a dû être arraché : contraception, avortement, sexualité, travail, divorce, permis de conduire. Sans jamais donner de leçon, sans aucune lourdeur, Adéle Bréau nous raconte la vie de sa grand-mère , qui fut une femme formidable à qui notre génération et les suivantes doivent beaucoup.
Elle était courageuse, elle débordait d'énergie, elle était généreuse, elle était novatrice. Parce qu'elle était heureuse dans sa vie, son milieu, son mariage, elle a voulu que toutes les françaises approchent ce bonheur . Elle pensait ( à une époque où les femmes étaient là pour s'occuper des autres avant elle-mêmes , où les femmes devaient combler leurs petits maris ), que le bonheur leur était dû.
Elle leur parlait, vers 15h, quand les enfants faisaient la sieste, quand les maris étaient encore au travail, à une heure où les femmes pouvaient un peu souffler... C'était l'heure des femmes. Elle leur expliquait qu'elles n'avaient pas, (qu'elles n'avaient plus) à subir, qu'elles pouvaient être les égales des hommes, demander, réclamer, exiger.

Je ne connaissais pas vraiment cette femme, je l'ai découverte avec ce livre et ce fut un coup de coeur. Menie fait partie des femmes qui ont "inventé" ( en France) , le féminisme. Mais le sien était décontracté, joyeux, pas revanchard, juste volontaire, il ne renoncait à rien , ni à la maternité, ni aux hommes, ni à la coquetterie. Elle aidait vraiment, donnait de sa personne, "mettait les mains dans le cambouis".

Un roman aussi instructif qu'agréable à lire.
A mettre entre toutes les mains, parce que rien n'est acquis...





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Je ne remercierai jamais assez une amie de Babelio: grâce à elle j'ai acheté ce livre romanesque, à partir de plusieurs trames narratives , reflet des angoisses, des tragédies des femmes, dans un monde exclusivement masculin .

Une plongée captivante dans la société de l'époque, les années 60: l'émission conduite par Menie, sur RTL, une femme libre, attentive, fantasque.
À l'aube de la cinquantaine, Menie , mère de famille bourgeoise, en réalité elle s'appelait Marie , mais depuis l'enfance , elle se faisait appeler ainsi peut-être afin de se démarquer de sa mère , compassée et distante.

Mariée à un très haut fonctionnaire, Roger ,( murmurant à l'oreille de Georges-Pompidou ) , ses filles déjà grandes , elle est sollicitée par la radio populaire RTL pour renouveler l'antenne .

Jusque là , elle organisait des dîners mondains, décontractés , grandioses, se contentait d'écrire quelques articles pour la presse féminine.

Elle a captivé des millions d'auditrices, sur les ondes, de 1967 à 1981, en début d'après - midi à l'heure où les hommes sont au travail et les enfants à l'école .

Celles - ci suivaient l'émission avec passion sur leur petit transistor : concept révolutionnaire pour l'époque ,Menie était une pionnière .

Toutes ces femmes la surnommeront «  La dame de coeur » .

À l'antenne, tous les sujets seront abordés , même les plus délicats , les problèmes de couples , l'avortement, les femmes battues, les maris conventionnels, distants, les attitudes sexistes, la lutte constante pour s'émanciper , l'obscurantisme, le planning familial , les grossesses non désirées, la frigidité , l'amour, le désir d'enfant…

L'émission à succès montre une femme novatrice, audacieuse, persévérante, pas toujours comprise par ses trois filles , parfois on l'insulte dans la rue ou on la gifle .
Sa vie est complètement bouleversée , on lui livre des tourments, sa qualité d'écoute, sa vision nouvelle vont accompagner doucement les changements de mentalité de ces années - là.

Chacun pouvait se raconter, écouter, apprendre, évoluer, sortir des carcans anciens ,,.
Sa petite fille Adele Breau unit , dans ce roman les destinées de trois femmes , des portraits fictifs se dessinant par ses soins : Mireille , et Suzanne , deux soeurs qui vont se battre pour échapper à leur condition et Esther, une journaliste, qui, cinquante ans après, tentera de conter cette histoire.




Merci pour ce portrait passionnant , vivant, haut en couleurs, prenant, qui nous fait revivre les efforts d'une équipe autour de Menie , elle a contribué à améliorer la condition de tant de femmes à propos de sujets jusque - là tabous .

Elle fera évoluer les mentalités par sa bienveillance, sa capacité d'écoute , son empathie ..
C'est un roman pétri d'émotions qui m'a beaucoup émue … délivrant la parole des femmes.
L'histoire d'une combattante, grande figure du féminisme , humaine , attachante , les lettres ( le livre est entrecoupé de lettres originales bouleversantes ) nous renseignent bien mieux que des discours ..

Un livre subversif, instructif, touchant, témoignage- mémoire d'une époque que chacune devrait lire!
Mais ce n'est que mon avis, bien sûr !

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Elle s'appelait Menie Grégoire et c'était la grand mère de l'autrice. Elle est aussi celle qui, à la fin des années 60, a libéré la parole des femmes en proposant une émission de radio l'après-midi où aucun sujet n'était tabou : contraception, grossesse, sexualité, IVG, violences conjugales, plaisir…
Un programme où chacun pouvait se raconter, questionner, écouter, apprendre.

« Tout le monde a besoin de ça. D'une oreille, sans jugement. de quelqu'un qui puisse tout entendre, qui puisse leur répondre qu'aucun vice, aucune douleur, aucune tragédie n'est solitaire. Quelqu'un qui explique aux femmes leur corps, aux jeunes filles les réalités du couple, aux hommes les besoins de leurs épouses. »

C'est son histoire romancée qu'Adèle Bréau raconte dans ce livre. L'histoire d'une femme libre, fantasque, attentive. En parallèle, elle dessine le portrait fictif de 3 femmes à l'existence impactée par Ménie : Suzanne et Mireille, 2 soeurs contemporaines de la présentatrice, et Esther, une journaliste qui, 50 ans après, va tenter de la raconter. 3 femmes dans un monde d'homme qui vont se battre, non sans mal, pour échapper à leur condition. Une sororité vaillante. Car même si les temps ont changé depuis « Allo Menie », la lutte pour s'émanciper n'est jamais terminé. C'est ce que soulève ce récit toujours passionnant, à la plume fluide et au ton juste.
Merci à Babelio pour l'envoi de ce roman dans le cadre de sa masse critique
https://www.instagram.com/p/Co9KeetqIzB/?igshid=YmMyMTA2M2Y=

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On l'appelait "la Dame de Coeur". Elle a captivé des millions d'auditrices de 1967 à 1981 sur les ondes de RTL, en début d'après-midi, à l'heure où les hommes et les enfants sont en principe absents du foyer familial (d'où le titre du livre.. Qui? Menie Grégoire, dont vous avez sûrement entendu au moins parler.; Menie, le nom vendéen de "Marie"...

Adèle Bréau, dans ce roman axé autour de la vie de son illustre grand-mère, nous raconte les étapes importantes de la vie de cette animatrice de radio qui était historienne de formation et qui avait travaillé comme journaliste pendant longtemps.
Le principe de son émission était simple: elle lisait à l'antenne l'une des nombreuses lettres de son courrier reçu, lettre écrite par une auditrice (ou plus rarement un auditeur), elle commentait et des auditrices (ou auditeurs) pouvaient l'appeler en direct pour faire part de leurs réactions.

C'était un concept vraiment révolutionnaire à l'époque, dans cette période austère du début des années 60, avant mai 1968, et avant tous les changements de société qui ont suivi..
Ce livre m'a passionnée à plus d'un titre; d'abord l'évocation du parcours d'une pionnière à l'époque, qui avait bien étudié son sujet (notamment au travers de voyages d'études et de conférences, pour tout ce qui était planning familial, sujet tabou à l'époque) est vraiment quelque chose de palpitant. Ce qui est bien rendu ensuite, c'est, au travers des lettres et divers témoignages, cet état de la condition féminine de l'époque, encore marquée par de l'obscurantisme et des préjugés sociaux et sexistes immenses.

Menie Grégoire, par sa qualité d'écoute et sa vision nouvelle va accompagner ce changement de mentalité qui va commencer, à l'aube des années 70. A l'antenne, tous les sujets, même les plus délicats, étaient évoqués, beaucoup concernaient les problèmes de couple, les grossesses non désirées (on est juste avant la loi Neuwirth et les premières années de commercialisation de la pilule ont été marquées par de nombreuses réticences des différents partenaires..),, étaient évoqués aussi les problèmes domestiques, les maris trop distants, ou trop empressés, les problèmes de contraception, l'avortement, l'éducation des enfants, la place de la femme dans le couple, le foyer...

L'émission, qui a connu dès le départ un grand succès, a eu des conséquences pas toujours faciles à gérer, notamment pour les trois filles de la célèbre animatrice, et il y eut aussi des incidences sur la carrière de son mari, conseiller d'Etat et proche de Georges Pompidou..

Ce portrait haut en couleurs nous montre une femme sûre d'elle, novatrice, audacieuse et persévérante. L'épisode où elle est giflée dans la rue par une passante m'a particulièrement marquée, c'est là qu'on mesure le chamboulement qui était en train de s'opérer.

Des chapitres entrecoupent ce portrait et concernent la vie sentimentale et professionnelle de la narratrice-biographe, Esther,.. dans sa vie de 2022. On y voit que des attitudes sexistes persistent et notamment dans sa vie de couple, ce qui nous montre que tous ces acquis obtenus depuis un peu plus d'une génération sont quelque chose de fragile....
Bref, un beau livre, vivant, et témoignage de toute une époque...
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Dans ce passionnant roman biographique, Adèle Bréau rend hommage à sa grand-mère, Menie Grégoire, femme charismatique, passionnée, combative, flamboyante, intuitive.

1967, la France, le bouleversement sociétal est en route, les femmes qui ont remplacé les hommes partis au front pendant la guerre 40-45 ne veulent plus reprendre leur rôle de femmes et de mères claquemurées dans leur foyer excepté le dimanche pour la messe.

C'est dans cette atmosphère en ébullition que Menie Grégoire se lance à presque cinquante ans dans une aventure périlleuse mais nécessaire sur les ondes de RTL à une heure de grande écoute…pour les femmes, à quinze heures, quand les enfants sont à l'école ou à la sieste, que le ménage est fait, que le repas mijote et que les maris ne sont pas encore rentrés du boulot. Menie leur parle, les écoute, leur répond, les informe avec sincérité, spontanéité et bienveillance.

Cette émission sera un des catalyseurs de la libération féminine en France, abordera la condition de la femme, le plaisir sexuel féminin, l'injonction à la maternité et à l'obéissance au mari qui fournit le toit et le pain, puis plus tard la contraception, la liberté de travailler, d'avoir son compte en banque, bien d'autres choses encore, qui sont normales aujourd'hui dans les sociétés occidentales. Est-il nécessaire de rappeler que ces droits ont été acquis de haute lutte par nos mères et nos grands-mères ? Que des femmes restent aujourd'hui sous une forte emprise patriarcale, ici moins qu'ailleurs, mais tout de même ? Que la lutte se poursuit plus que jamais aujourd'hui comme le droit à l'avortement dans la Constitution voté il y a quelques jours en France ?

Donc, cette émission sera un catalyseur, surtout pour les femmes vivant loin de Paris, dans ce qu'on nomme la France profonde, catholique, un réconfort, celui de ne plus se sentir seule, il y quelqu'un à l'écoute derrière le poste de radio, il y a d'autres femmes qui sont dans la même situation, qui se posent les mêmes questions, qui ont les mêmes tabous.

Et elle, Menie ? Une dame de la bourgeoisie parisienne, épouse épanouie de Roger, haut fonctionnaire de la République promis à un brillant avenir politique, maman heureuse et fière de ses trois filles. Son couple évolue sur un pied d'égalité, son mari est très ouvert et rallié à sa cause, elle mène sa vie et sa carrière comme elle l'entend.

Son émission durera quinze ans, elle sera perçue d'abord comme fantasque, puis scandaleuse dans plusieurs milieux, par beaucoup d'hommes, par des femmes aussi et des personnes de son entourage qui lui deviendront hostiles.

Je vais m'arrêter là car je pourrais vous raconter ce livre qui m'a transportée dans cette époque pas très lointaine, dans cette société en mutation. Son écho résonne encore quelques semaines après l'avoir refermé, ce destin de femme pionnière qui a aidé des milliers et des milliers de ses congénères à se libérer, à s'indépendantiser.

J'ai jeté les bases, à votre tour de faire sa connaissance à travers la plume moderne, vivante et dynamique de sa petite-fille, Adèle Bréau. Vous la suivrez à Paris, dans sa maison bourgeoise, dans les fêtes qu'elle y donne, ainsi que dans la villa de vacances familiale, dans sa vie de couple, dans sa vie de mère, et à la radio dans les studios de RTL avec sa petite équipe qui s'agrandira en même temps que le succès de son émission.

Trois autres histoires fictives se superposeront à celle de Menie, celles de deux soeurs, Suzanne et Mireille, jeunes femmes à la fin des années 60, et en 2021, celle d'Esther, qui, sortant d'une relation amoureuse toxique, enquête pour une maison d'édition sur la vie de Menie : elles renforcent le propos de l'autrice. de même que les lettres authentiques d'auditrices, glissées entre certains chapitres.

L'heure des femmes, un roman biographique passionnant, puissant ! Quel immense coup de coeur !
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La reine de coeur

Qui, de ma génération, ne connait pas Menie Grégoire ?
Elle a accompagné toutes ces années de 60 à 80 sur RTL. C'est une grande figure du féminisme, une bourgeoise qui comprends les problème du peuple, une femme « racée, intelligente et sensible » ( P 91-92 ) qui a aidé les femmes à « se mettre debout ». Bien sûr, elle ne faisait pas l'unanimité. Elle abordait les sujets tabous. Beaucoup la méprisait, la vilipendait. Comment osait-elle inciter les femmes à acquérir leur indépendance, au détriment de la famille et, surtout, du mari.
Cette époque, je l'ai vécue. Lorsque je raconte à mes petites-filles que je n'avais ni le droit d'avoir un compte en banque, ni le droit de travailler sans l'accord de mon mari, ni le droit de disposer de mes biens propres sans l'aval de celui-ci, elles ont du mal à se l'imaginer. Et pourtant, ce n'est pas si vieux.
Toutes ces femmes qui se sont battues pour nous ont permis à la société d'évoluer. Et elle en faisait partie.
Et, pourtant, tout n'est pas encore gagné, ne serait-ce qu'au point de vue des violences conjugales et de l'inceste.
Adèle Bréau, petite-fille de Menie, a choisi le roman plutôt qu'une biographie plus contraignante. Elle a ainsi pu faire parler les femmes de toutes les époques, y compris la notre.
Je vous invite à lire "L'heure des femmes" pour comprendre ce qu'elles ont pu endurer. et ce que Menie, grâce à RTL a pu faire pour elles, pour nous.
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En refermant "l'heure des femmes", mon premier mot a été "Merci".

Merci Ménie Grégoire et son équipe pour avoir tant oeuvré en faveur de la condition féminine française à une époque pas si lointaine que ça.

Je tiens à féliciter Adèle Bréau qui a rendu un très bel hommage à une dame de coeur que je n'ai pas connue du fait de mon jeune âge mais qui a marqué plusieurs générations par ses convictions et son travail. J'ai beaucoup aimé la forme prise de cette biographie romancée qui m'a fait prendre conscience de l'évolution de la société et du combat mené par nos mères et nos grands-mères pour arriver là où nous en sommes aujourd'hui.

Je suis très contente d'avoir pu découvrir cette histoire en version audio car j'ai trouvé que les intonations et voix de Françoise Cadol et de Clémentine Domptail correspondaient complétement au récit. Par ailleurs, quel bel hommage rendu à cette dame des ondes que par ce format d'écoute ;-)

Je tiens à remercier Audiolib et Netgalley France pour la découverte de cet ouvrage qui m'a beaucoup touché et a su m'émouvoir. J'ai beaucoup apprécié les discussions qu'il m'a permis d'avoir par la suite avec ma mère qui m'a raconté ses souvenirs de l'époque.

Merci encore Ménie Grégoire pour avoir "libéré la voix des femmes de toute une génération" et à sa petite fille Adèle Bréau pour avoir voulu partager cette histoire avec la nouvelle génération...
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Qui à notre époque a encore entendu parler de Ménie Grégoire ? Peut-être les plus de 60 ans s'en souviennent-elles et se rappellent aussi les scandales et les hostilités que l'émission radiophonique "L'heure des femmes" a provoqués, mais qui a tellement apporté à la cause féminine.

Adèle Bréau, petite fille de Ménie Grégoire, a entrepris ici, dans ce roman passionnant mêlant fiction et éléments véridiques, de lui rendre un bel hommage et de réparer l'oubli dans lequel est tombé cette femme exceptionnelle, cette "dame de coeur" ainsi qu'elle était surnommée.

Nous sommes en 1967, les françaises ont acquis le droit de vote vingt ans auparavant, mais ce sont toujours les hommes qui règnent en maîtres dans leur quotidien et qui conditionne leur vie. La loi Neuwirth qui autorise l'usage de contraceptifs, de la pilule en particulier, vient d'être votée, mais se heurte à de nombreuses réticences. Quant à l'intervention volontaire de grossesse, elle est lourdement pénalisée, ce qui n'empêche pas un grand nombre d'avortements clandestins pratiqués dans des conditions abominables.

Ménie Grégoire, femme élégante et distinguée, issue de la grande bourgeoise de province et épouse d'un haut fonctionnaire, a passé la cinquantaine lorsque la station radiophonique RTL lui demande d'animer une nouvelle émission entièrement dédiée aux femmes. le créneau horaire, pour leur donner la parole, est soigneusement choisi. Ce sera 15 heures, moment privilégié pour les ménagères et mères de famille. Elles ont terminé leurs travaux domestiques, leurs enfants font la sieste ou sont encore à l'école, la ligne est à elles ! Qu'elles saisissent l'opportunité qui leur est donnée de discuter de tout et de rien ! de leurs problèmes quotidiens liés aux traditions machistes et religieuses : charges ménagères, grossesses à répétition, violences conjugales, absence d'informations sexuelles...

Le succès de l'émission sera immédiat, les appels téléphoniques vont se multiplier au standard de RTL et les courriers émouvants de femmes, souvent en détresse, vont être lus et commentés à l'antenne, provoquant une prise de conscience et l'espérance d'une prochaine émancipation.

Ce roman est passionnant, une fois commencé, j'ai eu du mal à le lâcher. D'une part c'est le portrait magnifique d'une femme dynamique et résolument féministe, qui, bravant les tabous et les hostilités, a tant oeuvré pour la cause des femmes leur donnant l'espoir de prendre leur destin en main. C'est aussi une peinture sociale sur quelques décennies, avec des personnages fictifs mais attachants, et des situations bien réelles extraites des lettres d'auditrices, méticuleusement archivées.

Que de "chamboulements", que chemin parcouru depuis les années soixante, que de libertés durement acquises pour ces générations de "femmes si longtemps baillonnées dans un bonheur imposé" par des mentalités machistes rétrogrades et des traditions religieuses. Mais attention aux régressions ; rien n'est jamais acquis et la lutte ne doit pas cesser.

#Challenge ABC 2023 / 2024
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