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Romancière et essayiste, Belinda Cannone est aussi Docteur et maitre de conférences en littérature. Elle reçoit le prix de l'essai de l'Académie Française pour "l'Ecriture du désir", sujet qui la passionne.
"S'émerveiller" est un ouvrage précieux qu'il faudrait garder près de soi à tout moment. Les éditions Stock lui ont conféré une élégance particulière dans la forme par ses pages noblement glacées, sa couverture cartonnée sobrement racée. Les illustrations sont savamment recherchées, en toute simplicité et commentées avec délicatesse.
Durant cette lecture, au fil des pages lisses au toucher, je me suis sentie devenir autre, plus calme, plus sereine, plus concentrée sur l'instant présent. Une réflexion est menée sur le pouvoir dont nous sommes tous dotés, celui de s'émerveiller. Sans avoir besoin d'être fortuné, extralucide ou hautement intelligent , la faculté de s'arrêter et s'émerveiller d'un petit rien est source d'immense bien-être. Combien de fois passe-t'on devant telle ou telle image sans vraiment la voir, surtout sans déceler son côté merveilleux ? Il ne tient pas à l'objet ou à l'image de procurer cette sensation, il s'agit bien de puiser en soi l'attention, la saveur de la perception faisant partie de l'intimité de chacun.
Cet essai est riche en apprentissage notamment celui de la pleine conscience du moment ici et maintenant. La perception est en lien direct avec notre état d'esprit, le cultiver est important pour rester en santé.J'ai beaucoup aimé cet écrit, ce cadeau et en garde les ondes en moi.
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Je suis plutôt partagé quant à cet essai auquel je ne mettrai finalement qu'une note moyenne. Certes j'ai découvert de beaux passages, très poétiques, au fil des pages, mais j'ai trouvé aussi qu'il y avait des longueurs, des redondances. Parfois l'impression que l'auteure enfonce des portes ouvertes. La dimension mystique de certains passages m'a gêné aussi. Je ne sais pas si cette lecture va me porter à essayer d'autres livres de cette auteure. L'avenir le dira et mon opinion globale changera peut-être... Sans doute s'agit-il d'un titre qu'il faut lire, relire et méditer. Pour l'heur, je préfère consacrer du temps aux arbres que j'aperçois par la fenêtre de mon bureau et qui enchantent ma propre vie !
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S'émerveiller

il peut sembler décalé voire stupidement provocateur de s'abandonner à cet état d'esprit alors que le monde entier est plongé dans une terrible crise sanitaire, et que se profilent des crises économiques, sociales, environnementales, qui s'annoncent au moins aussi virulentes.

Mais précisément la lecture et l'appréhension de ce livre s'avèrent plus que jamais pertinents et bienfaisants et ce davantage encore que lors de sa sortie en 2017. Ce n'est pas la moindre de ses qualités.

L'auteure, Belinda Cannone, est une signature de qualité sur le terrain romanesque et avec des essais lumineux, comme son petit bijou « Petit éloge du désir ».

L'émerveillement est un puissant antidote, contre hier ce que l'on désignait par nihilisme et aujourd'hui l'enténèbrement, qui travaille les corps, les esprits les sociétés ; enténébrement qui n'a pas attendu l'apparition du coronavirus pour être à l'oeuvre.

« Et cependant dans ce risque d'enténebrement, il faut persister à évoquer l'émerveillement, car l'idée d'un bonheur ici et maintenant, le respect de chaque vie précaire, précieuse et susceptible d'accueillir les plaisirs, ceux-ci n'étant pas moins dignes que le travail et l'effort, sont précisément la marque d'une philosophie générale de l'existence qui distingue le monde que nous défendons.
Faire du bonheur et du plaisir, soutenus par le labeur et la construction, les buts de l'existence humaine, constitue une idée d'une force philosophique extraordinaire. C'est sous ces auspices que nous avons inventé les meilleures de nos valeurs. » (p. 25 et 26)

L'émerveillement n'est pas la béatitude et encore moins le recueillement simplet devant la crèche.

« S'émerveiller c'est d'abord saisir la présence des choses et des êtres. » (p. 85).

Etre disponible pour le kairos, l'instant opportun, disponibilité qui suppose aussi être dans un autre rapport au chronos, au temps, vivre dans une certaine lenteur.

L'émerveillement correspond à des ressorts intimes, au regard que l'on pose sur ces êtres, ces choses qui nous transportent. Il ne s'agit pas par conséquent d'éblouissement face à un « beau » spectacle, qui s'impose, comme ces belles concrétions minérales contemplées par l'auteure lors de la visite d'une grotte.

Et l'émerveillement doit être élu, et cette élection sera intime ; l'émerveillement par excellence est celui offert par l'Amour, le désir qui rendent l'être aimé(e), l'instant uniques. « Le désir général de vivre,comme celui plus aigu, d'aimer, est une réponse à l'enténébrement. » (p. 28)

Permettre la rencontre, permettre ce qu' André Breton qualifiait de hasard objectif :« Un hasard n'est souvent qu'une vigilance inconsciente .» (p.30), la vigilance poétique.

Ainsi l'émerveillement fonctionne dans le sens opposé à l'élévation platonicien du « Banquet » qui pose la solidarité entre la Beauté pure des corps, prédéfinie par des canons esthétiques, seuil d'entrée à la connaissance et la Beauté comme idéal.
Bélinda Cannone renverse le flux émotionnel, un peu dans l'esprit de Spinoza qui considère que c'est parce que je désire une chose qu'elle est bonne et ce n'est pas parce qu'elle est bonne que je la désire. C'est moi qui convoque la beauté telle que je la perçois intimement et qui vit l'épiphanie de l'instant, du lieu, de l'être sorti de l'ombre.

Dans cet esprit, pour Jung dans son magistral « L'âme et la vie », « La beauté ne réside pas dans les choses mais dans le sentiment que nous conférons aux choses. » (p. 136)

On peut aussi déceler des affinités plus contemporaines avec Cynthia Fleury (« Les irremplaçables ») et la regrettée Anne Dufourmentelle («Défense du secret »). Pour Cynthia Fleury, cultiver l'individuation est le salut avec la rencontre avec soi-même L'« imagino vera », l'imagination vraie, contre le « pressium doloris », le prix de la douleur, de l'entreprise de la désolation de notre société et ses pouvoirs aliénants. Anne Dufourmnatelle dénonçait aussi dans un passage que Bélinda Cannone aurait pu écrire, décrire, cet ère de « glaciation douce, » « d'anesthésie continuelle ». Résister à la terreur par le secret, l'émerveillement.

Un sentiment océanique…cet instant d'harmonie ouvrant sur le merveilleux.

Cette intensité océanique, l'auteure confie l'avoir rencontrée en trois lieux très privilégiés, dans les Alpes, dans le massif de l'Oisans, en Corse dans la vallée de la Restonica et en Egypte sur le Nil à Elephantine.

« Mon hypothèse-que l'émerveillement aurait pour horizon le sentiment océanique-tient compte du fait que , comme tout mouvement vers l‘horizon, l'émerveillement se manifeste sur le mode d e l'asymptote : tendant vers le sentiment océanique et ne l'atteignant jamais. » (p. 69) 

A un niveau très personnel j'ai été très réceptif à ces évocations de Belinda Cannone, sauf pour Elephantine, terra incognita.

L'Oisans, quelques souvenirs et autant dans cette vallée de la Restonica à une époque où on pouvait y dormir seul, avec le ciel étoilé comme toit et les flots joyeux et turbulents du torrent comme réveil. Intimidé, impressionné autant qu'émerveillé, tout près de l'éprouvante brèche du Capitello à franchir ; difficile de ne pas avoir ressenti des échos apparentés à ce sentiment océanique.

L'émerveillement ne se limite pas à l'intime naturaliste et Belinda Cannone met en lumière aussi des comportements émerveillants, comme Germaine Tillon fait preuve dans l'enfer de la déportation à Ravensbrück. Cette haute figure qui a puisé dans son écriture le moyen de survivre, écriture pour elle mais aussi pour ses camarades d'infortune avec cette création tragicomique hallucinante, le tout évidemment avec une prise de risques terrifiante.

Enfin, l'univers de la poésie chinoise est également convoqué, pas pour faire joli mais parce qu'il exprime par la beauté, la densité de ses mots, sans doute mieux que toute autre forme poétique littéraire, cet émerveillement « conducteur de réalité », de réalité révélatrice.

Laissez-vous émerveiller par l'écriture de Belinda Cannone, plus que jamais l'instant à saisir.
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« S'émerveiller » Belinda Cannone (Stock, 187 pages)
S'émerveiller donc, encore, de l'écriture de Belinda Cannone, de sa langue travaillée sans en avoir l'air, harmonieuse autant que rigoureuse. Voilà un bon et beau livre, où les photos en noir et blanc sont les articulations de la réflexion. Aucune raison de se lasser, bien au contraire, mais ici lire et réfléchir avec elle à cet existentiel et contagieux appétit de vivre, à une capacité à s'étonner, à accueillir les petites et grandes beautés du monde, ce monde qui est fait de la nature et des hommes. On est heureusement loin d'une prose «feel-good» à la mode, de ces injonctions et recettes de bonheurs préfabriqués en promotion dont sont garnis les rayons des «espaces culturels» des supermarchés, et qui veulent nous transformer en «ravis de la crèche». Ce livre est un regard philosophique, dense autant que poétique sur la capacité à accueillir le merveilleux dans ses différentes dimensions. Un émerveillement qui ne vient pas de la beauté de l'objet, mais de la capacité du regard, du «regardeur». Ne rien renier des horreurs du monde, en particulier dans l'histoire récente, mais être capable d'accepter l'émerveillement, sachant que devant nous, il peut y avoir pire qu'hier.
Ce «Regarde, regarde», ce besoin de partager le regard émerveillé face au beau minuscule ou au cosmos infini est partout dans l'expérience de l'auteur, héritage peut-être de son père. Cette capacité à recevoir est donc générosité, capacité à offrir, «l'émerveillement est un mouvement littéralement altruiste.» Elle peut pourtant appeler un retour sur soi, une intériorité qui a parfois besoin de solitude. Elle ne s'inscrit pas forcément dans du gigantesque, elle se nourrit aussi de ces petits riens (un souffle de vent, un arbre, un oiseau). Mais parfois, l'émerveillement poussé à l'extrême est aussi immersion totale (dans des paysages grandioses, par exemple en montagne). Cet émerveillement, parfois éblouissement, peut advenir par surprise, nous saisir. Il est donc affaire de circonstances, de disponibilité, il nous fait sortir de notre route, il faut y être prêt, il est source pure (mais pas exclusive bien sûr) de création artistique. Belinda Cannone appelle «sentiment océanique» cette sensation que peut provoquer parfois en elle cette immersion dans le beau du monde. L'émerveillement exige de prendre le temps. Être, c'est être au présent.
L'émerveillement, avec sa part d'enfance, d'inutilité, en témoignent par exemple les immenses structures articulées que le sculpteur Théo Janssen déploie au vent sur les plages de la Mer du Nord, ces bêtes de plage, ces «strandbeests» qu'on peut découvrir dans de petites vidéos sur internet. Mais aussi la haie de son jardin, l'épaule de l'amant…
L'essai convoque vers la fin deux références. D'abord la photo d'une foule d'un bloc qui salue Hitler d'un bras levé durant une cérémonie nazie en 1936, et au milieu de laquelle August Landmesseur, ouvrier allemand, garde seul et ostensiblement les bras croisés sur la poitrine ; image saisissante et tout à la fois rassurante sur les ressources de l'humanité. Et le bref rappel du parcours de Germaine Tillon, résistante de toute une vie, et qui, par la générosité de sa colère, survécut au camp de Ravensbrück. Deux évocations qui renvoient elles aussi au sublime, et à la modestie de ceux qui résistent. «- J'ai compris que la question du sens de l'existence s'annulait (se dissolvait) dans la joie de vivre, dans le désir qui nous lance vers l'avant». Désir, le maître mot de Belinda Cannone ?
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Regarde ! Regarde !
Ce titre.
C'est un verbe, une action, un engagement.
C'est un cadeau.
Et quel cadeau !
La vie.


Ouvrir son regard, tout entier sur l'extérieur, accueillir, recueillir en son coeur la beauté du monde qui l'attend, qui l'espère, ... Oui mais, le livre ?
Belinda Cannone défini son texte comme un essai. J'en lis très peu, je ne recherche pas tant la connaissance. Si je peux me permettre il se serait appelé en un temps plus ancien Petit traité de l'émerveillement, plus en adéquation avec la générosité qui s'en dégage. le texte est en effet facilement abordable, plaisant, agrémenté d'anecdotes le rendant plus accessible si besoin en était et d'une intention toute bienveillante pour le lecteur, tout en creusant profond. Suffisamment rare dans le genre essai pour le signaler.


L'émerveillement est souvent un "arrêt sur image". Aussi vais-je concentrer ma chronique sur la photo le mont-Saint-Michel, porte d'entrée à marée haute, vers 1895, d'Henri Magron qui m'avait juste parue un peu triste au premier coup d'oeil : bof il a plu, ou il bruine. Alors j'ai lu ce regard vigilant de la poétesse qui s'exprime ainsi p.47 "C'est une fenêtre sur la mer. Granit noir et reflets humides, courbes et lignes droites. Puissance du minéral atemporel et monumental autour du petit homme frêle. La muraille encadre le pêcheur et ce non-moi extrême : la mer. de nature très différente, ils sont pourtant parfaitement ajustés. Bien sûr qu'il s'agit d'un pêcheur : voyez son panier. Et surtout, comme dans un hiéroglyphe, la barque qui flotte au-dessus de sa casquette indique sa fonction."


Hiéroglyphe : à ce signe mon regard s'est aiguisé, alors j'ai vu. La barque, le panier, la pluie bel et bien disparue, la lumière plus vive. Soudain j'ai vu la côte au loin, la poutre au-dessus du seuil, de la barque et de la côte, ensemble d'horizontales ; et puis les verticales : piliers de la porte, et dans le coin des mats, soudain le petit homme n'est plus écrasé par son fardeau mais vient rejoindre les verticales, capable d'élévation. Oui de quoi s'émerveiller, et plus encore devant le regard vigilant du photographe qui a su capter ce moment éphémère où ce petit homme habite le monde.

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Petit aparté sur cette journée à Paris durant laquelle cette amie Babeliote me connaissant bien a eu la délicatesse de m'offrir ce bel ouvrage. Ce matin d'avril dans le train Maubeuge-Paris, une petite-fille dessinait à côté de moi. Son dessin n'était pas spécialement joli. Non, l'instant magique eut lieu quand elle me présenta d'un air grave son feutre. « Dis Monsieur, tu veux bien me l'ouvrir, je n'y arrive pas. » Et de suite après que je lui rendis, elle, avec un grand sourire et « les yeux qui brillent » : « Merci ! » Voilà.

J'ai été charmé par la chaleur de l'accueil de Valérie (à la gare du Nord), son touchant empressement (Ah, Ah ! Cela reste secret 😊) à m'amener au plus vite au Quai d'Orsay (le musée qu'allez-vous chercher), me partager avec un joyeux enthousiasme ses coups de coeur et me détailler La pie de Monet « Son » (marque évidente d'un émerveillement) tableau qu'elle aime à faire découvrir ainsi que quelques sublimes beautés cachées du musée. Visite au pas de charge de l'Orangerie, Valérie avait dû avaler sa montre au petit-déjeuner 😊 (à moins que ce ne soit Paris), pour ensuite nous précipiter (Ah, le beau paradoxe !) au Père tranquille. En chemin, sans même nous en apercevoir, nous venions de louper une extraordinaire occasion de nous émerveiller du chant inédit des oiseaux dans cet air de printemps d'un Paris exceptionnellement sans véhicules motorisés. Comme le dit si bien Bookycooky dans sa critique : question de réceptivité.

Mais ensuite. Quelle surprise ! Pascal me passa son portable pour un coup de fil tout à fait inattendu. Il a suffi d'un rien, une attention et comme souvent un lien direct avec la spontanéité (tiens, je m'attendais à ce que l'auteure le mentionne, d'autant que la perte de cette capacité innée à s'émerveiller me semble intimement liée avec cette érosion de la spontanéité venant selon moi des peurs, hélas des peurs apprises). C'était une personne très spéciale au bout du fil : en pleine ballade, il faut la voir en une seconde comme un chien à l'arrêt, et de suite un coup de coude : « Regarde ! C'est joliii ! ». Ou alors la voilà trottinant et te mettant un galet récupéré au bord de la mer : « C'est rigolo, non ? » Tellement vivante.
Car bien qu'ayant eu un petit moment d'émerveillement en faisant la file pour aller aux toilettes (c'est qu'il s'en passe des choses inédites et surprenantes dans les files), je dois bien avouer que ma capacité s'est de beaucoup émoussée (à mon grand regret et malgré le savoir brassicole belge). Cependant, je suis toujours aussi profondément heureux de la repérer chez d'autres, comme aussi chez cette Babeliote qui à l'époque n'était pas encore mon amie mais dont la chaleur de la voix et la pétillance du regard se mêlaient à l'intelligence de coeur et l'optimisme des propos, marques d'une pratique fréquente.
Ainsi je peux refermer cette parenthèse sur un double Je vous salue Marie.^^

Les souvenirs de ces beaux moments de partage ont ressurgi au fur et à mesure de ma lecture. Six mois après. En effet dans le train du retour après avoir feuilleté et regardé les photos je décidai de me consacrer au paysage et …. d'attendre. "Octobre se montrant clément, j'en profitais pour ..."p.7 lire en parfaite synchronie.

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« Nombreux sont ceux qui traversent le monde sans le voir … » p.50 sans le sentir, sans l'entendre ; alors quelques chansons évocatrices :

Henri Salvadore
L'abeille et le papillon
https://www.youtube.com/watch?v=vD1kyM9h7EI
Faire des ronds dans l'eau
https://www.youtube.com/watch?v=Oo1YWi5tVaU

Charles Trenet
La mer
https://www.youtube.com/watch?v=PXQh9jTwwoA

Jean Ferrat
C'est beau la vie
https://www.youtube.com/watch?v=lklP95xIEpo
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L'idéal serait de lire tous les livres de Belinda Cannone, une pensée solaire qui ne saurait se laisser enfermer dans des catégories "roman" ou "essai". C'est tout à la fois, de la philosophie, de la poésie, de l'humanité. S'émerveiller est un livre doué d'intelligence et de beauté qui deviendra un compagnon de route fidèle de tous les lecteurs qui auront eu la chance de le découvrir!
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“La beauté secrète du chêne apparaît sous mon regard assidu.”
Une phrase de l'écrivaine qui définit bien “L'émerveillement “ face aux petits détails de la vie, sujet de ce livre. Un émerveillement qui n'appartient pas au registre de l'admirable, qui pourrait être provoqué par n'importe quelle chose simple, modeste, des sons, un paysage, le sourire d'un inconnu, la vue d'un arbre, d'une fleur, le scintillement de la lumière sur l'eau.....que sais-je ? Un bonheur gratuit, source d'énergie, résultat d'une disposition intérieure à saisir “la beauté secrète” de ce qui est contemplé, écouté, touché, goûté, senti.......
L'auteur le relie à la curiosité, curiosité qui est fraîcheur du regard chez celui pour qui « aucun aspect de la vie n'est émoussé ». Une curiosité, une réceptivité, qu'on perd avec l'âge, et qu'il faudrait peut-être entretenir. Mais, “S'émerveiller réclame non seulement de vivre dans l'instant mais aussi dans la lenteur”.....
Bref, je pense que j'ai donné une idée suffisante de ce petit livre précieux agrémenté de belles photos sépia ( j'ai adoré, le Chêne de la ferme de Socquentot à Belmesnil (Seine-Maritime),26 avril 1892), dont la lecture ne peut qu'émerveiller et rafraîchir nos cinq sens et notre réceptivité à la vie.
Inutile de chercher ou d'attendre un bonheur dont on a généralement qu'une idée floue. Il est là au présent, à porté de main, déjà dans la lecture de ce petit livre, que l'écrivaine elle-même définit comme un “ livre qui ne fera pas le lecteur beaucoup plus savant mais peut-être plus vigilant, et plus attentif à ce qui importe –à ce que, mourant, il regrettera de quitter. “
Un livre qui décrit très bien ma propre conception du bonheur et du sens de l'existence, “Il n'y a aucun sens à vivre, et le chercher revient à mal poser la question. Ma petite philosophie existentielle s'est transformée le jour où j'ai compris que la question du sens de l'existence s'annulait (se dissolvait) dans la joie de vivre, dans le désir qui nous lance vers l'avant “.
En le terminant, j'entends la magnifique voix de Violeta Parra entonner “Gracias a la Vida”.........

Sur la pointe d'une herbe
devant l'infini du ciel
une fourmi
(Hōsai, 1885-1926)


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Belinda Cannone est admirablement talentueuse dans l'exploration et la description du sensible comme de l'abstrait. Jamais je n'oublierai ma première rencontre avec ses textes, par son essai sur le Sentiment d'imposture. Qu'est-ce que s'émerveiller ? Pourquoi est-ce important dans ces temps troubles ? Comment atteindre l'émerveillement ? Qu'est-ce qui le distingue du sublime ? Et du sentiment océanique ? Et de l'éblouissement ? Quels sont ses rapports avec l'instant, avec l'amour, avec l'humain ?
Tout au long de cette lecture, une image (d'émerveillement?) m'est revenue obstinément : celle des anneaux concentriques et centrifuges provoqués par la chute d'un objet dans une nappe d'eau. Ainsi procède le discours descriptif de l'essai, du noyau de l'émerveillement – et des conditions subjectives nécessaires pour y accéder – jusqu'à la périphérie du concept et de ses instances plus spécifiques – ou plus éventuelles. Néanmoins, je maintiens aussi l'aspect ondulatoire de ma métaphore, en ceci que certains éléments de l'émerveillement – et de ses circonstances – sont répétés comme un thème musical récurrent : la concentration, la lenteur, la nature, la « surprésence », le partage, la modestie de l'objet...
Les références littéraires (et musicales) sont relativement peu nombreuses dans cet ouvrage, à ma surprise et non sans regret ; cependant, je me suis arrêté (bien entendu) sur les implications langagières et particulièrement poétiques de l'émerveillement (comme le dénoncent mes cit.). La raison de cette rareté est peut-être la prégnance du côté visuel du travail, qui est né d'une collaboration avec l'Association régionale pour la diffusion de l'image (ARDI), remarquable lieu de collection-archives de photographies même très anciennes : l'auteure a choisi et commenté une photo à la fin de chaque chapitre, laquelle illustre parfaitement ses propos. Il faut dire qu'elles sont, même en soi, splendides.
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S'émerveillerS'émerveiller de tout et de rien, s'émerveiller des tout petits riens, du temps qu'il fait, d'un oiseau qui chante, d'une musique entendue, d'un instant de solitude, de la beauté d'un paysage, d'une fleur, d'un tableau ou d'un texte… S'émerveiller comme un enfant, retrouver cette disponibilité de l'âme, cette innocence. S'émerveiller comme une disposition intérieure, une façon nouvelle d'être au monde.

Ce que nous rappelle Belinda Cannone dans ce très bel essai en forme de variation sur la discipline de « l'instant présent », nous le savons déjà, mais ce rappel est important : la beauté, la valeur des choses et des êtres n'existent pas en tant que telles – c'est le regard qui se pose sur elles qui les crée, et si nous voulons accueillir à coeur ouvert les merveilles que le monde est prêt à nous offrir, c'est à nous et à nous seuls qu'il incombe d'être attentifs, concentrés, intenses, dans la pleine présence à l'instant.

Etre capables de réaliser cette alchimie secrète, cette oeuvre au noir spirituelle qui transmue l'anodin en événement, le banal en merveille, c'est ce à quoi nous convie ce petit livre de Belinda Cannone, « S'émerveiller », très joliment illustré de belles photographies. Un essai d'une certaine densité mais d'une écriture fluide, avec des accents qui évoquent souvent Christian Bobin ou René Frégni, et que j'ai lu avec un réel bonheur.

Un livre qui ressource et qui fait du bien. A lire, à relire, et à offrir autour de soi…
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Lecture un peu difficile pour moi, je dois bien reconnaitre ne pas avoir tout saisie. Écarts d'expérience et probablement de sensibilité.
Néanmoins, Belinda Cannone nous décompose l'émerveillement en illustrant parfaitement aussi bien de ses expériences que de ses lectures. Un essai qui ne laisse vraiment pas indifférent et invite à se poser quelques questions sur notre approche du quotidien.
A lire et relire
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